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ABDOULAYE BA, PRESIDENT DE L’UNION DES MAGISTRATS DU SENEGAL « Il faut faire cesser la dépendance financière du pouvoir judiciaire »

Pour « faire cesser la dépendance financière du pouvoir judiciaire, par rapport au pouvoir exécutif », le Président de l’Union des Magistrats du Sénégal (Ums), Abdoulaye Bâ, a proposé d’allouer par exemple une partie fixe du budget de l’Etat à la justice. Suggestion qui a été faite jeudi dernier, à la clôture du congrès de la 53 ième réunion annuelle de l’Union Internationale des Magistrats (Uim). Pour la première fois depuis 53 ans, l’Afrique est aux commandes. Mme Fatoumata Diakité de la Côte d’Ivoire a été élue Présidente, en remplacement de José Maria Bento.


Rédigé par leral.net le Dimanche 14 Novembre 2010 à 18:48 | | 0 commentaire(s)|

ABDOULAYE BA, PRESIDENT DE L’UNION DES MAGISTRATS DU SENEGAL « Il faut faire cesser la dépendance financière du pouvoir judiciaire »
L’As : En tant que Président de l’Union des Magistrats du Sénégal (Ums), vous venez d’organiser le congrès de la 53 ième réunion annuelle de l’Union Internationale des Magistrats (Uim). Etes-vous satisfait par rapport à vos attentes ?

Abdoulaye Bâ : Oui. Sur le plan organisationnel, c’était un grand défi à relever que de recevoir des centaines de magistrats provenant de tous les continents, les accueillir, leur donner de bonnes conditions de travail, assurer leur sécurité. A l’heure du bilan, nous pouvons dire que nous avons largement atteint cet objectif, d’autant que ce sont les congressistes eux-mêmes qui marquent leur satisfaction. Sur le plan scientifique aussi, nous avons des raisons de nous réjouir. Il y avait plusieurs thèmes de réflexion, des commissions techniques avaient été instituées. Les échanges ont été extrêmement enrichissants et au bout du compte, pour chaque commission, des propositions intéressantes ont été faites, lesquelles seront publiées sous peu.

Quelles sont les propositions centrales sorties de votre rencontre ?

Une détermination à serrer les rangs, à davantage nous organiser, puisque nous avons des objectifs communs, appartenons au même ordre, au-delà des nationalités, nous avons à peu près les mêmes problèmes.

Quelles sont ces problèmes que vous partagez ?

C’est toujours l’affirmation de l’indépendance du pouvoir judiciaire, son renforcement, sa promotion. Dans tous les pays, c’est par rapport à l’exécutif, qui est tentaculaire d’une part. D’autre part, c’est l’exécutif, qui détient les moyens. Quand on dit que la justice est un pouvoir, un pouvoir, qui, sur le plan financier, matériel, dépend d’un autre pouvoir, cela pose objectivement le problème de l’indépendance. Dans tous les Etats, l’Exécutif est expansif et tentaculaire. Il appartient alors au pouvoir judiciaire de repousser cette expansion assez clairement, par des décisions clairement notifiées, rendues dans des délais raisonnables. On peut faire cesser la dépendance financière du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir exécutif, en allouant par exemple une partie fixe du budget de l’Etat à la justice. C’est un moyen supplémentaire d’assurer l’indépendance de la justice qui est facteur de paix sociale, levier de la démocratie, garante de l’Etat de droit et un moyen d’assurer la sécurité des transactions et des affaires, et finalement facteur de développement économique.

Vous avez élu un nouveau Président de l’Uim …

Oui, en la personne de Mme Fatoumata Diakité. Le congrès de Dakar a coïncidé avec l’expiration des mandats des dirigeants. Nous avons procédé à des élections. Nous avons une Ivoirienne comme nouvelle Présidente. Elle a été élue pour deux ans. C’est symbolique pour nous, puisque c’est l’Afrique qui est aux commandes au niveau international, dans la magistrature. Il y a également que celle qui est devenue Présidente était Présidente du groupe régional africain. Avec sa nomination, nous pouvons espérer qu’elle aura plus de latitude pour encourager d’autres pays africains à rejoindre l’Uim, parce que sur les 77 pays, il n’y a que 12 pour l’Afrique. Mais pour les pays qui doivent venir, il faut que chez eux les associations de magistrats soient fortes, qu’elles expriment clairement leur autonomie vis-à-vis de l’exécutif.

La prochaine rencontre est prévue où et quand ?

A Istanbul en Turquie, ce sera dans un an exactement.

Quels ont été les couacs du congrès ?

Dans toute œuvre humaine, il y a des imperfections. Au niveau de l’accueil, nous avions tenu, avec l’aide des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, à recevoir nous-mêmes l’ensemble des congressistes au niveau du salon d’honneur ; mais certains ont pu échapper et sont partis de l’autre côté. Ce n’est pas méchant, c’était un petit groupe. Je voudrais aussi signaler que les critères d’acceptation par l’Uim de tenir son congrès annuel dans notre pays, c’était que les conditions de sécurité soient réunies. Il fallait une garde rapprochée pour certaines personnes. Nous avons reçu une délégation d’Israël, des Etats-Unis.

Combien a coûté le congrès ?

Je ne saurais le dire, nous n’avons pas encore fait les comptes ; mais c’est quand même coûteux.

Des centaines de millions ? Combien ?

Je ne saurais le dire.

Qui a financé ?

Nous avons été soutenus par l’Etat du Sénégal. Nos maigres ressources ne nous permettent pas de faire face à de tels événements, sur le plan financier. En tant que magistrats, nous ne pouvons pas faire appel au sponsoring.

Propos recueillis par Hadja Diaw Gaye

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