Colonel Cissé, on vous connait comme un proche collaborateur du président Wade. Comme avez-vous vécu la défaite des Fal 2012 au second tour de l’élection présidentielle ?
Je ne pense pas que l’on puisse parler de défaite pour le Président Wade. Je ne crois pas ! Il s’agit plutôt d’une victoire de Wade, une victoire qui a remis au goût du jour le rayonnement démocratique du Sénégal à travers le monde. C’est aussi une victoire du peuple sénégalais, mais surtout du libéralisme. Le Président Wade a fait tout ce qu’il avait à faire pour ce pays. Il a souhaité terminer ses travaux pour le bien du Sénégal, mais le peuple en a décidé autrement. Il a quitté le pouvoir d’une manière pacifique et victorieuse. Quant à son successeur, je pense que, d’une certaine façon, ce n’est là qu’une continuité du libéralisme. C’est un jeune président de 51 ans qui peut quand même réussir la mission qu’on lui a confiée.
Au niveau de la nouvelle opposition certains doutent de la capacité du nouveau président Macky Sall à relever les défis qui l’interpellent et pour lesquels il a été élu. Pensez-vous qu’il sera à la hauteur ?
C’est mal connaitre le Président Sall. Je pense qu’il pourra faire des merveilles parce qu’il a déjà le socle que lui a forgé son ancien mentor. Voilà, il ne fera que suivre ce que le Président Wade lui a légué tout en apportant des innovations, bien évidemment.
Que faites-vous alors de toutes les critiques formulées à l’endroit de Macky Sall lors la campagne où il a été traité de tous les noms ? On a même entendu dire que le Sénégal serait dans une situation catastrophique s’il est élu
Ça, c’est des propos de campagne. Tout le monde sait qu’il faut tirer sur votre adversaire quand on est en campagne, mais peut-être avec des balles à blanc. Mais tout le monde sait qu’il peut réussir sa mission parce qu’il sera entouré d’éléments capables de l’amener à bon port. Personne ne peut rien faire seul.
Quelle lecture faites-vous du premier gouvernement de l’ère Macky ?
C’est un gouvernement melting-pot, un gouvernement «soupou kandja.» Ce que je pense de cette affaire, c’est que ce n’est pas un gouvernement qui est prêt de ramener l’espoir que les Sénégalais avaient. Bon, c’est pour 3 mois. Les connaissant, je sais que c’est un gouvernement de récompense. Par contre, il y a des gars que je connais et qui sont très bien. Ali Ngouille Ndiaye, par exemple, est un élément valable. Il y a aussi le ministre des sports, Malick Gackou qui connait suffisamment le milieu et sait ce qu’il a à faire. Mais de toute manière, c’est le Président de la République Macky Sall qui impulse la bonne politique. Les autres ne sont que des exécutants. Par contre, je vois qu’au niveau du Secrétariat général de la présidence, on a fait un bon choix. Madame Aminata Tall connait bien la procédure. Elle revient à la barre et à partir de là, elle peut rayonner sur tout le gouvernement. Mon point de vue, c’est qu’avec le Président Macky et la ministre d’Etat Aminata Tall, le problème ne se posera pas pour les nouveaux venus parce qu’ils pourront toujours redresser et faire les réglages qui s’imposeront.
Que dites-vous de la nomination de Youssou Ndour en tant que ministre ?
Je l’ai toujours répété, Youssou Ndour, c’est un troubadour. Avec lui, c’est Fecc ma ci bolé. C’est-à-dire, il est de la partie parce qu’il sait danser.
Pensez-vous qu’il sera à la hauteur de la mission qu’on lui a confiée ?
Je ne peux pas dire oui sur le plan de la Culture. Pour ce qui est du tourisme, il peut drainer beaucoup de monde vers le Sénégal.
Qu’est ce qui pose problème à son niveau sur le plan de la Culture ?
La Culture est une chose très profonde et vaste qui nécessite de larges connaissances intellectuelles et c’est justement là son handicap. Je l’aurais mis au Tourisme et mettre un autre à la Culture. On n’a pas besoin de beaucoup de choses pour amener du monde dans les hôtels. C’est ça mon point de vue.
Selon vous, qu’est ce qui a causé la perte du pouvoir par Me Wade ?
