Quand l’argent du contribuable sénégalais sert à « libérer » des otages étrangers
Charité bien ordonnée commence par soi-même, dit-on souvent. Seulement, chez Abdoulaye Wade, presque tout se fait à l’envers. C’est ainsi qu’il faut comprendre sa générosité débordante toujours tournée vers l’extérieur. Il y a quelques semaines, c’était aux pauvres Haïtiens d’avoir droit à ses largesses, parce que victimes de catastrophes naturelles, comme cela arrive parfois au Sénégal, où certains sinistrés de la banlieue croupissent encore sous les eaux, faute de solution de relogement. Pas plus tard que le mois dernier, notre généreux donateur, Mame Abdoulaye, offrait 75 millions de Francs CFA aux petits Ivoiriens pour doter le pays de Laurent Gbagbo d’une « case des tout-petits », alors que dans son propre pays, le Sénégal, très pauvre et très endetté, la mendicité gagne du terrain, avec les talibés qui, de jour comme de nuit, arpentent les rues de la capitale, devenues leur seul domicile fixe, à la merci des pédophiles et autres prédateurs sexuels. Aujourd’hui, le président de la République, qui dernièrement avait offert aux Guinéens 500 millions de Francs pour s’amuser, s’est encore illustré dans la récupération politique, en s’offrant le beau rôle, aux côtés de son fils, dans la libération de Clotilde Reiss, l’ex otage du nouveau « Coluche » du Moyen-Orient, Ahmadinejad. Même si le geste est noble et grandit notre diplomatie, on ne saurait ni comprendre ni justifier à quel titre Abdoulaye Wade se permet d’utiliser l’argent du contribuable sénégalais comme monnaie d’échange pour libérer des otages étrangers. C’est le communiqué du ministère sénégalais des Affaires Etrangères même, qui affirme que Madické Niang et Karim Wade ont effectué des allers-retours multiples et répétés entre Dakar, Paris et Téhéran. D’abord le 22 octobre 2009 pour rencontrer Claude Guéant à Paris, suivi d’un déplacement à Téhéran du 10 au 12 novembre. Puis Karim Wade, à son tour, dépêché à Téhéran du 29 mars au 1er avril 2010 en compagnie de Robert Bourgi, et s’envole pour Paris le 2 avril pour rencontrer Claude Guéant. De nouveau à Paris le 6 avril 2010 pour « informer Claude Guéant de l’évolution positive du dossier ». Figurez-vous que les frais d’hôtels, les billets d’avion ainsi que le coût global de ce tourisme diplomatique ne sont pas à la charge de l’Etat français, mais du pauvre contribuable sénégalais, qui en remboursera l’intégralité jusqu’au dernier centime. Si l’Etat sénégalais est assez riche pour prendre en charge les frais liés au sauvetage du soldat « Reiss » à l’autre bout du monde, il devrait y avoir de quoi mettre fin à la grève de la faim des étudiants de Thiès qui réclamaient un putain de bus. Il ne serait pas erroné de dire, qu’aux yeux d’Abdoulaye Wade, la vie de Clotilde Reiss vaut dix fois plus que ces ressortissants sénégalais qui croupissent injustement dans les prisons à l’étranger, à l’image de cet homme de 42 ans condamné à 23 ans et 6 mois par la Cour d’assises de Bergamo, en Italie, un dont le dossier loin d’intéresser nos diplomates « chevronnés ». Reste à définir combien aura coûté la libération de l’otage français à l’Etat sénégalais. Pour Wade, rien n’est trop cher, tant que cela sert à redorer l’image de son fils, qu’il a cherché à tout-va à associer à cette libération pour lui faire de la publicité. Si c’était un plan de communication, il est bien réussi. Seulement, c’était sans compter sur l’ingratitude et le paternalisme de l’Etat français, qui, tout de même, a fini par rendre à César ce qui revient à César.
