Quel commentaire faites-vous de la vague de démissions au Palais ?
Je me dis qu’il s’agit de personnes qui avaient librement consenti à exercer certaines fonctions, et qui, tout aussi librement, ont décidé de se décharger de ces fonctions. Rien de dramatique à mon avis. Par contre, de bonnes raisons de se réjouir. Pendant longtemps, l’on a affirmé que nous autres Sénégalais n’avions pas la culture de la démission. C’est une chanson connue. Donc, si aujourd’hui on en arrive à cette situation où des collaborateurs du président de la République, occupant de hautes fonctions dans son cabinet, annoncent leur démission, je me dis que dans ce pays il y a quelque chose qui bouge : ou bien nous commençons enfin à acquérir cette culture de la démission, ou alors les fonctions désertées n’assurent plus ces privilèges indécents qui asservissaient les occupants et les rendaient accros plus que n’importe quelle drogue. Dans les deux cas, les perspectives sont plutôt rassurantes à mon sens.
Quelles sont les parts de responsabilité des démissionnaires et du Président ?
Chacun est libre d’interpréter comme il veut. Mais il me semble clair que ces démissions doivent beaucoup à des frustrations liées à l’écart constaté entre les représentations et la réalité.
Jacques Diouf, Moubarack Lo, Doudou Ndoye… de gros calibres quand même…
Je ne sais pas ce que vous appelez gros calibres. Il s’agit de trois personnalités sénégalaises, trois cadres, connus dans leurs domaines respectifs. Comme bien d’autres Sénégalais, présents aux côtés du Président ou non.
Le Président qui, pour les dénoncer, parle de gens prétentieux, hautains, et met en garde ses proches…, sa déception a dû être bien grande au sujet de son entourage ?
Je ne sais pas si ces mots du Président expriment une déception ou simplement la confirmation de choix constants dans son style de gestion. Je peux vous dire en tout cas que quand on veut compagnonner avec lui, il y a des tares qu’il faut absolument bannir. Je suis bien placé pour le dire.
Est-ce la résultante d’un mauvais casting ? Et dans ce cas, le Président s’entoure-t-il de toutes les garanties avant de recruter ses collaborateurs ?
J’ai eu l’occasion de dire, et je le répète, l’attribution de nomination est l’une des plus délicates à exercer pour un président de la République dans un contexte comme le nôtre. Parce que quels que soient votre bonne volonté, votre lucidité, votre rigueur et votre sens des responsabilités, vous êtes amené parfois à faire des choix qui n’emportent pas votre propre adhésion, mais vous sont imposés par des paramètres contextuels. On aimerait bien nommer un tel parce qu’on est convaincu que c’est celui qu’il faudrait, mais pour telle raison, sa nomination serait mal perçue dans l’opinion et pourrait instaurer une situation à effet inhibant sur son potentiel et ses performances. Tel autre ne convainc pas, mais le laisser en rade entraînerait des effets tout aussi nuisibles. Car le président de la République gère aussi l’opinion, qui est son meilleur allié dans la conduite de sa mission. Il ne peut pas à tout moment, sous prétexte de ses convictions personnelles, faire fi de l’opinion et n’en faire qu’à sa tête.
L’actualité, c’est aussi la mise au ban d’Abc des instances de décision de l’Apr. Fallait s’y attendre non ?
Je n’adhère pas à votre caractérisation de la situation. Alioune Badara Cissé n’est pas mis au ban des instances de décision de l’Apr. Même si je ne maîtrise pas la structuration et l’articulation des organes de ce parti, je sais qu’il n’a été ni exclu, ni suspendu du parti, et les seules instances où il ne siège plus, ce sont des instances de coordination et d’exécution ; celles où il avait accès sur nomination du Président. Il n’a pas été non plus sanctionné, comme on l’a dit et répété. Vous trouverez dans les textes de l’Apr, comme c’est le cas avec toutes les organisations de ce genre, la liste hiérarchisée des sanctions prévues et pouvant être infligées à un militant. Vous n’y verrez pas les mesures qui ont été prises contre ABC. Il n’a pas été sanctionné, il a été frappé par des mesures de retrait de confiance. C’est très différent. Le président de son parti, sur la base d’attributions réglementaires –je suppose qu’il y a un texte qui confère au président du parti le pouvoir de procéder à ces nominations car si cette habilitation n’existe pas, cela signifie que ABC n’a jamais été coordonnateur pour avoir été nommé de manière non réglementaire- l’avait investi de sa confiance en le nommant dans des instances nominatives et en le désignant coordonnateur. Le même président a décidé, toujours en mettant en œuvre ses attributions, de lui retirer sa confiance. A mon avis, il n’y a rien à redire. La confiance est une affaire personnelle, parfois même très subjective.
Cela dit, personnellement, je trouve que cette mesure est la suite logique d’une situation interne à l’Apr depuis le départ de Me Cissé du gouvernement. Ce départ avait fini de creuser un fossé entre lui et le président de la République qui, en tant que président de l’Apr, l’avait nommé coordonnateur du parti. Sur le plan purement politique, ils n’étaient plus dans les mêmes orientations, ne parlaient plus le même langage. J’ai entendu dire que ABC ne se présentait plus dans les instances de coordination du parti, préférant mener une action politique en solo sur le terrain et dans les instances de base. Ce que je sais en revanche sur la base de comptes rendus médiatiques, c’est que son discours public était un désaveu ouvertement infligé au leadership de son parti et aux orientations de celui-ci. Cela est constant. Dès lors, fallait-il le laisser continuer à porter la casquette de coordonnateur de ce parti dont les instances se réunissent, toujours en son absence, pour dégager des orientations qu’il s’attèle à désavouer à la première occasion ? Je pense qu’il y a un problème de cohérence et de logique dans tout cela. Si ABC avait été élu coordonnateur par une quelconque instance, on aurait pu considérer la légitimité découlant de son mandat, pour dire qu’il n’a de comptes à rendre qu’à l’instance qui l’a élu. Mais il a été nommé et il rend compte à celui qui l’a nommé. Donc s’ils ne sont plus en phase, s’ils ne parlent plus le même langage, il est logique de s’attendre à voir l’autre lui retirer sa confiance, parce qu’il ne peut plus le représenter.
J’ajoute que, je suis un témoin privilégié de leur compagnonnage dans l’Apr et cela n’a jamais été facile. Entre la création de l’Apr en fin 2008 et l’élection de Macky Sall en mars 2012, il y a eu au moins deux périodes de quasi-rupture entre eux. Deux périodes au cours desquelles toutes relations entre eux étaient gelées et ABC n’avait pratiquement plus d’activité dans le parti. C’était en 2009 et en 2011. Ces tensions intermittentes semblent s’être exacerbées avec la gestion des affaires nationales. Donc entre eux, cela a toujours été un compagnonnage en dents de scie. J’ai observé le processus de leur séparation sur plusieurs mois. J’évite d’entrer dans le fond des choses par devoir d’élégance et de courtoisie car même si je ne suis pas avec ABC au même niveau de relation que je me trouve avec Macky, il demeure néanmoins un ami qui m’a toujours manifesté des sentiments positifs que je me fais un devoir de mériter. J’ai eu moi-même, avec deux autres amis, Mame Mbaye Niang et Abdou Aziz Mbaye, l’actuel conseiller spécial en TIC du Président, à faire de la facilitation entre eux dans le passé, et je devrais pouvoir le faire encore. Cela me contraint à une certaine réserve. Mais je vous dis, ce qui s’est passé, c’est la suite logique d’un état relationnel.