Je l’appellerais plutôt une sortie pacifique du pouvoir. Néanmoins, ce qui n’a pas marché, c’est beaucoup de choses à la fois. Mais surtout ce qu’on appelle la gestion des élections. Une élection, ça se prépare pendant des années. Ce ne sont pas les foules que vous voyez par-ci et par-là qui remplissent les urnes. Je l’ai dit et redit à maintes reprises. L’approche électorale n’a pas été bien menée. Il n’y a que le Président Wade qui travaillait et tout seul encore. A croire qu’il n‘avait pas directeur de campagne mais de simples compagnons de campagne.
Voulez-vous insinuer que le premier ministre Souleymane Ndéné n’a pas joué le rôle pour lequel il a été désigné comme directeur de campagne de Me Wade ?
Je ne crois pas, non. Ce n’était même pas sa place.
Pourtant il a été félicité par le Président Wade.
Mais c’est tout à fait normal qu’il en soit ainsi parce que le Président est de bon cœur. Je dis qu’Idrissa Seck en tant que directeur de campagne en 2000 a réussi sa mission, Macky Sall en a fait de même en 2007. Mais le 3ième a simplement échoué. Moi quand je donne une note à quelqu’un qui a échoué, je lui donne une note inférieure à la moyenne.
Ne pensez-vous pas que le contexte était très défavorable au candidat Wade et que malgré tout il devait perdre ces élections ?
Non, le contexte était très favorable pour permettre au Président Wade de passer dès le premier tour compte tenu de tout ce qu’il a fait.
Quelles sont exactement les fautes commises de part et d‘autre ?
D’abord l’approche électorale de la politique de Wade. Au début, il voulait trop bien faire en entamant de très grands travaux en vue de doter le Sénégal d’infrastructures modernes. Seulement les Sénégalais n’ont pas encore atteint ce niveau de compréhension. Les Sénégalais ne votent pas par raison. Ils votent par émotion et par affinité du dernier moment. Il n’y a que 10% qui votent par raison, tout le reste est concerné par le premier lot. C’est le ventre, le riz qui a augmenté, de petits soucis à régler, voilà ce qui les intéresse, l’immédiat. Ils n’envisagent pas la perspective du futur du Sénégal. Ça, c’est le premier constat que j’ai fait. Le second constat, c’est qu’il n’y avait pas de parti. Le Pds n’existait pas. Il n’y avait que Wade qui existait. C’est lui qui faisait tout, qui remplissait la salle des banquets. Quand le Président de la République reçoit plus de 100 personnes en audience politique sans son directeur de campagne, sans ses ministres, cela dénote qu’il y a une certaine désorganisation. C’est dire que Wade était la locomotive, le wagon, le train, il était le tout. En plus, il avait un entourage, une équipe de proximité qui ne lui disait pas ce qu’il fallait pour gagner ces élections.
Mais vous-même faisiez partie de cet entourage. Est-ce qu’aujourd’hui vous pensez avoir bien rempli votre rôle.
D’aucuns pensaient que je suis très proche du Président. Mais j’étais là-bas parce que je devais lui dire certaines vérités ; sur ses actions, sur l’action des autres. Mais, il faut savoir qu’il y avait des facteurs bloquant qui ont fait que je n’arrivais pas toujours à lui dire ce que je pensais. Mais si j’avais la possibilité de lui dire tout ce que j’avais en tête, tout ce que je devais lui dire, je crois qu’on n’en arriverait pas là. Si les gens m’avaient écouté, Idrissa Seck ne serait pas parti. Si les gens m’avaient écouté, Macky Sall serait encore resté au Pds. Et bien d’autres encore.
Pourtant on vous désigne comme quelqu’un qui est très écouté par le Président…
Oui, c’est tout à fait le cas, mais à condition qu’on se voit assez souvent.
Qui est ce qui vous bloquait exactement.
Mais pour cela, il faut des audiences, il faut être autorisé avant de le voir. Un président, il est dans un bunker. Mon caractère ne me permet pas non plus de forcer la porte. Bien sûr il m’arrivait de forcer la porte quand c’est vraiment nécessaire pour remettre les pendules à l’heure. Mais chaque fois que je sortais d’une audience avec le Président Wade, certains de ses collaborateurs s’empressaient de l’orienter vers un autre avis contraire. Parce que tout simplement, ils n’ont pas à cœur l’intérêt national, encore moins le souci de la réélection de Wade.