Momar Mbaye
mbayemomar@yahoo.fr
Charité bien ordonnée commence par soi-même, dit-on souvent. Seulement, chez Abdoulaye Wade, presque tout se fait à l’envers. C’est ainsi qu’il faut comprendre sa générosité débordante toujours tournée vers l’extérieur. Il y a quelques semaines, c’était aux pauvres Haïtiens d’avoir droit à ses largesses, parce que victimes de catastrophes naturelles, comme cela arrive parfois au Sénégal, où certains sinistrés de la banlieue croupissent encore sous les eaux, faute de solution de relogement. Pas plus tard que le mois dernier, notre généreux donateur, Mame Abdoulaye, offrait 75 millions de Francs CFA aux petits Ivoiriens pour doter le pays de Laurent Gbagbo d’une « case des tout-petits », alors que dans son propre pays, le Sénégal, très pauvre et très endetté, la mendicité gagne du terrain, avec les talibés qui, de jour comme de nuit, arpentent les rues de la capitale, devenues leur seul domicile fixe, à la merci des pédophiles et autres prédateurs sexuels. Aujourd’hui, le président de la République, qui dernièrement avait offert aux Guinéens 500 millions de Francs pour s’amuser, s’est encore illustré dans la récupération politique, en s’offrant le beau rôle, aux côtés de son fils, dans la libération de Clotilde Reiss, l’ex otage du nouveau « Coluche » du Moyen-Orient, Ahmadinejad. Même si le geste est noble et grandit notre diplomatie, on ne saurait ni comprendre ni justifier à quel titre Abdoulaye Wade se permet d’utiliser l’argent du contribuable sénégalais comme monnaie d’échange pour libérer des otages étrangers. C’est le communiqué du ministère sénégalais des Affaires Etrangères même, qui affirme que Madické Niang et Karim Wade ont effectué des allers-retours multiples et répétés entre Dakar, Paris et Téhéran. D’abord le 22 octobre 2009 pour rencontrer Claude Guéant à Paris, suivi d’un déplacement à Téhéran du 10 au 12 novembre. Puis Karim Wade, à son tour, dépêché à Téhéran du 29 mars au 1er avril 2010 en compagnie de Robert Bourgi, et s’envole pour Paris le 2 avril pour rencontrer Claude Guéant. De nouveau à Paris le 6 avril 2010 pour « informer Claude Guéant de l’évolution positive du dossier ». Figurez-vous que les frais d’hôtels, les billets d’avion ainsi que le coût global de ce tourisme diplomatique ne sont pas à la charge de l’Etat français, mais du pauvre contribuable sénégalais, qui en remboursera l’intégralité jusqu’au dernier centime. Si l’Etat sénégalais est assez riche pour prendre en charge les frais liés au sauvetage du soldat « Reiss » à l’autre bout du monde, il devrait y avoir de quoi mettre fin à la grève de la faim des étudiants de Thiès qui réclamaient un putain de bus. Il ne serait pas erroné de dire, qu’aux yeux d’Abdoulaye Wade, la vie de Clotilde Reiss vaut dix fois plus que ces ressortissants sénégalais qui croupissent injustement dans les prisons à l’étranger, à l’image de cet homme de 42 ans condamné à 23 ans et 6 mois par la Cour d’assises de Bergamo, en Italie, un dont le dossier loin d’intéresser nos diplomates « chevronnés ». Reste à définir combien aura coûté la libération de l’otage français à l’Etat sénégalais. Pour Wade, rien n’est trop cher, tant que cela sert à redorer l’image de son fils, qu’il a cherché à tout-va à associer à cette libération pour lui faire de la publicité. Si c’était un plan de communication, il est bien réussi. Seulement, c’était sans compter sur l’ingratitude et le paternalisme de l’Etat français, qui, tout de même, a fini par rendre à César ce qui revient à César.
Momar Mbaye
mbayemomar@yahoo.fr