Qu'est-ce qui vous lie à Mouhamed Ndao Tyson ?
«Tyson» est un petit frère, parce que je suis issu, comme lui, de la banlieue pikinoise. Il s'accompagnait avec mes jeunes frères et les petits frères de Djibril Ngom qui fut ancien ministre du Budget sous le régime de Diouf. Tyson habitait ma maison et se couchait avec mon fils aîné qui s'appelle Bamba Ndiaye. C'est un garçon correct, très poli et qui aime pratiquer sa religion. Pendant au moins deux ans, toute l'écurie Boul Falé vivait dans cette maison.
Quels sont les combats de Tyson qui ont été préparés dans votre maison ?
Tyson y a préparé ses combats avec Daouda Dop, Guèye Loum et avec d'autres lutteurs. Et quand il partait dans l'arène, il prenait souvent mon véhicule 405 (Peugeot). Je me rappelle son combat contre Cheikh Mbaba, il avait pris mon véhicule et quand ils sont revenus de ce combat qui s'est déroulé à Iba Mar Diop, son coach Pape Ndiaye s'est confondu en excuses en me disant: «Grand, on a mis ton véhicule dans un piteux état. » Je lui ai simplement dit que ce n'était pas grave. Je me souviens quand Tyson était dans cette maison, j'habitais à Mole 2. Un jour, je l'ai fait convoquer avec ses amis et j'ai dit à Tyson de faire gaffe et d'éviter que l'argent ou les femmes ne le divisent d'avec ses amis. Il m'a répondu : «Grand, tu peux dormir tranquille, je ne ferai jamais ça.» Et d'ajouter : «Grand la lutte, c'est comme un jeu, mais quand tu subis une défaite, tu es vexé et tes amis sont vexés, c'est pourquoi je me donne entièrement dans la lutte. » Il me le disait tout le temps.
Est-ce que vous avez été vexé avant-hier (l'entretien s'est déroulé hier) quand vous l'avez vu s'incliner devant Balla Gaye 2?
J'ai eu une déception. Car, on ne s'implique pas comme on le faisait avant. Je me rappelle avoir passé la nuit dehors, lors du combat de Tyson contre Toubabou Dior. Ce jour-là, je suis venu spécialement du Mali et j'ai passé la journée chez Diallo Pithie, parce que le marabout m'avait demandé d'acheter des oiseaux et de les libérer des cages où ils étaient faits prisonniers jusqu'à la fin du combat. Je n'ai même pas regardé ce combat. Pour vous dire que le garçon (Tyson), on l'a longtemps suivi. Le premier ter¬rain qu'il a acheté pour sa maman derrière la Foire (Cices de Dakar, ndlr), c'est moi qui l'ai aidé à l'ache¬ter. Il m'est très proche. C'est vrai qu'il n'a plus assez de temps pour venir me voir. Mais face à Balla Gaye 2, la déception était grande. Je pense que l'écurie Boul Falé doit se restructurer. Il faut qu'il ait des sages qui puissent les guider, les orienter et leur parler. Il faut aussi que Tyson s'arrête et qu'il fasse l'évaluation de son passé pour pouvoir rebondir.
Si aujourd'hui, vous aviez un conseil à donner à Tyson, que lui diriez-vous ?
(Un tantinet hésitant) Je lui dirai de faire une autocritique. Il doit essayer de savoir ce que les personnes qui l'encadraient dans ses victoires sont aujourd'hui devenues. Car, il y a toujours des personnes qui agissaient dans l'ombre. Je vous dis que pour les combats de Tyson, je prenais l'avion et je quittais le Mali pour venir à mes propres frais avec tout ce que j'ai pu demander comme prières en venant. Djibril Ngom, ancien ministre du Budget sous Diouf, s'impliquait financièrement aussi. Le premier «mbappatt» (séance de lutte traditionnelle) que Tyson a remporté, c'est nous qui l'avons organisé derrière l'école 3 à Pikine. C'est à partir de ce «mbappatt» qu'il est entré dans l'arène. Si Tyson a gagné ses premiers combats, c'est parce que mystiquement, il a été très bien préparé.
Est-ce que cette préparation mystique a manqué lors de ses derniers combats ?
Oui ! Je pense que cette préparation mystique a manqué dans ces derniers combats.
Pourquoi ces sages ont été écartés de son staff ?
Dans la vie, si vous êtes une personne âgée, ce n'est jamais à vous d'aller vers le jeune. C'est plutôt le plus jeune qui doit aller vers l'aîné pour demander des conseils. Aujourd'hui, on regarde Tyson de loin. Même si Tyson ne nous contacte pas, s'il a un combat, nous sommes très sensibles à son sujet. Même s'il ne nous consulte pas, nous nous impliquons. Cela me fait mal d'entendre les gens me dire: «Tyson t'a abandonné.» C'est seulement dommage que Tyson ne nous implique plus. C'est pourquoi je l'invite à prendre du recul et se demander pourquoi hier il gagnait ses combats? Et pourquoi il les perd aujourd'hui ? On ne peut pas tout dire, mais je le sais.