Les membres de la Coalition «Macky 2012» font des menaces à l'endroit du chef de l'Etat, comment appréciez-vous cet état de fait ?
Je le déplore, mais en même temps, je me dis que cela nous renvoie l’image réelle de notre démocratie. Un univers propice à l’entreprenariat et au business politique. Les gens de «Macky 2012», comme d’autres compagnons du Président qui ont choisi la défection, subissent les contrecoups de la démarche d’amélioration de la gouvernance de ce pays. Naguère, la proximité du Président de la République était un champ de privilèges, entre nominations de complaisance, trafic d’influence et largesses prédatrices. Et quoi que l’on puisse croire ou prétendre, il y a actuellement une véritable croisade initiée par le président de la République contre ce genre de pratiques. Et beaucoup d’agitations qu’on observe aujourd’hui, beaucoup d’actes qu’on voudrait glorieux, ne sont en vérité inspirés que par la frustration née de l’anéantissement d’illusions et de desseins malsains. Quand on entre avec enthousiasme au
cabinet présidentiel en y voyant la fin de ses soucis d’argent comme disait l’autre, et que l’on se retrouve avec un salaire inférieur à celui d’un quelconque cadre du secteur privé et beaucoup plus d’obligations, et que par ailleurs tous les accès à l’argent facile que sont le trafic d’influence, la corruption, les largesses du maître des lieux avec des ressources qui ne sont pas siennes… toutes ces perspectives fondent progressivement, on se retrouve en face d’une alternative simple : ou bien on est suffisamment engagé à servir son pays et on s’adapte à la situation, ou bien on se soucie davantage de son confort personnel et on va voir ailleurs. Voilà la réalité. L’autre vérité est que, le Président, tout en veillant à honorer le contrat politique et moral qui l’a lié à ses alliés électoraux, en les associant aux affaires, refuse de se laisser enfermer dans un clanisme abusif qui consisterait à vouloir gérer ce pays avec les seuls gens qui étaient de son bord au moment des élections. Ce pays appartient à 13 millions de Sénégalais qui ont les mêmes droits et les mêmes devoirs, y compris ceux de servir la communauté. Et cela, le Président refuse de le perdre de vue.
Ne pensez-vous pas que l'implosion de «Bby» va déstabiliser le régime en place ?
Je ne sais pas si cette implosion aura lieu ou non, mais je sais que le Président ne se laissera pas surprendre. Cela veut dire qu’il s’assurera que des conjonctures dans le champ partisan n’aient pas d’impact sensible dans l’espace institutionnel.
On prête de plus en plus au Président Macky Sall la volonté d'enterrer «Benno bokk yakaar» (Bby) pour mettre en place un nouveau cadre en vue des prochaines joutes électorales...
Je ne crois pas qu’il s’agisse exactement d’une volonté du Président d’enterrer la coalition qui s’est créée dans l’entre-deux-tours et qui a soutenu sa candidature au 2nd tour. Je pense que sur ce plan-là, le Président a fait assez de concessions à ses alliés pour que nul ne puisse remettre en cause, de bonne foi, son engagement pour le maintien de ce compagnonnage. Mais il se trouve aussi qu’en politique, il y a des signes à décrypter pour dégager des perspectives et anticiper l’avenir. Si on n’est pas dans ces dispositions, on est voué à un sort de tocard ; or Macky Sall est loin d’être un tocard politique, son parcours épique le démontre à suffisance. Et je peux vous garantir qu’il n’est disposé ni à se laisser prendre en otage, ni à se laisser prendre de court par les évènements.
Quel regard portez-vous sur ce vaste rassemblement qu’il est en train d’organiser ?
Je ne connais pas franchement les détails de cette opération. On parle beaucoup de politique le Président et moi ; mais en toute sincérité, je vous dis que cette affaire, on ne l’a jamais évoquée entre nous. Certainement parce que nous sortons de l’hivernage qui est une période d’absence de Dakar pour moi, et on n’a pas eu l’occasion de beaucoup se rencontrer et échanger durant ces derniers mois.
Je peux quand même vous dire que l’implication du maximum de Sénégalais dans l’exercice de son mandat présidentiel, sans distinction aucune, c’est l’une des idées fortes de la doctrine du Président. Il gouverne 13 millions de Sénégalais, pour 13 millions de Sénégalais et compte le faire avec 13 millions de Sénégalais ne serait-ce que sous une forme échantillonnée. Personne, aucun espace ne sera exclu.
Est-il à la peine politiquement pour ainsi ouvrir ses bras à tout le monde ?
Je vous dis que c’est un choix doctrinal. Cela n’a rien à voir avec les conjonctures politiques. Peut-on sérieusement parler de peiner politiquement pour un Président qui boucle tout juste un an et demi d’exercice sur un mandat de 5 ans ? Je pense que c’est une perception qui ne résiste pas à la critique.
Ne risque-t-on pas de revivre le syndrome de la Cap 21, une coalition hétéroclite qui servait plus à jouer aux épouvantails ?
La Cap 21 a existé dans un contexte précis, et était animée par des personnes déterminées, pour soutenir un leader nommé Abdoulaye Wade. Aujourd’hui, le leader se nomme Macky Sall, disposant d’une histoire et d’une vision politique très différentes de celles de son prédécesseur ; et les organisations et personnalités politiques qui se mobilisent autour de lui ont également leurs spécificités au même titre que le contexte. C’est pourquoi il ne me semble pas pertinent d’envisager un retour à la mode Cap 21. Ce serait envisager l’histoire à reculons. Or l’histoire marche toujours vers l’avant. Ce qui amène certains à dire qu’elle ne se répète jamais, même s’il est courant d’observer des tentatives de la faire bégayer.
Pour casser la force d’Idy, Macky débauche son entourage, redonnant à la transhumance tous ses pouvoirs. Est-ce vertueux de pérenniser ces pratiques longtemps dénoncées ?
Si vous me dites : Macky Sall s’adonne aujourd’hui à ces pratiques qu’il a toujours dénoncées tant qu’il était de l’autre côté des affaires, je vous répondrai : donc, il y a problème. Mais votre question est plutôt subtile en ce sens qu’elle ne précise pas qui dénonçait. On ne peut pas évaluer le rapport de Macky Sall à la vertu sur la base des convictions des autres. Si vous voulez accuser Macky Sall de s’être renié sur cette question, évoquez-moi d’abord des prises de positions antérieures où il aurait dénoncé la transhumance politique. Je ne prétends pas avoir en mémoire tous ses discours politiques, mais je crois que sur cette question précise, son histoire politique ne lui a même pas donné l’opportunité de développer des discours contradictoires.
Où est la rupture, sur ce point, par rapport à ce qui se faisait ?
