Parlez nous du rôle des députés au parlement de la CEDEAO ?
Au niveau de la CEDEAO, le Sénégal est représenté par trois (3) députés qui sont élus par l’Assemblée et le parlement du Sénégal. Une fois arrivés là-bas, ils travaillent dans des commissions. C’est une assemblée qui n’a pas de voix délibérative mais donne ses avis et conseils aux chefs d’Etat. Au niveau de ce parlement, j’ai été, pendant six ans, rapporteur au niveau de la commission des politiques économiques et, pendant quatre ans, dans la commission des politiques des Finances. Notre rôle était de travailler sur l’ensemble des politiques économiques des Etats respectifs, sur le contrôle du budget au sein du parlement et, de manière générale, sur l’intégration ouest africaine. J’occupais ces fonctions de 2007 à 2011.
Qu’avez-vous pu réaliser au sein de ce parlement ?
Le Sénégal a l’habitude d’envoyer là-bas des députés qui sont écoutés. C'est-à-dire que le Sénégal a une très belle réputation. Durant notre passage, nous avons eu à travailler sur des dossiers extrêmement importants. Je vous ai parlé de la monnaie unique ouest africaine. L’objectif était de faire de sorte qu’une monnaie unique soit appliquée en 2020 pour l’ensemble des pays membres. Je ne vois pas les prémices. Je ne vois pas la volonté politique de la part des chefs d’Etat. En ce qui concerne les reformes amenées au sein du parlement, nous avions eu à travailler sur la libre circulation des personnes et des biens. Mon objectif est de travailler pour qu’il y ait une union ouest africaine qui sera une des prémices de l’union africaine. En tant que panafricaniste, je suis très réaliste. On ne peut pas tout d’un coup faire une union africaine mais on peut partir de la CEDEAO pour en faire une union politique et économique. Je veux dire une union des Etats de la CEDEAO. A partir de ce moment, les autres Etats pourront travailler pour des unions au niveau du centre, du sud, etc., c’est à partir de ce moment que l’union africaine peut être une réalité.
Pensez-vous que les députés du régime actuel sont en train de poursuivre vos projets entamés ?
Il y a énormément de choses qui se passent au niveau de l’Assemblée nationale que les populations ne savent pas. Ce n’est pas, à l’origine, des choses décidées par l’Etat du Sénégal. On est dans une union qui est celle des Etats de l’Afrique de l’Ouest. Il y a pas mal de nos lois qui subissent des influences par rapport à ce qu’a décidé la CEDEAO. Elle a ses traités et une fois que ces traités sont décidés et appliqués, l’ensemble des Etats doivent les traiter pour les intégrer dans nos lois internes. Donc, faire ce qu’on appelle la domiciliation à ce niveau. Sur le plan macro économique, tout ce qui se fait a été décidé par la CEDEAO. A cet effet, le Sénégal doit tout faire pour rester dans les critères de convergence par rapport au déficit budgétaire, aux prix, à la TVA, et c'est l’UEMOA et la CEDEAO qui décideront. Par exemple, en matière électorale, il y a une loi que les hommes politiques ont l’habitude de brandir qui est la modification de la loi électorale. Celle-ci ne peut pas être modifiée six mois avant les élections. Là, je me pose des questions par rapport aux élections locales qui vont venir. On nous parle de l’Acte III de la Décentralisation qui aura une incidence sur le code électoral. Et, jusqu’à présent, nous n’avons pas encore les conclusions de cet Acte III et bientôt nous serons à six (6) mois des élections locales. Soit on renvoie les élections soit on se fie des conclusions de l’Acte III de la Décentralisation et, là, je reste dubitatif par rapport à ce que le gouvernement veut faire.
En tant que maire, c’est le report des élections locales qui vous arrange ?
