La tentation du grand et du jamais vu en Afrique au sud du Sahara semblent être les principales raisons de vivre de Wade. Dès son arrivée au pouvoir, Wade a convaincu les Sénégalais, que Dakar et sa modernisation étaient un des soucis majeurs de son mandat. Il n’aura pas rêvé pour rien. L’homme a aussi réussi une grande prouesse, celle de s’être substitué par le cas de Dakar, aux maires élus, qui brillent aujourd’hui plus par leur manque de vision et par leur incapacité à impulser une véritable dynamique urbaine dans la ville. Maire de toutes les villes sénégalaises, le président de la République, semble vouloir ériger Dakar, en modèle de gestion de la cité pour les autres. Mais à quel prix ?
Dans le genre, Dakar est une exception, mais les autres villes aussi, ont fait les frais de cet effort gigantesque d’investissement et de modernisation. Dépassés par les évènements, tous les maires sénégalais semblent gérer le quotidien avec de maigres budgets, sans argent frais disponible pour faire de gros investissements (routes ensablées, ponts vieillis, infrastructures sanitaires, scolaires et sociales en souffrance). Kaolack se meurt dans la vase et le poto-poto du côté de Ndangane. Fatick n’a pas jusqu’ici bénéficié de toutes les promesses faites par l’Etat au début de l’alternance. Plus loin, Kaffrine comme Tambacounda, ne sont toujours pas facilement accessibles par la route. Quid de Kédougou, Bakel, Sédhiou, Kolda, Vélingara. La liste est longue de villes de l’intérieur avec leurs gros problèmes où les promesses de l’Etat ne ressemblent plus qu’à des chimères.
Pour bâtir la grande ville africaine et ses satellites, Wade, de sa position de leader et de président, aura au moins, enseigné une chose, celle de bousculer les tabous. Mais jusqu’où ira le président de la République après Dakar ? Surtout en ces moments, où le troisième choc pétrolier doublé de la crise alimentaire, ne facilite plus la libération d’un certain volume de transfert financier sans coup. Sans intérêt.
La question a son importance, au moment où tout l’or du monde dépensé dans la capitale, s’il a permis de réduire certaines contraintes liées à la mobilité n’aura fait que déplacer d’autres problèmes ailleurs. Dans ce fouillis concentrationnaire où les pôles urbains de rupture n’ont pas été favorisés (exemple de l’abandon du projet de pôle urbain et industriel de la plateforme de Diamniadio), il semble qu’on risque de reprendre à zéro pour les cas de certaines réalisations.
Quelques exemples suffisent à le démontrer. Sur la Corniche, la construction d’un tunnel de 495 mètres et la multiplication des voies souterraines, n’ont pas permis de réduire les sources de blocage une fois qu’on a franchi l’entrée du centre ville. L’erreur, selon les urbanistes, est dans l’aménagement d’une dalle en béton au milieu de la chaussée qui n’aura contribué qu’à rétrécir les voies d’encaissement ou de stockage pour traverser la rue ou s’arrêter sur le rebord de la chaussée en cas de panne.
LES MARISTES, OUEST-FOIRE
Des zones boutées de la cité
De l’autre côté de la ville en direction des régions de l’intérieur, l’autoroute, plus large, plus belle parce mieux construit, est une infrastructure qui bute sur des impasses. Dès qu’on sort de la bretelle qui permet de prendre le chemin de la ville de Pikine, on n’avance plus. Et ce n’est pas tout. Aujourd’hui l’aménagement de ces projets qui n’a pas été suivi de véritables études de faisabilité, entamés dans la précipitation, a eu pour effet sur la Voie de Dégagement nord, d’avoir complètement fini de couper du monde, un quartier comme Ouest-foire.
Même scénario dans la zone sud de la ville où, avec la construction de l’autoroute à péage, un quartier comme Hann Maristes, n’a plus d’accès sur l’autoroute. Et pour ce nouveau pôle urbain, où se trouvent de nombreuses zones résidentielles, ne s’offre qu’une seule entrée, du côté de la route de Rufisque ou en direction du pont de Hann, pour rejoindre l’autoroute. Le quartier étouffe d’autant qu’au même moment, les exploitants du sable de mer, vendus aux promoteurs immobiliers à prix d’or, bouchent avec leurs vieux camions, la principale voie d’accès à ce site résidentiel où vivent aujourd’hui près de 50.000 habitants.
