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Binetou Sylla, fille du grand producteur sénégalais Ibrahima Sylla : "Lorsque j’ai repris Syllart Records, j’avais 24 ans"

Rédigé par leral.net le Jeudi 13 Avril 2017 à 09:53 | | 0 commentaire(s)|

Binetou Sylla est depuis bientôt 3 ans le nouveau visage de Syllart Records, anciennement Syllart Production. Label africain fondé par son défunt père, le grand producteur sénégalais Ibrahima Sylla.
Binetou Sylla est depuis bientôt 3 ans le nouveau visage de Syllart Records, anciennement Syllart Production. Label africain fondé par son défunt père, le grand producteur sénégalais Ibrahima Sylla.

Corps longiligne, regard perçant, Binetou Sylla âgée de 28 ans, est depuis bientôt 3 ans, le nouveau visage de Syllart Records, anciennement Syllart Production. Label africain fondé par son défunt père, le grand producteur sénégalais Ibrahima Sylla. Âgée de 28 ans, cette passionnée d’histoire s’est vu confié la lourde tâche de perpétuer l’œuvre de celui qui aura marqué de son empreinte le show-business et la musique africaine depuis trente ans. Binetou Sylla, livre à NegroNews sa vision du panafricanisme et de la place qu’elle entend lui accorder dans la nouvelle stratégie de Syllart Records.

NegroNews : Historienne de formation, comment la transition vers le monde musical d’une part et du business d’autre part, s’est-elle faite?

Binetou Sylla : En effet, lorsque j’ai repris Syllart Records, j’avais 24 ans et venais à peine de terminer mon master et je devais m’inscrire pour débuter un doctorat histoire de l’Afrique à l’Université Paris 1. J’ai du tout abandonner pour me focaliser sur le label. La transition s’est faite assez abruptement, car il fallait faire vite: mon père ne pouvait plus répondre à ses responsabilités en tant que patron. Heureusement que pendant 2/3 années avant j’ai assisté mon père de façon sporadique mais j’étais très attentive au travail de mon père, mais c’est vrai que c’est plus une question de destin imposé que choisi à la base. Mais aujourd’hui, j’ai embrassé la cause avec passion.

NN : Les musiciens que Syllart Records a produit par le passé, avaient des messages très engagés, trois ans après pensez-vous avoir sauvegardé cet héritage?

BS : Les artistes qui ont été produits par la maison Syllart Records n’avaient pas tous des messages très engagés. Cela dépendait vraiment du contexte historique. Il faut se dire que le label a traversé 3 décennies. La fin des années 70 n’étaient pas les années 80 ni les années 2000, d'ailleurs. Certains n’étaient pas du tout engagés. Plus de 1300 albums ont été produits par Ibrahima Sylla. Il y a toute la diversité des musiques du Continent, tous les pays d’Afrique Francophone et aussi lusophone avec le Cap-Vert et l’Angola.
Ce qui était engagé, était justement le fait de montrer et valoriser toute cette diversité. Il n’y a pas une musique africaine, mais des musiques africaines. Ce qui était engag,  c’était de continuer à produire des artistes tout en préservant une authenticité et en étant comtemporain dans sa démarche artistique et musicale et en phase à son époque. Mon père a dit un jour dans une interview:« produire des artistes de toute l’Afrique et réunir tous ces artistes différents, c’est ma contribution à l’édification du panafricanisme ».

NN : Il y a un an vous avez déclaré lors d’une interview, que vous souhaitiez vous installer en Afrique, qu’en est-il aujourd’hui?

BS : Il y a un an? (Rires). Aujourd’hui, je fais des allers-retours le plus possible, mais le siège est ici à Paris. Je souhaite toujours être le plus présent en Afrique, mais avant de s’installer définitivement là-bas, il y a plusieurs choses que je dois consolider ici.

NN : Personnellement, quelle vision avez-vous du panafricanisme ?

BS : Ma vision du panafricanisme, elle est très pragmatique et factuelle. En tant qu’enfant de la diaspora Africaine d’abord, je sais ou est ma place, je ne peux pas parler au nom des Africains ou d’une jeunesse Africaine, car je n’y vis pas et que nos problématiques ne sont pas toujours les mêmes. Mais je crois au rôle moteur et enrichissant voire déterminant de la diaspora Africaine, afro descendante sur le présent et l’avenir du continent-mère.

Mon panafricanisme il est en premier lieu le devoir d’être consciente de mon africanité, la valoriser dans tout ce que je suis, je fais. Et dans mon travail, le fait même de continuer à faire vivre le label et m’intéresser et valoriser les artistes du Continent et ceux issus de sa diaspora, c’est contribuer à mon humble échelle au panafricanisme.

En sortant mon projet Afrodias (qui veut dire afrodiaspora), j’ai justement essayé à travers mon travail, de le faire. Enfin, je finirai par ire que comme à la base, j’étais destinée à faire une carrière dans la recherche universitaire et spécialement en Historie de l’Afrique,c’était aussi pour moi d’y contribuer.

NN : En tant que fille d’un homme dont l’héritage dépasse les seules frontières de l’Afrique, pensez-vous avoir une responsabilité morale envers les jeunes du continent?

BS : Je ne me mets pas autant de pression dis donc ! Ma responsabilité, c’est de faire les choses avec rigueur et passion afin de montrer l’excellence du travail de notre communauté

NN : L’afro-Trap est le genre musical le plus prisé par les jeunes du continent et de la diaspora, en tant que productrice, quel est votre regard sur ce phénomène?

BS : Aujourd’hui cela s’appelle l’afrotrap, mais en vrai ça s’appelle l’afropop non? C’est la symbiose entre les rythmiques afros et des sonorités telles que l’electro, le rap. Tout ça a toujours existé en Afrique, les mélanges. Ecoutez du Franco et Ok Jazz, c’est hyper funk tout en étant rumba, aujourd’hui nous avons Wizkid, Kiff No beat, Davido, MHD ou d’autres, on continue à faire briller la puissance des musiques afros. Et c’est tant mieux pour le Continent. Mon regard en tant que productrice, je l’ai initié à travers mon projet Afrodias, dont le premier projet est sorti fin Juin « Génération Enjaillement », avec des artistes de la jeune génération de toute la diaspora afro et du Continent (Haïti, Guyane Fr, Ghana, Nigéria, Mali, Côte d’Ivoire, Afrique du Sud, France, Belgique et UK) pour montrer ce phénomène. C’est disponible sur les plateformes et chez tous les bons disquaires 🙂

NN : Comment le recrutement de jeunes Talents en Afrique se fait-il?

BS : J’ai heureusement la chance de pouvoir m’y rendre facilement et j’ai aussi mon réseau de managers, de collaborateurs sur place qui me remontent les informations. Certains aussi viennent directement à nous. J’en découvre aussi grâce aux réseaux sociaux, à YouTube. C’est aussi de la prospective.

NN : À quoi ressemble une journée de Binetou Sylla hors de Syllart Records?

BS : (rires) Je suis très proche de ma mère et de mes petits frères et sœurs. Et j’essaie de toujours me cultiver et apprendre de nouvelles choses. Donc, je lis beaucoup et j’écoute toujours de la musique et toutes sortes !

NegroNews