Dites-le nous...
Nous gagnions nos combats, parce que mystiquement nous étions trop forts. Parce que celui qui avait les affaires mystiques de Tyson n'est plus. C'était un grand monsieur très fort qui habitait Dakar. Et le comble, c'était un intellectuel. Un chrétien.
Comment il s'appelait ?
Non, je ne vous le dirai pas.
Sa mort a-t-elle coïncidé avec des défaites de Tyson ?
Je me rappelle que sa mort a coïncidé avec la première défaite de Tyson face à Bombardier (25 décembre 2002). Il est mort quelques mois avant ce choc. Je me rappelle, ce combat m'a trouvé au Mali, devant ma télévision. Ce jour-là, j'ai senti que cet homme avait laissé derrière lui un vide difficile à combler. Je pense que Tyson a été marqué par son décès. Ce gars-là, s'il était encore en vie, Tyson ne serait jamais tombé. Je ne peux pas vous dire la dimension mystique de cette personne, car il était trop fort. Avant les combats de Tyson, il voyait les choses... Ah non, il était trop fort. Il n'était pas le seul, car dans tous les villages sérères, Tyson avait des gens qui s'occupaient de lui. Maintenant, je ne sais pas ce qui s'est passé. Contre Balla Gaye 2, par exemple, on sentait nettement que Tyson a été battu mystiquement.
Entretenez-vous toujours des rapports étroits avec Tyson ?
On dit souvent que les gens ne se voient pas, mais les cœurs se voient. Il vient occasionnellement chez moi. Je l'ai vu lors de son dernier combat contre Yékini (4 avril 2010). Ensuite, au décès de sa belle-mère il y a moins d'un an, il m'a appelé lui-même pour me dire : «Grand, ma belle-mère est décédée. » J'ai été le voir pour lui présenter mes condoléances.
Tyson vous a-t-il rendu la monnaie de votre pièce, avec tout ce que vous aviez fait pour lui ?
Dans la vie, ce qui est important, ce n'est pas de rendre la monnaie... (Il ne termine pas sa phrase). Que Tyson vienne ou ne vienne plus me voir, ce n'est pas important.
N'est-il pas temps que Tyson passe le flambeau à Eumeu Sène?
Seul Tyson peut répondre à cette question. Il est la personne la plus habilitée à le dire. Tyson doit sentir si sa force actuelle peut lui permettre encore de lutter ou s'il doit éviter de continuer à subir des humiliations dans l'arène.
SOURCE : L’OBS MOR TALLA GAYE
«Tyson» est un petit frère, parce que je suis issu, comme lui, de la banlieue pikinoise. Il s'accompagnait avec mes jeunes frères et les petits frères de Djibril Ngom qui fut ancien ministre du Budget sous le régime de Diouf. Tyson habitait ma maison et se couchait avec mon fils aîné qui s'appelle Bamba Ndiaye. C'est un garçon correct, très poli et qui aime pratiquer sa religion. Pendant au moins deux ans, toute l'écurie Boul Falé vivait dans cette maison.
Quels sont les combats de Tyson qui ont été préparés dans votre maison ?
Tyson y a préparé ses combats avec Daouda Dop, Guèye Loum et avec d'autres lutteurs. Et quand il partait dans l'arène, il prenait souvent mon véhicule 405 (Peugeot). Je me rappelle son combat contre Cheikh Mbaba, il avait pris mon véhicule et quand ils sont revenus de ce combat qui s'est déroulé à Iba Mar Diop, son coach Pape Ndiaye s'est confondu en excuses en me disant: «Grand, on a mis ton véhicule dans un piteux état. » Je lui ai simplement dit que ce n'était pas grave. Je me souviens quand Tyson était dans cette maison, j'habitais à Mole 2. Un jour, je l'ai fait convoquer avec ses amis et j'ai dit à Tyson de faire gaffe et d'éviter que l'argent ou les femmes ne le divisent d'avec ses amis. Il m'a répondu : «Grand, tu peux dormir tranquille, je ne ferai jamais ça.» Et d'ajouter : «Grand la lutte, c'est comme un jeu, mais quand tu subis une défaite, tu es vexé et tes amis sont vexés, c'est pourquoi je me donne entièrement dans la lutte. » Il me le disait tout le temps.
Est-ce que vous avez été vexé avant-hier (l'entretien s'est déroulé hier) quand vous l'avez vu s'incliner devant Balla Gaye 2?
