Que pensez-vous de ce drame vécu par la Casamance le samedi 6 janvier 2018, sans doute le pire qu’a connu la région en 35 ans de conflit armé ?
Ce drame est peut-être le pire par le nombre de victimes civiles, des personnes tuées et blessées, mais il n’est pas le pire en termes d’atrocité. Sans imputer le massacre de la forêt des Bayottes au MFDC, le massacre nous rappelle bien l’attaque de Djibanar dans la nuit du 7 au 8 septembre 1997, lorsqu’une bande armée a fait irruption au foyer des jeunes du village où se tenait une fête, pour mitrailler les jeunes, tuant 9 personnes et blessant 15 autres.
Ce massacre nous rappelle aussi le meurtre de 10 jeunes gens dans la forêt de Diagnon, le 21 novembre 2011. Il rappelle avec acuité ces 16 jeunes gens à qui on a coupé les oreilles dans le Niaguiss en 2008, pour leur faire payer leur audace de défier l’interdiction d’aller cueillir les noix de cajou et les fruits de brousse décrétée par des groupes armés. Il y a eu un grand nombre d’autres meurtres sur une ou des personnes civiles, depuis le début des années 90. Tous ces crimes sont restés impunis et cette impunité est un mauvais signal envoyé aux meurtriers : vous pouvez tuer, il ne vous arrivera rien du tout.
L’Etat a-t-il les moyens de rechercher, d’arrêter et de punir des meurtriers retranchés dans la forêt ?
L’Etat a les moyens d’enquêter, il a surtout à sa disposition des services de renseignement, pour identifier les meurtriers et leurs commanditaires et les rechercher activement. Des mandats d’arrêt internationaux doivent être lancés contre eux, car beaucoup d’entre eux sont présents sur le territoire d’Etats voisins, ou d’Etats en Europe et en Amérique du nord. Au lieu de cela, l’Etat a, sous Abdoulaye Wade, voté des lois d’amnistie pour leur garantir l’impunité. Ces lois d’amnistie n’ont pas apporté la paix et ont certainement été perçues par des individus et des groupes armés, comme une prime aux meurtres et autres violations graves des droits humains.
Est-ce que ce massacre ne risque pas de remettre en cause les progrès notés ces dernières années, dans la recherche de la paix en Casamance ?
L’Etat du Sénégal doit poursuivre ses efforts de paix, sans relâche, avec tous les individus ou groupes qui veulent bien dialoguer car le pays, les casamançais en particulier, aspirent à la paix. Ceux qui veulent continuer la guerre, vont rater le train de l’histoire. Ils seront isolés, stigmatisés par la nation, la communauté internationale et les casamançais eux-mêmes.
Pour ce qui est des ressources naturelles, il appartient à l’Etat d’évaluer l’opportunité de leur exploitation au vu du contexte actuel. Si cette exploitation doit raviver le conflit, il est souhaitable de la différer. Cela dit, la Casamance doit se développer ; et elle ne peut se développer sans la mise en valeur de ses ressources naturelles, minérales, forestières, halieutiques, dans le respect de l’environnement et des intérêts des communautés. Aucun groupe ne devrait se substituer à l’Etat pour protéger les ressources naturelles de la Casamance. L’Etat doit se donner les moyens de protéger les ressources sur toute l’étendue du territoire national.
Quel est votre message à l’endroit de l’Etat et du MFDC ?
J’exhorte l’Etat et le MFDC à redoubler d’efforts sur le chemin de la paix. Le conflit casamançais est, avec le conflit du Sahara occidental, les deux plus vieux conflits en Afrique. Le pays et la région en ont payé un lourd tribut. Dans tout processus de paix, il y a ceux qui veulent avancer vite et ceux qui traînent les pays. Il peut même y avoir ceux qui ne veulent pas du tout la paix.
Mais si la volonté de ceux qui veulent la paix, est forte, tout le monde finira par monter à bord du train. La société civile doit se donner les moyens d’accompagner le processus, comme c’est le cas partout où il y a un conflit. Elle doit, avec les communautés impactées, prendre en charge la question des ressources naturelles, pour éviter qu’elle ne soit politisée ou qu’elle vienne raviver le conflit.
