Lundi 28 décembre à Dakar, le président sénégalais Abdoulaye Wade défend la construction d’une gigantesque statue baptisée « Monument de la renaissance africaine ». Il s’agit d’un colosse en bronze tenant dans son bras gauche un enfant, et couvrant de son bras droit une femme trônant sur l’une des “Mamelles” de Ouakam, un quartier populaire de Dakar. Alors que sa construction n’est pas encore finie, cette statue suscite une vive polémique pour son seul coût : plusieurs millions d’euros. Plus grave, la plupart des imams sénégalais la trouve franchement « obscène ». Pour eux, il s’agit en réalité d’un symbole franc-maçonnique opposé aux valeurs de l’Islam. Sa construction devrait tout simplement être arrêtée, pensent-ils. Face à cette hostilité, le président se défend, mais dérape. « Pour les musulmans, les églises, c’est pour prier quelqu’un qui n’est pas Dieu. Ils prient Jésus-Christ dans les églises, tout le monde le sait, mais (...) est-ce qu’ils (les imams) ont jamais dit de casser les églises ? », interroge-t-il.
Le clergé catholique digère mal l’allusion. Mercredi, dans une réaction publique, le chef de l’église catholique au Sénégal, le cardinal Théodore Adrien Sarr juge les propos du président excessifs, blessants et humiliants. « Il est scandaleux et inadmissible que la divinité de Jésus et notre foi soient bafoués par le chef de l’Etat sénégalais. Nous ne pouvons pas l’accepter, nous voulons que le Christ qui est de même nature que le Père et en qui nous croyons, soit respecté », martèle-t-il. De leur côté, des groupes de jeunes chrétiens initient une manifestation qui dégénère rapidement en échauffourées, lorsque les forces de l’ordre s’en mêlent.
L’Eglise, à laquelle se joignent des partis d’opposition, exige des excuses publiques d’Abdoulaye Wade. Dans un premier temps, celui-ci envoie une délégation conduite par son fils Karim à la rencontre du clergé catholique. Ensuite, dans son message à la nation le 31 décembre, il présente des regrets, mais ne se plie pas aux excuses souhaitées. « Certains chrétiens ont pu se sentir blessés par la diffusion par des journaux et des radios connus pour leur hostilité à mon égard d’une phrase extraite de mon discours, hors de son contexte, déformant donc le sens de mon propos » déclare-t-il , avant de poursuivre : « Je voudrais dire à mes compatriotes chrétiens que je n’ai jamais eu l’intention de m’attaquer à leur religion que je respecte, au contraire. Si la compréhension de mes propos a pu offenser certains membres de la communauté chrétienne, je suis le premier à le regretter ».
L’Eglise se défend d’avoir été manipulée par la presse. Le cardinal Sarr observe que son propos du 30 décembre avait été « basé uniquement sur des paroles effectivement prononcées par le chef de l’Etat et non sur les reportages et commentaires de la presse ». Pour autant, il dit prendre acte des regrets du président Wade et déclare s’en remettre au Vatican pour la suite. Il multiplie aussi les appels au calme en direction des jeunes chrétiens.
Les imams condamnent les propos de Me Wade
Les musulmans sont loin d’être aussi conciliants envers Me Abdoulaye Wade. Pour un nombre d’entre eux, le président doit quitter le pouvoir. Réunis en collectif, de nombreux imams se montrent ainsi solidaires des chrétiens. « Les propos tenus par le Président Abdoulaye Wade n’ont aucun fondement islamique et n’engagent que sa propre personne (…) Les musulmans ont toujours renouvelé leur confiance au Président Léopold Sedar Senghor, catholique, qui a dirigé le Sénégal pendant vingt ans », écrit le collectif dans un communiqué rendu public ce week-end. Pour ces imams, la paix passe désormais par l’alternance au sommet de l’Etat. Ils ont ainsi lancé un appel à toutes les forces vives afin « qu’elles s’unissent et travaillent à arrêter le régime en place qui risque de nous conduire vers l’irréparable ».
Musulman lui-même et proche de la confrérie Mouride, la plus puissante du Sénégal, Abdoulaye Wade doit cette hostilité croissante de ses coreligionnaires à certaines de ses décisions dans la gestion du pays. Parmi eux, sa volonté d’ériger la statue de « la renaissance africaine », qui apparaît à leurs yeux comme une idole.
