Il n’y a pas de doute : la décision du président de la République de construire un Pôle urbain à Diamniadio, aux portes de la région de Dakar, est géniale. Pensez-donc ! une ville nouvelle, et même futuriste, avec des tours, un centre international de conférences ultramoderne — qui abritera d’ailleurs en novembre prochain le sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie —, un centre hospitalier universitaire, une université publique, des dizaines d’établissements privés d’enseignement supérieur, une cité du Savoir… N’en jetons plus.
Surtout, surtout, cette ville comprendra des dizaines de milliers, plus de 100.000, logements qui favoriseront la mixité sociale dans la mesure où cette gamme d’habitations embrassera large allant de l’habitat social au grand standing en passant par les logements de catégorie intermédiaire.
A l’heure où Dakar étouffe littéralement avec presque 80 % des activités économiques concentrées sur moins de 1 % du territoire nationale !, à l’heure où la spéculation foncière fait rage dans la presqu’ile du Cap-vert où le mètre carré coûte les yeux de la tête surtout dans des zones comme le Plateau, le Point E, Fann Résidence, les Almadies…, à l’heure où des dizaines de milliers de foyers désespèrent de trouver un logement — le déficit est de 125.000 logements — et où circuler dans Dakar est cauchemardesque, il était en effet plus que judicieux de construire un nouveau Pôle urbain.
Et de ce point de vue, le président de la République a été non seulement un visionnaire mais aussi un bâtisseur puisqu’il est aussitôt passé à la réalisation de son projet. Pour cette vision et ce sens du concret, donc, il mérite donc nos applaudissements. Immédiatement après ce triomphe, cependant, nous sommes obligés de lui décerner notre carton rouge. Pourquoi ?
Parce que, tout simplement, pour la réalisation de cette ville nouvelle il est allé fourguer toutes les terres disponibles dans cette partie « rurale » de la région de Dakar qui nourrissait la capitale en légumes et fruits, ces terres, donc, il est allé les fourguer à des étrangers auxquels il a accordé des conditions léonines !
L’immobilier valant de l’or même à la périphérie de Dakar, quand on en dispose et même si on est un manchot, il n’est pas difficile de lever des fonds pour construire des cités ! Hélas, encore une fois, pour la réalisation d’une idée aussi généreuse, le Président a distribué à tour de bras des centaines d’hectares à des promoteurs immobiliers se faisant pompeusement appeler « développeurs » (mon œil !) pour qu’ils y construisent des logements de diverses catégories.
Ces promoteurs sont Marocains, surtout, mais aussi Indiens et Turcs. L’Etat du Sénégal leur a donné non seulement gratuitement des dizaines d’hectares à chacun, mais encore va prendre en charge lui-même les aménagements primaires, c’est-à-dire les Vrd (voieries et réseaux divers). Or, ces derniers interviennent pour 25 à 30 % dans le coût d’un logement.
Et comme si cela ne suffisait pas, le même Etat — la République est décidément bonne fille ! — va donner à ceux d’entre eux qui en ont besoin une lettre de confort pour qu’ils puissent lever des financements au niveau des banques. C’est-y pas trop beau tout ça ? Autrement dit, le président de la République offre à ces bienheureux « développeurs » non seulement le beurre et l’argent du beurre, mais encore la fille du fermier pour le repos des guerriers qu’ils sont ! Si avec ça ils ne réussissent pas à construire un Pole urbain, ce serait à désespérer…
Parmi ces bienheureux promoteurs immobiliers, pardon « développeurs », les plus vernis sont sans doute les Marocains du Groupe Alliances présenté comme spécialiste d’aménagement de pôles urbains. Ce groupe décidément veinard a bénéficié de 375 hectares (mais oui, mais oui !) sur lesquels il va donc construire 40.000 logements en quatre phases et sur une durée de six à huit ans.
Disposant de terrains et avec des Vrd devant être pris en charge par l’Etat, ce groupe va faire financer son programme immobilier par la banque… marocaine évidemment, Attijariwafa. En attendant de faire assurer ses chantiers par la compagnie, elle aussi marocaine, « Wafa Assurances ». Laquelle vient rejoindre sur le marché national la compagnie Saha qui vient de racheter les activités de l’assureur Colina.