L’Observateur
Ce drame est peut-être le pire par le nombre de victimes civiles, des personnes tuées et blessées, mais il n’est pas le pire en termes d’atrocité. Sans imputer le massacre de la forêt des Bayottes au MFDC, le massacre nous rappelle bien l’attaque de Djibanar dans la nuit du 7 au 8 septembre 1997, lorsqu’une bande armée a fait irruption au foyer des jeunes du village où se tenait une fête, pour mitrailler les jeunes, tuant 9 personnes et blessant 15 autres.
Ce massacre nous rappelle aussi le meurtre de 10 jeunes gens dans la forêt de Diagnon, le 21 novembre 2011. Il rappelle avec acuité ces 16 jeunes gens à qui on a coupé les oreilles dans le Niaguiss en 2008, pour leur faire payer leur audace de défier l’interdiction d’aller cueillir les noix de cajou et les fruits de brousse décrétée par des groupes armés. Il y a eu un grand nombre d’autres meurtres sur une ou des personnes civiles, depuis le début des années 90. Tous ces crimes sont restés impunis et cette impunité est un mauvais signal envoyé aux meurtriers : vous pouvez tuer, il ne vous arrivera rien du tout.
L’Etat a-t-il les moyens de rechercher, d’arrêter et de punir des meurtriers retranchés dans la forêt ?
L’Etat a les moyens d’enquêter, il a surtout à sa disposition des services de renseignement, pour identifier les meurtriers et leurs commanditaires et les rechercher activement. Des mandats d’arrêt internationaux doivent être lancés contre eux, car beaucoup d’entre eux sont présents sur le territoire d’Etats voisins, ou d’Etats en Europe et en Amérique du nord. Au lieu de cela, l’Etat a, sous Abdoulaye Wade, voté des lois d’amnistie pour leur garantir l’impunité. Ces lois d’amnistie n’ont pas apporté la paix et ont certainement été perçues par des individus et des groupes armés, comme une prime aux meurtres et autres violations graves des droits humains.
Est-ce que ce massacre ne risque pas de remettre en cause les progrès notés ces dernières années, dans la recherche de la paix en Casamance ?
L’Etat du Sénégal doit poursuivre ses efforts de paix, sans relâche, avec tous les individus ou groupes qui veulent bien dialoguer car le pays, les casamançais en particulier, aspirent à la paix. Ceux qui veulent continuer la guerre, vont rater le train de l’histoire. Ils seront isolés, stigmatisés par la nation, la communauté internationale et les casamançais eux-mêmes.
Pour ce qui est des ressources naturelles, il appartient à l’Etat d’évaluer l’opportunité de leur exploitation au vu du contexte actuel. Si cette exploitation doit raviver le conflit, il est souhaitable de la différer. Cela dit, la Casamance doit se développer ; et elle ne peut se développer sans la mise en valeur de ses ressources naturelles, minérales, forestières, halieutiques, dans le respect de l’environnement et des intérêts des communautés. Aucun groupe ne devrait se substituer à l’Etat pour protéger les ressources naturelles de la Casamance. L’Etat doit se donner les moyens de protéger les ressources sur toute l’étendue du territoire national.
Quel est votre message à l’endroit de l’Etat et du MFDC ?
J’exhorte l’Etat et le MFDC à redoubler d’efforts sur le chemin de la paix. Le conflit casamançais est, avec le conflit du Sahara occidental, les deux plus vieux conflits en Afrique. Le pays et la région en ont payé un lourd tribut. Dans tout processus de paix, il y a ceux qui veulent avancer vite et ceux qui traînent les pays. Il peut même y avoir ceux qui ne veulent pas du tout la paix.
Mais si la volonté de ceux qui veulent la paix, est forte, tout le monde finira par monter à bord du train. La société civile doit se donner les moyens d’accompagner le processus, comme c’est le cas partout où il y a un conflit. Elle doit, avec les communautés impactées, prendre en charge la question des ressources naturelles, pour éviter qu’elle ne soit politisée ou qu’elle vienne raviver le conflit.
L’Observateur