La rupture n’est pas une réalité parcellaire qu’il faille appréhender au détail. Il faut en avoir une vision globale avec une approche privilégiant des fondamentaux. Pour un pays qui se veut Etat de droit, démocratique et républicain, où les services de sécurité s’illustraient dans les bavures mortelles sans jamais être inquiétées, où les citoyens étaient un peu plus assujettis tous les jours et par différents procédés, où le bien public était devenu pernicieusement patrimonial, où le culte d’un homme avait supplanté le culte de la République, quand je vois depuis un an et demi, le nombre d’agents de la sécurité publique jugés et condamnés, ou bien poursuivis en justice pour des bavures perpétrées contre des gens ordinaires, quand je vois la rigueur avec laquelle les ressources publiques sont désormais gérées, la détermination avec laquelle on s’attèle à revaloriser la citoyenneté, à restaurer les valeurs
et les symboles de la République, moi je me dis que la rupture est bien amorcée. Je vais vous raconter une anecdote : il y a 2 semaines, c’était le samedi 09 novembre si je ne me trompe, j’étais avec le Président et nous sommes sortis du Palais vers midi pour une visite privée à des proches. On est partis avec juste une escorte légère et discrète. Sur la Place Washington, le chauffeur du Président, soucieux de ne pas se laisser distancer par le véhicule d’escorte qui avait déjà contourné le rond point, a voulu disputer le passage à un chauffeur de taxi qui, aux termes du Code de la route, était prioritaire. Le Président l’a aussitôt rappelé à l’ordre en ces termes : vous n’avez pas la priorité et vous n’êtes pas en cortège. Je vous ai toujours dit que lorsque nous sortons sans cortège, nous avons les mêmes droits que tous les autres usagers de la route. Nous devons nous conformer scrupuleusement au code. On
était quatre dans le véhicule. Le Président et moi étions derrière, et devant il y avait le chef de sa sécurité rapprochée, un commandant du GIGN, assis à côté du chauffeur. C’est vérifiable. Et moi, j’ai perçu cette scène comme une excellente leçon sur le devoir de soumission des hommes, quel que soit leur rang, aux valeurs de la République. Et cela, c’est le socle du système alternatif que doit instaurer la rupture. J’aurais pu vous parler aussi de la discipline avec laquelle le Président se lève toujours pour saluer le drapeau national aux heures de montée et de descente, même lorsqu’il est seul dans une pièce du Palais, à l’abri de tout regard. L’Etat de droit et la République, c’est une conviction forte chez lui, c’est la base de son action politique.
Finalement, je vous dirai que le Président assume pleinement sa part de rupture. Mais est-ce que nous autres citoyens, nous sommes disposés à le suivre dans ce sens ? C’est une question qui, à mon avis, mériterait que nous y réfléchissions un peu, sans passion, avec lucidité et froideur. Nous avons des réflexes et des comportements que nous semblons peiner à abandonner et qui ne favorisent pas l’instauration de la société de rupture que nous réclamons tous à haute voix. Le Président impulse la rupture, mais ne nous l’impose pas. S’il l’assume à son niveau, et que nous refusions de nous y engager et nous y adapter, on n’assistera jamais à l’avènement de la rupture.
Au vu des difficultés du pouvoir à trouver des solutions aux maux des Sénégalais, d'aucuns estiment que le syndrome Sarkozy guette Macky Sall. Partagez-vous ces craintes ?
Là où vous parlez de difficultés du pouvoir, moi je relativiserai. Certes, les choses ne sont pas faciles pour les gouvernants, mais cette situation, je l’appréhende sur la base de l’état réel du pays à la date du 25 mars 2012. Le Président Wade et ses partisans avaient passé leur premier septennat à justifier leurs difficultés par l’état dans lequel ils avaient trouvé le pays, selon eux, et ce, malgré le livre-bilan de Mamadou Lamine Loum qui nous présentait, dans une démarche d’une rigueur scientifique, un Sénégal aux perspectives plutôt favorables. Le Président Macky Sall, sur ce plan-là, s’est montré d’une élégance remarquable, pour n’avoir pas beaucoup insisté sur le legs qu’il a reçu. Certains de ses compagnons le lui reprochent même, estimant que s’il avait clairement informé les Sénégalais de ce qu’il a trouvé sur place, il se serait épargné certaines critiques qui indexent son gouvernement sur des affaires relevant du passif de l’ancienne équipe. Quoi qu’il en soit, c’est le Président Wade lui-même, en campagne pour le second tour de 2012, qui nous avait lancé cette alerte aux allures d’aveu : si je ne suis pas réélu, le pays ne pourra pas payer les salaires de ses fonctionnaires à la prochaine fin de mois. Les médias l’avaient relayée et tous les Sénégalais l’ont entendue. Cela veut dire quoi, dans la bouche du Président qui était en exercice à l’époque ? Simplement que le pays était en faillite et que lui seul, soit par ses ressources propres, soit par ses relations, pouvait trouver les moyens d’assurer les salaires des fonctionnaires à la prochaine fin de mois. Cela est clair. Voilà l’état dans lequel le pays a été transmis au Président Macky Sall le 03 avril 2012. J’ajoute qu’à l’époque, la presse a informé l’opinion nationale de la situation inouïe, avec l’essentiel du budget national consommé par l’équipe sortante, pour juste un trimestre d’exercice. Cette même presse nous avait informés d’une autre contrainte, structurelle celle-là, très pesante, à laquelle le nouveau Président devrait faire face. Pour un budget de 2 200 milliards, le Sénégal avait une masse salariale mensuelle de plus de 50 milliards –non les 30 milliards qu’on a toujours déclarés officiellement- et un service de la dette de plus de 50 milliards aussi par mois. Cela signifie que plus de 50% du budget national étaient consacrés à ces 2 postes. Et je le rappelle, cette situation n’a rien de conjoncturel. Elle découle des choix politiques de l’ancien Président, et affecte les finances publiques jusqu’à ce que d’autres choix politiques majeurs viennent changer les choses ; ce qui ne saurait se faire dans le cours terme.
A partir de toutes ces considérations, on peut se demander comment le Président Macky Sall a fait, pour empêcher la réalisation de la prophétie de Wade, en assurant le paiement intégral des salaires des fonctionnaires, non pas seulement à l’échéance fatidique, mais régulièrement, depuis qu’il est en place. Mieux, il s’est même permis de faire adopter des mesures de baisse de fiscalité sur ces salaires, et a procédé à un important recrutement de fonctionnaires, le tout ne pouvant manquer, évidemment, d’avoir un effet haussier sur la masse salariale. Et les milliards engagés pour faire bénéficier à tous nos enfants d’une couverture maladie ? Et les autres milliards mobilisés et distribués sous formes d’allocations sociales aux familles les plus défavorisées de notre Nation ? La prophétie du Président Wade, pouvait-elle laisser envisager en si peu de temps un retournement de situation aussi spectaculaire ?
Avec ces contraintes citées, qui sont loin d’être exhaustives, comment est-on parvenu à faire fonctionner ce pays, sans aucun problème, depuis le départ du Président Wade ? C’est là que l’on peut trouver tout l’engagement du Président Sall à construire ce pays, au-delà des conjonctures et des conjectures.