Ce n’est pas ce qui m’arrange qui compte. Ce qui est important, c’est ce qui arrange le Sénegal et les Sénégalais. Pour moi, un projet exécuté doit être évalué pour savoir ce qui a marché et ce qui n’a pas marché. On a eu l’Acte I et l’Acte II de la Décentralisation, il faut évaluer. Après l’évaluation, il faut proposer des réformes par rapport à certaines réformes proposées. Les collectivités doivent être renforcées. Au Sénégal, elles sont trop faibles du point de vue de la superficie, du point de vue de l’économie, des finances locales. L’Etat ne veut toujours pas lâcher une part extrêmement importante de la TVA pour ces collectivités locales qui sont ses démembrements. On est resté toujours à 5% alors qu’au Maroc, par exemple, on est à plus de 35%, dans certains pays, on est à 25%. Dans un premier temps, on devait aller au moins jusqu’à 25% de la part de la TVA pour les collectivités locales pour leur permettre d’avoir une possibilité économique. Il y a énormément des compétences qui nous sont transférées. Mais l’Etat ne respecte pas la loi qui voudrait que le transfert de compétence soit accompagné d’un transfert concomitant de moyens. On nous transfert des problèmes mais on ne nous donne pas les moyens pour faire face à ces problèmes. Je prends l’exemple de la commune de Khombole qui est née depuis 1925. Cette vieille commune, on veut la confiner à ses limites de cette date. Il y a eu un décret de 2004 qui a élargi la superficie de la commune mais ce n’est pas suffisant. Il faudrait qu’on prenne la décision d’agrandir l’ensemble des communes. Les populations des communautés rurales viennent habiter les communes. Ils ont des superficies extraordinaires ce qui fait que les communes ne peuvent pas s’élargir. Il faut que l’Etat prenne la décision de pouvoir élargir les communes. Cela serait une réforme vraiment souhaitée. Il faudrait encore plus d’autonomie aux collectivités locales pour qu’elles puissent travailler pour renforcer la prise en charge des besoins des populations.
Comment faites vous alors pour satisfaire les attentes des populations ?
C’est extrêmement difficile de gérer une collectivité locale. Quand on est maire dans une commune. Je prends l’exemple sur Khombole où tout le monde se connait, on est tous des parents, on est tous des frères et le maire est accessible. Les populations, c’est de leur devoir, c’est de leur droit de penser que le maire est là pour résoudre l’ensemble de leurs problèmes. Malheureusement, elles n’essaient pas de comprendre les possibilités du maire. Le maire a un budget qui est basé sur des prévisions et des dépenses. Des fois, vous prévoyez d’avoir tant de recettes, au finish, vous n’en avez pas. Et, même si vous l’aviez, il faut savoir que le budget d’une commune ne peut pas faire face aux besoins. Le maire est obligé de faire une gymnastique extrêmement difficile pour régler les problèmes des populations. En sortant régulièrement de sa poche, en voyageant pour trouver des partenaires pour le développement de la commune…
Vous êtes maire, vous êtes à votre deuxième mandat, n’est-il pas temps que vous tiriez un bilan par rapport aux deux mandats que vous avez faits à la tête de cette collectivité locale?
C’est en 2002 que j’ai été élu pour la première fois maire de Khombole. J’ai trouvé que tout était prioritaire que tout était à refaire et l’exemple que je donne est que j’ai trouvé un budget de 60 millions de francs CFA avec une dette de 70 millions. Il fallait payer les dettes mais il fallait aussi essayer de trouver des moyens. On a triplé le budget à notre première année et on a travaillé pour faire des projets. Dans le domaine des infrastructures, on a énormément fait. On a construit plusieurs écoles, fait des routes, on a fait le marché central, des plateaux multifonctionnels. On a refait le stade, ainsi de suite, dans le domaine, on a fait beaucoup de choses. Il y a le centre de santé de référence de Khombole qui a été inauguré il y a un an de cela. Et on continue et je pense que les Khombolois peuvent en témoigner, nous avons un bilan très positif bien que ce n’est pas encore suffisant. On s’était fixé un objectif de quinze ans pour faire de la commune une véritable ville parce qu’il y a ce qui fait la différence entre la ville et la campagne. Donc c’était des infrastructures, on a essayé de booster l’économie pour que les populations puissent trouver de quoi s’occuper. Et, dans ce domaine, on a pu avoir des partenaires et, pour la première fois dans l’histoire de Khombole, une usine est en train d’être construite, elle va au moins prendre cent personnes dans un premier temps. Et ça, c’est important. Cent salariés, cent Khombolois qui vont travailler et avoir un salaire.
