"Les pêcheurs sénégalais y ont rapidement vu l'opportunité de faire des économies d’essence"
Stéphane Blanco, 40 ans, a grandi au Sénégal. Il enseigne les mathématiques à Melle, sur la côte Atlantique française. Il est l’inventeur du Volanz, le "cerf-volant de survie dynamique".
Je travaille sur le projet Volanz depuis un peu plus de 10 ans maintenant. J’ai pris trois années de congés, entre 2002 et 2005, pour créer le prototype, le tester et le lancer sur le marché via une micro-entreprise.
Stéphane Blanco, 40 ans, a grandi au Sénégal. Il enseigne les mathématiques à Melle, sur la côte Atlantique française. Il est l’inventeur du Volanz, le "cerf-volant de survie dynamique".
Je travaille sur le projet Volanz depuis un peu plus de 10 ans maintenant. J’ai pris trois années de congés, entre 2002 et 2005, pour créer le prototype, le tester et le lancer sur le marché via une micro-entreprise.
Stéphane Blanco teste le prototype Volanz pendant une tempête sur la côte vendéenne dans l’ouest de la France. Photo : Jean-Paul Gendry.
Le public a commencé à s’intéresser à ces cerfs-volants en 2009 après qu’un participant de la course transatlantique à la rame Bouvet-Guyane en ait utilisé un comme 'moteur de secours' pour atteindre la côte alors que son bateau connaissait des problèmes techniques. Les cerfs-volants sont grands, de couleurs vives et constituent aussi des signaux de détresse efficaces.
Cette vidéo de démonstration montre comment les cerfs-volants peuvent être déployés en cas d’urgence sur les bateaux à rames utilisés dans les courses professionnelles. Depuis 2009, tous les bateaux de la course Bouvet-Guyane sont équipés de Volanz. Vidéo postée sur YouTube par TheMantaVideo.
Badara Tall (à gauche) coupe les tissus pour les cerfs-volants et Babacar Fall (à droite) les assemble. Photos: Stéphane Blanco.
"J’ai formé deux artisans locaux à la conception et à la fabrication des cerfs-volants"
J’ai ensuite pris contact avec les autorités sénégalaises en charge de la pêche qui envisageaient d’équiper les bateaux des pêcheurs locaux. Il y a plus de 10 000 pêcheurs artisanaux au Sénégal et la plupart utilise des petites pirogues en bois dont les moteurs sont délabrés. Chaque année, un nombre indéterminé de pêcheurs [plus de 50, selon certaines estimations ] meurent en mer en raison des problèmes de moteur. Je suis allé au Sénégal en février pour former deux artisans, Badara 'Badou' Tall et Babacar Fall, à la conception et à la fabrication des cerfs-volants. Nous avons testé les deux premiers avec les pêcheurs de la ville de Hann Bel-Air [commune de la ville de Dakar, située sur la côte].
J’ai ensuite pris contact avec les autorités sénégalaises en charge de la pêche qui envisageaient d’équiper les bateaux des pêcheurs locaux. Il y a plus de 10 000 pêcheurs artisanaux au Sénégal et la plupart utilise des petites pirogues en bois dont les moteurs sont délabrés. Chaque année, un nombre indéterminé de pêcheurs [plus de 50, selon certaines estimations ] meurent en mer en raison des problèmes de moteur. Je suis allé au Sénégal en février pour former deux artisans, Badara 'Badou' Tall et Babacar Fall, à la conception et à la fabrication des cerfs-volants. Nous avons testé les deux premiers avec les pêcheurs de la ville de Hann Bel-Air [commune de la ville de Dakar, située sur la côte].
Des pêcheurs font la queue pour acheter de l’essence dans le village de Soumbédioune, en mars 2011. Au Sénégal, le pétrole est cher et rationné, et toute économie est bonne à prendre pour les pêcheurs.
