Pour cette première sortie de l’homme chargé de mener les poursuites au sein de cette redoutable Cour, il fallait s’attendre à un record de présence de journalistes. Et de fait, les confrères ont répondu présents. Ils étaient venus, ils étaient tous là, journalistes et correspondants de la presse nationale et internationale. A cette occasion, M. Ndao a livré les noms des sept dignitaires de l’ancien régime appelés à ouvrir le bal des auditions devant les enquêteurs de la Section de Recherches de la Gendarmerie nationale. Il s’agit des anciens ministres Karim Wade, Oumar Sarr, Abdoulaye Baldé, Madické Niang, Samuel Sarr. Deux anciens directeurs nationaux complètent le tableau, MM. Tahibou Ndiaye, ancien directeur du Cadastre, et Doudou Diagne, ancien directeur de l’Urbanisme.
Après cette sortie du Procureur spécial, tous les Sénégalais sont convaincus que les enquêteurs de la Section de Recherches de la Gendarmerie nationale vont écraser en un tournemain ces dangereux pilleurs des caisses de la République. Mieux, l’opinion publique croit dur comme fer que les gendarmes vont déterrer et soulever, comme des hercules, tous les immeubles et villas cachés par les présumés voleurs de l’ancien régime.
Prions pour qu’ils ne déchantent pas, ces compatriotes qui placent une confiance inouïe dans les performances de nos gendarmes-enquêteurs. En effet, le travail d’investigations que le Procureur spécial Alioune Ndao vient de confier à la Section de Recherches ne sera pas une partie de plaisir contrairement à ce que croit le commun des Sénégalais. La compétence et le professionalisme des hommes qui composent cette unité d’élite de notre Gendarmerie nationale ne sont pas en cause, bien entendu, mais leurs conditions et moyens de travail. D’abord, il faut savoir que la « SR » est une redoutable unité exerçant exclusivement des missions de police judiciaire. Il s’agit d’ enquêtes et autres investigations à la fois longues et complexes portant sur des faits extrêmement graves : crimes économiques ou de sang, trafics de drogue, actes de terrorisme, complots contre la sûreté de l’Etat et autres faits criminels à l’échelle nationale et internationale. A la « SR », nous dit-on, il n’y a jamais eu d’affaire non élucidée. Toutes ont abouti, fussent-elles les plus complexes et les plus rocambolesques. Autant donc dire que le Procureur spécial ne s’est pas trompé d’unité en confiant la lourde et noble mission consistant à traquer les biens mal acquis sous l’ancien régime aux enquêteurs de la Gendarmerie. Des deniers publics évaporés estimés à plusieurs milliards cfa. Des milliards cachés ou blanchis aux quatre coins du monde. De ce point de vue, rien que le nom « SR » est un gage d’espoir pour les populations de voir traquer et retrouver les biens de la nation spoliés. Mieux, l’expérience et le professionnalisme des enquêteurs et rusés de la « SR » sont à même de faire la différence. Autre élément déterminant, les éléments de la « SR » travaillent sous la direction d’un certain commandant Cheikh Sarr, un enquêteur de métier !
Hélas, tous ces atouts ne suffisent pas puisque les ex-ministres et autres dignitaires de la République qu’ils sont chargés de cuisiner, dont ils doivent passer le patrimoine au peigne fin, et qu’ils doivent faire avouer semblent être mieux armés et mieux équipés qu’eux, les gendarmes poursuivants.
Dans l’Armée, on donne trois mots clés pour réussir une opération : « Un chef, une mission, des moyens ». Et certes, la « SR » dispose à sa tête d’un véritable chef, très compétent. Sa mission, dans cette enquête, est clairement définie par le Procureur spécial de la CREI qui l’a chargée de traquer les biens de la Nation présumés détournés par des dignitaires de l’ancien régime. Toute la question est, dès lors, celle de savoir si elle dispose de moyens suffisants pour mener à bien cette très lourde mission. La réponse est négative, hélas.