Donc, je suis d’accord que la tâche n’est pas aisée pour les gouvernants actuels, mais la vision et l’engagement produisent déjà des résultats.
Beaucoup d'observateurs de la scène politique sont d'avis que l'argument avancé (Acte III de la décentralisation) par les autorités pour repousser les Locales ne tient pas la route...
On a reporté des élections pour moins que cela dans ce pays. Et depuis le Président Senghor jusqu’à nos jours, les élections locales en particulier, se sont rarement tenues à date échue. En matière de modification du calendrier électoral, je suis convaincu que le Président Macky Sall ne battra jamais le record du Président Wade.
Selon vous, est-ce que Mme Aminata Touré est capable de traduire en actes concrets la vision du président de la République ?
Elle présente toutes les aptitudes et toutes les qualités pour cela, et je crois qu’elle commence déjà à nous faire sentir ce qu’elle est en train de faire.
Sentez-vous l’accélération quelque part ?
Je pense que les mesures phares du programme du Président, dont on parle depuis plus d’un an, sans les voir arriver, se manifestent maintenant. Je pense aux bourses de sécurité familiale dont on annonce le démarrage des paiements la semaine prochaine, je pense à la nouvelle politique de santé qui était au centre des échanges en Conseil des ministres, il y a une à deux semaines, je pense à l’Agence pour la sécurité de proximité, qui a fini ses recrutements et a publié les listes de ses agents, je pense aux Fonsis et au Fongid, dont j’ai lu dernièrement des communiqués relatifs au recrutement de leur personnel, je pense à la fixation dès début novembre, du prix du kilogramme d’arachide au producteur, qui était publié traditionnellement en décembre et souvent même dans la 2ème quinzaine. Oui, les choses bougent, c’est clair.
Un an et six mois après son accession à la présidence de la République, de quoi Macky peut-il bien se targuer ?
Dans les développements précédents, j’ai largement évoqué les réalisations à l’actif du Président Macky Sall en un an et demi d’exercice d’un mandat de 5 ans. Aujourd’hui, il peut se targuer d’avoir engagé la restauration de l’Etat de droit républicain et démocratique, d’avoir engagé la revalorisation de la citoyenneté en instituant des politiques sociales en faveur de Sénégalais identifiés comme vulnérables ou défavorisés, d’avoir engagé le processus de sécurisation des ressources publiques face aux velléités prédatrices de gestionnaires indélicats, d’avoir engagé la réhabilitation de la vie rurale par la promotion économique et sociale des populations concernées. Je ne parle pas de la renaissance diplomatique que connaît notre pays et d’autres aspects encore de son action en un an et demi d’exercice du mandat présidentiel.
La traque des biens mal acquis ne va-t-elle pas devenir le talon d’Achille du pouvoir, vu le tassement en cours ?
La traque des biens mal acquis, c’était une exigence forte de l’opinion nationale. Les politiques l’ont donc inscrite dans leur agenda. Après les élections, cette opinion s’est impatientée. On a même soupçonné le Président d’avoir voulu évacuer le dossier pour ménager des gens avec qui il a cheminé en politique. On démarre l’opération, le scepticisme était toujours là. Il a fallu que le juge prononce des inculpations et décerne des mandats de dépôt, pour que finalement on ne puisse plus entretenir le scepticisme dans l’opinion. On change de fusil d’épaule et désormais, on tente de diaboliser et de décrédibiliser l’opération, en parlant de juridiction d’exception illégitime, de justice politique violant les principes fondamentaux du droit, de lenteurs et tout. C’est cela aussi le Sénégal. Nous sommes rarement constants, cohérents et conséquents dans nos aspirations et nos volontés.
Personnellement, ma position sur ce sujet, depuis le début, est simple. Désormais, il faut être totalement inconscient pour vouloir profiter des positions de responsabilités publiques et s’enrichir indûment. Parce que cette affaire va faire jurisprudence, et les gens qui l’ont initiée et l’appliquent aujourd’hui aux anciens gouvernants, la subiront un jour eux aussi, quand ils quitteront les affaires. Et ils quitteront bien un jour. Et ma conviction est que, après 2 ou 3 générations de dirigeants appelés à rendre compte de leur gestion, les affaires publiques seront gérées avec plus de rigueur et d’orthodoxie. Et en vérité, là est l’ambition portée par le Président Macky Sall qui ne rate aucune occasion, particulièrement en privé, pour mettre en garde ses proches et ses collaborateurs sur la nécessité de veiller à pouvoir partir le moment venu, sans crainte d’être rattrapés par un passé contentieux.
Depuis l’indépendance, la plus grande pesanteur qui contraint notre projet de développement, c’est le pompage de nos ressources par les élites gouvernantes. C’est notre problème public numéro 1. Il fallait y trouver une solution. Et là, il me semble bien qu’après 3 Présidents qui ont été tous impuissants contre ce fléau, le 4ème, le Président Macky Sall s’est révélé l’homme de la situation, le porteur de solution. Et Rien que pour cette innovation courageuse et salutaire, il ne peut plus échouer dans sa mission. Un jour, on dépassera les controverses d’intérêt, et on portera un regard moins passionné, plus impersonnel, sur cette question. C’est ma conviction.
Il y a quand même Me El hadj Amadou Sall qui révèle une offre de deal du Président Macky Sall à Karim Wade
Me Sall ne fait pas de révélation. Il s’adonne juste à des allégations, et je crois que personne ne l’a pris au sérieux. Où, quand, comment et selon quelles modalités cette offre de deal aurait-elle été faite ? Je pense que là sont des questions qu’on ne devrait pas manquer de lui poser, pour qu’il donne des détails précis.
Vous savez, j’aime bien El hadj Amadou Sall. C’est une personne très sympathique. Le Président aussi l’aime bien. C’est notre grand, comme on dit. Mais il est souvent excessif, et cela finit par créer des situations… Rappelez-vous, en 2008, lorsqu’il s’est agi d’éliminer politiquement Macky Sall, El hadj Amadou jouait le même rôle que celui qui est sien aujourd’hui. Les déclarations fracassantes et démesurées, c’était toujours lui. On avait l’impression qu’au-delà des conflits politiques, il avait un problème personnel avec Macky. Quelque temps après le départ de Macky, Me Sall s’est retrouvé dans une situation d’infortune politique. Cela l’avait sans doute marqué, au point qu’il est venu voir Macky qui occupait à l’époque une maison de location à Fann Résidence, et venait de créer l’Apr. C’était fin 2008 ou dans les premiers mois de 2009, je ne sais plus. El hadj est arrivé là-bas. Il a été accueilli. On était sortis, Macky et moi, et il a attendu. Au retour, comme nous étions informés de sa présence, moi je suis monté directement au niveau supérieur et Macky est allé vers lui. Ils se sont parlé. Je n’entre pas dans les détails, bien que je les connaisse, parce que j’en ai discuté ensuite avec Macky qui m’a aussi révélé qu’ils s’étaient rencontrés auparavant lors d’un événement chez une responsable du Pds qui était députée à l’époque. C’est là-bas qu’El hadj lui avait parlé et avait promis de venir le voir. Mais aujourd’hui encore, à chaque fois que j’entends El hadj faire ses déclarations excessives, je repense à cette séquence de l’histoire.
