Certes, bien des ingrédients qui ont fait exploser les chaudrons tunisien et égyptien se trouvent réunis au sud du Sahara. Usure du pouvoir, petits arrangements avec la Constitution, népotisme, corruption, mauvaise gouvernance, profondes inégalités sociales, atonie de l’opposition, poids démographique de la jeunesse… À cette aune-là, une bonne douzaine de régimes peuvent se sentir menacés, même si la persistance du communautarisme, ce facteur meurtrier de division inconnu en Tunisie et en Égypte et qui concerne ici toutes les couches de la société à commencer par les armées nationales, constitue entre les mains des pouvoirs en place un redoutable antidote. Mais, y compris dans les rares pays où ce virus ne sévit pas ou peu (le Sénégal par exemple), il manque pour que soient dupliqués les modèles de Tunis et du Caire un élément essentiel : les acteurs.
Sauf en Afrique du Sud, qui est déjà une vraie démocratie, aucun pays subsaharien ne dispose de cette masse critique de jeunes mondialisés armés de leurs smartphones et de leurs pages Facebook, diplômés-chômeurs interconnectés et étudiants à lunettes, en mesure de peser sur le rapport des forces de par leur seule mobilisation. Mohamed Bouazizi, vendeur de fruits et légumes à Sidi Bouzid, fréquentait les cybercafés : il savait donc qu’ailleurs dans le monde le mépris, la misère, la corruption et le favoritisme ne sont pas partout la règle. Ses camarades d’infortune de Matam, de Tcholliré ou de Mbandaka, là où le taux de pénétration d’internet est inférieur à 1 % de la population, n’en ont, eux, qu’une conscience diffuse. Sans parler de ces classes moyennes, omniprésentes au coeur des « révolutions arabes » d’aujourd’hui et encore embryonnaires dans ces pays africains où, entre les riches et les pauvres, il n’y a presque rien.
Ce qui fait qu’une émeute devient une révolution et non un simple coup d’État est le fruit d’une mutation et d’une maturation invisible et progressive de tout le corps social. L’Afrique subsaharienne n’en est pas encore là. Reste que, après les leçons de Tunis et du Caire, les successions de père en fils et les Constitutions prêt-àporter risquent de devenir partout de moins en moins supportables. C’est déjà ça de gagné...
Sauf en Afrique du Sud, qui est déjà une vraie démocratie, aucun pays subsaharien ne dispose de cette masse critique de jeunes mondialisés armés de leurs smartphones et de leurs pages Facebook, diplômés-chômeurs interconnectés et étudiants à lunettes, en mesure de peser sur le rapport des forces de par leur seule mobilisation. Mohamed Bouazizi, vendeur de fruits et légumes à Sidi Bouzid, fréquentait les cybercafés : il savait donc qu’ailleurs dans le monde le mépris, la misère, la corruption et le favoritisme ne sont pas partout la règle. Ses camarades d’infortune de Matam, de Tcholliré ou de Mbandaka, là où le taux de pénétration d’internet est inférieur à 1 % de la population, n’en ont, eux, qu’une conscience diffuse. Sans parler de ces classes moyennes, omniprésentes au coeur des « révolutions arabes » d’aujourd’hui et encore embryonnaires dans ces pays africains où, entre les riches et les pauvres, il n’y a presque rien.
Ce qui fait qu’une émeute devient une révolution et non un simple coup d’État est le fruit d’une mutation et d’une maturation invisible et progressive de tout le corps social. L’Afrique subsaharienne n’en est pas encore là. Reste que, après les leçons de Tunis et du Caire, les successions de père en fils et les Constitutions prêt-àporter risquent de devenir partout de moins en moins supportables. C’est déjà ça de gagné...