Qui vous empêchait de le voir ?
Personne ne me bloque. Personne ne peut me bloquer. J’accède au Président quand je veux. Mais c’est juste la façon de faire qui me bloquais. Je ne vais pas là, où on ne m’attend pas.
Il est beaucoup question ces temps-ci de la succession de Wade à la tête du Pds. Ne pensez-vous pas qu’il est temps qu’il cède la place à un autre de la même manière qu’il l’a fait avec Macky Sall.
D’abord, il faut dire qu’il n’a pas cédé sa place à Macky, c’est Macky qui a pris sa place. Et de toute façon, je ne fais pas partie du Pds et je ne voudrais pas répondre à la place des éléments du Pds parce que je suis chef de parti comme eux. Cependant, il faut comprendre que Wade a le Pds dans le sang. C’est un parti qu’il a fait et vu naitre, qu’il a vu grandir jusqu’à ce que le Pds atteigne la maturité qu’on lui connait aujourd’hui. Le problème de Wade actuellement, c’est de trouver un bon remplaçant, un bon Wade dans le parti. Quelqu’un qui a à cœur l’unique intérêt du parti, qui sait ce qu’il a à faire sans parti pris. C’est très difficile de trouver un remplaçant dans ce groupe, surtout dans l’immédiat. Ils auraient dû le préparer depuis bien longtemps. Je le répété, si les gens m’avaient écouté, Idrissa Seck ne serait pas parti. Si les gens m’avaient écouté, Macky Sall serait encore resté au Pds. Et bien d’autres encore. Maintenant que les choses sont ce qu’elles sont, il faudrait trouver quelqu’un qui puisse polariser tout cela. Quelqu’un qui puisse fédérer l’ensemble des contradictions du Pds.
Mais qui serait le meilleur profil selon vous ? Le nom de fils du Président Wade, Karim revient souvent dans cette course à la succession au moment où des caciques du Pds veulent plébisciter le Président Pape Diop sans compter les velléités encore timides qui se manifestent par-ci et par-là.
Attendez ! On ne succéde pas à quelqu’un en politique. Quelqu’un l’a fait, le gars de Saint-Louis, Cheikh Bamba Dièye. Mais ce n’est pas démocratique. Le pouvoir ne se donne pas en politique. Cela s’arrache par le travail d’abord. Ensuite par le cumul des voix en votre faveur. Sinon moi-même j’aurais pu prétendre succéder à Wade parce que c’est mon oncle. Donc le pouvoir, ça s’acquiert.
Pensez-vous que Karim ait le bon profil. ?
Je peux juste vous dire qu’il a beaucoup de chose à apprendre dans le Sénégal des profondeurs. Pour remplacer Me Wade, il faut connaitre les coins et recoins du pays, aller dormir dans les hameaux.
Voulez-vous dire que Karim ne connait rien de tout cela ?
Il a encore à apprendre et je lui aurais conseillé de bien s’intégrer d’abord dans le pays et de s’entourer de gens aguerris, pleins d’expérience. Un jeune ne peut pas être conseillé par des jeunes. Ils sont tous très jeunes pour connaitre les rouages, l’esprit du Sénégalais.
Qui pensez-vous qu’il sera vraiment à la hauteur pour prendre la place de Wade à la tête du parti ?
Quelqu’un qui connait bien le terroir, qui a des connaissances larges et qui a des rapports humains avec le Sénégal des profondeurs.
Et que pensez-vous du président Pape Diop ? Peut-il légitimement prétendre remplacer Wade à la tête du Pds ?
Je pense que son qualificatif de Président lui permet déjà de présider aux destinées du Pds. Compte tenu de ses connaissances et de tout ce que j’ai dit tout à l’heure, il est quand même capable, tel que je connais l’individu, de prendre en main le destin du parti. En démocratie, on ne donne pas le pouvoir, il faut le mériter par le travail. Peut-être qu’il faudrait passer par des primaires pour désigner le successeur de Wade.
Est-ce que le moment se prête à l’organisation de primaires alors que l’on s’achemine vers les législatives ?
