C'est une lettre envoyée par Maureen Dor aux équipes du magazine "Envoyé spécial". L'animatrice et comédienne belge de 51 ans a transmis ce courrier lorsqu'elle a appris que l'émission de France 2 avait recueilli plusieurs témoignages de femmes affirmant avoir été agressées par Nicolas Hulot. Dans cette lettre, Maureen Dor assure que Nicolas Hulot lui aurait "sauté dessus" et aurait "tenté de l'embrasser" contre son gré, lorsqu'elle avait 18 ans. Les faits décrits par l'animatrice remontent à 1989 et sont donc prescrits. Nicolas Hulot est présumé innocent. Dans le cadre de la diffusion du numéro d'"Envoyé spécial", jeudi 25 novembre, nous publions son témoignage écrit dans son intégralité.
Je m'appelle Maureen Dor. Je suis née en Belgique il y a 51 ans. A 17 ans, en dernière année de lycée, j'ai commencé à travailler à la télévision belge. L'année suivante, j'ai lu le livre Les chemins de traverse de Nicolas Hulot, star de l'émission "Ushuaïa". J'ai adoré ce livre et j'ai eu l'envie de lui envoyer une lettre qui le lui disait. Ne connaissant pas son adresse, j'ai écrit à "Nicolas Hulot, émission Ushuaïa, TF1, Paris, France". Dans cette lettre, je lui disais aussi que j'étais Bruxelloise et que je me ferais un plaisir de lui faire visiter ma ville si un jour il y venait. Je lui laissais aussi mon numéro de téléphone puisque nous étions "collègues de télévision".
"Je le repousse, étonnée et effrayée"
Quelle ne fut pas ma surprise de recevoir, quelques semaines après, un coup de fil de la vedette m'annonçant qu'il venait à Bruxelles pour le salon du livre et qu'il serait ravi de me rencontrer. Il me donnait rendez-vous à l'hôtel Métropole, hôtel mythique de Bruxelles. J'y suis allée, toute heureuse d'avoir intéressé le grand homme, que j'ai vu apparaître dans le hall. De là, nous sommes allés boire un verre au bar de l'hôtel.
"Au bout d'un quart d'heure, il me dit que des journalistes doivent venir l'interviewer et il me propose de l'accompagner dans sa chambre pour les attendre."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Et moi je dis oui, évidemment ! Je n'ai jamais vu les chambres de ce grand hôtel – je n'ai même jamais été dans un établissement comme celui-là – et je suis flattée qu'il me le propose.
Et maintenant, je vais commencer à me justifier, comme toute femme qui s'est retrouvée en fâcheuse posture. J'ai 18 ans en 1989, élevée dans un milieu bourgeois catholique. Je suis vierge et surtout, je ne me trouve pas particulièrement sexy. C'est important à dire parce qu'à l'époque je pense sincèrement qu'un homme peut me proposer de l'accompagner dans sa chambre sans avoir aucune arrière-pensée. Je fais partie de ces jeunes filles qui ne pensent pas un instant inspirer la moindre pensée ou le moindre désir d'ordre sexuel. C'est tellement loin de mon schéma de pensée à moi !
"Je l'accompagne donc et, aussitôt dans la chambre, le voilà qui me saute dessus et tente de m'embrasser. Je le repousse, étonnée et effrayée, en lui faisant cette remarque si naïve : 'Mais vous avez une femme !' et lui de me répondre que cela n'a rien à voir et que je serai une 'parenthèse'."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
A ce moment précis, la réception appelle pour annoncer que les journalistes arrivent. Il me dit de partir, ce que je fais. Le téléphone portable n'existant pas à cette époque, j'appelle ma meilleure amie du téléphone de l'étage pour lui raconter ce qui vient de se passer, choquée que l'homme que j'admirais ait fait cela, mais pas non plus désespérée. Et la voilà qui me dit, mi-combative, mi-rigolant : "Résiste Maureen, résiste."
"Il ne fallait pas faire ça aux jeunes filles qui l'admiraient"
Et c'est à cause de ce qui va suivre que je pense que mon témoignage ne vaut rien : j'y suis retournée. Quand nous étions dans le hall de l'hôtel, il m'avait proposé d'aller dîner avec lui et des amis à lui, et j'avais accepté. Malgré ce qu'il venait de se passer, j'ai tout de même voulu aller dîner avec lui, fascinée par le bonhomme. Voilà, c'est là où j'ai l'impression de ne pas avoir été claire avec moi-même.