Le Populaire
Je me dis qu’il s’agit de personnes qui avaient librement consenti à exercer certaines fonctions, et qui, tout aussi librement, ont décidé de se décharger de ces fonctions. Rien de dramatique à mon avis. Par contre, de bonnes raisons de se réjouir. Pendant longtemps, l’on a affirmé que nous autres Sénégalais n’avions pas la culture de la démission. C’est une chanson connue. Donc, si aujourd’hui on en arrive à cette situation où des collaborateurs du président de la République, occupant de hautes fonctions dans son cabinet, annoncent leur démission, je me dis que dans ce pays il y a quelque chose qui bouge : ou bien nous commençons enfin à acquérir cette culture de la démission, ou alors les fonctions désertées n’assurent plus ces privilèges indécents qui asservissaient les occupants et les rendaient accros plus que n’importe quelle drogue. Dans les deux cas, les perspectives sont plutôt rassurantes à mon sens.
Quelles sont les parts de responsabilité des démissionnaires et du Président ?
Chacun est libre d’interpréter comme il veut. Mais il me semble clair que ces démissions doivent beaucoup à des frustrations liées à l’écart constaté entre les représentations et la réalité.
Jacques Diouf, Moubarack Lo, Doudou Ndoye… de gros calibres quand même…
Je ne sais pas ce que vous appelez gros calibres. Il s’agit de trois personnalités sénégalaises, trois cadres, connus dans leurs domaines respectifs. Comme bien d’autres Sénégalais, présents aux côtés du Président ou non.
Le Président qui, pour les dénoncer, parle de gens prétentieux, hautains, et met en garde ses proches…, sa déception a dû être bien grande au sujet de son entourage ?
Je ne sais pas si ces mots du Président expriment une déception ou simplement la confirmation de choix constants dans son style de gestion. Je peux vous dire en tout cas que quand on veut compagnonner avec lui, il y a des tares qu’il faut absolument bannir. Je suis bien placé pour le dire.
Est-ce la résultante d’un mauvais casting ? Et dans ce cas, le Président s’entoure-t-il de toutes les garanties avant de recruter ses collaborateurs ?
J’ai eu l’occasion de dire, et je le répète, l’attribution de nomination est l’une des plus délicates à exercer pour un président de la République dans un contexte comme le nôtre. Parce que quels que soient votre bonne volonté, votre lucidité, votre rigueur et votre sens des responsabilités, vous êtes amené parfois à faire des choix qui n’emportent pas votre propre adhésion, mais vous sont imposés par des paramètres contextuels. On aimerait bien nommer un tel parce qu’on est convaincu que c’est celui qu’il faudrait, mais pour telle raison, sa nomination serait mal perçue dans l’opinion et pourrait instaurer une situation à effet inhibant sur son potentiel et ses performances. Tel autre ne convainc pas, mais le laisser en rade entraînerait des effets tout aussi nuisibles. Car le président de la République gère aussi l’opinion, qui est son meilleur allié dans la conduite de sa mission. Il ne peut pas à tout moment, sous prétexte de ses convictions personnelles, faire fi de l’opinion et n’en faire qu’à sa tête.
L’actualité, c’est aussi la mise au ban d’Abc des instances de décision de l’Apr. Fallait s’y attendre non ?
Je n’adhère pas à votre caractérisation de la situation. Alioune Badara Cissé n’est pas mis au ban des instances de décision de l’Apr. Même si je ne maîtrise pas la structuration et l’articulation des organes de ce parti, je sais qu’il n’a été ni exclu, ni suspendu du parti, et les seules instances où il ne siège plus, ce sont des instances de coordination et d’exécution ; celles où il avait accès sur nomination du Président. Il n’a pas été non plus sanctionné, comme on l’a dit et répété. Vous trouverez dans les textes de l’Apr, comme c’est le cas avec toutes les organisations de ce genre, la liste hiérarchisée des sanctions prévues et pouvant être infligées à un militant. Vous n’y verrez pas les mesures qui ont été prises contre ABC. Il n’a pas été sanctionné, il a été frappé par des mesures de retrait de confiance. C’est très différent. Le président de son parti, sur la base d’attributions réglementaires –je suppose qu’il y a un texte qui confère au président du parti le pouvoir de procéder à ces nominations car si cette habilitation n’existe pas, cela signifie que ABC n’a jamais été coordonnateur pour avoir été nommé de manière non réglementaire- l’avait investi de sa confiance en le nommant dans des instances nominatives et en le désignant coordonnateur. Le même président a décidé, toujours en mettant en œuvre ses attributions, de lui retirer sa confiance. A mon avis, il n’y a rien à redire. La confiance est une affaire personnelle, parfois même très subjective.
Cela dit, personnellement, je trouve que cette mesure est la suite logique d’une situation interne à l’Apr depuis le départ de Me Cissé du gouvernement. Ce départ avait fini de creuser un fossé entre lui et le président de la République qui, en tant que président de l’Apr, l’avait nommé coordonnateur du parti. Sur le plan purement politique, ils n’étaient plus dans les mêmes orientations, ne parlaient plus le même langage. J’ai entendu dire que ABC ne se présentait plus dans les instances de coordination du parti, préférant mener une action politique en solo sur le terrain et dans les instances de base. Ce que je sais en revanche sur la base de comptes rendus médiatiques, c’est que son discours public était un désaveu ouvertement infligé au leadership de son parti et aux orientations de celui-ci. Cela est constant. Dès lors, fallait-il le laisser continuer à porter la casquette de coordonnateur de ce parti dont les instances se réunissent, toujours en son absence, pour dégager des orientations qu’il s’attèle à désavouer à la première occasion ? Je pense qu’il y a un problème de cohérence et de logique dans tout cela. Si ABC avait été élu coordonnateur par une quelconque instance, on aurait pu considérer la légitimité découlant de son mandat, pour dire qu’il n’a de comptes à rendre qu’à l’instance qui l’a élu. Mais il a été nommé et il rend compte à celui qui l’a nommé. Donc s’ils ne sont plus en phase, s’ils ne parlent plus le même langage, il est logique de s’attendre à voir l’autre lui retirer sa confiance, parce qu’il ne peut plus le représenter.
J’ajoute que, je suis un témoin privilégié de leur compagnonnage dans l’Apr et cela n’a jamais été facile. Entre la création de l’Apr en fin 2008 et l’élection de Macky Sall en mars 2012, il y a eu au moins deux périodes de quasi-rupture entre eux. Deux périodes au cours desquelles toutes relations entre eux étaient gelées et ABC n’avait pratiquement plus d’activité dans le parti. C’était en 2009 et en 2011. Ces tensions intermittentes semblent s’être exacerbées avec la gestion des affaires nationales. Donc entre eux, cela a toujours été un compagnonnage en dents de scie. J’ai observé le processus de leur séparation sur plusieurs mois. J’évite d’entrer dans le fond des choses par devoir d’élégance et de courtoisie car même si je ne suis pas avec ABC au même niveau de relation que je me trouve avec Macky, il demeure néanmoins un ami qui m’a toujours manifesté des sentiments positifs que je me fais un devoir de mériter. J’ai eu moi-même, avec deux autres amis, Mame Mbaye Niang et Abdou Aziz Mbaye, l’actuel conseiller spécial en TIC du Président, à faire de la facilitation entre eux dans le passé, et je devrais pouvoir le faire encore. Cela me contraint à une certaine réserve. Mais je vous dis, ce qui s’est passé, c’est la suite logique d’un état relationnel.