Parlez-nous de cette usine.
C’est une usine de fabrication de briques et de pavés et il y a d’autres partenaires avec qui nous travaillons. Parce qu’on a une zone industrielle qu’on a mise sur place et nous sommes en train de travailler avec beaucoup d’entrepreneurs pour venir s’installer à Khombole et aider les Khombolois à avoir de l’emploi.
Qui sont ces partenaires ?
L’usine c’est un Sénégalais qui est en train de la construire, il y a la demande d’un Italien qui est dans la construction métallique qui va venir et nous sommes toujours en contact avec nos amis Brésiliens. Et, dans le domaine de l’énergie, on a un projet de centrale solaire, on est en train de travailler avec des partenaires dans ça. Et, je pense que c’est en très bonne voie. Dans le domaine du sport, nous aidons régulièrement les ASC, et l’équipe fanion de Khombole qui est l’ASC Khombole, nous leur donnons régulièrement des subventions et je pense que, sur ce plan-là, nous avons fait beaucoup de choses. Et maintenant, je veux m’orienter un peu plus vers le domaine culturel, aider davantage les acteurs culturels, les musiciens, les jeunes rappeurs, ceux qui font le théâtre, les aider à pouvoir s’épanouir.
Ne craignez-vous pas que la localité soit agitée lors des élections locales à venir entre vous et le camp de la mouvance présidentielle ?
Je souhaite que les élections puissent se dérouler à date échue, mais vous savez une élection locale, que ça soit une élection de manière générale, c’est toujours le rendez-vous des acteurs politiques avec les populations. Moi, en tant que maire sortant, mon devoir, c’est de me présenter encore devant les Khombolois pour leur dire voici mon bilan. Voilà ce que je vous avais promis et voilà ce qu’en j’ai réalisé. Et maintenant, c’est à eux de voir s’ils veulent me réélire ou pas. Mais, j’espère qu’ils vont apprécier le bilan à sa juste valeur, et mon équipe et moi-même allons être réélus et, ça, j’en suis presque convaincu.
Vous semblez convaincu d’avoir un troisième mandat, pourquoi tant d’optimisme ?
Effectivement, parce que je suis relativement jeune, j’ai commencé très tôt la politique, j’ai été le plus jeune maire de ville du Sénégal en 2002. L’autre chose est que j’ai beaucoup d’ambitions pour Khombole, je m’étais fixé des objectifs, j’en ai atteint certains, les autres je suis toujours en voie de les atteindre. Et, je m’étais donné au minimum quinze ans pour changer le visage de Khombole. Il y a des choses qui ont été faites, et j’ai des projets, c’est tout à fait légitime que je puisse demander à la population de me faire encore confiance pour continuer avec elle cette aventure pour Khombole.
Certains maires ont commencé à rejoindre le camp présidentiel. Est-ce que vous êtes dans les dispositions de transhumer?
Je ne peux pas revenir sur ce que je combattais avant. J’ai travaillée pour le PDS et pour l’avènement de l’Alternance. Et, j’ai toujours été gêné par la transhumance. Je vous raconte l’anecdote que je donne toujours : pour être député, il a fallu que je sorte et c'est avec mon ami Mamadou Diagne Fada qu'on a créé le ‘’Warwi’’ pour que je puisse être élu député. J’ai toujours combattu la transhumance parce que ça ne permet pas de clarifier le jeu politique. Ce n’est pas parce qu’on a perdu le pouvoir qu’on doit transhumer et gêner les gens qui ont travaillé pour arriver au pouvoir. Moi, je respecte ceux qui ont travaillé avec Macky Sall pour accéder au pouvoir. Et, nous de l’opposition, nous devons travailler pour revenir au pouvoir. A partir de ce moment, je ne ferai jamais partie de ces gens qui vont transhumer. Ce n’est pas dans mes valeurs, ça ne rentre pas dans le cadre de mes valeurs et je combattrai la transhumance. Pour rien au monde je ne vais transhumer.
Quelle appréciation faites-vous du régime de Macky Sall ?
