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DROGUE : Une nouvelle "technologie" de la conscience III - Et "Jah", dans tout ça ?

Rédigé par leral.net le Mardi 23 Juillet 2013 à 21:29 | | 0 commentaire(s)|

Comment peut-on prétendre rechercher la paix intérieure en s'autodétruisant ? Ce paradoxe se résume fort bien dans cette terrible phrase de "Pecos" - c’est le surnom d’un "camé" repenti que Jamra avait eu l'opportunité d'encadrer, et dont l'histoire a fait l'objet d'un récit pathétique, fidèlement restitué par le défunt Abdou Latif Guèye, dans le premier numéro de "JAMRA, Revue sénégalaise des dossiers sociaux", du mois de février 1983 -, et qui défraya, à l'époque, la chronique.


DROGUE :  Une nouvelle "technologie" de la conscience III - Et "Jah", dans tout ça ?
«Pecos» a confié ceci à Latif : "Lors de son voyage à Dakar, Burning Spear, cette icône du Reggae, m'a dit que la drogue procure un équilibre mental qui efface la souffrance. Effectivement, j'ai pu me rendre compte que lorsque j'étais en plein "haaya", on pouvait égorger un enfant devant moi et ça m’aurait laissé indifférent". Effarante contradiction ! Maudit cercle vicieux ! En cherchant à "s'améliorer", à se "libérer", par le biais de la drogue, on aura en fait réussi qu'à se bâtir perfidement le caractère le plus épouvantable qui soit.
Lorsqu'au paroxysme de l'intoxication "Pecos" – qui s'était "défoncé" pendant 17 ans – en arriva un jour à gifler son petit neveu de trois ans (qui en perdit connaissance); à casser la tête de son prof' d'un coup de manivelle; à décharger son pm (pistolet-mitrailleur) sur son supérieur militaire hiérarchique, etc., on peut aisément imaginer la profonde aversion qui a dû le saisir postérieurement – à la faveur d'un furtif mais salutaire moment de lucidité -, et l'impérieux sursaut de conscience qui aura eu l'heur de l'arracher des tentacules envoûtante du produit satanique.


