Et pourtant, cette ceinture verte qui servait de passage pour des raisons sécuritaires aux infrastructures techniques de base et de micro climat notamment de brise de vent de limitation géographique d’avec les villages traditionnels, a fait l’objet d’un financement de 3,2 milliards de francs CFA par un prêt BIRD (groupe Banque Mondiale) à l’Etat du Sénégal. Cet état de fait pour le moins désastreux fait aujourd’hui de la station balnéaire de Saly Portudal une véritable bombe à retardement. En effet, dans le lot de ces infrastructures utilitaires, on peut noter un câble électrique haute tension de 30.000 Volts sur lequel une résidence à usage d’habitation est construite. De nouvelles installations qui sont loin de profiter au tourisme.
Non respect de la Convention générale
«Il est temps, soutenait Eric Philibert, Directeur général de Lamentin Beach de Saly, le 22 août 2007 dans les colonnes de notre confrère Wal Fadjri, de développer d’autres endroits, des endroits plus typiques, plus naturels comme ce qui se passe actuellement dans les îles du Saloum. La station de Saly a plus besoin d’un rafraîchissement, d’un lifting». Ces propos tenus par un professionnel du secteur sur le désengorgement de la station touristique s’inscrit en droite ligne des dispositions de la Convention générale qui régit l’Etat du Sénégal à la Sapco dont les compétences ont même été élargies. En effet, au terme d’une convention signée entre l’Etat du Sénégal et la Sapco en date du 29 août 1977, il a été identifiées et retenues 6 unités d’aménagement touristique dont la mise en valeur devrait générer des effets économiques directs et indirects. Il s’agit notamment de Toubab Dialao, Somone, Saly, Nianing, Popenguine et Joal. «Pour des raisons d’opportunité, peut-on lire dans un rapport technique général de la station de Saly Sud daté de 1996, seul a démarré le développement de la zone pilote de Saly sur laquelle était prévue l’implantation par des promoteurs privés, de dix établissements hôteliers pour une capacité de 2500 lits».
Trente quatre (34) ans après cette Convention, la Sapco en est toujours à l’aménagement de son site pilote qu’elle a fini, en vérité, par dénaturer. De dix (10) établissements, on en est aujourd’hui à vingt trois (23), sans compter les nombreux commerces.
La déforestation de Saly
«Tout le problème, témoigne un autre professionnel du tourisme qui préfère garder l’anonymat, est du fait de la Sapco qui a donné des autorisations à tout le monde sans veiller au but final de la construction à savoir une résidence hôtelière ou une résidence avec divers propriétaires. Ce qui fait qu’un aventurier qui a les moyens de construire une ou deux villas et qui sait vendre, construira sa résidence grâce aux ventes qu’il réalisera. Surtout quand on sait que construire une villa revient à 20 millions de francs CFA. Il y a même une résidence qui a commencé à vendre sans aucune maison témoin».
Boubacar Sabaly, Directeur de l’hôtel Bougainvilliers de Saly et par ailleurs président du Syndicat d’initiatives du tourisme de Thiès, abonde dans le même sens et déduit qu’il y a «sur occupation et que plusieurs hectares ont été défôrestées». Et notre interlocuteur de poursuivre : «Nous avons eu à dénoncer cette déforestation depuis les années 1996 mais le phénomène continue. Le Comité de station est présidé par la Sapco et nous n’avons pas les moyens juridiques d’intervenir».
Pour sa part, M. Ibrahima Fofana de Graphyx Système, une société d’informatique établie à Saly, soutient que «cette situation de violation récurrente découle de l’appât du gain des autorités qui, en lieu et place de diligenter des projets novateurs à long terme, cherchent à s’enrichir illicitement. C’est ainsi que la ceinture verte de Saly a commencé à disparaître gravement depuis 2008».
«Le problème de la déforestation, renchérit une autre source, vient du fait que les terrains qui intéressent actuellement les investisseurs se trouvent au niveau de Saly. Toute la zone de Gandigal a été quasiment vendue. C’est pour cela qu'il y a une guerre avec la Mairie et que des zones sont en litiges. Avant la Mairie, c'était la Communauté rurale de Malicounda. Il suffit de voir un terrain qui passe de 300 000 à 3.000 000 F CFA pour mesurer l’ampleur de la spéculation foncière dans la zone».
La Convention générale fait pourtant obligation à la Sapco en son article 32 de gérer le bon fonctionnement des équipements, l’entretien des installations et plantations.
Un nouveau type de banditisme
Le drame dans ces nouvelles installations anarchiques de Saly réside surtout dans le fait qu’elles ne profitent nullement au tourisme. Rares en effet, sont les hôtels qui ont été implantés dans la station ces dix (10) dernières années. Il y en a, pour la plupart, que pour des installations à usages d’habitation qui profitent à des proches du pouvoir libéral (Nous y reviendrons avec les noms et documents à l’appui). L’argent engrangé dans ces opérations ne profite pas également au Sénégal. Il ressort, en effet, de nos investigations, que cet argent est envoyé en Europe dans des comptes Off shore notamment à Monaco. Le modus opérandi étant de faire payer l’acheteur en Europe sur des comptes monégasques. Les représentants de ces banques viennent d’ailleurs régulièrement au Sénégal pour pêcher de nouveaux clients en réclamant tout simplement la carte de résident. Ainsi, les nouveaux recrutés ne sont plus considérés comme français (Un français ne pouvant pas avoir de compte à Monaco) et le tour est joué! Certains envoient des chèques par DHL ou avec des amis qui voyagent. D’autres font leurs opérations depuis la Gambie. La Cour des comptes, selon des sources sûres, est depuis quelques semaines à Saly Portudal pour passer au peigne fin cette mode de gestion qui y est érigée en règle. Elle gagnerait à s’attacher les services du Ministère de l’Economie et des Finances qui, à l’instar de son homologue du Budget français, Eric Woerth a demandé aux banques établies en France, les noms des résidents français ayant un compte en Suisse afin de mettre la main sur les trois (3) milliards d’euros qui y sont planqués. On imagine d’ici l’effet boomerang qu’aurait une telle demande du Ministère de l’Economie et des Finances sur nos délinquants à col blanc…
Par Amadou Ly DIOME
Le Mag confidentiel Septembre 2011