J’aurai bien aimé pouvoir dire que depuis qu’il est venu voilà ce qui a été fait. Mais, depuis lors, rien n’a été fait. Je ne désespère pas de le voir, je le dis d’autant plus qu’il y a eu des projets qui ont été initiés avec le pouvoir sortant dans le domaine des infrastructures et dans le domaine aussi de la jeunesse. Dans le domaine des infrastructures, nous avions un programme de route intérieure au niveau de Khombole, également de la route Khombole-Touba Toul-Tivaoune. Et, cette dernière a été réalisée mais la voirie intérieure de Khombole tarde à voir le jour. On me dit qu’il n’y a pas de moyens pour le faire alors que c’était calé. On avait au moins 10 km de route à l’intérieur de Khombole qu’il fallait faire. Ça devait se terminer en 2014, rien n’a été fait et ce n’est même plus programmé. Au niveau de la jeunesse, on avait un programme de Cuber pour former les jeunes en informatique avec l’ANEJ. On m’a fait signer un protocole et, depuis lors, il y a beaucoup de tergiversations. Je ne vois même plus de communication venant de l’ANEJ pour m’expliquer les difficultés qui pourraient expliquer ce retard. Donc, ne serait ce que par rapport à ça, cela veut dire qu’il y a beaucoup de difficultés. Et Khombole n’a pas encore senti les effets positifs de l’arrivée du Président Macky Sall.
Cela veut dire que vous attendez beaucoup de ce pouvoir ?
Bien sûr, vous savez l’Etat est une continuité, la commune c’est un démembrement de l’Etat. Les projets qui avaient été projetés par l’Etat du Sénégal devraient voir leurs réalisations. Ça n’a pas encore été fait, nous ne recevons pas d’explication venant du pouvoir disant que voilà pourquoi ceci n’a pas été fait. Mais, je ne désespère pas. J’espère que l’ambition du pouvoir est de faire des réalisations pour la population. Parce que parmi la population de Khombole, il y en a qui ont voté pour Macky Sall et je ne pense pas que ça soit une discrimination par rapport à nous. Cela rentre dans le cadre des difficultés du pouvoir actuel pour faire face aux besoins de sa population.
Vous, qu’est-ce que vous auriez demandé à la population de Khombole ?
C’est de continuer à m’accompagner comme ils l’ont toujours fait. Mais de ne pas uniquement m’accompagner en restant derrière, je voudrais qu’ensemble, on puisse relever les défis. Maintenant que les objectifs de réalisations d’infrastructures sont presque atteints, ce que je voudrais, c’est donner le pouvoir économique à la population de Khombole et ça ne peut se faire qu’en ayant des opérateurs économiques au niveau de Khombole qui ont de l’ambition. Pour que nous, en tant qu’autorité, nous puissions les accompagner pour aller trouver les financements de leurs projets. On avait initié beaucoup de choses comme des lignes de crédit pour permettre aux entrepreneurs, surtout au niveau des jeunes et des femmes, de pouvoir en bénéficier et, jusqu’à présent, ça tarde encore. Les lignes de crédit existent mais il y a en a qui ont pris et qui n’ont pas remboursé. Ce qui ne facilite pas aux autres de pouvoir en bénéficier. Et tout cela, nous allons en discuter dans une large réunion pour nous permettre de faire le bilan de ce qui a été fait dans ce domaine. Ce, pour aussi pouvoir pousser les autres dans le domaine de la formation et dans le domaine de l’encadrement pour leur permettre de pouvoir créer des emplois. J’ai un projet extrêmement important qui me tient à cœur, c’est un programme de volontariat que j’avais initié depuis pratiquement cinq ans que je n’avais pas pu réaliser. Cette année, d’ici un à deux mois, nous allons vers le début de la réalisation. L’idée c’est de prendre des jeunes et les moins jeunes parce que, au Sénégal, quand on parle de jeunes, on a l’habitude de penser que c’est uniquement les gens qui ont trente à trente six ans. Maintenant, la situation est telle qu’il y a des gens qui ont plus de 36 ans et qui n’ont pas encore les moyens de pouvoir faire face à leurs besoins. Ces gens-là, ils sont valides, il faut les considérer comme des jeunes et essayer de les encadrer en leur donnant une formation mais, surtout, en les aidants à trouver de quoi financer leurs micro-projets pour pouvoir s’en sortir.