Comme si cela ne suffisait pas, la compagnie marocaine Addoha est elle aussi sur les rangs tandis qu’un autre groupe du Royaume chérifien, Hollarcom, a repris dans notre pays les activités de la société Peacock. Autant dire que notre pays est en passe de devenir une colonie du Maroc ! Ou, à tout le moins, une de ses « provinces du Sud » comme on appelle au Maroc le Sahara occidental.
Les Nègres que nous sommes savons quand même construire des maisons !
Comprenons-nous bien : la coopération Sud-Sud est une excellente chose et nous trouvons qu’il faut toujours accueillir à bras ouverts les investisseurs africains, qu’ils viennent du Nord ou du Sud du Sahara. Surtout s’ils sont marocains, un pays auquel autant de choses nous lient. Le problème est ailleurs !
Il est en ce que, nul ne saurait comprendre, encore moins accepter, que des choses pour lesquelles le Sénégal a une expertise avérée au point que de nombreux pays du continent viennent s’en inspirer et voudraient en bénéficier chez eux, que malgré cette expertise, donc, qu’on aille chercher ailleurs des étrangers, qu’on leur fasse toutes sortes de facilités pour les réaliser chez nous tandis que les nationaux sont écartés ! Là est le problème et non pas ailleurs.
Car, que l’on sache, il ne s’agit pas de construire des centrales nucléaires, de concevoir et monter des engins spatiaux, de fabriquer des nanotechnologies, des TGV et autres matières pour lesquelles les Nègres émotifs que nous sommes n’avons aucune expertise mais, plus simplement, de construire des logements.
Et ça, Dieu merci, nous savons quand même le faire ! Nos sociétés nationales comme la Sicap et la Sn Hlm ont une expérience avérée en la matière. Et des réalisations palpables. Quelle est la société qui, plus que la Sicap, a construit des logements en Afrique de l’Ouest ? Il n’y en a tout simplement pas ! De 1951 à maintenant, cette société a construit l’équivalent d’une ville à Dakar.
Comme l’a rappelé vendredi dernier le secrétaire général du syndicat des travailleurs de cette société, M. Abdoul Aziz Wane, « la Sicap SA a fait de la mixité depuis sa création en 1951 : de la chambre au centre commercial en passant par les studios, les terrains viabilisés, les villas économiques, les villas moyen ou grand standing (comme la résidence privée du Président à Fenêtre Mermoz), les immeubles du Point E (où se trouvent les bureaux de la CREI, du GIABA etc.), la prisée cité Keur Gorgui avec ses immeubles abritant des ministères, le premier centre commercial moderne de Dakar avec escalator » sur l’avenue Jean Jaurès etc.
Le jeune leader syndical avait aussi précisé que la Sicap, c’est également Fann Hock, Amitié 1, 2, 3, Liberté 1, 2, 3, 4, 5 et 6, mais aussi Baobabs, Mermoz, Karack, Darabis, Rue 10, Bourguiba, Dieuppeul de 1 à 4, Sacré-Cœur 1 à 3 mais aussi Sacré-Cœur 3 VDN, Pyrotechnie. A cela il convient d’ajouter Mbao Villeneuve, Sicap Touba, Sicap Point E, Sicap Plateau.
En tout, de l’indépendance à nos jours, cette société à participation publique majoritaire a construit 20.00 unités-logements, c’est-à-dire plus exactement 16.000 logements, le reste en terrains viabilisés. Elle a accumulé une expérience inestimable en matière de construction de tous types de logements. Peut-on donc construire une ville nouvelle au Sénégal sans l’y associer ? En quoi les groupes marocains Alliances ou Addoha sont-ils plus performants qu’elle ?
Et en quoi les privés nationaux auxquels on a donné des terrains sont-ils plus méritants que la Sicap et la Sn Hlm ? Si ces deux sociétés ont été freinées dans leur expansion depuis des années, c’est tout simplement parce qu’elle ne disposent plus de terrains où construire. Plus exactement, depuis 2000, pas un seul lopin de terre n’a été octroyé à la Sicap par l’Etat.
