(SenePlus) - À la tête de la Fédération sénégalaise de football (FSF) depuis 2009, Augustin Senghor traverse actuellement une période difficile. Sa récente défaite électorale au sein des instances internationales met en lumière des relations complexes avec les nouvelles autorités sénégalaises, comme le rapporte Jeune Afrique dans une analyse approfondie de la situation.
Le 12 mars dernier, Augustin Senghor a subi un revers cinglant lors de l'élection des représentants africains au conseil de la FIFA. Avec seulement treize voix récoltées, il a été éliminé dès le premier tour du scrutin, comme le souligne Jeune Afrique. Les conséquences ne se sont pas fait attendre : "Le lendemain, il décidait de démissionner de son poste de 1ᵉʳ vice-président de la Confédération africaine de football (CAF), qu'il occupait depuis mars 2021", précise le magazine panafricain.
Pour justifier cette décision tout en conservant son siège au Comité exécutif de l'instance, Senghor avait déclaré sans ambages : "Je ne peux pas continuer à diriger des gens qui m'ont battu dans les urnes". Une phrase qui reflète l'amertume du dirigeant face à ce qu'il considère comme un manque de loyauté au sein même de l'organisation continentale.
Si certains observateurs pointent un manque d'entretien de ses réseaux africains, l'absence de soutien franc des autorités sénégalaises n'est pas passée inaperçue. Comme le note JA, "il n'a pas reçu un soutien franc et massif des autorités, contrairement à d'autres candidats africains pour un poste à la FIFA très convoité".
L'enjeu dépassait pourtant largement la simple ambition personnelle du dirigeant. Avec une rémunération annuelle de 240 000 euros par an pour un mandat de quatre ans, ce poste représente également "une manière de renforcer l'influence d'un pays, notamment sur son continent d'origine", rappelle le magazine.
Ferdinand Coly, ancien international sénégalais, confirme cette lecture dans les colonnes du journal : "Ce n'est pas l'entente parfaite. Je n'inventerais rien en disant que les rapports entre Senghor et l'ancien régime, incarné par Macky Sall, étaient plus fluides. Et je ne vous apprendrais rien non plus en vous disant qu'au Sénégal, mais pas seulement, le politique a tendance à regarder de près les affaires du football."
Le "camouflet Cissé", comme le qualifie Jeune Afrique, illustre parfaitement cette détérioration des relations. Le 2 octobre 2023, le départ d'Aliou Cissé, sélectionneur des Lions de la Teranga depuis février 2015, avait été "perçu comme relevant d'une décision politique".
Alors que la Fédération souhaitait prolonger le contrat du technicien champion d'Afrique en 2022, Khady Dième Gaye, ministre des Sports, avait annulé cette prolongation, "officiellement en raison des résultats en baisse et des critiques d'une partie des supporters".
Un dirigeant de club cité par Jeune Afrique affirme : "Tout le monde avait bien compris que cela venait d'en haut, c'est-à-dire du chef de l'État [Bassirou Diomaye Faye] ou de son entourage. La ministre n'aurait jamais pris cette décision toute seule."
Cette source anonyme pointe également les affinités politiques passées du président de la FSF : "Il est de notoriété publique que Senghor était proche de Macky Sall, sans pour autant être membre du parti présidentiel [...] Alors, évidemment, quand un nouveau pouvoir arrive, les choses peuvent changer."
Les relations se sont encore tendues en août 2024, lorsque la ministre des Sports a demandé des comptes à Augustin Senghor concernant les bilans financiers de l'équipe nationale pour 2022 et 2024. Face à cette requête, le président de la FSF avait répondu par écrit en rappelant à Khady Dième Gaye "que les budgets de ces compétitions sont arrêtés par les services du ministère des Sports, soumis au ministère des Finances, et exécutés exclusivement et en totalité par le ministère de tutelle".
Malgré ces tensions, le bilan sportif d'Augustin Senghor à la tête de la FSF reste remarquable, avec cinq titres continentaux : la CAN en 2022, le Championnat d'Afrique des nations (CHAN), la CAN des moins de 20 ans et des moins de 17 ans en 2023, et cinq des six dernières CAN de beach-soccer.
À cela s'ajoutent les qualifications pour les Coupes du monde 2018 en Russie et 2022 au Qatar, marquant le retour du Sénégal sur la scène mondiale après une longue absence.
Ferdinand Coly confirme ce constat : "C'est un excellent bilan sportif. Il y a aussi eu des améliorations au niveau des infrastructures, du championnat national. Mais les gens sont partagés : certains souhaitent qu'il continue, d'autres veulent du changement."
Alors que l'élection à la présidence de la FSF est prévue pour août prochain, l'avenir d'Augustin Senghor reste incertain. D'après Jeune Afrique, "des rumeurs laissaient entendre qu'Augustin Senghor n'avait pas l'intention de briguer un cinquième mandat". Toutefois, le magazine précise que "l'intéressé ne s'est jamais exprimé officiellement sur la question".
Dans ce contexte politique tendu, et malgré un bilan sportif éloquent, la question se pose : Augustin Senghor parviendra-t-il à maintenir son influence sur le football sénégalais face à un nouveau pouvoir qui semble déterminé à marquer sa différence avec le précédent régime ?

Source : https://www.seneplus.com/politique/entre-sengor-et...