De notre envoyé spécial à Beyrouth
«Pourquoi tant d'horreurs? Pourquoi tant de morts? J'en appelle à la communauté internationale!» Dimanche, Benoît XVI a finalement lancé depuis le Liban un cri poignant sous la forme d'un appel solennel pour que cesse la guerre civile en Syrie.
«J'en appelle aux pays arabes afin qu'en frères ils proposent des solutions viables qui respectent la dignité de chaque personne humaine, ses droits et sa religion.» Il venait de conclure la messe en plein air, face à la mer, sur une baie de Beyrouth, et entamait la prière mariale de l'Angélus: «Tournons-nous maintenant vers Marie, Notre Dame du Liban, autour de laquelle se retrouvent les chrétiens et les musulmans.»
Soulignant que les «premières victimes» de ce conflit sont «les femmes et les enfants», il a sollicité un changement de regard «pour cesser de voir dans l'autre un mal à éliminer». Un effort «pas facile» à poser, a-t-il reconnu, mais nécessaire: «Il le faut, si on désire construire la paix, si on veut la fraternité.»
Il a conclu par cette imploration: «Puisse Dieu concéder à votre pays, à la Syrie et au Moyen-Orient le don de la paix des cœurs, le silence des armes et l'arrêt de toute violence! Puissent les hommes comprendre qu'ils sont tous frères!»
Modification de dernière minute
L'intervention n'était manifestement pas prévue dans le programme initial. Le Saint-Siège se limitait depuis le début de la crise syrienne à critiquer le recours à la violence mais se montrait très prudent en raison des incertitudes pesant sur la communauté catholique syrienne jusque-là protégée par le régime de Damas. C'est en tout cas la première fois que le Pape lance un appel d'une telle vigueur pour la Syrie. Et surtout qu'il sollicite publiquement l'implication des «pays arabes» pour trouver une solution.
Est-ce le contact direct avec la réalité libanaise qui a conduit Benoît XVI à décider finalement d'évoquer ce sujet? Il n'est pas dans les habitudes de la diplomatie pontificale, ni dans les pratiques des voyages, d'opérer une telle incursion dans le champ directement politique, touchant un pays voisin, de culture arabe et musulmane qui plus est.
Le fait que les discours du Pape, prévus pour dimanche, mais aussi ceux de la veille, aient été modifiés au dernier moment indique que le sommet de l'Église catholique a pris conscience qu'il ne pouvait se trouver à 80 km de Damas sans mot dire.
Samedi soir, effectivement, en s'adressant à vingt mille jeunes Libanais - dont des réfugiés catholiques syriens -, le Pape avait ajouté ce passage à son discours: «J'ai appris qu'il y a parmi nous des jeunes venus de Syrie. Je veux vous dire combien j'admire votre courage. Dites chez vous, à vos familles et à vos amis, que le Pape ne vous oublie pas. Dites autour de vous que le Pape est triste à cause de vos souffrances et de vos deuils (…). Il est temps que musulmans et chrétiens s'unissent pour mettre fin à la violence et aux guerres.»
Vendredi, dans l'avion qui le conduisait au Liban - il doit rentrer ce dimanche soir à Rome - il avait demandé qu'en Syrie «cesse l'importation des armes», qualifiée de «péché grave», et qu'à la place soient importées «des idées de paix».
Par Jean-Marie Guénois
«Pourquoi tant d'horreurs? Pourquoi tant de morts? J'en appelle à la communauté internationale!» Dimanche, Benoît XVI a finalement lancé depuis le Liban un cri poignant sous la forme d'un appel solennel pour que cesse la guerre civile en Syrie.
«J'en appelle aux pays arabes afin qu'en frères ils proposent des solutions viables qui respectent la dignité de chaque personne humaine, ses droits et sa religion.» Il venait de conclure la messe en plein air, face à la mer, sur une baie de Beyrouth, et entamait la prière mariale de l'Angélus: «Tournons-nous maintenant vers Marie, Notre Dame du Liban, autour de laquelle se retrouvent les chrétiens et les musulmans.»
Soulignant que les «premières victimes» de ce conflit sont «les femmes et les enfants», il a sollicité un changement de regard «pour cesser de voir dans l'autre un mal à éliminer». Un effort «pas facile» à poser, a-t-il reconnu, mais nécessaire: «Il le faut, si on désire construire la paix, si on veut la fraternité.»
Il a conclu par cette imploration: «Puisse Dieu concéder à votre pays, à la Syrie et au Moyen-Orient le don de la paix des cœurs, le silence des armes et l'arrêt de toute violence! Puissent les hommes comprendre qu'ils sont tous frères!»
Modification de dernière minute
L'intervention n'était manifestement pas prévue dans le programme initial. Le Saint-Siège se limitait depuis le début de la crise syrienne à critiquer le recours à la violence mais se montrait très prudent en raison des incertitudes pesant sur la communauté catholique syrienne jusque-là protégée par le régime de Damas. C'est en tout cas la première fois que le Pape lance un appel d'une telle vigueur pour la Syrie. Et surtout qu'il sollicite publiquement l'implication des «pays arabes» pour trouver une solution.
Est-ce le contact direct avec la réalité libanaise qui a conduit Benoît XVI à décider finalement d'évoquer ce sujet? Il n'est pas dans les habitudes de la diplomatie pontificale, ni dans les pratiques des voyages, d'opérer une telle incursion dans le champ directement politique, touchant un pays voisin, de culture arabe et musulmane qui plus est.
Le fait que les discours du Pape, prévus pour dimanche, mais aussi ceux de la veille, aient été modifiés au dernier moment indique que le sommet de l'Église catholique a pris conscience qu'il ne pouvait se trouver à 80 km de Damas sans mot dire.
Samedi soir, effectivement, en s'adressant à vingt mille jeunes Libanais - dont des réfugiés catholiques syriens -, le Pape avait ajouté ce passage à son discours: «J'ai appris qu'il y a parmi nous des jeunes venus de Syrie. Je veux vous dire combien j'admire votre courage. Dites chez vous, à vos familles et à vos amis, que le Pape ne vous oublie pas. Dites autour de vous que le Pape est triste à cause de vos souffrances et de vos deuils (…). Il est temps que musulmans et chrétiens s'unissent pour mettre fin à la violence et aux guerres.»
Vendredi, dans l'avion qui le conduisait au Liban - il doit rentrer ce dimanche soir à Rome - il avait demandé qu'en Syrie «cesse l'importation des armes», qualifiée de «péché grave», et qu'à la place soient importées «des idées de paix».
Par Jean-Marie Guénois