Elle est donc obligée d’acheter des terrains au prix du marché, c’est-à-dire très cher, et de lever des fonds au prix du marché là aussi, c’est-à-dire à des taux d’intérêt exorbitants. Sans compter qu’elle est tenue de payer les travaux des sociétés concessionnaires (Sones-Sde, Senelec, Onas…) Dans ces conditions, évidemment, difficile de lui demander de réaliser des logements à des coûts sociaux.
Pourquoi donc ne pas lui faire bénéficier des mêmes faveurs foncières que les sociétés marocaines chargées de réaliser le pole urbain de Diamaniadio ? Nous sommes sûrs que la Sicap ferait mieux qu’elles ! Ne parlons pas de la Sn Hlm qui, elle aussi, a réalisé nos Hlm de 1 à 6, qui sont une véritable ville dans la ville, sans compter les Hlm Gueule Tapée, Fass, Angle-Mousse, Las Palmas à Guédiawaye et les programmes dans les capitales régionales.
A vrai dire, on a du mal à comprendre cette logique singulière de l’Etat consistant à offrir des hectares de terrains à des groupes étrangers pour faire ce que ses propres sociétés auraient pu faire mieux et à de meilleures conditions si elles avaient été soutenues.
Oh certes, à côté de ces groupes étrangers, on a donné quelques superficies à des privés nationaux choisis sur on ne sait quelles bases et dont les références en matière de promotion immobilière sont plus que douteuses. A ceux-là aussi on a donné généreusement du foncier tandis que la majorité des promoteurs privés était laissée en rade.
Ceux-là ayant menacé de faire des sorties publiques pour dénoncer cette aliénation du patrimoine foncier national au profit de groupes étrangers, la Primature a enjoint le Délégué général aux Pôles urbains de les rencontrer et de leur octroyer quelques miettes pour les calmer. Surtout qu’ils s’étaient attachés les services de l’avocat Me Massokhna Kane et envisageaient d’attaquer ces attributions faites par l’Etat devant les tribunaux.
En fait, seules les sociétés nationales — dont les réalisations plaident pourtant éloquemment en leur faveur ! — sont laissées en rade. Entre intérêts français et marocains, les Sénégalais sont priés d’aller se coucher…
Le Président… et la Sicap et la Sn Hlm
Mais non, mais non le président de la République n’a pas oublié les sociétés nationales de promotion immobilière. Simplement, il les a zappées dans l’attribution des terres du futur Pôle urbain de Diamniadio. Il faut dire que l’attrait de l’étranger est si fort et les Marocains… si convaincants !
A preuve, c’est dès le 26 juillet 2013, au cours d’une visite officielle au royaume chérifien, que le Président a signé un contrat avec le Groupe Alliances pour la réalisation d’un pôle urbain de 375 hectares pour un investissement de quatre milliards de dirhams (240 milliards cfa environ).
Quatre mois plus tard, le même président de la République reprenait l’avion pour le Maroc. Pour un séjour privé cette fois-ci… au cours duquel il a quand même eu le temps de visiter un chantier du groupe Alliances à Marrakech en compagnie du président de ce groupe, le sieur Mohamed Alami Lazrak (et tant pis si, depuis son arrivée au pouvoir il n’a pas eu le temps de rendre visite à la Sicap et à la Sn Hlm !).
A la suite de quoi, il a été décidé de lancer les travaux du pôle urbain de Diamniadio en mai 2014 et de les accélérer immédiatement après. Avec tous les avantages consentis au groupe marocain, c’est bien le diable si ces travaux trainaient !
Nous disions que le Président n’a pas oublié la Sicap et la Sn Hlm. A preuve : le 15 janvier dernier, en Conseil des ministres, il avait demandé au Gouvernement de « conclure, avant fin février 2014, des contrats d’objectifs et de moyens avec la Sicap SA et la Sn Hlm. » Dans la foulée, le même Président avait demandé au même gouvernement de préparer, la tenue, « courant mars 2014 », d’un Conseil présidentiel sur le financement du logement.
Last but not least, il avait donné des instructions fermes pour la préparation, « avant fin mars 2014 » d’un projet de loi d’orientation pour l’habitat social. Autant en a emporté le vent…
Le Président n’a pas oublié la Sicap et la Sn Hlm, vous dit-on ! Simplement, il les a zappées lors du partage du gâteau foncier de Diamniadio… Chez nous, l’étranger est roi !