Entretien réalisé par Tapa Tounkara
Au niveau de la CEDEAO, le Sénégal est représenté par trois (3) députés qui sont élus par l’Assemblée et le parlement du Sénégal. Une fois arrivés là-bas, ils travaillent dans des commissions. C’est une assemblée qui n’a pas de voix délibérative mais donne ses avis et conseils aux chefs d’Etat. Au niveau de ce parlement, j’ai été, pendant six ans, rapporteur au niveau de la commission des politiques économiques et, pendant quatre ans, dans la commission des politiques des Finances. Notre rôle était de travailler sur l’ensemble des politiques économiques des Etats respectifs, sur le contrôle du budget au sein du parlement et, de manière générale, sur l’intégration ouest africaine. J’occupais ces fonctions de 2007 à 2011.
Qu’avez-vous pu réaliser au sein de ce parlement ?
Le Sénégal a l’habitude d’envoyer là-bas des députés qui sont écoutés. C'est-à-dire que le Sénégal a une très belle réputation. Durant notre passage, nous avons eu à travailler sur des dossiers extrêmement importants. Je vous ai parlé de la monnaie unique ouest africaine. L’objectif était de faire de sorte qu’une monnaie unique soit appliquée en 2020 pour l’ensemble des pays membres. Je ne vois pas les prémices. Je ne vois pas la volonté politique de la part des chefs d’Etat. En ce qui concerne les reformes amenées au sein du parlement, nous avions eu à travailler sur la libre circulation des personnes et des biens. Mon objectif est de travailler pour qu’il y ait une union ouest africaine qui sera une des prémices de l’union africaine. En tant que panafricaniste, je suis très réaliste. On ne peut pas tout d’un coup faire une union africaine mais on peut partir de la CEDEAO pour en faire une union politique et économique. Je veux dire une union des Etats de la CEDEAO. A partir de ce moment, les autres Etats pourront travailler pour des unions au niveau du centre, du sud, etc., c’est à partir de ce moment que l’union africaine peut être une réalité.
Pensez-vous que les députés du régime actuel sont en train de poursuivre vos projets entamés ?
Il y a énormément de choses qui se passent au niveau de l’Assemblée nationale que les populations ne savent pas. Ce n’est pas, à l’origine, des choses décidées par l’Etat du Sénégal. On est dans une union qui est celle des Etats de l’Afrique de l’Ouest. Il y a pas mal de nos lois qui subissent des influences par rapport à ce qu’a décidé la CEDEAO. Elle a ses traités et une fois que ces traités sont décidés et appliqués, l’ensemble des Etats doivent les traiter pour les intégrer dans nos lois internes. Donc, faire ce qu’on appelle la domiciliation à ce niveau. Sur le plan macro économique, tout ce qui se fait a été décidé par la CEDEAO. A cet effet, le Sénégal doit tout faire pour rester dans les critères de convergence par rapport au déficit budgétaire, aux prix, à la TVA, et c'est l’UEMOA et la CEDEAO qui décideront. Par exemple, en matière électorale, il y a une loi que les hommes politiques ont l’habitude de brandir qui est la modification de la loi électorale. Celle-ci ne peut pas être modifiée six mois avant les élections. Là, je me pose des questions par rapport aux élections locales qui vont venir. On nous parle de l’Acte III de la Décentralisation qui aura une incidence sur le code électoral. Et, jusqu’à présent, nous n’avons pas encore les conclusions de cet Acte III et bientôt nous serons à six (6) mois des élections locales. Soit on renvoie les élections soit on se fie des conclusions de l’Acte III de la Décentralisation et, là, je reste dubitatif par rapport à ce que le gouvernement veut faire.
En tant que maire, c’est le report des élections locales qui vous arrange ?