Il suffit juste d’organiser des primaires et faire de Wade le président d’honneur du Pds en laissant la direction du parti au secrétaire général élu lors des primaires. Ça se fait en deux ou trois jours.
Mais cela ne risque-t-il pas de réveiller les vieux démons du Pds et générer des frustrations et des conflits de positionnement ?
C’est parce qu’ils n’y croient pas dans ce cas. Si quelqu’un se frustre parce qu’on a mis un autre, c’est parce que c’est un élément négatif. Il faut que le Pds se purifie avec des éléments choc qui puissent réussir une mission. Tenez l’APR qui vient de naitre depuis seulement 3 ans avec des gens sérieux et voilà, c’est bien parti. Moi, lorsque j’allais aux élections locales avec mon parti, j’ai gagné beaucoup de collectivités : la communauté rurale de Ndiandère, de Keur Samba Kane, de Goudomp, etc.
Quelle posture votre parti le Psds va-t-il adopter pour ces législatives ?
Le Psds ira certainement aux élections avec nos alliés, les syndicats des transports routiers, des gens de l’Unacois et d’autres grosses pointures.
Que faites-vous de votre alliance avec le Pds ?
Le Président Wade a déjà donné la voix lors du congrès du Pds en disant qu’il libère tous les alliés. Mais il semblerait que le Président Wade a décidé de reformuler autrement les Fals 2012. De toute façon, nous sommes en attentes de nouvelles directives pour décider de la suite à donner à cette alliance.
Mais au cas où Wade persisterait à vouloir se séparer de ses alliés ?
Je suis toujours parti aux élections, seul et sans coalitions. Lorsqu’il y a coalition c’est que les partis en question ne sont pas forts. S’ils partaient individuellement devant moi, je les aurais laminés.
Un dernier mot ?
Je souhaite que le Sénégal puisse continuer à approfondir et à enrichir sa démocratie dans la paix comme nous l’avons réussi à cette élection et que seul le travail puisse payer et servir à départager les uns et les autres. Moi je crois au travail parce que si le Sénégal continue dans cette voie, nous allons réussir.
Avez-vous des regrets à ce jour?
Je ne regrette rien. Je suis là depuis Senghor en passant par Abdou Diouf et Wade. Je souhaite juste que le Sénégal continue sa marche
xamle.net
Je ne pense pas que l’on puisse parler de défaite pour le Président Wade. Je ne crois pas ! Il s’agit plutôt d’une victoire de Wade, une victoire qui a remis au goût du jour le rayonnement démocratique du Sénégal à travers le monde. C’est aussi une victoire du peuple sénégalais, mais surtout du libéralisme. Le Président Wade a fait tout ce qu’il avait à faire pour ce pays. Il a souhaité terminer ses travaux pour le bien du Sénégal, mais le peuple en a décidé autrement. Il a quitté le pouvoir d’une manière pacifique et victorieuse. Quant à son successeur, je pense que, d’une certaine façon, ce n’est là qu’une continuité du libéralisme. C’est un jeune président de 51 ans qui peut quand même réussir la mission qu’on lui a confiée.
Au niveau de la nouvelle opposition certains doutent de la capacité du nouveau président Macky Sall à relever les défis qui l’interpellent et pour lesquels il a été élu. Pensez-vous qu’il sera à la hauteur ?
C’est mal connaitre le Président Sall. Je pense qu’il pourra faire des merveilles parce qu’il a déjà le socle que lui a forgé son ancien mentor. Voilà, il ne fera que suivre ce que le Président Wade lui a légué tout en apportant des innovations, bien évidemment.
Que faites-vous alors de toutes les critiques formulées à l’endroit de Macky Sall lors la campagne où il a été traité de tous les noms ? On a même entendu dire que le Sénégal serait dans une situation catastrophique s’il est élu
Ça, c’est des propos de campagne. Tout le monde sait qu’il faut tirer sur votre adversaire quand on est en campagne, mais peut-être avec des balles à blanc. Mais tout le monde sait qu’il peut réussir sa mission parce qu’il sera entouré d’éléments capables de l’amener à bon port. Personne ne peut rien faire seul.
Quelle lecture faites-vous du premier gouvernement de l’ère Macky ?
