La bataille électorale géorgienne ne se joue pas seulement à Tbilissi, mais sur les rives du Potomac à Washington. Le milliardaire Bidzina Ivanishvili, grand rival du président Saakachvili, a lancé une armée de lobbyistes à l'assaut de la capitale américaine, payant près d'un million de dollars depuis janvier aux firmes les plus établies de K Street pour déstabiliser son adversaire.
Parmi les nombreux relais utilisés, la vénérable firme Patton Boggs a déjà dépensé 510.000 dollars en 2012, tandis que National Strategies et BGR Group affichaient des budgets de 160.000 et 180.000 dollars pour leur client géorgien, chiffres d'une ampleur inhabituelle pour un parti d'opposition étranger.
Campagnes dans les journaux, virées sur la colline du Capitole pour influencer les «seigneurs» du Congrès, rencontres avec les têtes pensantes des think tanks qui donnent le la en politique étrangère… Les observateurs parlent d'un effort «massif» pour convaincre l'Amérique que son allié géorgien n'est pas l'îlot de démocratie qu'il prétend être. «Pendant des années, Saakachvili a utilisé de puissants lobbyistes… pour présenter une façade de démocratie. Je ne peux me permettre de louer les services de quelques firmes de lobbying (pour) montrer le vrai tableau», a expliqué Ivanishvili au New York Times . Le message de ses équipes est notamment qu'il est indispensable de conditionner la marche de Tbilissi vers l'Otan à la transparence électorale.
Les cabinets de lobbying Podesta et Orion Strategies sont payés respectivement 50.000 et 45.000 dollars mensuels pour représenter le gouvernement de Tbilissi. L'ambassadeur géorgien Temuri Iakobachvili soutient que «ces efforts visent à défendre les intérêts du pays. Notre adversaire, lui, cherche à détruire l'image de la Géorgie sans proposition constructive», dit-il. Tandis qu'Ivanishvili insiste sur le déficit démocratique du pays, l'équipe gouvernementale évoque les connexions russes du milliardaire d'opposition, qui a fait sa fortune de 6,4 milliards de dollars en Russie. «Je ne vois pas de plan secret, nuance Iakobachvili. Mais je constate que les arguments utilisés par les lobbyistes de l'opposition sont les mêmes que ceux qu'utilise le lobbying russe contre nous». Le spécialiste du Caucase à l'institut Carnegie, Thomas de Waal, parle de «bataille de légitimité». «Washington est devenu l'arbitre de la politique géorgienne.»
Sous surveillance de l'ex-grand frère russe, le gouvernement Saakachvili s'est accroché à sa relation avec l'Amérique comme à une planche de salut. Même s'il a été plus distant que George W. Bush, le président Obama continue de soutenir Tbilissi, toujours perçu comme le «meilleur élève» de la région. Mais la Maison-Blanche voudrait voir le régime, très personnel, progresser dans la démocratisation, notamment dans les régions. Tout en prônant l'intérêt de la transparence totale, les Géorgiens mettent en garde contre une approche naïve qui ouvrirait les portes à des «soutiens» de Moscou, susceptibles de détruire leur projet occidental.
Par Laure Mandeville
Parmi les nombreux relais utilisés, la vénérable firme Patton Boggs a déjà dépensé 510.000 dollars en 2012, tandis que National Strategies et BGR Group affichaient des budgets de 160.000 et 180.000 dollars pour leur client géorgien, chiffres d'une ampleur inhabituelle pour un parti d'opposition étranger.
Campagnes dans les journaux, virées sur la colline du Capitole pour influencer les «seigneurs» du Congrès, rencontres avec les têtes pensantes des think tanks qui donnent le la en politique étrangère… Les observateurs parlent d'un effort «massif» pour convaincre l'Amérique que son allié géorgien n'est pas l'îlot de démocratie qu'il prétend être. «Pendant des années, Saakachvili a utilisé de puissants lobbyistes… pour présenter une façade de démocratie. Je ne peux me permettre de louer les services de quelques firmes de lobbying (pour) montrer le vrai tableau», a expliqué Ivanishvili au New York Times . Le message de ses équipes est notamment qu'il est indispensable de conditionner la marche de Tbilissi vers l'Otan à la transparence électorale.
Les cabinets de lobbying Podesta et Orion Strategies sont payés respectivement 50.000 et 45.000 dollars mensuels pour représenter le gouvernement de Tbilissi. L'ambassadeur géorgien Temuri Iakobachvili soutient que «ces efforts visent à défendre les intérêts du pays. Notre adversaire, lui, cherche à détruire l'image de la Géorgie sans proposition constructive», dit-il. Tandis qu'Ivanishvili insiste sur le déficit démocratique du pays, l'équipe gouvernementale évoque les connexions russes du milliardaire d'opposition, qui a fait sa fortune de 6,4 milliards de dollars en Russie. «Je ne vois pas de plan secret, nuance Iakobachvili. Mais je constate que les arguments utilisés par les lobbyistes de l'opposition sont les mêmes que ceux qu'utilise le lobbying russe contre nous». Le spécialiste du Caucase à l'institut Carnegie, Thomas de Waal, parle de «bataille de légitimité». «Washington est devenu l'arbitre de la politique géorgienne.»
Sous surveillance de l'ex-grand frère russe, le gouvernement Saakachvili s'est accroché à sa relation avec l'Amérique comme à une planche de salut. Même s'il a été plus distant que George W. Bush, le président Obama continue de soutenir Tbilissi, toujours perçu comme le «meilleur élève» de la région. Mais la Maison-Blanche voudrait voir le régime, très personnel, progresser dans la démocratisation, notamment dans les régions. Tout en prônant l'intérêt de la transparence totale, les Géorgiens mettent en garde contre une approche naïve qui ouvrirait les portes à des «soutiens» de Moscou, susceptibles de détruire leur projet occidental.
Par Laure Mandeville