Voilà les faits. La preuve que quand des projets fussent-ils les plus utiles au monde sont faits sans de véritables études, avec la seule volonté de faire, comme l’a confirmé un ancien ministre de Wade, on fait des erreurs qui ne seront corrigés qu’à coups de milliards de francs.
AUTOROUTE A PEAGE
Le piège de l’exploitation
Tous ces projets finis avec leur marge d’erreur, quel autre projet pour le président Wade ? La question a son importance parce que le nouveau combat qui s’annonce pour l’homme au goût d’innovations toujours plus poussé, s’articule autour de l’autoroute à péage partant de Dakar en direction de Diamniadio. Et cela dans l’optique de la construction de l’aéroport international de Diass. Le défi est encore immense, mais la réalisation du projet bute sur nombre d’obstacles, qui n’ont pas été des moindres depuis le début. Un exemple : l’aménagement de la route au milieu de la grande niaye de Dakar. Entre les milliers de tonnes de sable, pierres, les kilomètres de bâches ensevelis pour bloquer les phénomènes de résurgence de la nappe, l’autoroute qui devrait coûter la somme de 300 milliards de francs, n’est pas une mince affaire. Mais Wade aime ça. Se lancer des défis que n’osaient pas entreprendre ses prédécesseurs. Mais, entretemps, l’homme qui aime décidément la vitesse et la course, n’a pas peur. Certains de ceux qui l’ont connu dans les années 50 se rappellent encore de la belle « Mustang » qu’il conduisait à l’époque de sa splendeur. Il n’a jamais peur.
Le gigantesque et le géant sont ses marques de fabrique. Il lutte contre ses propres limites et celles du temps. Et si pour demain l’impact économique de la voie Dakar-Diamniadio, devrait permettre comme l’a soutenu Madani Tall, représentant résident de la Banque mondiale au Sénégal, de déboucher un horizon, il reste que le coût est énorme. Et les voies de sa future exploitation pour plus de rentabilité ne semblent pas toujours garanties. Les exemples du tunnel sous la manche dont les concepteurs attendaient monts et merveilles et qui n’a cessé de cumuler des pertes énormes qui ont failli entraîner la fin de ce rêve franco-anglais sont assez éloquents pour le démontrer. Aujourd’hui si le sourire est revenu de ce côté, c’est à la suite de nombreux sacrifices de part et d’autres de la France et de la Grande Bretagne ; même chez les actionnaires (petits comme grands). On peut aussi citer dans le même cas de la France, le fait que nombre d’autoroutes à péages, ne connaissent pas aujourd’hui tout le succès qui était attendu au moment de leur réalisation.
Gigantisme dangereux
Un tel projet d’autoroute à péage mérite bien réflexions et des études sérieuses, que les concepteurs présents aujourd’hui au niveau de l’Agence autonome pour l’investissement et les grands travaux (Apix) devraient garder à l’esprit. Ces deux leçons venues d’ailleurs, sont des exemples qui méritent une attention particulière. Parce qu’une autoroute à péage, ce n’est pas tout. Et demain, il peut arriver que le coût de revient de l’investissement ne revienne pas dans les caisses de l’Etat. Il faut savoir la rentabiliser en la vendant bien aux usagers. En disciplinant les conducteurs, surtout ceux du secteur des transports urbains (bus, cars et minibus). L’autre question qui se pose est de savoir comment sa gestion devrait être organisée. Question fondamentale.
En Afrique subsaharienne, ce modèle d’autoroute n’a pas encore été tenté dans de nombreux pays. Ils sont rares, d’ailleurs à en disposer. En la faisant le président Wade et son gouvernement, lancent un énorme pari. Celui de tester les capacités technologiques et matérielles, des ingénieurs africains aidés par d’autres venus d’ailleurs. Cependant si le défi technologique devrait être gagné tant bien que mal, il ne s’agira pour le président de la République de laisser un ouvrage en béton à la postérité. Il faudra l’entretenir, le rendre plus attrayant et plus sûr. Et tout le jeu pour demain est à ce niveau. Or, dans la compréhension des gens du pouvoir et les commentaires d’émerveillement qui s’ensuivent, ce qui est essentiel est seulement de le faire. Ce serait une grave erreur de croire à une telle folie. Parce que tous les ans, de Montréal à Paris, en passant par Madrid et le Cap, des ouvrages, (ponts, tunnels etc.) ne cessent de s’effondrer à cause des vents, tempêtes, mais aussi de l’usure. Faisant au passage des victimes innocentes.