C’est un gouvernement melting-pot, un gouvernement «soupou kandja.» Ce que je pense de cette affaire, c’est que ce n’est pas un gouvernement qui est prêt de ramener l’espoir que les Sénégalais avaient. Bon, c’est pour 3 mois. Les connaissant, je sais que c’est un gouvernement de récompense. Par contre, il y a des gars que je connais et qui sont très bien. Ali Ngouille Ndiaye, par exemple, est un élément valable. Il y a aussi le ministre des sports, Malick Gackou qui connait suffisamment le milieu et sait ce qu’il a à faire. Mais de toute manière, c’est le Président de la République Macky Sall qui impulse la bonne politique. Les autres ne sont que des exécutants. Par contre, je vois qu’au niveau du Secrétariat général de la présidence, on a fait un bon choix. Madame Aminata Tall connait bien la procédure. Elle revient à la barre et à partir de là, elle peut rayonner sur tout le gouvernement. Mon point de vue, c’est qu’avec le Président Macky et la ministre d’Etat Aminata Tall, le problème ne se posera pas pour les nouveaux venus parce qu’ils pourront toujours redresser et faire les réglages qui s’imposeront.
Que dites-vous de la nomination de Youssou Ndour en tant que ministre ?
Je l’ai toujours répété, Youssou Ndour, c’est un troubadour. Avec lui, c’est Fecc ma ci bolé. C’est-à-dire, il est de la partie parce qu’il sait danser.
Pensez-vous qu’il sera à la hauteur de la mission qu’on lui a confiée ?
Je ne peux pas dire oui sur le plan de la Culture. Pour ce qui est du tourisme, il peut drainer beaucoup de monde vers le Sénégal.
Qu’est ce qui pose problème à son niveau sur le plan de la Culture ?
La Culture est une chose très profonde et vaste qui nécessite de larges connaissances intellectuelles et c’est justement là son handicap. Je l’aurais mis au Tourisme et mettre un autre à la Culture. On n’a pas besoin de beaucoup de choses pour amener du monde dans les hôtels. C’est ça mon point de vue.
Selon vous, qu’est ce qui a causé la perte du pouvoir par Me Wade ?
Je l’appellerais plutôt une sortie pacifique du pouvoir. Néanmoins, ce qui n’a pas marché, c’est beaucoup de choses à la fois. Mais surtout ce qu’on appelle la gestion des élections. Une élection, ça se prépare pendant des années. Ce ne sont pas les foules que vous voyez par-ci et par-là qui remplissent les urnes. Je l’ai dit et redit à maintes reprises. L’approche électorale n’a pas été bien menée. Il n’y a que le Président Wade qui travaillait et tout seul encore. A croire qu’il n‘avait pas directeur de campagne mais de simples compagnons de campagne.
Voulez-vous insinuer que le premier ministre Souleymane Ndéné n’a pas joué le rôle pour lequel il a été désigné comme directeur de campagne de Me Wade ?
Je ne crois pas, non. Ce n’était même pas sa place.
Pourtant il a été félicité par le Président Wade.
Mais c’est tout à fait normal qu’il en soit ainsi parce que le Président est de bon cœur. Je dis qu’Idrissa Seck en tant que directeur de campagne en 2000 a réussi sa mission, Macky Sall en a fait de même en 2007. Mais le 3ième a simplement échoué. Moi quand je donne une note à quelqu’un qui a échoué, je lui donne une note inférieure à la moyenne.
Ne pensez-vous pas que le contexte était très défavorable au candidat Wade et que malgré tout il devait perdre ces élections ?
Non, le contexte était très favorable pour permettre au Président Wade de passer dès le premier tour compte tenu de tout ce qu’il a fait.
Quelles sont exactement les fautes commises de part et d‘autre ?
D’abord l’approche électorale de la politique de Wade. Au début, il voulait trop bien faire en entamant de très grands travaux en vue de doter le Sénégal d’infrastructures modernes. Seulement les Sénégalais n’ont pas encore atteint ce niveau de compréhension. Les Sénégalais ne votent pas par raison. Ils votent par émotion et par affinité du dernier moment. Il n’y a que 10% qui votent par raison, tout le reste est concerné par le premier lot. C’est le ventre, le riz qui a augmenté, de petits soucis à régler, voilà ce qui les intéresse, l’immédiat. Ils n’envisagent pas la perspective du futur du Sénégal. Ça, c’est le premier constat que j’ai fait. Le second constat, c’est qu’il n’y avait pas de parti. Le Pds n’existait pas. Il n’y avait que Wade qui existait. C’est lui qui faisait tout, qui remplissait la salle des banquets. Quand le Président de la République reçoit plus de 100 personnes en audience politique sans son directeur de campagne, sans ses ministres, cela dénote qu’il y a une certaine désorganisation. C’est dire que Wade était la locomotive, le wagon, le train, il était le tout. En plus, il avait un entourage, une équipe de proximité qui ne lui disait pas ce qu’il fallait pour gagner ces élections.