Certes, j'avais été interloquée par sa tentative de baiser, par ses mains qui avaient agrippé mon visage, mais l'envie et la fierté d'avoir été invitée par lui ont été les plus fortes. Qu'est-ce que cela dit de moi, de la jeune fille que j'étais ? Je ne le sais toujours pas. Aurais-je dû être traumatisée ? Etais-je naïve ou vicieuse ? Ai-je "cherché" ce qui m'est arrivé ? Ai-je envoyé des signes malgré moi et lui, l'homme adulte qu'il était, les a mal compris et les a interprétés ?
Dans la voiture qui nous conduisait au restaurant, il m'a redonné le numéro de sa chambre "au cas où". Cet événement a dû me "travailler" plus que prévu puisque pendant la nuit, je lui ai écrit une longue lettre dans laquelle je disais qu'il ne fallait pas faire ça aux jeunes filles qui l'admiraient. Et le lendemain, je me souviens avoir passé outre la file de lecteurs qui attendaient leur dédicace au salon du livre pour lui déposer théâtralement sur sa table ce que j'avais à lui dire.
"Notre rencontre, ma lettre, ne semblent pas l'avoir bouleversé puisque quelques années plus tard, je l'ai croisé dans les couloirs de Canal + sans qu'il me reconnaisse."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Depuis, j'ai souvent raconté cette histoire à mes copains, sans jamais m'apitoyer sur mon sort. Je savais que j'avais évité quelque chose grâce à l'arrivée des journalistes, mais quoi ?
Plus tard, alors que je travaillais déjà à la télévision française, un directeur artistique d'une grosse agence de publicité m'a contactée pour faire de moi, disait-il, "l'égérie d'une grande marque populaire de cosmétiques". Un peu méfiante – on apprend à le devenir-, j'ai rappelé l'agence qui m'a bien confirmé que ce monsieur travaillait pour eux. Je me suis rendue à l'adresse indiquée qui était un immeuble d'habitations, ce qui m'a surprise, mais on est à Paris, pensais-je, et tout est possible…
Je sonne à la porte de l'appartement, j'entends une voix qui dit "J'arrive, j'arrive", tout en mettant un peu de temps et, quand l'homme ouvre et me fait rentrer, je remarque tout de suite que l'appartement est vide, qu'il y a une odeur de saleté et de cheveux gras qui traîne, et je comprends qu'il ne faut pas que je reste. Je lui annonce que je ne pense pas que ce lieu soit propice à une conversation professionnelle et que je l'attends au bar situé en face de son immeuble. Il n'est jamais venu. Je ne suis pas allée voir la police, et surtout, et je m'en veux encore, je n'ai pas recontacté l'agence pour les prévenir qu'un de leurs employés avait un comportement potentiellement dangereux envers les femmes.
"Entre 15 ans et 25 ans, il y a une période où les femmes sont particulièrement vulnérables"
Je raconte cette anecdote parce qu'elle est révélatrice d'un fait majeur : j'ai 18 ans lors de ma rencontre avec Nicolas Hulot et j'en ai 25 lors de la seconde. Or, je suis convaincue qu'entre 15 ans et 25 ans, il y a une période où les filles/femmes sont particulièrement vulnérables. Comme un trou noir de leur instinct qui les rend incapables de réagir comme elles le devraient à certaines situations, ou comme leur instinct de conservation, plus tard, les fera réagir.
"Lors de cette période de vie, soit la jeune fille est trop naïve pour envisager qu'elle peut inspirer un désir d'ordre sexuel aux hommes, soit elle-même ressent un sentiment amoureux dont elle croit sincèrement à la réciproque de la part de l'homme qu'elle côtoie."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Et c'est cette ambivalence entre son attitude, sa manière de s'habiller ou de se comporter et la pureté de ses émotions qui semble difficile, si pas impossible, à comprendre pour les femmes et les hommes devenus adultes. Je dis bien "les femmes et les hommes" parce que nous savons que les femmes peuvent parfois être aussi dures et critiques dans leur vision de certaines situations sensibles que les hommes.