Ce n’est pas ce qui m’arrange qui compte. Ce qui est important, c’est ce qui arrange le Sénegal et les Sénégalais. Pour moi, un projet exécuté doit être évalué pour savoir ce qui a marché et ce qui n’a pas marché. On a eu l’Acte I et l’Acte II de la Décentralisation, il faut évaluer. Après l’évaluation, il faut proposer des réformes par rapport à certaines réformes proposées. Les collectivités doivent être renforcées. Au Sénégal, elles sont trop faibles du point de vue de la superficie, du point de vue de l’économie, des finances locales. L’Etat ne veut toujours pas lâcher une part extrêmement importante de la TVA pour ces collectivités locales qui sont ses démembrements. On est resté toujours à 5% alors qu’au Maroc, par exemple, on est à plus de 35%, dans certains pays, on est à 25%. Dans un premier temps, on devait aller au moins jusqu’à 25% de la part de la TVA pour les collectivités locales pour leur permettre d’avoir une possibilité économique. Il y a énormément des compétences qui nous sont transférées. Mais l’Etat ne respecte pas la loi qui voudrait que le transfert de compétence soit accompagné d’un transfert concomitant de moyens. On nous transfert des problèmes mais on ne nous donne pas les moyens pour faire face à ces problèmes. Je prends l’exemple de la commune de Khombole qui est née depuis 1925. Cette vieille commune, on veut la confiner à ses limites de cette date. Il y a eu un décret de 2004 qui a élargi la superficie de la commune mais ce n’est pas suffisant. Il faudrait qu’on prenne la décision d’agrandir l’ensemble des communes. Les populations des communautés rurales viennent habiter les communes. Ils ont des superficies extraordinaires ce qui fait que les communes ne peuvent pas s’élargir. Il faut que l’Etat prenne la décision de pouvoir élargir les communes. Cela serait une réforme vraiment souhaitée. Il faudrait encore plus d’autonomie aux collectivités locales pour qu’elles puissent travailler pour renforcer la prise en charge des besoins des populations.
Comment faites vous alors pour satisfaire les attentes des populations ?
C’est extrêmement difficile de gérer une collectivité locale. Quand on est maire dans une commune. Je prends l’exemple sur Khombole où tout le monde se connait, on est tous des parents, on est tous des frères et le maire est accessible. Les populations, c’est de leur devoir, c’est de leur droit de penser que le maire est là pour résoudre l’ensemble de leurs problèmes. Malheureusement, elles n’essaient pas de comprendre les possibilités du maire. Le maire a un budget qui est basé sur des prévisions et des dépenses. Des fois, vous prévoyez d’avoir tant de recettes, au finish, vous n’en avez pas. Et, même si vous l’aviez, il faut savoir que le budget d’une commune ne peut pas faire face aux besoins. Le maire est obligé de faire une gymnastique extrêmement difficile pour régler les problèmes des populations. En sortant régulièrement de sa poche, en voyageant pour trouver des partenaires pour le développement de la commune…
Vous êtes maire, vous êtes à votre deuxième mandat, n’est-il pas temps que vous tiriez un bilan par rapport aux deux mandats que vous avez faits à la tête de cette collectivité locale?
C’est en 2002 que j’ai été élu pour la première fois maire de Khombole. J’ai trouvé que tout était prioritaire que tout était à refaire et l’exemple que je donne est que j’ai trouvé un budget de 60 millions de francs CFA avec une dette de 70 millions. Il fallait payer les dettes mais il fallait aussi essayer de trouver des moyens. On a triplé le budget à notre première année et on a travaillé pour faire des projets. Dans le domaine des infrastructures, on a énormément fait. On a construit plusieurs écoles, fait des routes, on a fait le marché central, des plateaux multifonctionnels. On a refait le stade, ainsi de suite, dans le domaine, on a fait beaucoup de choses. Il y a le centre de santé de référence de Khombole qui a été inauguré il y a un an de cela. Et on continue et je pense que les Khombolois peuvent en témoigner, nous avons un bilan très positif bien que ce n’est pas encore suffisant. On s’était fixé un objectif de quinze ans pour faire de la commune une véritable ville parce qu’il y a ce qui fait la différence entre la ville et la campagne. Donc c’était des infrastructures, on a essayé de booster l’économie pour que les populations puissent trouver de quoi s’occuper. Et, dans ce domaine, on a pu avoir des partenaires et, pour la première fois dans l’histoire de Khombole, une usine est en train d’être construite, elle va au moins prendre cent personnes dans un premier temps. Et ça, c’est important. Cent salariés, cent Khombolois qui vont travailler et avoir un salaire.
Parlez-nous de cette usine.
