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Au Mali, les djihadistes chassent les rebelles touaregs

Rédigé par leral.net le Vendredi 29 Juin 2012 à 15:13 | | 0 commentaire(s)|

La perte de Gao, «capitale» du Nord, montre l'usure du groupe laïc.


Au Mali, les djihadistes chassent les rebelles touaregs
Le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) a perdu mercredi Gao. Les derniers hommes de la rébellion touareg ont fui leur capitale au milieu de la nuit, pourchassés par leurs rivaux du Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), un groupe salafiste. «Les gens du Mujao sont seuls en ville», affirmait, jeudi matin au téléphone, Adama, un habitant. Une victoire qui scelle un peu plus la prééminence des islamistes radicaux au sein des rébellions qui contrôlent le nord du Mali.

Toute la journée de mercredi d'intenses combats ont opposé les deux mouvements au travers de la ville. En fin d'après-midi, le Mujao avait fini par se rendre maître du gouvernorat le siège du «gouvernement» du MNLA. Ces affrontements auraient fait entre 20 et 36 morts. Le secrétaire général du MNLA Bilal ag Chérif, blessé, a été évacué par hélicoptère vers Ouagadougou. Pour le MNLA, la perte de sa capitale Gao sonne comme un symbole de son affaiblissement. Présenté comme la composante forte de la rébellion du Nord Mali lors des débuts de l'insurrection en janvier dernier le MNLA, laïc et indépendantiste, a vite manqué de stratégie. Ses volontés d'indépendance lui ont aliéné la communauté internationale et son manque de finances l'a rendu incapable de s'opposer à Ansar Dine, une autre rébellion touareg et au Mujao. Depuis avril, le MNLA a perdu ses bastions dans le Nord. D'abord Tombouctou à peine conquise, puis Kidal il y a deux mois et enfin Gao. «Le mouvement est désormais confiné dans le désert à l'ouest du Mali», commente une source à Bamako.

Résolution à l'ONU
Ansar Dine, dirigé par Iyad ag Ghaly, un célèbre rebelle touareg proche d'al-Qaida au Maghreb islamiste (Aqmi), prône un islam rigoriste. Le Mujao, allié d'Ansar Dine, et véritable filiale d'Aqmi, n'a cessé de grandir. Commandé par un Mauritanien, Hamada Ould Mohammed Kheirou, alias Abou Ghoum-Ghoum, ce groupe, composé pour l'essentiel d'Arabes à sa fondation en 2009 a massivement recruté dans les rangs des ethnies locales de Gao: les Songhaïs et les Peuls.

À Gao, nul ne semble regretter le départ du MNLA. «Ils rackettaient les gens et s'en prenaient aux femmes. Ils étaient très brutaux. Les gens du Mujao eux se tiennent bien», affirme un commerçant. Tondi, un de ses voisins redoute cependant une application stricte de la charia. Ces dernières semaines, Ansar Dine avait ainsi interdit aux femmes de sortir seules ou aux hommes de regarder la télévision. «Pour l'instant ces mesures sont levées. Ils ont laissé les jeunes brandir le drapeau malien et chanter l'hymne. Mais je ne me fais pas d'illusion. C'est juste pour nous amadouer. Ce que l'on attend maintenant c'est que l'armée malienne vienne nous délivrer», dit Tondi. À Bamako, le gouvernement suit de près la situation au Nord.

Dans les prochains jours, le Conseil de sécurité de l'ONU doit examiner, à la demande de l'Union africaine, une résolution sur l'envoi de troupes au Mali. Une solution que beaucoup de pays occidentaux jugent prématurée. Les événements de Gao pourraient les inciter à accélérer le calendrier.


Par Tanguy Berthemet