Je n'ai pas été "abîmée" par ma rencontre avec monsieur Hulot. Et j'ai sincèrement peur de l'être beaucoup plus par les réactions que ce genre de dénonciations engendre sur les réseaux sociaux. De plus, je pense que l'on peut changer. On peut être un sale bonhomme à une époque et se rendre compte de sa connerie en vieillissant ou en ayant des enfants. J'ose espérer que la paternité a "appris" à monsieur Hulot qu'il fallait respecter les femmes.
"Mais s'il semble qu'il a continué à ne pas prendre un "non" pour ce qu'il est, s'il a continué à croire que le corps des femmes est à sa disposition, alors, il faut qu'on lui enseigne que ce n'est pas le cas."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Comme nous, les femmes, à qui la vie "apprend" – et souvent dans la douleur – à nous méfier et à faire attention aux signaux que nous envoyons ou que nous recevons. Et puisqu'il semble que pour faire comprendre quelque chose durablement, il faille parfois passer par des moyens peu agréables, il faut soutenir la nouvelle génération, dont je ne fais pas partie mais que je regarde avec respect, quand elle s'empare de ces moyens à bras-le-corps, comme longtemps certains hommes (pas tous, loin de là et il ne faut jamais l'oublier !) se sont emparés du corps des femmes avec leurs bras.
"Certaines douleurs enfouies doivent sortir"
Je suis sincèrement désolée pour la fille de monsieur Hulot qui va découvrir que son père n'est pas le héros ou l'homme intègre qu'elle était en droit d'espérer mais je suis encore plus désolée pour toutes les femmes qui l'ont appris dans la douleur et à leur corps défendant (c'est le cas de le dire !). Entre elle et elles, j'ai choisi elles. Parce qu'elles, c'est aussi moi. Et ça, j'ai mis très longtemps à m'en rendre compte.
Aucune femme qui témoigne à visage découvert ou anonymement ne le fait facilement et de gaité de cœur. Mais certaines douleurs enfouies doivent sortir pour faire place à de nouvelles émotions qui, elles, ne feront pas mal.
Cette prise de parole étant difficile, pour ma part, elle sera unique.
Les journalistes d'"Envoyé spécial" ont contacté Nicolas Hulot et ses avocats à plusieurs reprises. Il a refusé de répondre à nos questions face à une caméra. Ses avocats ont également décliné les demandes d'interviews. Leur client conteste fermement les faits et affirme plus généralement n'avoir jamais agressé une femme dans sa vie.
Je m'appelle Maureen Dor. Je suis née en Belgique il y a 51 ans. A 17 ans, en dernière année de lycée, j'ai commencé à travailler à la télévision belge. L'année suivante, j'ai lu le livre Les chemins de traverse de Nicolas Hulot, star de l'émission "Ushuaïa". J'ai adoré ce livre et j'ai eu l'envie de lui envoyer une lettre qui le lui disait. Ne connaissant pas son adresse, j'ai écrit à "Nicolas Hulot, émission Ushuaïa, TF1, Paris, France". Dans cette lettre, je lui disais aussi que j'étais Bruxelloise et que je me ferais un plaisir de lui faire visiter ma ville si un jour il y venait. Je lui laissais aussi mon numéro de téléphone puisque nous étions "collègues de télévision".
"Je le repousse, étonnée et effrayée"
Quelle ne fut pas ma surprise de recevoir, quelques semaines après, un coup de fil de la vedette m'annonçant qu'il venait à Bruxelles pour le salon du livre et qu'il serait ravi de me rencontrer. Il me donnait rendez-vous à l'hôtel Métropole, hôtel mythique de Bruxelles. J'y suis allée, toute heureuse d'avoir intéressé le grand homme, que j'ai vu apparaître dans le hall. De là, nous sommes allés boire un verre au bar de l'hôtel.
"Au bout d'un quart d'heure, il me dit que des journalistes doivent venir l'interviewer et il me propose de l'accompagner dans sa chambre pour les attendre."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Et moi je dis oui, évidemment ! Je n'ai jamais vu les chambres de ce grand hôtel – je n'ai même jamais été dans un établissement comme celui-là – et je suis flattée qu'il me le propose.
