De notre correspondant à Londres
Pour un homme qui aime le pas de charge, c'est avec une petite foulée que Boris Johnson aborde le déconfinement. La situation sanitaire du pays et sans doute aussi l'épreuve qu'il a subie ont incité le premier ministre à la prudence. « Le temps n'est pas venu de déconfiner cette semaine », a-t-il dit, soulignant que le taux de reproduction du virus (R0), était encore tout juste inférieur à 1. L'essentiel du confinement reste en place jusqu'au 1er juin. Le slogan officiel change toutefois : ce n'est plus « Stay home » (restez à la maison) mais « Stay alert » (restez vigilants).
Boris Johnson s'est donc contenté d'annoncer quelques assouplissements. Les Britanniques restent incités à rester à la maison « autant que possible ». Il est recommandé de privilégier le télétravail quand c'est possible et de retourner au travail quand cela ne l'est pas. Il faut aussi continuer à « limiter les contacts ». Les Britanniques pourront sortir faire de l'exercice de manière « illimitée », et non plus une seule fois par jour. Londres va par ailleurs instaurer une « quarantaine » de quatorze jours pour les voyageurs arrivant dans le pays, mais les Français ne seraient pas concernés par cette mesure. Les écoles ne commenceront pas à rouvrir avant le début juin. Ce pourrait être également l'horizon pour les commerces. Bars et restaurants devront attendre un mois de plus.
Un nouveau système d'alerte
Cette stratégie de déconfinement par étapes s'appuie sur un nouveau système d'alerte, ressemblant à ce qui existe en matière de terrorisme, pour informer les Britanniques du niveau de danger de la pandémie. Il comportera cinq niveaux, allant du vert au rouge. « Pour le moment, nous pensons que le pays se trouve à quatre sur une échelle de cinq, et nous voulons le ramener aussi rapidement que possible à trois », a commenté le ministre chargé des Communautés, Robert Jenrick, sur Sky News. Ces niveaux pourront être différenciés par région. À chaque étape, des contraintes seront relâchées pour aider au redémarrage de la vie quotidienne et de l'économie.
Ces mesures sont valables pour l'Angleterre et chaque nation a la possibilité d'adapter les mesures de confinement. L'Écosse, le Pays de Galles et l'Irlande du Nord entendent plutôt vouloir rester sur la ligne « restez à la maison »… La nouvelle injonction demandant de « rester vigilant » a été critiquée pour son message trop sujet à interprétation par l'opposition travailliste.
Les alpinistes disent toujours que descendre du sommet est la partie la plus dangereuse. C'est à ce moment-là que vous risquez d'être trop confiant et de faire des erreurs
Boris Johnson
La vigueur persistante de l'épidémie prêchait pour un déconfinement graduel. Avec plus de 31.000 morts, le Royaume-Uni est devenu le pays le plus endeuillé d'Europe et le deuxième au monde [derrière les États-Unis]url:https://www.lefigaro.fr/sciences/en-direct-coronavirus-covid-19-confinement-deconfinement-macron-philippe-culture-ecoles-masques-20200506 . Le pic serait atteint mais les chiffres marquent un inquiétant plateau. Boris Johnson a d'ailleurs utilisé une métaphore montagnarde pour appeler à la vigilance. « Les alpinistes disent toujours que descendre du sommet est la partie la plus dangereuse. C'est à ce moment-là que vous risquez d'être trop confiant et de faire des erreurs », a-t-il déclaré au Sun.
La semaine dernière, des rapports alarmants avaient été envoyés au « Sage », le conseil scientifique du gouvernement. La London School of Tropical Hygiene et l'Imperial College, entre autres, avaient pointé une « marge de manœuvre très faible ». Ils ont averti que le bilan pourrait dépasser les 100.000 morts si les mesures de confinement étaient trop vite relâchées. Surtout, le chiffre de contaminations quotidiennes a fait reculer les ministres qui plaidaient pour un déconfinement plus agressif pour voler au secours de l'économie : il serait de 18.000 par jour, quand le gouvernement s'était fixé une cible de 4000.
Pour montrer que, malgré la timidité du déconfinement, les Britanniques peuvent respirer un peu plus, Boris Johnson pourrait lui-même reprendre son footing dès cette semaine.
lefigaro.fr