Ce qui est intéressant c’est que, bien que le Volanz ait été créé pour être utilisé dans des cas d’urgence, les pêcheurs sénégalais avec lesquels j’ai travaillé y ont rapidement vu l'opportunité de faire des économies d’essence. Au Sénégal, le pétrole coûte aussi cher qu’en France alors que le salaire moyen des pêcheurs locaux est bien inférieur à celui des pêcheurs français. Il y a peu de chiffres officiels mais un pêcheur à qui j’ai parlé m’a dit qu’il pouvait dépenser jusqu’à 10 000 francs CFA (15 euros) d’essence par jour alors que parfois il ne gagnait pas plus de 1 500 francs CFA (2,2 euros) dans la journée en vendant ses poissons. La plupart des pêcheurs ont vraiment du mal à joindre les deux bouts. S’ils utilisent le cerf-volant, soit pour partir au large, soit pour revenir vers la côte – cela dépend du sens du vent – ils peuvent économiser entre 30 et 40 % de carburant.
Les pêcheurs sénégalais testent le Volanz (les rouges et blancs ont été fabriqués par Badara “Badou” Tall and Babacar Fall, deux artisans locaux) en mars 2011. Photo: Rémy Frappas-Denis.
Les cerfs-volants sont des modèles à une seule corde et n’ont pas besoin d’être pilotés, ce qui signifie qu’ils peuvent être utilisés sans formation particulière. Ils doivent simplement être fixés à une attache solide sur le bateau (sur les pirogues, les pêcheurs les attachent à l’arrière près du moteur et font passer la corde sous un des bancs par sécurité). Il faut en général 8 secondes pour le déployer. Un Volanz de 6m2 peut tracter une pirogue de 8 mètres de long à la vitesse de 3 ou 4 nœuds (5 à 8 km/h) en fonction de la force du vent.
"Je veux que les cerfs-volants deviennent une source de revenu viable pour les artisans locaux"
Actuellement, nous sommes dans une phase de test. Nous essayons d’abord de fabriquer et de vendre 100 cerfs-volants pour équiper des petits bateaux de pêche sénégalais. Si tout se passe bien, je retournerai au Sénégal pour former plus de monde et, petit à petit, on lancera une production à plus grande échelle. Mes partenaires (mes sponsors et le ministère sénégalais de l’Économie maritime, de la Pêche et des Transports) et moi-même devons déterminer le prix auquel les cerfs-volants seront vendus sur le marché sénégalais. Tout ce que je sais, c’est que je ne veux pas lancer une opération à trop bas prix : je veux que les cerfs-volants deviennent une source de revenus viable pour les artisans locaux et non qu’ils soient produits en masse par un grand fabricant."
"Je veux que les cerfs-volants deviennent une source de revenu viable pour les artisans locaux"
Actuellement, nous sommes dans une phase de test. Nous essayons d’abord de fabriquer et de vendre 100 cerfs-volants pour équiper des petits bateaux de pêche sénégalais. Si tout se passe bien, je retournerai au Sénégal pour former plus de monde et, petit à petit, on lancera une production à plus grande échelle. Mes partenaires (mes sponsors et le ministère sénégalais de l’Économie maritime, de la Pêche et des Transports) et moi-même devons déterminer le prix auquel les cerfs-volants seront vendus sur le marché sénégalais. Tout ce que je sais, c’est que je ne veux pas lancer une opération à trop bas prix : je veux que les cerfs-volants deviennent une source de revenus viable pour les artisans locaux et non qu’ils soient produits en masse par un grand fabricant."
Un pêcheur tient une corde de cerf-volant. Photo: Rémy Frappas-Denis.
Le mot “Allah” est inscrit en arabe sur cette pirogue. Stéphane Blanco explique : “Certains pêcheurs sortent en mer sans savoir s’ils auront assez d’essence pour revenir. S’ils ont une panne, ils n’ont plus qu’Allah pour les sauver.
Vue aérienne du village de pêcheurs de Soumbédioune. Photo : Stéphane Blanco, prise avec un appareil fixé au cerf-volant.
Stéphane Blanco Billet écrit avec la collaboration de Lorena Galliot, journaliste à France 24