Les membres de la Coalition «Macky 2012» font des menaces à l'endroit du chef de l'Etat, comment appréciez-vous cet état de fait ?
Je le déplore, mais en même temps, je me dis que cela nous renvoie l’image réelle de notre démocratie. Un univers propice à l’entreprenariat et au business politique. Les gens de «Macky 2012», comme d’autres compagnons du Président qui ont choisi la défection, subissent les contrecoups de la démarche d’amélioration de la gouvernance de ce pays. Naguère, la proximité du Président de la République était un champ de privilèges, entre nominations de complaisance, trafic d’influence et largesses prédatrices. Et quoi que l’on puisse croire ou prétendre, il y a actuellement une véritable croisade initiée par le président de la République contre ce genre de pratiques. Et beaucoup d’agitations qu’on observe aujourd’hui, beaucoup d’actes qu’on voudrait glorieux, ne sont en vérité inspirés que par la frustration née de l’anéantissement d’illusions et de desseins malsains. Quand on entre avec enthousiasme au
cabinet présidentiel en y voyant la fin de ses soucis d’argent comme disait l’autre, et que l’on se retrouve avec un salaire inférieur à celui d’un quelconque cadre du secteur privé et beaucoup plus d’obligations, et que par ailleurs tous les accès à l’argent facile que sont le trafic d’influence, la corruption, les largesses du maître des lieux avec des ressources qui ne sont pas siennes… toutes ces perspectives fondent progressivement, on se retrouve en face d’une alternative simple : ou bien on est suffisamment engagé à servir son pays et on s’adapte à la situation, ou bien on se soucie davantage de son confort personnel et on va voir ailleurs. Voilà la réalité. L’autre vérité est que, le Président, tout en veillant à honorer le contrat politique et moral qui l’a lié à ses alliés électoraux, en les associant aux affaires, refuse de se laisser enfermer dans un clanisme abusif qui consisterait à vouloir gérer ce pays avec les seuls gens qui étaient de son bord au moment des élections. Ce pays appartient à 13 millions de Sénégalais qui ont les mêmes droits et les mêmes devoirs, y compris ceux de servir la communauté. Et cela, le Président refuse de le perdre de vue.
Ne pensez-vous pas que l'implosion de «Bby» va déstabiliser le régime en place ?
Je ne sais pas si cette implosion aura lieu ou non, mais je sais que le Président ne se laissera pas surprendre. Cela veut dire qu’il s’assurera que des conjonctures dans le champ partisan n’aient pas d’impact sensible dans l’espace institutionnel.
On prête de plus en plus au Président Macky Sall la volonté d'enterrer «Benno bokk yakaar» (Bby) pour mettre en place un nouveau cadre en vue des prochaines joutes électorales...
Je ne crois pas qu’il s’agisse exactement d’une volonté du Président d’enterrer la coalition qui s’est créée dans l’entre-deux-tours et qui a soutenu sa candidature au 2nd tour. Je pense que sur ce plan-là, le Président a fait assez de concessions à ses alliés pour que nul ne puisse remettre en cause, de bonne foi, son engagement pour le maintien de ce compagnonnage. Mais il se trouve aussi qu’en politique, il y a des signes à décrypter pour dégager des perspectives et anticiper l’avenir. Si on n’est pas dans ces dispositions, on est voué à un sort de tocard ; or Macky Sall est loin d’être un tocard politique, son parcours épique le démontre à suffisance. Et je peux vous garantir qu’il n’est disposé ni à se laisser prendre en otage, ni à se laisser prendre de court par les évènements.
Quel regard portez-vous sur ce vaste rassemblement qu’il est en train d’organiser ?
Je ne connais pas franchement les détails de cette opération. On parle beaucoup de politique le Président et moi ; mais en toute sincérité, je vous dis que cette affaire, on ne l’a jamais évoquée entre nous. Certainement parce que nous sortons de l’hivernage qui est une période d’absence de Dakar pour moi, et on n’a pas eu l’occasion de beaucoup se rencontrer et échanger durant ces derniers mois.
Je peux quand même vous dire que l’implication du maximum de Sénégalais dans l’exercice de son mandat présidentiel, sans distinction aucune, c’est l’une des idées fortes de la doctrine du Président. Il gouverne 13 millions de Sénégalais, pour 13 millions de Sénégalais et compte le faire avec 13 millions de Sénégalais ne serait-ce que sous une forme échantillonnée. Personne, aucun espace ne sera exclu.
Est-il à la peine politiquement pour ainsi ouvrir ses bras à tout le monde ?
Je vous dis que c’est un choix doctrinal. Cela n’a rien à voir avec les conjonctures politiques. Peut-on sérieusement parler de peiner politiquement pour un Président qui boucle tout juste un an et demi d’exercice sur un mandat de 5 ans ? Je pense que c’est une perception qui ne résiste pas à la critique.
Ne risque-t-on pas de revivre le syndrome de la Cap 21, une coalition hétéroclite qui servait plus à jouer aux épouvantails ?
La Cap 21 a existé dans un contexte précis, et était animée par des personnes déterminées, pour soutenir un leader nommé Abdoulaye Wade. Aujourd’hui, le leader se nomme Macky Sall, disposant d’une histoire et d’une vision politique très différentes de celles de son prédécesseur ; et les organisations et personnalités politiques qui se mobilisent autour de lui ont également leurs spécificités au même titre que le contexte. C’est pourquoi il ne me semble pas pertinent d’envisager un retour à la mode Cap 21. Ce serait envisager l’histoire à reculons. Or l’histoire marche toujours vers l’avant. Ce qui amène certains à dire qu’elle ne se répète jamais, même s’il est courant d’observer des tentatives de la faire bégayer.
Pour casser la force d’Idy, Macky débauche son entourage, redonnant à la transhumance tous ses pouvoirs. Est-ce vertueux de pérenniser ces pratiques longtemps dénoncées ?
Si vous me dites : Macky Sall s’adonne aujourd’hui à ces pratiques qu’il a toujours dénoncées tant qu’il était de l’autre côté des affaires, je vous répondrai : donc, il y a problème. Mais votre question est plutôt subtile en ce sens qu’elle ne précise pas qui dénonçait. On ne peut pas évaluer le rapport de Macky Sall à la vertu sur la base des convictions des autres. Si vous voulez accuser Macky Sall de s’être renié sur cette question, évoquez-moi d’abord des prises de positions antérieures où il aurait dénoncé la transhumance politique. Je ne prétends pas avoir en mémoire tous ses discours politiques, mais je crois que sur cette question précise, son histoire politique ne lui a même pas donné l’opportunité de développer des discours contradictoires.
Où est la rupture, sur ce point, par rapport à ce qui se faisait ?
