Un double attentat-suicide a de nouveau frappé dimanche l'Extrême-Nord du Cameroun, tuant au moins neuf personnes, au lendemain d'une autre attaque, particulièrement meurtrière, auTchad attribuée aux islamistes nigérians de Boko Haram, toujours actifs malgré l'offensive militaire conjointe des pays de la région.
Ces deux pays font partie de la coalition contre les insurgés qui mènent depuis plusieurs mois des attentats sanglants bien au-delà du nord-est du Niger ia, leur fief historique, pour frapper les Etats limitrophes du bassin du lac Tchad : Tchad, Cameroun et Niger.
La Haute représentante de l?UE pour les Affaires étrangères, Federica Mogherini, a condamné dimanche le triple attentat qui a fait plus de quarante morts samedi au Tchad, le qualifiant de "tentative de déstabilisation inquiétante" du pays à la pointe de la contre-insurrection.
Quelques heures à peine après les attentats sur les bords de lac Tchad, les islamistes ont frappé de nouveau non loin de là, cette fois au Cameroun.
Deux femmes kamikazes se sont fait exploser vers 06H00 (05H00 GMT) dans le village de Kangaleri, à une trentaine de kilomètres de Mora, dans la province de l'Extrême-Nord, selon une source sécuritaire et un responsable local.
La première femme a tué neuf personnes dans un petit restaurant, tandis que la seconde s'est fait exploser seule, sans faire de morts, a expliqué ce dernier. Parmi les 29 blessés, plusieurs sont actuellement dans un état "très grave", a-t-il précisé.
Il s'agit des 14e et 15e attentats-suicides dans l'Extrême-Nord du Cameroun depuis juillet. Plus de 100 personnes ont péri dans ces attentats attribués aux islamistes nigérians.
- 'Tentative de déstabilisation' -
Samedi, le triple attentat attribué à Boko Haram avait tué 41 personnes et en avait blessé 48 autres au Tchad voisin, le jour du marché à Baga Sola, sur les rives du lac Tchad, selon un bilan officiel dimanche.
D'après des sources humanitaires et sécuritaires, plusieurs kamikazes ont déclenché leurs charges explosives au milieu de la foule, dans cette ville où plusieurs dizaines de milliers de Nigérians et de Tchadiens ont trouvé refuge, fuyant ces derniers mois les exactions de Boko Haram.
Après ces nouveaux attentats, l'armée nigériane a mis en garde Boko Haram et a invité ses combattants à se rendre, assurant que l'étau se resserrait autour des islamistes.
"Nous voulons leur dire que nous savons où ils se cachent. Ils devraient prendre exemple sur leurs collègues qui se sont déjà rendus. S'ils ne se rendent pas, ils devront en assumer les conséquences car nos troupes se rapprochent rapidement", a prévenu le porte-parole de l'armée, le colonel Sani Husman, dans un communiqué.
Le 25 septembre, l'armée nigériane avait affirmé que plus de 200 insurgés de Boko Haram s'étaient rendus lors de la reprise de la ville de Banki , qui a été utilisée par les islamistes comme base pour mener des attaques vers le Cameroun.
Pour combattre Boko Haram, les quatre pays riverains du lac Tchad - Cameroun, Nigeria, Niger, Tchad - et le Bénin ont mis sur pied une Force d'intervention conjointe multinationale (MNJTF), avec un quartier général à N'Djamena au Tchad.
La ville de Mora, théâtre du double attentat-suicide de dimanche, abrite le quartier-général du 1er secteur de la MNJTF.
La MNJTF, qui doit compter à terme environ dix mille militaires et policiers, manque de financements pour être vraiment opérationnelle. Et les islamistes de Boko Haram parviennent encore à s'infiltrer dans les villes, malgré un renforcement des mesures de sécurité et un appel constant des autorités à la vigilance de la population.
Dans cette guerre d'usure, les islamistes, affiliés à l'Etat islamique (EI), ont perdu des territoires sous la pression des armées régionales.
Mais depuis des mois, ils sont retranchés dans la forêt de Sambisa et les monts Mandara, au Nigeria, ainsi que sur les innombrables îles du lac Tchad.
Boko Haram, dont l'insurrection a fait au moins 17.000 morts et plus de 2,5 millions de déplacés depuis 2009, est tenu pour responsable de la mort de plus de près de 1.300 personnes depuis la prise de fonctions du nouveau président nigérian Muhammadu Buhari le 29 mai. M. Buhari a fait du combat contre les islamistes sa priorité.
afp