Le plus grand mérite de la jeunesse intellectuelle de notre pays, est qu'elle est généralement sans équivoque lorsque, dans ses analyses, elle passe au crible les dogmes culturels ou politiques. Elle aime à les "remettre en question", pour en discerner les aspects aliénants. Notre jeunesse est généralement attentive et vigilante, face aux apports culturels extérieurs, avant d'en adopter éventuellement les aspects positifs. Lors de leurs conférences et "thés-débats contradictoires", ce ne sont pas les réquisitoires sévères, daubant telle ou telle impérialisme, qui manquent. Mais on est comme frappé cécité face au plus cruel, au plus venimeux des impérialismes, que l'on subit complaisamment parce dispensateur de "rêves et d'euphorie".
Si la drogue a pu durablement gagner sous nos cieux ses lettres de noblesse, au point de devenir endémique au Sénégal, c'est parce que, reconnaissons humblement, elle est devenue un effet de mode (on "s'enflamme" pour être à la page) après s'être mué en une véritable idéologie, avec l'avènement du Mouvement "Rasta", dont les effluves sonores des années 1980, continuent toujours d’ailleurs, depuis la lointaine Jamaïque, de faire leur effet de séduction sur de large segments juvéniles et autres nostalgiques de ces années de gloire du "dreadlocks rasta".
Les "Rastafarians", apôtres d'un nouveau dogme philosophique, ou simples victimes de la société néo-coloniale, sont en tous cas d'un ressentiment inextinguible contre les "sangsues de Babylone", incarnés, selon eux, par les impérialismes occidentaux. Ils ne pardonneront jamais à l'Occident d'avoir non seulement astreint, pendant 300 ans, leurs ancêtres à l'esclavagisme le plus vil (la Traite négrière), mais surtout d'avoir continuer, par l'exploitation économique et financière néo-coloniale, à reléguer leur progéniture dans la précarité, dans des quartiers crasseux et populeux de lumpen-prolétariat.
Renonçant à toutes formes de lutte consciente et organisée, en vue de leur libération culturelle et économique, ils se résignent à un repli sur eux-mêmes, s'enferment dans un univers musical et psychédélique pour extérioriser leur rage et leur désespoir dans des exhortations tantôt bibliques, tantôt injurieuses contre "l'usurpateur", "l'impérialiste". Simple révolte qui n'aura pour autant pas eu l'heur de les affranchir véritablement de l'ascendance culturel du système oppresseur.
Par conséquent, où sied-t-il le mieux, que dans cette occurrence, de parler d' "Opium du Peuple" ? Complaisance ne peut, en effet, être plus saillante, de la part de l'élite intellectuelle "rastafariane", dans ce renversement condamnable des rôles, qui n'en aura pas moins permis de révéler au grand jour une certaine cécité "révolutionnaire". Après des décennies de gesticulations puériles, ces "idoles", qui prétendent porter le message de la philosophie "Rasta", auront tout au plus réussi – et les nombreuses masses populaires, fanatisées, avec eux - à promouvoir, et à mettre en musique (cf. "legalize marijuana", de Peter Tosh), des comportements sociaux serviles, et surtout à s'assujettir inconsciemment à des politiques laxistes d'anesthésie de la conscience populaire, par la vulgarisation à outrance du "Ganja", qui aura compromis moult carrières et brisé bien des vies. Qu'on laisse donc "Jah" tranquille. Il n'y est pour rien!
Le visionnaire jamaïcain, Marcus Mosiah Garvey (1887-1940), avait fondé l’Association universelle pour l’amélioration de la condition noire, l' "Universal Negro Improvement Association"- UNIA, toujours en activité. Sous son impulsion, cette organisation devint le principal défenseur de "la rédemption par le rapatriement".En 1919, à New York, Garvey descend les rues de Manhattan à bord d’une Limousine, suivi par 250.000 adeptes. Les Jamaïcains écoutent religieusement et avec enthousiasme ses prêches, lors des meetings organisés dans les mois qui suivirent son retour en Jamaïque. En dépit de cette ambiance sympathique et animée, Garvey se trouvait à l’étroit et, en 1935, il part pour l’Angleterre.
Mais auparavant, il eut le temps de prononcer, à Kingston (Jamaïque), son discours historique, qui devait marquer le lancement du mouvement Rasta, dans une église de la capitale. C'était un dimanche de 1927. Il eut ces mots : " Look to Africa, where a black king shall be crowned " ("Portez vos regards vers l’Afrique, où un roi noir doit être couronné ").
Marcus venait ainsi de "prédire", à l'attention de la Diaspora noire du monde entier, que ce noir qui allait être couronné en Afrique, "rassemblerait les tribus égarées pour les libérer et les ramener à la terre de leurs ancêtres". Une prédiction qui était plus symbolique que dialectique, mais qu'une bonne frange d'afro-américains prit à la lettre. Ils l'interprétèrent comme le signe de la venue d'un messie noir. Et le mouvement "Rasta" naquit à New York et à Kingston, en attendant l'événement !
Trois ans plus tard, le 02 novembre 1930, un chef tribal, jusque-là méconnu, fut couronné empereur à Addis-Abeba, le "Négus", Souverain d'Ethiopie. Il prend le nom d' ''Hailé Sélassié 1er", signifiant le " Pouvoir de la Sainte Trinité ". De plus, il est descendant de Salomon, fils de David, lui-même fils de Jessé (Issaï Jessé est noir, selon la philosophie "Rasta").
Les Rastafarians conclurent naturellement que toute la filiation est noire et qu'ils sont par conséquent les vrais juifs. JAH (JAH-VÉ) est donc leur Dieu. Rastafari (Haïlé Sélassié) leur roi, le Seigneur des Seigneurs, le Lion de Judée, l'homme-Dieu incarné, l'égal de Jésus. Les Rastas y virent donc un accomplissement de la prophétie de Garvey.
Prédiction symbolique, disions-nous, Mais non moins significative quand on sait que c'est Addis Abéba, fief du Négus, qui abrita, en 1963, le premier Sommet de l'Oua, et que l'organisation panafricaine ambitionnait, dés qu'elle fut portée sur les fonts baptismaux, de parachever l'indépendance politique et économique du Continent.
Or donc, déportés et déracinés, nos frères de cette île des Antilles, au sud de Cuba, assistent toujours impuissants à leur déculturation, à leur aliénation, en se délectant, depuis plusieurs générations, de ce "bricolage mythologique", qu'ils enrichissent à souhait de références bibliques, qui "avaliseraient" leur croyance Rasta. Assoiffés d'authenticité culturelle, les "Rastafarians" trouvent toujours (faute de mieux ?) leur consolation dans la Drogue et de la musique reggae. Et les multiples célébrations - le 11 de chaque mois de mai -, depuis trois décennies maintenant, à travers le monde, de l’anniversaire de la mort du "Roi du Reggae", Bob Marley, parti pour le "grand voyage", à la fleur de l’âge - il avait 36 ans - n’auront pour autant pas connu une seule ride, en dépit de l’épreuve du temps !

(A SUIVRE…)

Mame Mactar Guèye
Vice-président Organisation
Islamique Jamra
ongjamra@hotmail.com