Auteur: Mame Aly KONTE
Dans le genre, Dakar est une exception, mais les autres villes aussi, ont fait les frais de cet effort gigantesque d’investissement et de modernisation. Dépassés par les évènements, tous les maires sénégalais semblent gérer le quotidien avec de maigres budgets, sans argent frais disponible pour faire de gros investissements (routes ensablées, ponts vieillis, infrastructures sanitaires, scolaires et sociales en souffrance). Kaolack se meurt dans la vase et le poto-poto du côté de Ndangane. Fatick n’a pas jusqu’ici bénéficié de toutes les promesses faites par l’Etat au début de l’alternance. Plus loin, Kaffrine comme Tambacounda, ne sont toujours pas facilement accessibles par la route. Quid de Kédougou, Bakel, Sédhiou, Kolda, Vélingara. La liste est longue de villes de l’intérieur avec leurs gros problèmes où les promesses de l’Etat ne ressemblent plus qu’à des chimères.
Pour bâtir la grande ville africaine et ses satellites, Wade, de sa position de leader et de président, aura au moins, enseigné une chose, celle de bousculer les tabous. Mais jusqu’où ira le président de la République après Dakar ? Surtout en ces moments, où le troisième choc pétrolier doublé de la crise alimentaire, ne facilite plus la libération d’un certain volume de transfert financier sans coup. Sans intérêt.
La question a son importance, au moment où tout l’or du monde dépensé dans la capitale, s’il a permis de réduire certaines contraintes liées à la mobilité n’aura fait que déplacer d’autres problèmes ailleurs. Dans ce fouillis concentrationnaire où les pôles urbains de rupture n’ont pas été favorisés (exemple de l’abandon du projet de pôle urbain et industriel de la plateforme de Diamniadio), il semble qu’on risque de reprendre à zéro pour les cas de certaines réalisations.
Quelques exemples suffisent à le démontrer. Sur la Corniche, la construction d’un tunnel de 495 mètres et la multiplication des voies souterraines, n’ont pas permis de réduire les sources de blocage une fois qu’on a franchi l’entrée du centre ville. L’erreur, selon les urbanistes, est dans l’aménagement d’une dalle en béton au milieu de la chaussée qui n’aura contribué qu’à rétrécir les voies d’encaissement ou de stockage pour traverser la rue ou s’arrêter sur le rebord de la chaussée en cas de panne.
LES MARISTES, OUEST-FOIRE
Des zones boutées de la cité
De l’autre côté de la ville en direction des régions de l’intérieur, l’autoroute, plus large, plus belle parce mieux construit, est une infrastructure qui bute sur des impasses. Dès qu’on sort de la bretelle qui permet de prendre le chemin de la ville de Pikine, on n’avance plus. Et ce n’est pas tout. Aujourd’hui l’aménagement de ces projets qui n’a pas été suivi de véritables études de faisabilité, entamés dans la précipitation, a eu pour effet sur la Voie de Dégagement nord, d’avoir complètement fini de couper du monde, un quartier comme Ouest-foire.
Même scénario dans la zone sud de la ville où, avec la construction de l’autoroute à péage, un quartier comme Hann Maristes, n’a plus d’accès sur l’autoroute. Et pour ce nouveau pôle urbain, où se trouvent de nombreuses zones résidentielles, ne s’offre qu’une seule entrée, du côté de la route de Rufisque ou en direction du pont de Hann, pour rejoindre l’autoroute. Le quartier étouffe d’autant qu’au même moment, les exploitants du sable de mer, vendus aux promoteurs immobiliers à prix d’or, bouchent avec leurs vieux camions, la principale voie d’accès à ce site résidentiel où vivent aujourd’hui près de 50.000 habitants.
Voilà les faits. La preuve que quand des projets fussent-ils les plus utiles au monde sont faits sans de véritables études, avec la seule volonté de faire, comme l’a confirmé un ancien ministre de Wade, on fait des erreurs qui ne seront corrigés qu’à coups de milliards de francs.