En effet, les dirigeants du défunt régime libéral avaient procédé à une véritable politique de la terre brûlée avant de quitter leurs bureaux au lendemain de la défaite du 25 mars dernier. Certains parmi eux avaient déjà sécurisé leurs biens et brouillé toutes les pistes susceptibles de permettre de découvrir le pillage auquel ils s’étaient livrés. Et puis, même lorsqu’ils étaient au pouvoir, ils avaient verrouillé leurs arrières pour des raisons politiques dès lors que le président Abdoulaye Wade savait brandir l’arme des audits pour faire régner l’ordre dans les rangs du Pds. Et gare à ceux qui sortaient des rangs pour décrier la dérive monarchique du régime. La jurisprudence politique « Idrissa Seck » avait servi de leçon pour tous ! Une leçon bien retenue par la plupart des voleurs à col blanc du régime libéral. Autrement dit, la plupart des responsables qui étaient aux affaires avaient bien préparé l’après-Wade. Les premières opérations d’investigations menées par les enquêteurs de la « SR » confirment cette thèse. En effet, certains anciens ministres, députés, directeurs de sociétés nationales avaient monté des sociétés civiles immobilières (SCI) sous statut familial. Seulement voilà, ces Sci n’étaient que des sociétés fantômes, voire écrans, destinées à blanchir des fonds volés. Et si des notaires ont eu à collaborer de manière loyale et franche avec les enquêteurs suite à des réquisitions envoyées par le procureur de la République, d’autres se sont rebellés sans avoir l’air d’y toucher. En effet, ils n’ont mis à la disposition des enquêteurs que des dossiers erronés ou évasifs. C’est de notoriété publique qu’un grand cabinet qui faisait des affaires en or sous le règne des libéraux n’a pas joué franc jeu alors que la loi exige la levée du secret professionnel au profit du fisc ou de la justice. Commentaire dépité d’un enquêteur de la « SR » : « Que voulez-vous ? Ces notaires ne vont pas gâcher des relations d’affaires avec des clients qui leur font gagner des centaines de millions de francs en les dénonçant auprès de nous. Ils préfèrent donc louvoyer, nous donner des informations erronées ou parcellaires plutôt que de perdre ces précieux clients en les dénonçant. Et puis, ils se disent au fond d’eux-mêmes que ces audits sont une mode qui passera bien vite. Alors, estiment-ils, mieux vaut garder nos clients et jouer avec les gendarmes ou les policiers… » Même les réquisitions envoyées à la Chambre de Commerce de Dakar, à la Direction du Cadastre et même aux compagnies d’Assurance-Vie n’ont pas donné grand chose. Malgré tout, ces enquêteurs chevronnés pourront sans doute trouver de bonnes pistes menant vers la délinquance financière et immobilière, hélas, ils auront du mal à avoir des preuves palpables. Autre manifestation de la politique de terre brûlée des vaincus du 25 mars, même pour avoir la filiation exacte (date et lieu de naissance et noms des parents) des différentes personnes mises en cause, les enquêteurs ont beaucoup tourné en rond. Il a fallu qu’ils se rabattent au secrétariat général du ministère des Affaires étrangères pour sauver la face. Là, ou moins, la plupart des dignitaires (responsables politiques, hommes d’affaires, directeurs de sociétés…) avaient laissé des pièces pour la confection de passeports diplomatiques. Malgré tout, il y a un richissime homme d’affaires qui a tenté d’effacer toute trace de ses transactions et de créer son insolvabilité. Il s’agit d’un ex-gros fournisseur de la Senelec sous l’ancien régime. Pour son cas, les éléments du commandant Cheikh Sarr risquent de buter sur une impasse immobilière. Les premiers indices font en effet apparaître que l’homme d’affaires dont le sort judiciaire est lié à celui d’un ancien ministre qui est son ami, aurait hypothéqué auprès des banques ses différents immeubles et villas. Un stratagème pour mettre à l’abri son patrimoine immobilier, histoire de créer un éventuel bras de fer entre la Cour de répression de l’enrichissement illicite et les banques.
S’agissant de ces dernières, on nous dit qu’elles ont été très coopératives vis-à-vis des enquêteurs de la « SR ». Car tous les comptes dont disposaient les personnalités incriminées ont pu être passés au peigne fin. Mais là, la pêche n’a pas été fructueuse puisque si ces comptes ont enregistré des mouvements cumulés assez importants en 12 ans, ils ne contenaient pas des sommes colossales en revanche. À l’évidence les détourneurs, pas fous, ont planqué leur argent ailleurs… Autant dire que les enquêteurs de la « Section de Recherches » auront du pain sur la planche pour découvrir où sont cachés les milliards des biens mal acquis.