Et maintenant, je vais commencer à me justifier, comme toute femme qui s'est retrouvée en fâcheuse posture. J'ai 18 ans en 1989, élevée dans un milieu bourgeois catholique. Je suis vierge et surtout, je ne me trouve pas particulièrement sexy. C'est important à dire parce qu'à l'époque je pense sincèrement qu'un homme peut me proposer de l'accompagner dans sa chambre sans avoir aucune arrière-pensée. Je fais partie de ces jeunes filles qui ne pensent pas un instant inspirer la moindre pensée ou le moindre désir d'ordre sexuel. C'est tellement loin de mon schéma de pensée à moi !
"Je l'accompagne donc et, aussitôt dans la chambre, le voilà qui me saute dessus et tente de m'embrasser. Je le repousse, étonnée et effrayée, en lui faisant cette remarque si naïve : 'Mais vous avez une femme !' et lui de me répondre que cela n'a rien à voir et que je serai une 'parenthèse'."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
A ce moment précis, la réception appelle pour annoncer que les journalistes arrivent. Il me dit de partir, ce que je fais. Le téléphone portable n'existant pas à cette époque, j'appelle ma meilleure amie du téléphone de l'étage pour lui raconter ce qui vient de se passer, choquée que l'homme que j'admirais ait fait cela, mais pas non plus désespérée. Et la voilà qui me dit, mi-combative, mi-rigolant : "Résiste Maureen, résiste."
"Il ne fallait pas faire ça aux jeunes filles qui l'admiraient"
Et c'est à cause de ce qui va suivre que je pense que mon témoignage ne vaut rien : j'y suis retournée. Quand nous étions dans le hall de l'hôtel, il m'avait proposé d'aller dîner avec lui et des amis à lui, et j'avais accepté. Malgré ce qu'il venait de se passer, j'ai tout de même voulu aller dîner avec lui, fascinée par le bonhomme. Voilà, c'est là où j'ai l'impression de ne pas avoir été claire avec moi-même.
Certes, j'avais été interloquée par sa tentative de baiser, par ses mains qui avaient agrippé mon visage, mais l'envie et la fierté d'avoir été invitée par lui ont été les plus fortes. Qu'est-ce que cela dit de moi, de la jeune fille que j'étais ? Je ne le sais toujours pas. Aurais-je dû être traumatisée ? Etais-je naïve ou vicieuse ? Ai-je "cherché" ce qui m'est arrivé ? Ai-je envoyé des signes malgré moi et lui, l'homme adulte qu'il était, les a mal compris et les a interprétés ?
Dans la voiture qui nous conduisait au restaurant, il m'a redonné le numéro de sa chambre "au cas où". Cet événement a dû me "travailler" plus que prévu puisque pendant la nuit, je lui ai écrit une longue lettre dans laquelle je disais qu'il ne fallait pas faire ça aux jeunes filles qui l'admiraient. Et le lendemain, je me souviens avoir passé outre la file de lecteurs qui attendaient leur dédicace au salon du livre pour lui déposer théâtralement sur sa table ce que j'avais à lui dire.
"Notre rencontre, ma lettre, ne semblent pas l'avoir bouleversé puisque quelques années plus tard, je l'ai croisé dans les couloirs de Canal + sans qu'il me reconnaisse."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Depuis, j'ai souvent raconté cette histoire à mes copains, sans jamais m'apitoyer sur mon sort. Je savais que j'avais évité quelque chose grâce à l'arrivée des journalistes, mais quoi ?
Plus tard, alors que je travaillais déjà à la télévision française, un directeur artistique d'une grosse agence de publicité m'a contactée pour faire de moi, disait-il, "l'égérie d'une grande marque populaire de cosmétiques". Un peu méfiante – on apprend à le devenir-, j'ai rappelé l'agence qui m'a bien confirmé que ce monsieur travaillait pour eux. Je me suis rendue à l'adresse indiquée qui était un immeuble d'habitations, ce qui m'a surprise, mais on est à Paris, pensais-je, et tout est possible…
Je sonne à la porte de l'appartement, j'entends une voix qui dit "J'arrive, j'arrive", tout en mettant un peu de temps et, quand l'homme ouvre et me fait rentrer, je remarque tout de suite que l'appartement est vide, qu'il y a une odeur de saleté et de cheveux gras qui traîne, et je comprends qu'il ne faut pas que je reste. Je lui annonce que je ne pense pas que ce lieu soit propice à une conversation professionnelle et que je l'attends au bar situé en face de son immeuble. Il n'est jamais venu. Je ne suis pas allée voir la police, et surtout, et je m'en veux encore, je n'ai pas recontacté l'agence pour les prévenir qu'un de leurs employés avait un comportement potentiellement dangereux envers les femmes.