Toutefois, dans ce contexte trouble, pour de nombreux observateurs le Sénégal, pays constitué de 90% de musulmans et de 10% de chrétiens qui depuis des décennies cohabitent dans la paix, ne court pas un risque d’affrontements religieux. Seul Abdoulaye Wade pourrait au final payer un prix politique élevé, si les imams continuent leur fronde contre lui. Au pouvoir depuis le 1er avril 2000, le président Wade est âgé de 83 ans.
afrik.com
Le clergé catholique digère mal l’allusion. Mercredi, dans une réaction publique, le chef de l’église catholique au Sénégal, le cardinal Théodore Adrien Sarr juge les propos du président excessifs, blessants et humiliants. « Il est scandaleux et inadmissible que la divinité de Jésus et notre foi soient bafoués par le chef de l’Etat sénégalais. Nous ne pouvons pas l’accepter, nous voulons que le Christ qui est de même nature que le Père et en qui nous croyons, soit respecté », martèle-t-il. De leur côté, des groupes de jeunes chrétiens initient une manifestation qui dégénère rapidement en échauffourées, lorsque les forces de l’ordre s’en mêlent.
L’Eglise, à laquelle se joignent des partis d’opposition, exige des excuses publiques d’Abdoulaye Wade. Dans un premier temps, celui-ci envoie une délégation conduite par son fils Karim à la rencontre du clergé catholique. Ensuite, dans son message à la nation le 31 décembre, il présente des regrets, mais ne se plie pas aux excuses souhaitées. « Certains chrétiens ont pu se sentir blessés par la diffusion par des journaux et des radios connus pour leur hostilité à mon égard d’une phrase extraite de mon discours, hors de son contexte, déformant donc le sens de mon propos » déclare-t-il , avant de poursuivre : « Je voudrais dire à mes compatriotes chrétiens que je n’ai jamais eu l’intention de m’attaquer à leur religion que je respecte, au contraire. Si la compréhension de mes propos a pu offenser certains membres de la communauté chrétienne, je suis le premier à le regretter ».
L’Eglise se défend d’avoir été manipulée par la presse. Le cardinal Sarr observe que son propos du 30 décembre avait été « basé uniquement sur des paroles effectivement prononcées par le chef de l’Etat et non sur les reportages et commentaires de la presse ». Pour autant, il dit prendre acte des regrets du président Wade et déclare s’en remettre au Vatican pour la suite. Il multiplie aussi les appels au calme en direction des jeunes chrétiens.
Les imams condamnent les propos de Me Wade
Les musulmans sont loin d’être aussi conciliants envers Me Abdoulaye Wade. Pour un nombre d’entre eux, le président doit quitter le pouvoir. Réunis en collectif, de nombreux imams se montrent ainsi solidaires des chrétiens. « Les propos tenus par le Président Abdoulaye Wade n’ont aucun fondement islamique et n’engagent que sa propre personne (…) Les musulmans ont toujours renouvelé leur confiance au Président Léopold Sedar Senghor, catholique, qui a dirigé le Sénégal pendant vingt ans », écrit le collectif dans un communiqué rendu public ce week-end. Pour ces imams, la paix passe désormais par l’alternance au sommet de l’Etat. Ils ont ainsi lancé un appel à toutes les forces vives afin « qu’elles s’unissent et travaillent à arrêter le régime en place qui risque de nous conduire vers l’irréparable ».
Musulman lui-même et proche de la confrérie Mouride, la plus puissante du Sénégal, Abdoulaye Wade doit cette hostilité croissante de ses coreligionnaires à certaines de ses décisions dans la gestion du pays. Parmi eux, sa volonté d’ériger la statue de « la renaissance africaine », qui apparaît à leurs yeux comme une idole.
Toutefois, dans ce contexte trouble, pour de nombreux observateurs le Sénégal, pays constitué de 90% de musulmans et de 10% de chrétiens qui depuis des décennies cohabitent dans la paix, ne court pas un risque d’affrontements religieux. Seul Abdoulaye Wade pourrait au final payer un prix politique élevé, si les imams continuent leur fronde contre lui. Au pouvoir depuis le 1er avril 2000, le président Wade est âgé de 83 ans.
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