C’est une usine de fabrication de briques et de pavés et il y a d’autres partenaires avec qui nous travaillons. Parce qu’on a une zone industrielle qu’on a mise sur place et nous sommes en train de travailler avec beaucoup d’entrepreneurs pour venir s’installer à Khombole et aider les Khombolois à avoir de l’emploi.
Qui sont ces partenaires ?
L’usine c’est un Sénégalais qui est en train de la construire, il y a la demande d’un Italien qui est dans la construction métallique qui va venir et nous sommes toujours en contact avec nos amis Brésiliens. Et, dans le domaine de l’énergie, on a un projet de centrale solaire, on est en train de travailler avec des partenaires dans ça. Et, je pense que c’est en très bonne voie. Dans le domaine du sport, nous aidons régulièrement les ASC, et l’équipe fanion de Khombole qui est l’ASC Khombole, nous leur donnons régulièrement des subventions et je pense que, sur ce plan-là, nous avons fait beaucoup de choses. Et maintenant, je veux m’orienter un peu plus vers le domaine culturel, aider davantage les acteurs culturels, les musiciens, les jeunes rappeurs, ceux qui font le théâtre, les aider à pouvoir s’épanouir.
Ne craignez-vous pas que la localité soit agitée lors des élections locales à venir entre vous et le camp de la mouvance présidentielle ?
Je souhaite que les élections puissent se dérouler à date échue, mais vous savez une élection locale, que ça soit une élection de manière générale, c’est toujours le rendez-vous des acteurs politiques avec les populations. Moi, en tant que maire sortant, mon devoir, c’est de me présenter encore devant les Khombolois pour leur dire voici mon bilan. Voilà ce que je vous avais promis et voilà ce qu’en j’ai réalisé. Et maintenant, c’est à eux de voir s’ils veulent me réélire ou pas. Mais, j’espère qu’ils vont apprécier le bilan à sa juste valeur, et mon équipe et moi-même allons être réélus et, ça, j’en suis presque convaincu.
Vous semblez convaincu d’avoir un troisième mandat, pourquoi tant d’optimisme ?
Effectivement, parce que je suis relativement jeune, j’ai commencé très tôt la politique, j’ai été le plus jeune maire de ville du Sénégal en 2002. L’autre chose est que j’ai beaucoup d’ambitions pour Khombole, je m’étais fixé des objectifs, j’en ai atteint certains, les autres je suis toujours en voie de les atteindre. Et, je m’étais donné au minimum quinze ans pour changer le visage de Khombole. Il y a des choses qui ont été faites, et j’ai des projets, c’est tout à fait légitime que je puisse demander à la population de me faire encore confiance pour continuer avec elle cette aventure pour Khombole.
Certains maires ont commencé à rejoindre le camp présidentiel. Est-ce que vous êtes dans les dispositions de transhumer?
Je ne peux pas revenir sur ce que je combattais avant. J’ai travaillée pour le PDS et pour l’avènement de l’Alternance. Et, j’ai toujours été gêné par la transhumance. Je vous raconte l’anecdote que je donne toujours : pour être député, il a fallu que je sorte et c'est avec mon ami Mamadou Diagne Fada qu'on a créé le ‘’Warwi’’ pour que je puisse être élu député. J’ai toujours combattu la transhumance parce que ça ne permet pas de clarifier le jeu politique. Ce n’est pas parce qu’on a perdu le pouvoir qu’on doit transhumer et gêner les gens qui ont travaillé pour arriver au pouvoir. Moi, je respecte ceux qui ont travaillé avec Macky Sall pour accéder au pouvoir. Et, nous de l’opposition, nous devons travailler pour revenir au pouvoir. A partir de ce moment, je ne ferai jamais partie de ces gens qui vont transhumer. Ce n’est pas dans mes valeurs, ça ne rentre pas dans le cadre de mes valeurs et je combattrai la transhumance. Pour rien au monde je ne vais transhumer.
Quelle appréciation faites-vous du régime de Macky Sall ?