La rupture n’est pas une réalité parcellaire qu’il faille appréhender au détail. Il faut en avoir une vision globale avec une approche privilégiant des fondamentaux. Pour un pays qui se veut Etat de droit, démocratique et républicain, où les services de sécurité s’illustraient dans les bavures mortelles sans jamais être inquiétées, où les citoyens étaient un peu plus assujettis tous les jours et par différents procédés, où le bien public était devenu pernicieusement patrimonial, où le culte d’un homme avait supplanté le culte de la République, quand je vois depuis un an et demi, le nombre d’agents de la sécurité publique jugés et condamnés, ou bien poursuivis en justice pour des bavures perpétrées contre des gens ordinaires, quand je vois la rigueur avec laquelle les ressources publiques sont désormais gérées, la détermination avec laquelle on s’attèle à revaloriser la citoyenneté, à restaurer les valeurs
et les symboles de la République, moi je me dis que la rupture est bien amorcée. Je vais vous raconter une anecdote : il y a 2 semaines, c’était le samedi 09 novembre si je ne me trompe, j’étais avec le Président et nous sommes sortis du Palais vers midi pour une visite privée à des proches. On est partis avec juste une escorte légère et discrète. Sur la Place Washington, le chauffeur du Président, soucieux de ne pas se laisser distancer par le véhicule d’escorte qui avait déjà contourné le rond point, a voulu disputer le passage à un chauffeur de taxi qui, aux termes du Code de la route, était prioritaire. Le Président l’a aussitôt rappelé à l’ordre en ces termes : vous n’avez pas la priorité et vous n’êtes pas en cortège. Je vous ai toujours dit que lorsque nous sortons sans cortège, nous avons les mêmes droits que tous les autres usagers de la route. Nous devons nous conformer scrupuleusement au code. On
était quatre dans le véhicule. Le Président et moi étions derrière, et devant il y avait le chef de sa sécurité rapprochée, un commandant du GIGN, assis à côté du chauffeur. C’est vérifiable. Et moi, j’ai perçu cette scène comme une excellente leçon sur le devoir de soumission des hommes, quel que soit leur rang, aux valeurs de la République. Et cela, c’est le socle du système alternatif que doit instaurer la rupture. J’aurais pu vous parler aussi de la discipline avec laquelle le Président se lève toujours pour saluer le drapeau national aux heures de montée et de descente, même lorsqu’il est seul dans une pièce du Palais, à l’abri de tout regard. L’Etat de droit et la République, c’est une conviction forte chez lui, c’est la base de son action politique.
Finalement, je vous dirai que le Président assume pleinement sa part de rupture. Mais est-ce que nous autres citoyens, nous sommes disposés à le suivre dans ce sens ? C’est une question qui, à mon avis, mériterait que nous y réfléchissions un peu, sans passion, avec lucidité et froideur. Nous avons des réflexes et des comportements que nous semblons peiner à abandonner et qui ne favorisent pas l’instauration de la société de rupture que nous réclamons tous à haute voix. Le Président impulse la rupture, mais ne nous l’impose pas. S’il l’assume à son niveau, et que nous refusions de nous y engager et nous y adapter, on n’assistera jamais à l’avènement de la rupture.
Au vu des difficultés du pouvoir à trouver des solutions aux maux des Sénégalais, d'aucuns estiment que le syndrome Sarkozy guette Macky Sall. Partagez-vous ces craintes ?
Là où vous parlez de difficultés du pouvoir, moi je relativiserai. Certes, les choses ne sont pas faciles pour les gouvernants, mais cette situation, je l’appréhende sur la base de l’état réel du pays à la date du 25 mars 2012. Le Président Wade et ses partisans avaient passé leur premier septennat à justifier leurs difficultés par l’état dans lequel ils avaient trouvé le pays, selon eux, et ce, malgré le livre-bilan de Mamadou Lamine Loum qui nous présentait, dans une démarche d’une rigueur scientifique, un Sénégal aux perspectives plutôt favorables. Le Président Macky Sall, sur ce plan-là, s’est montré d’une élégance remarquable, pour n’avoir pas beaucoup insisté sur le legs qu’il a reçu. Certains de ses compagnons le lui reprochent même, estimant que s’il avait clairement informé les Sénégalais de ce qu’il a trouvé sur place, il se serait épargné certaines critiques qui indexent son gouvernement sur des affaires relevant du passif de l’ancienne équipe. Quoi qu’il en soit, c’est le Président Wade lui-même, en campagne pour le second tour de 2012, qui nous avait lancé cette alerte aux allures d’aveu : si je ne suis pas réélu, le pays ne pourra pas payer les salaires de ses fonctionnaires à la prochaine fin de mois. Les médias l’avaient relayée et tous les Sénégalais l’ont entendue. Cela veut dire quoi, dans la bouche du Président qui était en exercice à l’époque ? Simplement que le pays était en faillite et que lui seul, soit par ses ressources propres, soit par ses relations, pouvait trouver les moyens d’assurer les salaires des fonctionnaires à la prochaine fin de mois. Cela est clair. Voilà l’état dans lequel le pays a été transmis au Président Macky Sall le 03 avril 2012. J’ajoute qu’à l’époque, la presse a informé l’opinion nationale de la situation inouïe, avec l’essentiel du budget national consommé par l’équipe sortante, pour juste un trimestre d’exercice. Cette même presse nous avait informés d’une autre contrainte, structurelle celle-là, très pesante, à laquelle le nouveau Président devrait faire face. Pour un budget de 2 200 milliards, le Sénégal avait une masse salariale mensuelle de plus de 50 milliards –non les 30 milliards qu’on a toujours déclarés officiellement- et un service de la dette de plus de 50 milliards aussi par mois. Cela signifie que plus de 50% du budget national étaient consacrés à ces 2 postes. Et je le rappelle, cette situation n’a rien de conjoncturel. Elle découle des choix politiques de l’ancien Président, et affecte les finances publiques jusqu’à ce que d’autres choix politiques majeurs viennent changer les choses ; ce qui ne saurait se faire dans le cours terme.
A partir de toutes ces considérations, on peut se demander comment le Président Macky Sall a fait, pour empêcher la réalisation de la prophétie de Wade, en assurant le paiement intégral des salaires des fonctionnaires, non pas seulement à l’échéance fatidique, mais régulièrement, depuis qu’il est en place. Mieux, il s’est même permis de faire adopter des mesures de baisse de fiscalité sur ces salaires, et a procédé à un important recrutement de fonctionnaires, le tout ne pouvant manquer, évidemment, d’avoir un effet haussier sur la masse salariale. Et les milliards engagés pour faire bénéficier à tous nos enfants d’une couverture maladie ? Et les autres milliards mobilisés et distribués sous formes d’allocations sociales aux familles les plus défavorisées de notre Nation ? La prophétie du Président Wade, pouvait-elle laisser envisager en si peu de temps un retournement de situation aussi spectaculaire ?
Avec ces contraintes citées, qui sont loin d’être exhaustives, comment est-on parvenu à faire fonctionner ce pays, sans aucun problème, depuis le départ du Président Wade ? C’est là que l’on peut trouver tout l’engagement du Président Sall à construire ce pays, au-delà des conjonctures et des conjectures.
Donc, je suis d’accord que la tâche n’est pas aisée pour les gouvernants actuels, mais la vision et l’engagement produisent déjà des résultats.