Mais vous-même faisiez partie de cet entourage. Est-ce qu’aujourd’hui vous pensez avoir bien rempli votre rôle.
D’aucuns pensaient que je suis très proche du Président. Mais j’étais là-bas parce que je devais lui dire certaines vérités ; sur ses actions, sur l’action des autres. Mais, il faut savoir qu’il y avait des facteurs bloquant qui ont fait que je n’arrivais pas toujours à lui dire ce que je pensais. Mais si j’avais la possibilité de lui dire tout ce que j’avais en tête, tout ce que je devais lui dire, je crois qu’on n’en arriverait pas là. Si les gens m’avaient écouté, Idrissa Seck ne serait pas parti. Si les gens m’avaient écouté, Macky Sall serait encore resté au Pds. Et bien d’autres encore.
Pourtant on vous désigne comme quelqu’un qui est très écouté par le Président…
Oui, c’est tout à fait le cas, mais à condition qu’on se voit assez souvent.
Qui est ce qui vous bloquait exactement.
Mais pour cela, il faut des audiences, il faut être autorisé avant de le voir. Un président, il est dans un bunker. Mon caractère ne me permet pas non plus de forcer la porte. Bien sûr il m’arrivait de forcer la porte quand c’est vraiment nécessaire pour remettre les pendules à l’heure. Mais chaque fois que je sortais d’une audience avec le Président Wade, certains de ses collaborateurs s’empressaient de l’orienter vers un autre avis contraire. Parce que tout simplement, ils n’ont pas à cœur l’intérêt national, encore moins le souci de la réélection de Wade.
Qui vous empêchait de le voir ?
Personne ne me bloque. Personne ne peut me bloquer. J’accède au Président quand je veux. Mais c’est juste la façon de faire qui me bloquais. Je ne vais pas là, où on ne m’attend pas.
Il est beaucoup question ces temps-ci de la succession de Wade à la tête du Pds. Ne pensez-vous pas qu’il est temps qu’il cède la place à un autre de la même manière qu’il l’a fait avec Macky Sall.
D’abord, il faut dire qu’il n’a pas cédé sa place à Macky, c’est Macky qui a pris sa place. Et de toute façon, je ne fais pas partie du Pds et je ne voudrais pas répondre à la place des éléments du Pds parce que je suis chef de parti comme eux. Cependant, il faut comprendre que Wade a le Pds dans le sang. C’est un parti qu’il a fait et vu naitre, qu’il a vu grandir jusqu’à ce que le Pds atteigne la maturité qu’on lui connait aujourd’hui. Le problème de Wade actuellement, c’est de trouver un bon remplaçant, un bon Wade dans le parti. Quelqu’un qui a à cœur l’unique intérêt du parti, qui sait ce qu’il a à faire sans parti pris. C’est très difficile de trouver un remplaçant dans ce groupe, surtout dans l’immédiat. Ils auraient dû le préparer depuis bien longtemps. Je le répété, si les gens m’avaient écouté, Idrissa Seck ne serait pas parti. Si les gens m’avaient écouté, Macky Sall serait encore resté au Pds. Et bien d’autres encore. Maintenant que les choses sont ce qu’elles sont, il faudrait trouver quelqu’un qui puisse polariser tout cela. Quelqu’un qui puisse fédérer l’ensemble des contradictions du Pds.
Mais qui serait le meilleur profil selon vous ? Le nom de fils du Président Wade, Karim revient souvent dans cette course à la succession au moment où des caciques du Pds veulent plébisciter le Président Pape Diop sans compter les velléités encore timides qui se manifestent par-ci et par-là.
