Tout le monde est pressé de découvrir l’identité de cet homme « éclairé » et rétif aux promesses démesurées, à la « tortuosité » politique et aux tartufferies (« je suis un vrai Cheikh, mais je n’exploite jamais la fibre religieuse », réplique-t-il à ceux qui craindraient une éventuelle « mouridisation » de l’Etat si jamais il accède au pouvoir, à cause de « son nom évocateur » : Cheikh Bamba Dièye.
Toutefois, le leader du FSD/BJ révèle aux jeunes « éclairés » de la diaspora qu’il ne se rangera derrière personne pour les élections présidentielles de 2012 tout en précisant qu’il n’exclut rien pour le deuxième tour : « j’ai déjà commis une erreur que je regrette jusqu’à présent, car j’étais acteur de l’Alternance ». Une telle déclaration incarne l’audace et la détermination d’un « homme neuf », symbole du renouvellement générationnel tant souhaité et longtemps attendu par une jeunesse déshéritée qui ne croit plus à des promesses et encore moins aux partis « politiques traditionnels ».
Ainsi, un jeune leader aux mains propres est à la rencontre de ses concitoyens de la même génération afin de les sensibiliser sur la situation chaotique d’un pays ravagé par cinquante ans de « mal gouvernance », de corruption, de gabegie, de népotisme et de sinécure. Et pourtant, cette contrée possède tous les atouts pour sortir de l’ornière. Cheikh Bamba connaît très bien la situation de plus en plus difficile et précaire des étudiants devenus aujourd’hui des soutiens de famille : « je sais que c’est superfétatoire de vous rappeler la misère et la détresse du peuple sénégalais, car chaque fin du mois vous envoyez vous-mêmes de l’argent à vos parents ; s’il n’y avait pas l’argent des expatriés qu’on estime à plus de quarante-quatre milliards par an, les Sénégalais descendraient dans la rue pour réclamer de quoi subsister ». Une somme supérieure aux aides annuelles reçues par l’Etat.
Je ne suis pas un « militant diéyiste », mais plutôt un anti-idéologue qui a la peau dure contre les slogans « retentissants », et qui réclame le « départ immédiat » de Sa Majesté. Je suis né en plein roulement des tambours du Socialisme et j’y ai grandi tout comme Cheikh Bamba Dièye. L’ironie du sort est que ce sont les mêmes personnes qui dirigeaient hier le pays sans se soucier de notre essoufflement et de notre précarité, qui souhaitent revenir au pouvoir, se refusant à « solder leurs comptes » avec le peuple sénégalais longtemps exploité. Il y a lieu de rappeler qu’ils ont une grande part de responsabilité dans les cinquante années sombres qui nous ont fait haleter, baver, souffrir, et qui nous ont affamés et assoiffés. L’heure est donc au renouvellement générationnel. Et Cheikh œuvre dans ce sens et n’en démord pas, au moment où les leaders des partis politiques traditionnels se croyaient de manière illusoire les seuls « partis patentés ». Les Sénégalais laisseront-ils passer la « Séguragate » ? C’est le moment où jamais : pourquoi hésite-t-on face à l’audace et à la conviction de l’homme neuf à la tête du FSD/BJ ? En tout cas, il a le profil de celui qui est à même de faire émerger ce pays meurtri, grâce à sa philosophie basée essentiellement, à mon avis, sur le modèle éducatif, « rousseauiste ». Autrement dit, l’éducation dès le bas âge est incontournable, à l’image du jeune Émile de Rousseau. Un enseignement de qualité est à la base de tout développement.
Enfin, cet homme neuf aux ambitions présidentielles déplore avec véhémence la non réforme de notre système éducatif obsolète qui date de l’époque coloniale : de l’école primaire à l’université, rien n’a changé. Un statu quo ! C’est ainsi que Cheikh Bamba suggère la création d’universités des métiers, par exemple une Université agricole à Saint Louis. Mais, Que deviendront les soixante mille étudiants de l’université Cheikh Anta Diop ? Cependant, sa descente dans l’arène politique marque un tournant dans l’histoire, pour ne pas dire la transition de la Monarchie vers la Démocratie. Si nous regardons dans l’histoire des ‘grandes démocraties’, toute transition vers la démocratie fait trembler les réactionnaires. A titre d’exemple: la Révolution française contre la Monarchie absolutiste est édifiant, ou alors l’enterrement du Fascisme en Italie, ou encore celui du Nazisme en Allemagne.
Dame Diop, Doctorant au laboratoire du Circles/ Section Cna (Centre de Narratologie Appliquée) / Spécialité : ‘Études Ibériques’/ Université de Nice Sophia-Antipolis
NB : les propos cités de Cheikh Bamba Dièye ont été tenus lors d’un débat avec les étudiants sénégalais de Nice, le 9 décembre 2009.