SUNEOR ET TRANSRAIL CONSISTITUENT UN VRAI GIRATOIRE MENANT VERS DES PISTES SERIEUSES
Cela dit, « le Témoin » est en mesure d’affirmer que les gendarmes-enquêteurs concentrent leurs efforts sur deux grands dossiers. Il s’agit de ceux de Suneor et Transrail, des sociétés qui appartiennent toutes deux à l’homme d’affaires sénégalais d’origine libanaise, M. Abass Jaber. D’après leurs indicateurs, le « rachat » de ces deux grandes sociétés envelopperait des « deals » de plusieurs milliards de nos francs. En particulier, les repreneurs auraient promis des trocs et des donations de villas situées à Paris et à Dakar pour faciliter des transactions nébuleuses. Ont-ils respecté le « deal » des biens immobiliers et les autres clauses du contrat ? Les enquêteurs de la gendarmerie cherchent justement à établir cela.
Face à la presse, le Procureur Spécial Alioune Ndao a été courageux et pédagogue. Même s’il a filé immédiatement après à Touba pour s’expliquer… Après avoir donné un excellent cours magistral pour mieux camper le débat des poursuites et les missions de la juridiction, il a pris ses responsabilités pour livrer la première vague des personnes incriminées. Maintenant, la Section de Recherches de la Gendarmerie est mise à l’épreuve. Elle fait face à l’histoire. Sa mission est très lourde. Redoutable. Nous ne sommes pas là pour plaider pour le bien-être matériel ou social des enquêteurs de la « SR ». Seulement voilà, nous estimons que ces gendarmes doivent être dotés d’importants moyens financiers et matériels. Des moyens à la dimension de l’ampleur des dégâts financiers qu’ils sont chargés de déterminer et circonscrire. Parce que dans une traque de biens mal acquis où ils doivent pourchasser une redoutable mafia, l’enquête classique atteint bien vite ses limites. Et surtout face à des mastodontes financiers qui ne comptent reculer devant rien et sont prêts à tout. En effet, ils n'hésiteront pas à recourir aux pires scénarios pour sauvegarder leur patrimoine ou faire reculer la Justice. Donc pour briser ces chaînes de corruption ou de lobbying installées et entretenues par les accusés, les enquêteurs de la gendarmerie doivent disposer de gros moyens afin de pouvoir approcher, soudoyer et convaincre divers indicateurs aptes à leur faciliter leur travail. Ils devront même, pourquoi pas, pouvoir ouvrir un numéro vert ou un « email vert » pour mettre à contribution les citoyens ou informateurs susceptibles d’apporter des indices permettant d’aider à récupérer les milliards de la Nation détournés par des malfrats…
Pape NDIAYE
Le Témoin N° 1104 –Hebdomadaire Sénégalais ( NOVEMBRE 2012 )
Après cette sortie du Procureur spécial, tous les Sénégalais sont convaincus que les enquêteurs de la Section de Recherches de la Gendarmerie nationale vont écraser en un tournemain ces dangereux pilleurs des caisses de la République. Mieux, l’opinion publique croit dur comme fer que les gendarmes vont déterrer et soulever, comme des hercules, tous les immeubles et villas cachés par les présumés voleurs de l’ancien régime.
Prions pour qu’ils ne déchantent pas, ces compatriotes qui placent une confiance inouïe dans les performances de nos gendarmes-enquêteurs. En effet, le travail d’investigations que le Procureur spécial Alioune Ndao vient de confier à la Section de Recherches ne sera pas une partie de plaisir contrairement à ce que croit le commun des Sénégalais. La compétence et le professionalisme des hommes qui composent cette unité d’élite de notre Gendarmerie nationale ne sont pas en cause, bien entendu, mais leurs conditions et moyens de travail. D’abord, il faut savoir que la « SR » est une redoutable unité exerçant exclusivement des missions de police judiciaire. Il s’agit d’ enquêtes et autres investigations à la fois longues et complexes portant sur des faits extrêmement graves : crimes économiques ou de sang, trafics de drogue, actes de terrorisme, complots contre la sûreté de l’Etat et autres faits criminels à l’échelle nationale et internationale. A la « SR », nous dit-on, il n’y a jamais eu d’affaire non élucidée. Toutes ont abouti, fussent-elles les plus complexes et les plus rocambolesques. Autant donc dire que le Procureur spécial ne s’est pas trompé d’unité en confiant la lourde et noble mission consistant à traquer les biens mal acquis sous l’ancien régime aux enquêteurs de la Gendarmerie. Des deniers publics évaporés estimés à plusieurs milliards cfa. Des milliards cachés ou blanchis aux quatre coins du monde. De ce point de vue, rien que le nom « SR » est un gage d’espoir pour les populations de voir traquer et retrouver les biens de la nation spoliés. Mieux, l’expérience et le professionnalisme des enquêteurs et rusés de la « SR » sont à même de faire la différence. Autre élément déterminant, les éléments de la « SR » travaillent sous la direction d’un certain commandant Cheikh Sarr, un enquêteur de métier !
