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Affaire Alex Saab : Pourquoi le Cap-Vert ignore-t-il la juge Costa ?

Rédigé par leral.net le Dimanche 11 Juillet 2021 à 16:27 | | 0 commentaire(s)|

Le 15 mars 2021, la Cour de justice de la CEDEAO a statué dans une décision unanime et contraignante que la détention par la République du Cap-Vert du diplomate vénézuélien Alex Nain Saab Moran était illégale, que celui-ci devait être immédiatement libéré, que le processus d’extradition auquel il était sujet au Cap-Vert soit résilié et… Continue reading Affaire Alex Saab : Pourquoi le Cap-Vert ignore-t-il la juge Costa ?

Le 15 mars 2021, la Cour de justice de la CEDEAO a statué dans une décision unanime et contraignante que la détention par la République du Cap-Vert du diplomate vénézuélien Alex Nain Saab Moran était illégale, que celui-ci devait être immédiatement libéré, que le processus d’extradition auquel il était sujet au Cap-Vert soit résilié et qu’il lui soit versé la somme de 200 000 $ à titre de dommages moraux. Une décision claire, concise et précise.

Le 16 mars 2021, dans un acte choquant de désobéissance, la Cour suprême de justice du Cap-Vert a décidé que l’extradition d’Alex Saab vers les États-Unis pouvait être maintenue. La décision représente un fait extraordinaire en termes de gifle portée à la fois à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest et à la Cour de justice de la CEDEAO. Il était également clair pour tous dans sa lecture que la décision avait été préparée bien avant la décision de la CEDEAO de la veille et publiée si hâtivement que plusieurs des paragraphes contenus dans la décision écrite étaient encore non modifiés et inachevés. Une confirmation claire, concise et précise de mépris.

La nature préalablement préparée de la décision de la Cour suprême est davantage confirmée par le fait qu’elle ne fait, et ne pouvait évidemment pas faire, de commentaire sur la nature substantielle et bien argumentée de la décision de la Cour de la CEDEAO. L’unique argument significatif que la Cour suprême avait à offrir était qu’elle avait accepté de facto le fait que Alex Saab est un diplomate légalement nommé et qu’il mérite donc de bénéficier de l’immunité et de l’inviolabilité que ce statut apporte, toutefois, et il est important de le noter, le tribunal a clairement indiqué que la décision de reconnaître l’immunité d’Alex Saab n’est pas une affaire judiciaire, mais une décision politique qui devait être prise par l’exécutif.

Au cours des dernières semaines, divers responsables gouvernementaux dirigés par le vénérable président de la République du Cap-Vert, Jorge Fonseca, la ministre de la Justice Janine Lélis et le procureur général Luis Landim ont annoncés partout et à qui voulait l’entendre « qu’il appartient aux tribunaux de décider du sort d’Alex Saab » (Fonseca), « cela ne dépend pas de moi » (Lélis) et « l’affaire dépend de la Cour constitutionnelle et non du gouvernement » (Ladim).

Solution bien pratique. Avec personne au sein du gouvernement qui ose emprunter la voie logique et juridiquement correcte d’accepter le statut d’Alex Saab en tant que diplomate légalement nommé, il est clair que le cabinet du Premier ministre Ulisses Correia cherche à battre tous les records connus de vitesse pour s’éloigner aussi vite que possible de la décision que la Cour suprême leur a imposée.

Malheureusement, ce n’est pas là que s’arrête la réaction empreinte de lâcheté des autorités du Cap-Vert.

Comme indiqué précédemment, la décision du 15 mars de la Cour de la CEDEAO était unanime, ce qui en soi n’a rien de remarquable, cependant, ce qui rend cette décision extrêmement remarquable, est le fait que le juge rapporteur du collège des juges était la juge Januária Tavares Silva Moreira Costa. La juge Costa est non seulement une juriste capverdienne respectée et expérimentée, mais elle est également l’ancienne ministre de la Justice de ce pays.

Ce point est d’une extrême importance, car la décision du 15 mars, qui a conclu que la détention d’Alex Saab est illégale et qu’il devait être immédiatement libéré, est fondée principalement sur des violations de la loi nationale du Cap-Vert. Avec les deux autres membres du panel originaires du Nigeria et du Ghana (le président de la Cour de la CEDEAO), il est évident que toutes les questions concernant des points de droit du Cap-Vert n’ont pu être traitées que par la juge Costa.

PRENEZ LE TEMPS DE BIEN ASSIMILER CETTE INFORMATION.

L’un des plus hauts juges du Cap-Vert, qui a également occupé le poste de ministre de la Justice, a déclaré au monde que l’arrestation, la détention (et par implication le processus d’extradition) d’Alex Saab sont illégales, car la manière dont elles ont eu lieu enfreint les lois du Cap-Vert.

Ce qui rend impossible de comprendre, alors qu’il a fallu un peu plus d’un mois à la juge Costa et à ses collègues pour entendre les deux parties et parvenir à la décision que l’arrestation d’Alex Saab était illégale, pourquoi, après plus d’un an, l’ensemble du système juridique du Cap-Vert n’a pas reconnu les violations de ses propres lois. La juge Costa a-t-elle tort ? La personne jugée suffisamment qualifiée par l’État du Cap-Vert pour le représenter devant le tribunal le plus prestigieux de la région de la CEDEAO n’est-elle finalement pas qualifiée pour se prononcer sur les aspects les plus fondamentaux de la loi du Cap-Vert ?

Où cette hésitation place-t-elle le Premier ministre Ulisses Correia ? La condamnation mondiale de l’arrestation d’un diplomate légalement nommé n’a cessé de croître depuis la gifle méprisante adressée à la CEDEAO le 16 mars. La façade autoproclamée de démocratie du Cap-Vert et de respect des lois et des obligations internationales s’écroule et l’État acquiert rapidement la réputation d’être inconstant, peu fiable et totalement sensible aux pressions politiques.



Source : https://www.lasnews.info/affaire-alex-saab-pourquo...