Beaucoup d'observateurs de la scène politique sont d'avis que l'argument avancé (Acte III de la décentralisation) par les autorités pour repousser les Locales ne tient pas la route...
On a reporté des élections pour moins que cela dans ce pays. Et depuis le Président Senghor jusqu’à nos jours, les élections locales en particulier, se sont rarement tenues à date échue. En matière de modification du calendrier électoral, je suis convaincu que le Président Macky Sall ne battra jamais le record du Président Wade.
Selon vous, est-ce que Mme Aminata Touré est capable de traduire en actes concrets la vision du président de la République ?
Elle présente toutes les aptitudes et toutes les qualités pour cela, et je crois qu’elle commence déjà à nous faire sentir ce qu’elle est en train de faire.
Sentez-vous l’accélération quelque part ?
Je pense que les mesures phares du programme du Président, dont on parle depuis plus d’un an, sans les voir arriver, se manifestent maintenant. Je pense aux bourses de sécurité familiale dont on annonce le démarrage des paiements la semaine prochaine, je pense à la nouvelle politique de santé qui était au centre des échanges en Conseil des ministres, il y a une à deux semaines, je pense à l’Agence pour la sécurité de proximité, qui a fini ses recrutements et a publié les listes de ses agents, je pense aux Fonsis et au Fongid, dont j’ai lu dernièrement des communiqués relatifs au recrutement de leur personnel, je pense à la fixation dès début novembre, du prix du kilogramme d’arachide au producteur, qui était publié traditionnellement en décembre et souvent même dans la 2ème quinzaine. Oui, les choses bougent, c’est clair.
Un an et six mois après son accession à la présidence de la République, de quoi Macky peut-il bien se targuer ?
Dans les développements précédents, j’ai largement évoqué les réalisations à l’actif du Président Macky Sall en un an et demi d’exercice d’un mandat de 5 ans. Aujourd’hui, il peut se targuer d’avoir engagé la restauration de l’Etat de droit républicain et démocratique, d’avoir engagé la revalorisation de la citoyenneté en instituant des politiques sociales en faveur de Sénégalais identifiés comme vulnérables ou défavorisés, d’avoir engagé le processus de sécurisation des ressources publiques face aux velléités prédatrices de gestionnaires indélicats, d’avoir engagé la réhabilitation de la vie rurale par la promotion économique et sociale des populations concernées. Je ne parle pas de la renaissance diplomatique que connaît notre pays et d’autres aspects encore de son action en un an et demi d’exercice du mandat présidentiel.
La traque des biens mal acquis ne va-t-elle pas devenir le talon d’Achille du pouvoir, vu le tassement en cours ?
La traque des biens mal acquis, c’était une exigence forte de l’opinion nationale. Les politiques l’ont donc inscrite dans leur agenda. Après les élections, cette opinion s’est impatientée. On a même soupçonné le Président d’avoir voulu évacuer le dossier pour ménager des gens avec qui il a cheminé en politique. On démarre l’opération, le scepticisme était toujours là. Il a fallu que le juge prononce des inculpations et décerne des mandats de dépôt, pour que finalement on ne puisse plus entretenir le scepticisme dans l’opinion. On change de fusil d’épaule et désormais, on tente de diaboliser et de décrédibiliser l’opération, en parlant de juridiction d’exception illégitime, de justice politique violant les principes fondamentaux du droit, de lenteurs et tout. C’est cela aussi le Sénégal. Nous sommes rarement constants, cohérents et conséquents dans nos aspirations et nos volontés.
Personnellement, ma position sur ce sujet, depuis le début, est simple. Désormais, il faut être totalement inconscient pour vouloir profiter des positions de responsabilités publiques et s’enrichir indûment. Parce que cette affaire va faire jurisprudence, et les gens qui l’ont initiée et l’appliquent aujourd’hui aux anciens gouvernants, la subiront un jour eux aussi, quand ils quitteront les affaires. Et ils quitteront bien un jour. Et ma conviction est que, après 2 ou 3 générations de dirigeants appelés à rendre compte de leur gestion, les affaires publiques seront gérées avec plus de rigueur et d’orthodoxie. Et en vérité, là est l’ambition portée par le Président Macky Sall qui ne rate aucune occasion, particulièrement en privé, pour mettre en garde ses proches et ses collaborateurs sur la nécessité de veiller à pouvoir partir le moment venu, sans crainte d’être rattrapés par un passé contentieux.
Depuis l’indépendance, la plus grande pesanteur qui contraint notre projet de développement, c’est le pompage de nos ressources par les élites gouvernantes. C’est notre problème public numéro 1. Il fallait y trouver une solution. Et là, il me semble bien qu’après 3 Présidents qui ont été tous impuissants contre ce fléau, le 4ème, le Président Macky Sall s’est révélé l’homme de la situation, le porteur de solution. Et Rien que pour cette innovation courageuse et salutaire, il ne peut plus échouer dans sa mission. Un jour, on dépassera les controverses d’intérêt, et on portera un regard moins passionné, plus impersonnel, sur cette question. C’est ma conviction.
Il y a quand même Me El hadj Amadou Sall qui révèle une offre de deal du Président Macky Sall à Karim Wade
Me Sall ne fait pas de révélation. Il s’adonne juste à des allégations, et je crois que personne ne l’a pris au sérieux. Où, quand, comment et selon quelles modalités cette offre de deal aurait-elle été faite ? Je pense que là sont des questions qu’on ne devrait pas manquer de lui poser, pour qu’il donne des détails précis.
Vous savez, j’aime bien El hadj Amadou Sall. C’est une personne très sympathique. Le Président aussi l’aime bien. C’est notre grand, comme on dit. Mais il est souvent excessif, et cela finit par créer des situations… Rappelez-vous, en 2008, lorsqu’il s’est agi d’éliminer politiquement Macky Sall, El hadj Amadou jouait le même rôle que celui qui est sien aujourd’hui. Les déclarations fracassantes et démesurées, c’était toujours lui. On avait l’impression qu’au-delà des conflits politiques, il avait un problème personnel avec Macky. Quelque temps après le départ de Macky, Me Sall s’est retrouvé dans une situation d’infortune politique. Cela l’avait sans doute marqué, au point qu’il est venu voir Macky qui occupait à l’époque une maison de location à Fann Résidence, et venait de créer l’Apr. C’était fin 2008 ou dans les premiers mois de 2009, je ne sais plus. El hadj est arrivé là-bas. Il a été accueilli. On était sortis, Macky et moi, et il a attendu. Au retour, comme nous étions informés de sa présence, moi je suis monté directement au niveau supérieur et Macky est allé vers lui. Ils se sont parlé. Je n’entre pas dans les détails, bien que je les connaisse, parce que j’en ai discuté ensuite avec Macky qui m’a aussi révélé qu’ils s’étaient rencontrés auparavant lors d’un événement chez une responsable du Pds qui était députée à l’époque. C’est là-bas qu’El hadj lui avait parlé et avait promis de venir le voir. Mais aujourd’hui encore, à chaque fois que j’entends El hadj faire ses déclarations excessives, je repense à cette séquence de l’histoire.
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