Hélas, tous ces atouts ne suffisent pas puisque les ex-ministres et autres dignitaires de la République qu’ils sont chargés de cuisiner, dont ils doivent passer le patrimoine au peigne fin, et qu’ils doivent faire avouer semblent être mieux armés et mieux équipés qu’eux, les gendarmes poursuivants.
Dans l’Armée, on donne trois mots clés pour réussir une opération : « Un chef, une mission, des moyens ». Et certes, la « SR » dispose à sa tête d’un véritable chef, très compétent. Sa mission, dans cette enquête, est clairement définie par le Procureur spécial de la CREI qui l’a chargée de traquer les biens de la Nation présumés détournés par des dignitaires de l’ancien régime. Toute la question est, dès lors, celle de savoir si elle dispose de moyens suffisants pour mener à bien cette très lourde mission. La réponse est négative, hélas.
En effet, les dirigeants du défunt régime libéral avaient procédé à une véritable politique de la terre brûlée avant de quitter leurs bureaux au lendemain de la défaite du 25 mars dernier. Certains parmi eux avaient déjà sécurisé leurs biens et brouillé toutes les pistes susceptibles de permettre de découvrir le pillage auquel ils s’étaient livrés. Et puis, même lorsqu’ils étaient au pouvoir, ils avaient verrouillé leurs arrières pour des raisons politiques dès lors que le président Abdoulaye Wade savait brandir l’arme des audits pour faire régner l’ordre dans les rangs du Pds. Et gare à ceux qui sortaient des rangs pour décrier la dérive monarchique du régime. La jurisprudence politique « Idrissa Seck » avait servi de leçon pour tous ! Une leçon bien retenue par la plupart des voleurs à col blanc du régime libéral. Autrement dit, la plupart des responsables qui étaient aux affaires avaient bien préparé l’après-Wade. Les premières opérations d’investigations menées par les enquêteurs de la « SR » confirment cette thèse. En effet, certains anciens ministres, députés, directeurs de sociétés nationales avaient monté des sociétés civiles immobilières (SCI) sous statut familial. Seulement voilà, ces Sci n’étaient que des sociétés fantômes, voire écrans, destinées à blanchir des fonds volés. Et si des notaires ont eu à collaborer de manière loyale et franche avec les enquêteurs suite à des réquisitions envoyées par le procureur de la République, d’autres se sont rebellés sans avoir l’air d’y toucher. En effet, ils n’ont mis à la disposition des enquêteurs que des dossiers erronés ou évasifs. C’est de notoriété publique qu’un grand cabinet qui faisait des affaires en or sous le règne des libéraux n’a pas joué franc jeu alors que la loi exige la levée du secret professionnel au profit du fisc ou de la justice. Commentaire dépité d’un enquêteur de la « SR » : « Que voulez-vous ? Ces notaires ne vont pas gâcher des relations d’affaires avec des clients qui leur font gagner des centaines de millions de francs en les dénonçant auprès de nous. Ils préfèrent donc louvoyer, nous donner des informations erronées ou parcellaires plutôt que de perdre ces précieux clients en les dénonçant. Et puis, ils se disent au fond d’eux-mêmes que ces audits sont une mode qui passera bien vite. Alors, estiment-ils, mieux vaut garder nos clients et jouer avec les gendarmes ou les policiers… » Même les réquisitions envoyées à la Chambre de Commerce de Dakar, à la Direction du Cadastre et même aux compagnies d’Assurance-Vie n’ont pas donné grand chose. Malgré tout, ces enquêteurs chevronnés pourront sans doute trouver de bonnes pistes menant vers la délinquance financière et immobilière, hélas, ils auront du mal à avoir des preuves palpables. Autre manifestation de la politique de terre brûlée des vaincus du 25 mars, même pour avoir la filiation exacte (date et lieu de naissance et noms des parents) des différentes personnes mises en cause, les enquêteurs ont beaucoup tourné en rond. Il a fallu qu’ils se rabattent au secrétariat général du ministère des Affaires étrangères pour sauver la face. Là, ou moins, la plupart des dignitaires (responsables politiques, hommes d’affaires, directeurs de sociétés…) avaient laissé des pièces pour la confection de passeports diplomatiques. Malgré tout, il y a un richissime homme d’affaires qui a tenté d’effacer toute trace de ses transactions et de créer son insolvabilité. Il s’agit d’un ex-gros fournisseur de la Senelec sous l’ancien régime. Pour son cas, les éléments du commandant Cheikh Sarr risquent de buter sur une impasse immobilière. Les premiers indices font en effet apparaître que l’homme d’affaires dont le sort judiciaire est lié à celui d’un ancien ministre qui est son ami, aurait hypothéqué auprès des banques ses différents immeubles et villas. Un stratagème pour mettre à l’abri son patrimoine immobilier, histoire de créer un éventuel bras de fer entre la Cour de répression de l’enrichissement illicite et les banques.
