« Je sais que c’est puéril, mais j’aimerais vivre ça au moins une fois dans mon existence. » Léna, jolie trentenaire célibataire, en rêve. L’affaire est entendue : le coup de foudre n’est garant de rien, ni de durée, ni de bonheur dans la relation amoureuse. Et il fait même l’objet de toutes les mises en garde : « C’est une illusion », « Déception garantie », « L’autre n’est jamais ce qu’il a l’air d’être », etc. Pourtant, il occupe une place de choix dans nos petites mythologies secrètes. Au fond, de quoi s’agit-il ? De « l’amour au premier regard, d’une idéalisation instantanée de l’autre », définit le psychiatre et psychanalyste Didier Lauru, auteur de Père-fille, une histoire de regard (Albin Michel, 2006).
De la certitude quasi immédiate d’avoir en face de soi quelqu’un dont la présence viendra inexplicablement nous combler. « C’est […] comme si je m’étais perdu et qu’on vînt tout à coup me donner de mes nouvelles », écrit André Breton dans L’Amour fou (Gallimard, Folio, 1976)... Et cela n’arrive pas dix fois dans une vie, préviennent les psychanalystes : « Une fois, c’est déjà bien. Deux, trois, c’est le maximum, confirme Didier Lauru. Au-delà, ce ne sont pas des coups de foudre, plutôt des comportements compulsifs d’“amoureux de l’amour”. »
Ceux qui l’ont connu évoquent un éblouissement instantané. « J’étais à un vernissage, se souvient Mélanie, 42 ans. J’ai eu l’impression que quelqu’un me regardait. J’ai levé les yeux : un homme grisonnant et souriant. J’ai pensé : “C’est un homme comme celui-là qu’il me faudrait. Il a l’air heureux mais profond. Je pourrais passer ma vie avec quelqu’un comme ça.” » Son émotion était partagée et, quelques instants plus tard, le monsieur « grisonnant » est venu lui parler : « Il a évoqué L’Homme qui marche de Giacometti, la force de l’art qui aide à avancer. Je me suis dit : “Oui. Maintenant, tu ne dis plus que oui.”
Depuis, je n’ai jamais cessé de lui dire oui. » Marine, 32 ans se déclare, elle, « incapable » de « céder » à cet emballement : « J’ai besoin de connaître l’autre avant de tomber amoureuse. Je ne peux pas, d’un claquement de doigts, fondre pour quelqu’un. Ça ne m’est jamais arrivé et je ne me le souhaite pas. » Il y aurait, d’un côté, ceux qui ont vécu cette expérience exaltante et parfois douloureuse, surtout quand elle est à sens unique. Et de l’autre, ceux qui en seraient exclus, sans forcément en souffrir puisqu’ils ne désirent pas l’expérimenter. S’agirait-il tout simplement d’une question de volonté ? Non. « Tout le monde peut potentiellement vivre le coup de foudre, y compris ceux qui ne le veulent pas consciemment, assure Didier Lauru. Mais certaines conditions doivent être réunies. » Et celles-ci n’ont évidemment rien à voir avec une envie, affichée ou pas, de connaître ces sensations.
Quand nous sommes disponible
D’abord, préexiste évidemment une rencontre avec celui ou celle qui déclenchera la secousse. Mais cela ne suffit pas : il faut être perméable aux effets du hasard, sans pour autant vouloir le forcer. Le psychanalyste Roland Gori, auteur de Logique des passions (Flammarion, “Champs”, 2005), éclaire la dimension irrationnelle du phénomène en citant Picasso : « “Je ne cherche pas, je trouve.” La logique est ici la même. Quand on cherche le coup de foudre, il est impossible de le trouver, parce que le volontarisme échappe aux conditions psychiques de ce sentiment amoureux très puissant, de cette forme de folie, de mirage qui nous saisit à la vue de l’autre. »
De la certitude quasi immédiate d’avoir en face de soi quelqu’un dont la présence viendra inexplicablement nous combler. « C’est […] comme si je m’étais perdu et qu’on vînt tout à coup me donner de mes nouvelles », écrit André Breton dans L’Amour fou (Gallimard, Folio, 1976)... Et cela n’arrive pas dix fois dans une vie, préviennent les psychanalystes : « Une fois, c’est déjà bien. Deux, trois, c’est le maximum, confirme Didier Lauru. Au-delà, ce ne sont pas des coups de foudre, plutôt des comportements compulsifs d’“amoureux de l’amour”. »
Ceux qui l’ont connu évoquent un éblouissement instantané. « J’étais à un vernissage, se souvient Mélanie, 42 ans. J’ai eu l’impression que quelqu’un me regardait. J’ai levé les yeux : un homme grisonnant et souriant. J’ai pensé : “C’est un homme comme celui-là qu’il me faudrait. Il a l’air heureux mais profond. Je pourrais passer ma vie avec quelqu’un comme ça.” » Son émotion était partagée et, quelques instants plus tard, le monsieur « grisonnant » est venu lui parler : « Il a évoqué L’Homme qui marche de Giacometti, la force de l’art qui aide à avancer. Je me suis dit : “Oui. Maintenant, tu ne dis plus que oui.”
Depuis, je n’ai jamais cessé de lui dire oui. » Marine, 32 ans se déclare, elle, « incapable » de « céder » à cet emballement : « J’ai besoin de connaître l’autre avant de tomber amoureuse. Je ne peux pas, d’un claquement de doigts, fondre pour quelqu’un. Ça ne m’est jamais arrivé et je ne me le souhaite pas. » Il y aurait, d’un côté, ceux qui ont vécu cette expérience exaltante et parfois douloureuse, surtout quand elle est à sens unique. Et de l’autre, ceux qui en seraient exclus, sans forcément en souffrir puisqu’ils ne désirent pas l’expérimenter. S’agirait-il tout simplement d’une question de volonté ? Non. « Tout le monde peut potentiellement vivre le coup de foudre, y compris ceux qui ne le veulent pas consciemment, assure Didier Lauru. Mais certaines conditions doivent être réunies. » Et celles-ci n’ont évidemment rien à voir avec une envie, affichée ou pas, de connaître ces sensations.
Quand nous sommes disponible
D’abord, préexiste évidemment une rencontre avec celui ou celle qui déclenchera la secousse. Mais cela ne suffit pas : il faut être perméable aux effets du hasard, sans pour autant vouloir le forcer. Le psychanalyste Roland Gori, auteur de Logique des passions (Flammarion, “Champs”, 2005), éclaire la dimension irrationnelle du phénomène en citant Picasso : « “Je ne cherche pas, je trouve.” La logique est ici la même. Quand on cherche le coup de foudre, il est impossible de le trouver, parce que le volontarisme échappe aux conditions psychiques de ce sentiment amoureux très puissant, de cette forme de folie, de mirage qui nous saisit à la vue de l’autre. »