J'ai eu une déception. Car, on ne s'implique pas comme on le faisait avant. Je me rappelle avoir passé la nuit dehors, lors du combat de Tyson contre Toubabou Dior. Ce jour-là, je suis venu spécialement du Mali et j'ai passé la journée chez Diallo Pithie, parce que le marabout m'avait demandé d'acheter des oiseaux et de les libérer des cages où ils étaient faits prisonniers jusqu'à la fin du combat. Je n'ai même pas regardé ce combat. Pour vous dire que le garçon (Tyson), on l'a longtemps suivi. Le premier ter¬rain qu'il a acheté pour sa maman derrière la Foire (Cices de Dakar, ndlr), c'est moi qui l'ai aidé à l'ache¬ter. Il m'est très proche. C'est vrai qu'il n'a plus assez de temps pour venir me voir. Mais face à Balla Gaye 2, la déception était grande. Je pense que l'écurie Boul Falé doit se restructurer. Il faut qu'il ait des sages qui puissent les guider, les orienter et leur parler. Il faut aussi que Tyson s'arrête et qu'il fasse l'évaluation de son passé pour pouvoir rebondir.
Si aujourd'hui, vous aviez un conseil à donner à Tyson, que lui diriez-vous ?
(Un tantinet hésitant) Je lui dirai de faire une autocritique. Il doit essayer de savoir ce que les personnes qui l'encadraient dans ses victoires sont aujourd'hui devenues. Car, il y a toujours des personnes qui agissaient dans l'ombre. Je vous dis que pour les combats de Tyson, je prenais l'avion et je quittais le Mali pour venir à mes propres frais avec tout ce que j'ai pu demander comme prières en venant. Djibril Ngom, ancien ministre du Budget sous Diouf, s'impliquait financièrement aussi. Le premier «mbappatt» (séance de lutte traditionnelle) que Tyson a remporté, c'est nous qui l'avons organisé derrière l'école 3 à Pikine. C'est à partir de ce «mbappatt» qu'il est entré dans l'arène. Si Tyson a gagné ses premiers combats, c'est parce que mystiquement, il a été très bien préparé.
Est-ce que cette préparation mystique a manqué lors de ses derniers combats ?
Oui ! Je pense que cette préparation mystique a manqué dans ces derniers combats.
Pourquoi ces sages ont été écartés de son staff ?
Dans la vie, si vous êtes une personne âgée, ce n'est jamais à vous d'aller vers le jeune. C'est plutôt le plus jeune qui doit aller vers l'aîné pour demander des conseils. Aujourd'hui, on regarde Tyson de loin. Même si Tyson ne nous contacte pas, s'il a un combat, nous sommes très sensibles à son sujet. Même s'il ne nous consulte pas, nous nous impliquons. Cela me fait mal d'entendre les gens me dire: «Tyson t'a abandonné.» C'est seulement dommage que Tyson ne nous implique plus. C'est pourquoi je l'invite à prendre du recul et se demander pourquoi hier il gagnait ses combats? Et pourquoi il les perd aujourd'hui ? On ne peut pas tout dire, mais je le sais.
Dites-le nous...
Nous gagnions nos combats, parce que mystiquement nous étions trop forts. Parce que celui qui avait les affaires mystiques de Tyson n'est plus. C'était un grand monsieur très fort qui habitait Dakar. Et le comble, c'était un intellectuel. Un chrétien.
Comment il s'appelait ?
Non, je ne vous le dirai pas.
Sa mort a-t-elle coïncidé avec des défaites de Tyson ?
Je me rappelle que sa mort a coïncidé avec la première défaite de Tyson face à Bombardier (25 décembre 2002). Il est mort quelques mois avant ce choc. Je me rappelle, ce combat m'a trouvé au Mali, devant ma télévision. Ce jour-là, j'ai senti que cet homme avait laissé derrière lui un vide difficile à combler. Je pense que Tyson a été marqué par son décès. Ce gars-là, s'il était encore en vie, Tyson ne serait jamais tombé. Je ne peux pas vous dire la dimension mystique de cette personne, car il était trop fort. Avant les combats de Tyson, il voyait les choses... Ah non, il était trop fort. Il n'était pas le seul, car dans tous les villages sérères, Tyson avait des gens qui s'occupaient de lui. Maintenant, je ne sais pas ce qui s'est passé. Contre Balla Gaye 2, par exemple, on sentait nettement que Tyson a été battu mystiquement.
Entretenez-vous toujours des rapports étroits avec Tyson ?
On dit souvent que les gens ne se voient pas, mais les cœurs se voient. Il vient occasionnellement chez moi. Je l'ai vu lors de son dernier combat contre Yékini (4 avril 2010). Ensuite, au décès de sa belle-mère il y a moins d'un an, il m'a appelé lui-même pour me dire : «Grand, ma belle-mère est décédée. » J'ai été le voir pour lui présenter mes condoléances.
Tyson vous a-t-il rendu la monnaie de votre pièce, avec tout ce que vous aviez fait pour lui ?
Dans la vie, ce qui est important, ce n'est pas de rendre la monnaie... (Il ne termine pas sa phrase). Que Tyson vienne ou ne vienne plus me voir, ce n'est pas important.
N'est-il pas temps que Tyson passe le flambeau à Eumeu Sène?
Seul Tyson peut répondre à cette question. Il est la personne la plus habilitée à le dire. Tyson doit sentir si sa force actuelle peut lui permettre encore de lutter ou s'il doit éviter de continuer à subir des humiliations dans l'arène.
SOURCE : L’OBS MOR TALLA GAYE