Mamadou Oumar Ndiaye
Le Témoin
Surtout, surtout, cette ville comprendra des dizaines de milliers, plus de 100.000, logements qui favoriseront la mixité sociale dans la mesure où cette gamme d’habitations embrassera large allant de l’habitat social au grand standing en passant par les logements de catégorie intermédiaire.
A l’heure où Dakar étouffe littéralement avec presque 80 % des activités économiques concentrées sur moins de 1 % du territoire nationale !, à l’heure où la spéculation foncière fait rage dans la presqu’ile du Cap-vert où le mètre carré coûte les yeux de la tête surtout dans des zones comme le Plateau, le Point E, Fann Résidence, les Almadies…, à l’heure où des dizaines de milliers de foyers désespèrent de trouver un logement — le déficit est de 125.000 logements — et où circuler dans Dakar est cauchemardesque, il était en effet plus que judicieux de construire un nouveau Pôle urbain.
Et de ce point de vue, le président de la République a été non seulement un visionnaire mais aussi un bâtisseur puisqu’il est aussitôt passé à la réalisation de son projet. Pour cette vision et ce sens du concret, donc, il mérite donc nos applaudissements. Immédiatement après ce triomphe, cependant, nous sommes obligés de lui décerner notre carton rouge. Pourquoi ?
Parce que, tout simplement, pour la réalisation de cette ville nouvelle il est allé fourguer toutes les terres disponibles dans cette partie « rurale » de la région de Dakar qui nourrissait la capitale en légumes et fruits, ces terres, donc, il est allé les fourguer à des étrangers auxquels il a accordé des conditions léonines !
L’immobilier valant de l’or même à la périphérie de Dakar, quand on en dispose et même si on est un manchot, il n’est pas difficile de lever des fonds pour construire des cités ! Hélas, encore une fois, pour la réalisation d’une idée aussi généreuse, le Président a distribué à tour de bras des centaines d’hectares à des promoteurs immobiliers se faisant pompeusement appeler « développeurs » (mon œil !) pour qu’ils y construisent des logements de diverses catégories.
Ces promoteurs sont Marocains, surtout, mais aussi Indiens et Turcs. L’Etat du Sénégal leur a donné non seulement gratuitement des dizaines d’hectares à chacun, mais encore va prendre en charge lui-même les aménagements primaires, c’est-à-dire les Vrd (voieries et réseaux divers). Or, ces derniers interviennent pour 25 à 30 % dans le coût d’un logement.
Et comme si cela ne suffisait pas, le même Etat — la République est décidément bonne fille ! — va donner à ceux d’entre eux qui en ont besoin une lettre de confort pour qu’ils puissent lever des financements au niveau des banques. C’est-y pas trop beau tout ça ? Autrement dit, le président de la République offre à ces bienheureux « développeurs » non seulement le beurre et l’argent du beurre, mais encore la fille du fermier pour le repos des guerriers qu’ils sont ! Si avec ça ils ne réussissent pas à construire un Pole urbain, ce serait à désespérer…
Parmi ces bienheureux promoteurs immobiliers, pardon « développeurs », les plus vernis sont sans doute les Marocains du Groupe Alliances présenté comme spécialiste d’aménagement de pôles urbains. Ce groupe décidément veinard a bénéficié de 375 hectares (mais oui, mais oui !) sur lesquels il va donc construire 40.000 logements en quatre phases et sur une durée de six à huit ans.
Disposant de terrains et avec des Vrd devant être pris en charge par l’Etat, ce groupe va faire financer son programme immobilier par la banque… marocaine évidemment, Attijariwafa. En attendant de faire assurer ses chantiers par la compagnie, elle aussi marocaine, « Wafa Assurances ». Laquelle vient rejoindre sur le marché national la compagnie Saha qui vient de racheter les activités de l’assureur Colina.