S’agissant de ces dernières, on nous dit qu’elles ont été très coopératives vis-à-vis des enquêteurs de la « SR ». Car tous les comptes dont disposaient les personnalités incriminées ont pu être passés au peigne fin. Mais là, la pêche n’a pas été fructueuse puisque si ces comptes ont enregistré des mouvements cumulés assez importants en 12 ans, ils ne contenaient pas des sommes colossales en revanche. À l’évidence les détourneurs, pas fous, ont planqué leur argent ailleurs… Autant dire que les enquêteurs de la « Section de Recherches » auront du pain sur la planche pour découvrir où sont cachés les milliards des biens mal acquis.
SUNEOR ET TRANSRAIL CONSISTITUENT UN VRAI GIRATOIRE MENANT VERS DES PISTES SERIEUSES
Cela dit, « le Témoin » est en mesure d’affirmer que les gendarmes-enquêteurs concentrent leurs efforts sur deux grands dossiers. Il s’agit de ceux de Suneor et Transrail, des sociétés qui appartiennent toutes deux à l’homme d’affaires sénégalais d’origine libanaise, M. Abass Jaber. D’après leurs indicateurs, le « rachat » de ces deux grandes sociétés envelopperait des « deals » de plusieurs milliards de nos francs. En particulier, les repreneurs auraient promis des trocs et des donations de villas situées à Paris et à Dakar pour faciliter des transactions nébuleuses. Ont-ils respecté le « deal » des biens immobiliers et les autres clauses du contrat ? Les enquêteurs de la gendarmerie cherchent justement à établir cela.
Face à la presse, le Procureur Spécial Alioune Ndao a été courageux et pédagogue. Même s’il a filé immédiatement après à Touba pour s’expliquer… Après avoir donné un excellent cours magistral pour mieux camper le débat des poursuites et les missions de la juridiction, il a pris ses responsabilités pour livrer la première vague des personnes incriminées. Maintenant, la Section de Recherches de la Gendarmerie est mise à l’épreuve. Elle fait face à l’histoire. Sa mission est très lourde. Redoutable. Nous ne sommes pas là pour plaider pour le bien-être matériel ou social des enquêteurs de la « SR ». Seulement voilà, nous estimons que ces gendarmes doivent être dotés d’importants moyens financiers et matériels. Des moyens à la dimension de l’ampleur des dégâts financiers qu’ils sont chargés de déterminer et circonscrire. Parce que dans une traque de biens mal acquis où ils doivent pourchasser une redoutable mafia, l’enquête classique atteint bien vite ses limites. Et surtout face à des mastodontes financiers qui ne comptent reculer devant rien et sont prêts à tout. En effet, ils n'hésiteront pas à recourir aux pires scénarios pour sauvegarder leur patrimoine ou faire reculer la Justice. Donc pour briser ces chaînes de corruption ou de lobbying installées et entretenues par les accusés, les enquêteurs de la gendarmerie doivent disposer de gros moyens afin de pouvoir approcher, soudoyer et convaincre divers indicateurs aptes à leur faciliter leur travail. Ils devront même, pourquoi pas, pouvoir ouvrir un numéro vert ou un « email vert » pour mettre à contribution les citoyens ou informateurs susceptibles d’apporter des indices permettant d’aider à récupérer les milliards de la Nation détournés par des malfrats…
Pape NDIAYE
Le Témoin N° 1104 –Hebdomadaire Sénégalais ( NOVEMBRE 2012 )