AUTOROUTE A PEAGE
Le piège de l’exploitation
Tous ces projets finis avec leur marge d’erreur, quel autre projet pour le président Wade ? La question a son importance parce que le nouveau combat qui s’annonce pour l’homme au goût d’innovations toujours plus poussé, s’articule autour de l’autoroute à péage partant de Dakar en direction de Diamniadio. Et cela dans l’optique de la construction de l’aéroport international de Diass. Le défi est encore immense, mais la réalisation du projet bute sur nombre d’obstacles, qui n’ont pas été des moindres depuis le début. Un exemple : l’aménagement de la route au milieu de la grande niaye de Dakar. Entre les milliers de tonnes de sable, pierres, les kilomètres de bâches ensevelis pour bloquer les phénomènes de résurgence de la nappe, l’autoroute qui devrait coûter la somme de 300 milliards de francs, n’est pas une mince affaire. Mais Wade aime ça. Se lancer des défis que n’osaient pas entreprendre ses prédécesseurs. Mais, entretemps, l’homme qui aime décidément la vitesse et la course, n’a pas peur. Certains de ceux qui l’ont connu dans les années 50 se rappellent encore de la belle « Mustang » qu’il conduisait à l’époque de sa splendeur. Il n’a jamais peur.
Le gigantesque et le géant sont ses marques de fabrique. Il lutte contre ses propres limites et celles du temps. Et si pour demain l’impact économique de la voie Dakar-Diamniadio, devrait permettre comme l’a soutenu Madani Tall, représentant résident de la Banque mondiale au Sénégal, de déboucher un horizon, il reste que le coût est énorme. Et les voies de sa future exploitation pour plus de rentabilité ne semblent pas toujours garanties. Les exemples du tunnel sous la manche dont les concepteurs attendaient monts et merveilles et qui n’a cessé de cumuler des pertes énormes qui ont failli entraîner la fin de ce rêve franco-anglais sont assez éloquents pour le démontrer. Aujourd’hui si le sourire est revenu de ce côté, c’est à la suite de nombreux sacrifices de part et d’autres de la France et de la Grande Bretagne ; même chez les actionnaires (petits comme grands). On peut aussi citer dans le même cas de la France, le fait que nombre d’autoroutes à péages, ne connaissent pas aujourd’hui tout le succès qui était attendu au moment de leur réalisation.
Gigantisme dangereux
Un tel projet d’autoroute à péage mérite bien réflexions et des études sérieuses, que les concepteurs présents aujourd’hui au niveau de l’Agence autonome pour l’investissement et les grands travaux (Apix) devraient garder à l’esprit. Ces deux leçons venues d’ailleurs, sont des exemples qui méritent une attention particulière. Parce qu’une autoroute à péage, ce n’est pas tout. Et demain, il peut arriver que le coût de revient de l’investissement ne revienne pas dans les caisses de l’Etat. Il faut savoir la rentabiliser en la vendant bien aux usagers. En disciplinant les conducteurs, surtout ceux du secteur des transports urbains (bus, cars et minibus). L’autre question qui se pose est de savoir comment sa gestion devrait être organisée. Question fondamentale.
En Afrique subsaharienne, ce modèle d’autoroute n’a pas encore été tenté dans de nombreux pays. Ils sont rares, d’ailleurs à en disposer. En la faisant le président Wade et son gouvernement, lancent un énorme pari. Celui de tester les capacités technologiques et matérielles, des ingénieurs africains aidés par d’autres venus d’ailleurs. Cependant si le défi technologique devrait être gagné tant bien que mal, il ne s’agira pour le président de la République de laisser un ouvrage en béton à la postérité. Il faudra l’entretenir, le rendre plus attrayant et plus sûr. Et tout le jeu pour demain est à ce niveau. Or, dans la compréhension des gens du pouvoir et les commentaires d’émerveillement qui s’ensuivent, ce qui est essentiel est seulement de le faire. Ce serait une grave erreur de croire à une telle folie. Parce que tous les ans, de Montréal à Paris, en passant par Madrid et le Cap, des ouvrages, (ponts, tunnels etc.) ne cessent de s’effondrer à cause des vents, tempêtes, mais aussi de l’usure. Faisant au passage des victimes innocentes.
Auteur: Mame Aly KONTE