D’un œil très amusé, je suis attentivement les premiers pas de François Hollande et de Macky Sall. Je me plais à voir, dans le destin de ces deux hommes, certaines similitudes. La première, c’est le costume d’homme "normal" que Hollande a revêtu tout au long d’une très belle campagne sur le thème de la normalité face à son prédécesseur agité, trouble, trépignant et manquant de calme dans sa manière d’être et de gouverner.
Je dis souvent à mes amis socialistes français que la présidence de François Hollande sera douce et tempérée. On n’entendra pas, de la part de socialistes, des paroles stigmatisant l’étranger, le musulman ou "l’assisté".
A la différence d’Abdoulaye Wade – qui est, paraît-il, l’homme le plus diplômé du Caire au Cap –, Macky Sall est aussi un homme normal. Il n’a pas fait une campagne structurée autour de promesses mirobolantes dont Wade détenait jalousement le secret, comme les usines de fabrication de plats de riz ou les centrales nucléaires clés en main pour un pays encore sous le joug de la pauvreté.
Ces deux hommes sont, en outre, la preuve évidente de la relativité des choses en politique. Ils ont montré, à leur insu, combien les destins se font et se défont à une vitesse incommensurable.
Il aura fallu une libido excessivement incontrôlée de Dominique Strauss-Kahn dans un hôtel new-yorkais pour changer le destin de la France. L’homme que tous les sondages considéraient comme le grand favori de la présidentielle 2012 a vu filer toutes ses chances de devenir le septième président de la Ve République. "Flanby", dont la candidature faisait sourire, a eu ainsi la voie libre.
Concernant Macky Sall, il est toujours apparu comme un homme sans relief aux yeux de l’opinion publique sénégalaise. Mais il aura fallu une erreur monumentale de jugement d’Abdoulaye Wade pour faire sortir la bête politique qui était enfouie au fond de l’ancien Premier ministre. Vilipendé, insulté puis chassé du perchoir par ses anciens "frères" [il a été président de l'Assemblée en 2007-2008], Macky prit son courage à deux mains et, son orgueil peul aidant, s’en alla à la rencontre de ses concitoyens, sillonnant de toutes parts le Sénégal jusqu’au couronnement du 25 mars. La gouvernance des deux hommes sera apaisée, car le caractère influe en grande partie sur la manière de conduire la destinée d’un pays. La sobriété est sans conteste le mot qui caractérise leurs débuts de mandat.
D’abord, sobriété dans le choix du Premier ministre. Si Hollande a jeté son dévolu sur le fidèle Jean-Marc Ayrault, un austère professeur d’allemand, réformiste tenant d’une social-démocratie rigide, Sall a opté pour un banquier inconnu du sérail politique, chargé de redresser des finances publiques exsangues. Sobriété lors de la cérémonie d’investiture. Macky s’est éloigné de la grand-messe fastueuse de Wade. Il opta pour un hôtel avec des invités triés sur le volet.
Les consécrations de Macky et de François furent empreintes de sobriété républicaine et éloignées des excentricités bling-bling chères à Abdoulaye et Nicolas.
Le besoin impérieux de rassembler lie aussi les deux hommes, et cela s’est noté jusque dans la formation de leur première équipe gouvernementale.
Depuis, les premiers pas des deux hommes au pouvoir sont relativement irréprochables. Mais la normalité a un risque : celui de ne pas être un grand président mais un gestionnaire de passage qu’on aura oublié deux décennies plus tard. Eviter les erreurs du prédécesseur est tout de même trop simple pour espérer marquer son passage d’une empreinte indélébile. Quand on détient de tels pouvoirs, c’est pour agir, au risque de se tromper.
Courrier international
Je dis souvent à mes amis socialistes français que la présidence de François Hollande sera douce et tempérée. On n’entendra pas, de la part de socialistes, des paroles stigmatisant l’étranger, le musulman ou "l’assisté".
A la différence d’Abdoulaye Wade – qui est, paraît-il, l’homme le plus diplômé du Caire au Cap –, Macky Sall est aussi un homme normal. Il n’a pas fait une campagne structurée autour de promesses mirobolantes dont Wade détenait jalousement le secret, comme les usines de fabrication de plats de riz ou les centrales nucléaires clés en main pour un pays encore sous le joug de la pauvreté.
Ces deux hommes sont, en outre, la preuve évidente de la relativité des choses en politique. Ils ont montré, à leur insu, combien les destins se font et se défont à une vitesse incommensurable.
Il aura fallu une libido excessivement incontrôlée de Dominique Strauss-Kahn dans un hôtel new-yorkais pour changer le destin de la France. L’homme que tous les sondages considéraient comme le grand favori de la présidentielle 2012 a vu filer toutes ses chances de devenir le septième président de la Ve République. "Flanby", dont la candidature faisait sourire, a eu ainsi la voie libre.
Concernant Macky Sall, il est toujours apparu comme un homme sans relief aux yeux de l’opinion publique sénégalaise. Mais il aura fallu une erreur monumentale de jugement d’Abdoulaye Wade pour faire sortir la bête politique qui était enfouie au fond de l’ancien Premier ministre. Vilipendé, insulté puis chassé du perchoir par ses anciens "frères" [il a été président de l'Assemblée en 2007-2008], Macky prit son courage à deux mains et, son orgueil peul aidant, s’en alla à la rencontre de ses concitoyens, sillonnant de toutes parts le Sénégal jusqu’au couronnement du 25 mars. La gouvernance des deux hommes sera apaisée, car le caractère influe en grande partie sur la manière de conduire la destinée d’un pays. La sobriété est sans conteste le mot qui caractérise leurs débuts de mandat.
D’abord, sobriété dans le choix du Premier ministre. Si Hollande a jeté son dévolu sur le fidèle Jean-Marc Ayrault, un austère professeur d’allemand, réformiste tenant d’une social-démocratie rigide, Sall a opté pour un banquier inconnu du sérail politique, chargé de redresser des finances publiques exsangues. Sobriété lors de la cérémonie d’investiture. Macky s’est éloigné de la grand-messe fastueuse de Wade. Il opta pour un hôtel avec des invités triés sur le volet.
Les consécrations de Macky et de François furent empreintes de sobriété républicaine et éloignées des excentricités bling-bling chères à Abdoulaye et Nicolas.
Le besoin impérieux de rassembler lie aussi les deux hommes, et cela s’est noté jusque dans la formation de leur première équipe gouvernementale.
Depuis, les premiers pas des deux hommes au pouvoir sont relativement irréprochables. Mais la normalité a un risque : celui de ne pas être un grand président mais un gestionnaire de passage qu’on aura oublié deux décennies plus tard. Eviter les erreurs du prédécesseur est tout de même trop simple pour espérer marquer son passage d’une empreinte indélébile. Quand on détient de tels pouvoirs, c’est pour agir, au risque de se tromper.
Courrier international