Comme si cela ne suffisait pas, la compagnie marocaine Addoha est elle aussi sur les rangs tandis qu’un autre groupe du Royaume chérifien, Hollarcom, a repris dans notre pays les activités de la société Peacock. Autant dire que notre pays est en passe de devenir une colonie du Maroc ! Ou, à tout le moins, une de ses « provinces du Sud » comme on appelle au Maroc le Sahara occidental.
Les Nègres que nous sommes savons quand même construire des maisons !
Comprenons-nous bien : la coopération Sud-Sud est une excellente chose et nous trouvons qu’il faut toujours accueillir à bras ouverts les investisseurs africains, qu’ils viennent du Nord ou du Sud du Sahara. Surtout s’ils sont marocains, un pays auquel autant de choses nous lient. Le problème est ailleurs !
Il est en ce que, nul ne saurait comprendre, encore moins accepter, que des choses pour lesquelles le Sénégal a une expertise avérée au point que de nombreux pays du continent viennent s’en inspirer et voudraient en bénéficier chez eux, que malgré cette expertise, donc, qu’on aille chercher ailleurs des étrangers, qu’on leur fasse toutes sortes de facilités pour les réaliser chez nous tandis que les nationaux sont écartés ! Là est le problème et non pas ailleurs.
Car, que l’on sache, il ne s’agit pas de construire des centrales nucléaires, de concevoir et monter des engins spatiaux, de fabriquer des nanotechnologies, des TGV et autres matières pour lesquelles les Nègres émotifs que nous sommes n’avons aucune expertise mais, plus simplement, de construire des logements.
Et ça, Dieu merci, nous savons quand même le faire ! Nos sociétés nationales comme la Sicap et la Sn Hlm ont une expérience avérée en la matière. Et des réalisations palpables. Quelle est la société qui, plus que la Sicap, a construit des logements en Afrique de l’Ouest ? Il n’y en a tout simplement pas ! De 1951 à maintenant, cette société a construit l’équivalent d’une ville à Dakar.
Comme l’a rappelé vendredi dernier le secrétaire général du syndicat des travailleurs de cette société, M. Abdoul Aziz Wane, « la Sicap SA a fait de la mixité depuis sa création en 1951 : de la chambre au centre commercial en passant par les studios, les terrains viabilisés, les villas économiques, les villas moyen ou grand standing (comme la résidence privée du Président à Fenêtre Mermoz), les immeubles du Point E (où se trouvent les bureaux de la CREI, du GIABA etc.), la prisée cité Keur Gorgui avec ses immeubles abritant des ministères, le premier centre commercial moderne de Dakar avec escalator » sur l’avenue Jean Jaurès etc.
Le jeune leader syndical avait aussi précisé que la Sicap, c’est également Fann Hock, Amitié 1, 2, 3, Liberté 1, 2, 3, 4, 5 et 6, mais aussi Baobabs, Mermoz, Karack, Darabis, Rue 10, Bourguiba, Dieuppeul de 1 à 4, Sacré-Cœur 1 à 3 mais aussi Sacré-Cœur 3 VDN, Pyrotechnie. A cela il convient d’ajouter Mbao Villeneuve, Sicap Touba, Sicap Point E, Sicap Plateau.
En tout, de l’indépendance à nos jours, cette société à participation publique majoritaire a construit 20.00 unités-logements, c’est-à-dire plus exactement 16.000 logements, le reste en terrains viabilisés. Elle a accumulé une expérience inestimable en matière de construction de tous types de logements. Peut-on donc construire une ville nouvelle au Sénégal sans l’y associer ? En quoi les groupes marocains Alliances ou Addoha sont-ils plus performants qu’elle ?
Et en quoi les privés nationaux auxquels on a donné des terrains sont-ils plus méritants que la Sicap et la Sn Hlm ? Si ces deux sociétés ont été freinées dans leur expansion depuis des années, c’est tout simplement parce qu’elle ne disposent plus de terrains où construire. Plus exactement, depuis 2000, pas un seul lopin de terre n’a été octroyé à la Sicap par l’Etat.
Elle est donc obligée d’acheter des terrains au prix du marché, c’est-à-dire très cher, et de lever des fonds au prix du marché là aussi, c’est-à-dire à des taux d’intérêt exorbitants. Sans compter qu’elle est tenue de payer les travaux des sociétés concessionnaires (Sones-Sde, Senelec, Onas…) Dans ces conditions, évidemment, difficile de lui demander de réaliser des logements à des coûts sociaux.