Attendez ! On ne succéde pas à quelqu’un en politique. Quelqu’un l’a fait, le gars de Saint-Louis, Cheikh Bamba Dièye. Mais ce n’est pas démocratique. Le pouvoir ne se donne pas en politique. Cela s’arrache par le travail d’abord. Ensuite par le cumul des voix en votre faveur. Sinon moi-même j’aurais pu prétendre succéder à Wade parce que c’est mon oncle. Donc le pouvoir, ça s’acquiert.
Pensez-vous que Karim ait le bon profil. ?
Je peux juste vous dire qu’il a beaucoup de chose à apprendre dans le Sénégal des profondeurs. Pour remplacer Me Wade, il faut connaitre les coins et recoins du pays, aller dormir dans les hameaux.
Voulez-vous dire que Karim ne connait rien de tout cela ?
Il a encore à apprendre et je lui aurais conseillé de bien s’intégrer d’abord dans le pays et de s’entourer de gens aguerris, pleins d’expérience. Un jeune ne peut pas être conseillé par des jeunes. Ils sont tous très jeunes pour connaitre les rouages, l’esprit du Sénégalais.
Qui pensez-vous qu’il sera vraiment à la hauteur pour prendre la place de Wade à la tête du parti ?
Quelqu’un qui connait bien le terroir, qui a des connaissances larges et qui a des rapports humains avec le Sénégal des profondeurs.
Et que pensez-vous du président Pape Diop ? Peut-il légitimement prétendre remplacer Wade à la tête du Pds ?
Je pense que son qualificatif de Président lui permet déjà de présider aux destinées du Pds. Compte tenu de ses connaissances et de tout ce que j’ai dit tout à l’heure, il est quand même capable, tel que je connais l’individu, de prendre en main le destin du parti. En démocratie, on ne donne pas le pouvoir, il faut le mériter par le travail. Peut-être qu’il faudrait passer par des primaires pour désigner le successeur de Wade.
Est-ce que le moment se prête à l’organisation de primaires alors que l’on s’achemine vers les législatives ?
Il suffit juste d’organiser des primaires et faire de Wade le président d’honneur du Pds en laissant la direction du parti au secrétaire général élu lors des primaires. Ça se fait en deux ou trois jours.
Mais cela ne risque-t-il pas de réveiller les vieux démons du Pds et générer des frustrations et des conflits de positionnement ?
C’est parce qu’ils n’y croient pas dans ce cas. Si quelqu’un se frustre parce qu’on a mis un autre, c’est parce que c’est un élément négatif. Il faut que le Pds se purifie avec des éléments choc qui puissent réussir une mission. Tenez l’APR qui vient de naitre depuis seulement 3 ans avec des gens sérieux et voilà, c’est bien parti. Moi, lorsque j’allais aux élections locales avec mon parti, j’ai gagné beaucoup de collectivités : la communauté rurale de Ndiandère, de Keur Samba Kane, de Goudomp, etc.
Quelle posture votre parti le Psds va-t-il adopter pour ces législatives ?
Le Psds ira certainement aux élections avec nos alliés, les syndicats des transports routiers, des gens de l’Unacois et d’autres grosses pointures.
Que faites-vous de votre alliance avec le Pds ?
Le Président Wade a déjà donné la voix lors du congrès du Pds en disant qu’il libère tous les alliés. Mais il semblerait que le Président Wade a décidé de reformuler autrement les Fals 2012. De toute façon, nous sommes en attentes de nouvelles directives pour décider de la suite à donner à cette alliance.
Mais au cas où Wade persisterait à vouloir se séparer de ses alliés ?
Je suis toujours parti aux élections, seul et sans coalitions. Lorsqu’il y a coalition c’est que les partis en question ne sont pas forts. S’ils partaient individuellement devant moi, je les aurais laminés.
Un dernier mot ?
Je souhaite que le Sénégal puisse continuer à approfondir et à enrichir sa démocratie dans la paix comme nous l’avons réussi à cette élection et que seul le travail puisse payer et servir à départager les uns et les autres. Moi je crois au travail parce que si le Sénégal continue dans cette voie, nous allons réussir.
Avez-vous des regrets à ce jour?
Je ne regrette rien. Je suis là depuis Senghor en passant par Abdou Diouf et Wade. Je souhaite juste que le Sénégal continue sa marche
xamle.net