J’aurai bien aimé pouvoir dire que depuis qu’il est venu voilà ce qui a été fait. Mais, depuis lors, rien n’a été fait. Je ne désespère pas de le voir, je le dis d’autant plus qu’il y a eu des projets qui ont été initiés avec le pouvoir sortant dans le domaine des infrastructures et dans le domaine aussi de la jeunesse. Dans le domaine des infrastructures, nous avions un programme de route intérieure au niveau de Khombole, également de la route Khombole-Touba Toul-Tivaoune. Et, cette dernière a été réalisée mais la voirie intérieure de Khombole tarde à voir le jour. On me dit qu’il n’y a pas de moyens pour le faire alors que c’était calé. On avait au moins 10 km de route à l’intérieur de Khombole qu’il fallait faire. Ça devait se terminer en 2014, rien n’a été fait et ce n’est même plus programmé. Au niveau de la jeunesse, on avait un programme de Cuber pour former les jeunes en informatique avec l’ANEJ. On m’a fait signer un protocole et, depuis lors, il y a beaucoup de tergiversations. Je ne vois même plus de communication venant de l’ANEJ pour m’expliquer les difficultés qui pourraient expliquer ce retard. Donc, ne serait ce que par rapport à ça, cela veut dire qu’il y a beaucoup de difficultés. Et Khombole n’a pas encore senti les effets positifs de l’arrivée du Président Macky Sall.
Cela veut dire que vous attendez beaucoup de ce pouvoir ?
Bien sûr, vous savez l’Etat est une continuité, la commune c’est un démembrement de l’Etat. Les projets qui avaient été projetés par l’Etat du Sénégal devraient voir leurs réalisations. Ça n’a pas encore été fait, nous ne recevons pas d’explication venant du pouvoir disant que voilà pourquoi ceci n’a pas été fait. Mais, je ne désespère pas. J’espère que l’ambition du pouvoir est de faire des réalisations pour la population. Parce que parmi la population de Khombole, il y en a qui ont voté pour Macky Sall et je ne pense pas que ça soit une discrimination par rapport à nous. Cela rentre dans le cadre des difficultés du pouvoir actuel pour faire face aux besoins de sa population.
Vous, qu’est-ce que vous auriez demandé à la population de Khombole ?
C’est de continuer à m’accompagner comme ils l’ont toujours fait. Mais de ne pas uniquement m’accompagner en restant derrière, je voudrais qu’ensemble, on puisse relever les défis. Maintenant que les objectifs de réalisations d’infrastructures sont presque atteints, ce que je voudrais, c’est donner le pouvoir économique à la population de Khombole et ça ne peut se faire qu’en ayant des opérateurs économiques au niveau de Khombole qui ont de l’ambition. Pour que nous, en tant qu’autorité, nous puissions les accompagner pour aller trouver les financements de leurs projets. On avait initié beaucoup de choses comme des lignes de crédit pour permettre aux entrepreneurs, surtout au niveau des jeunes et des femmes, de pouvoir en bénéficier et, jusqu’à présent, ça tarde encore. Les lignes de crédit existent mais il y a en a qui ont pris et qui n’ont pas remboursé. Ce qui ne facilite pas aux autres de pouvoir en bénéficier. Et tout cela, nous allons en discuter dans une large réunion pour nous permettre de faire le bilan de ce qui a été fait dans ce domaine. Ce, pour aussi pouvoir pousser les autres dans le domaine de la formation et dans le domaine de l’encadrement pour leur permettre de pouvoir créer des emplois. J’ai un projet extrêmement important qui me tient à cœur, c’est un programme de volontariat que j’avais initié depuis pratiquement cinq ans que je n’avais pas pu réaliser. Cette année, d’ici un à deux mois, nous allons vers le début de la réalisation. L’idée c’est de prendre des jeunes et les moins jeunes parce que, au Sénégal, quand on parle de jeunes, on a l’habitude de penser que c’est uniquement les gens qui ont trente à trente six ans. Maintenant, la situation est telle qu’il y a des gens qui ont plus de 36 ans et qui n’ont pas encore les moyens de pouvoir faire face à leurs besoins. Ces gens-là, ils sont valides, il faut les considérer comme des jeunes et essayer de les encadrer en leur donnant une formation mais, surtout, en les aidants à trouver de quoi financer leurs micro-projets pour pouvoir s’en sortir.
Entretien réalisé par Tapa Tounkara