Pourquoi donc ne pas lui faire bénéficier des mêmes faveurs foncières que les sociétés marocaines chargées de réaliser le pole urbain de Diamaniadio ? Nous sommes sûrs que la Sicap ferait mieux qu’elles ! Ne parlons pas de la Sn Hlm qui, elle aussi, a réalisé nos Hlm de 1 à 6, qui sont une véritable ville dans la ville, sans compter les Hlm Gueule Tapée, Fass, Angle-Mousse, Las Palmas à Guédiawaye et les programmes dans les capitales régionales.
A vrai dire, on a du mal à comprendre cette logique singulière de l’Etat consistant à offrir des hectares de terrains à des groupes étrangers pour faire ce que ses propres sociétés auraient pu faire mieux et à de meilleures conditions si elles avaient été soutenues.
Oh certes, à côté de ces groupes étrangers, on a donné quelques superficies à des privés nationaux choisis sur on ne sait quelles bases et dont les références en matière de promotion immobilière sont plus que douteuses. A ceux-là aussi on a donné généreusement du foncier tandis que la majorité des promoteurs privés était laissée en rade.
Ceux-là ayant menacé de faire des sorties publiques pour dénoncer cette aliénation du patrimoine foncier national au profit de groupes étrangers, la Primature a enjoint le Délégué général aux Pôles urbains de les rencontrer et de leur octroyer quelques miettes pour les calmer. Surtout qu’ils s’étaient attachés les services de l’avocat Me Massokhna Kane et envisageaient d’attaquer ces attributions faites par l’Etat devant les tribunaux.
En fait, seules les sociétés nationales — dont les réalisations plaident pourtant éloquemment en leur faveur ! — sont laissées en rade. Entre intérêts français et marocains, les Sénégalais sont priés d’aller se coucher…
Le Président… et la Sicap et la Sn Hlm
Mais non, mais non le président de la République n’a pas oublié les sociétés nationales de promotion immobilière. Simplement, il les a zappées dans l’attribution des terres du futur Pôle urbain de Diamniadio. Il faut dire que l’attrait de l’étranger est si fort et les Marocains… si convaincants !
A preuve, c’est dès le 26 juillet 2013, au cours d’une visite officielle au royaume chérifien, que le Président a signé un contrat avec le Groupe Alliances pour la réalisation d’un pôle urbain de 375 hectares pour un investissement de quatre milliards de dirhams (240 milliards cfa environ).
Quatre mois plus tard, le même président de la République reprenait l’avion pour le Maroc. Pour un séjour privé cette fois-ci… au cours duquel il a quand même eu le temps de visiter un chantier du groupe Alliances à Marrakech en compagnie du président de ce groupe, le sieur Mohamed Alami Lazrak (et tant pis si, depuis son arrivée au pouvoir il n’a pas eu le temps de rendre visite à la Sicap et à la Sn Hlm !).
A la suite de quoi, il a été décidé de lancer les travaux du pôle urbain de Diamniadio en mai 2014 et de les accélérer immédiatement après. Avec tous les avantages consentis au groupe marocain, c’est bien le diable si ces travaux trainaient !
Nous disions que le Président n’a pas oublié la Sicap et la Sn Hlm. A preuve : le 15 janvier dernier, en Conseil des ministres, il avait demandé au Gouvernement de « conclure, avant fin février 2014, des contrats d’objectifs et de moyens avec la Sicap SA et la Sn Hlm. » Dans la foulée, le même Président avait demandé au même gouvernement de préparer, la tenue, « courant mars 2014 », d’un Conseil présidentiel sur le financement du logement.
Last but not least, il avait donné des instructions fermes pour la préparation, « avant fin mars 2014 » d’un projet de loi d’orientation pour l’habitat social. Autant en a emporté le vent…
Le Président n’a pas oublié la Sicap et la Sn Hlm, vous dit-on ! Simplement, il les a zappées lors du partage du gâteau foncier de Diamniadio… Chez nous, l’étranger est roi !
Mamadou Oumar Ndiaye
Le Témoin