"Entre 15 ans et 25 ans, il y a une période où les femmes sont particulièrement vulnérables"
Je raconte cette anecdote parce qu'elle est révélatrice d'un fait majeur : j'ai 18 ans lors de ma rencontre avec Nicolas Hulot et j'en ai 25 lors de la seconde. Or, je suis convaincue qu'entre 15 ans et 25 ans, il y a une période où les filles/femmes sont particulièrement vulnérables. Comme un trou noir de leur instinct qui les rend incapables de réagir comme elles le devraient à certaines situations, ou comme leur instinct de conservation, plus tard, les fera réagir.
"Lors de cette période de vie, soit la jeune fille est trop naïve pour envisager qu'elle peut inspirer un désir d'ordre sexuel aux hommes, soit elle-même ressent un sentiment amoureux dont elle croit sincèrement à la réciproque de la part de l'homme qu'elle côtoie."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Et c'est cette ambivalence entre son attitude, sa manière de s'habiller ou de se comporter et la pureté de ses émotions qui semble difficile, si pas impossible, à comprendre pour les femmes et les hommes devenus adultes. Je dis bien "les femmes et les hommes" parce que nous savons que les femmes peuvent parfois être aussi dures et critiques dans leur vision de certaines situations sensibles que les hommes.
Je n'ai pas été "abîmée" par ma rencontre avec monsieur Hulot. Et j'ai sincèrement peur de l'être beaucoup plus par les réactions que ce genre de dénonciations engendre sur les réseaux sociaux. De plus, je pense que l'on peut changer. On peut être un sale bonhomme à une époque et se rendre compte de sa connerie en vieillissant ou en ayant des enfants. J'ose espérer que la paternité a "appris" à monsieur Hulot qu'il fallait respecter les femmes.
"Mais s'il semble qu'il a continué à ne pas prendre un "non" pour ce qu'il est, s'il a continué à croire que le corps des femmes est à sa disposition, alors, il faut qu'on lui enseigne que ce n'est pas le cas."
Maureen Dor dans une lettre transmise à "Envoyé spécial"
Comme nous, les femmes, à qui la vie "apprend" – et souvent dans la douleur – à nous méfier et à faire attention aux signaux que nous envoyons ou que nous recevons. Et puisqu'il semble que pour faire comprendre quelque chose durablement, il faille parfois passer par des moyens peu agréables, il faut soutenir la nouvelle génération, dont je ne fais pas partie mais que je regarde avec respect, quand elle s'empare de ces moyens à bras-le-corps, comme longtemps certains hommes (pas tous, loin de là et il ne faut jamais l'oublier !) se sont emparés du corps des femmes avec leurs bras.
"Certaines douleurs enfouies doivent sortir"
Je suis sincèrement désolée pour la fille de monsieur Hulot qui va découvrir que son père n'est pas le héros ou l'homme intègre qu'elle était en droit d'espérer mais je suis encore plus désolée pour toutes les femmes qui l'ont appris dans la douleur et à leur corps défendant (c'est le cas de le dire !). Entre elle et elles, j'ai choisi elles. Parce qu'elles, c'est aussi moi. Et ça, j'ai mis très longtemps à m'en rendre compte.
Aucune femme qui témoigne à visage découvert ou anonymement ne le fait facilement et de gaité de cœur. Mais certaines douleurs enfouies doivent sortir pour faire place à de nouvelles émotions qui, elles, ne feront pas mal.
Cette prise de parole étant difficile, pour ma part, elle sera unique.
Les journalistes d'"Envoyé spécial" ont contacté Nicolas Hulot et ses avocats à plusieurs reprises. Il a refusé de répondre à nos questions face à une caméra. Ses avocats ont également décliné les demandes d'interviews. Leur client conteste fermement les faits et affirme plus généralement n'avoir jamais agressé une femme dans sa vie.