«La situation en République démocratique du Congo est tout à fait inacceptable sur le plan des droits, de la démocratie, et de la reconnaissance de l'opposition.» Cette déclaration de François Hollande, au détour d'une conférence de presse mardi, a retenu l'attention, alors que le président français doit précisément se rendre samedi à Kinshasa pour le Sommet de la francophonie. «Cela n'a rien de surprenant. C'est juste une première approche des messages qu'il délivrera sur place», explique-t-on à l'Élysée, où l'on rejette toute idée d'improvisation.
Les autorités françaises trahissent un certain embarras à quelques jours du déplacement. Car se rendre à ce sommet n'était pas une évidence. À peine élu, François Hollande a été confronté à la question de sa participation à ce rendez-vous prévu de longue date. Nicolas Sarkozy hésitait lui aussi. Dans l'entourage du nouvel élu, le sujet divise tant les diplomates que le Parti socialiste. «Il y a eu un vrai débat», reconnaît Yamina Benguigui, ministre déléguée à la Francophonie. Les ONG, elles non plus, ne parlent pas d'une seule voix.
En cause, les violations répétées des droits de l'homme constatées en RDC et surtout la réélection, en décembre 2011, du président Kabila lors d'un scrutin vivement critiqué par les observateurs internationaux, à commencer par ceux de l'Union européenne. François Hollande, convaincu par les demandes d'Abdou Diouf, le président de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et de plusieurs chefs d'État ouest-africains, a fini par trancher en faveur de sa participation. L'insistance de Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, qui voit dans la francophonie l'un des rouages essentiels de l'influence française dans le monde, aura pesé.
«Boycotter ce sommet, le premier organisé en Afrique centrale et dans le plus grand pays francophone du monde, aurait entraîné son annulation. Cela aurait été une grosse erreur pour la France et la RDC», plaide aujourd'hui Yamina Benguigui. Sidiki Kaba, président d'honneur de Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), ne dit pas autre chose: «C'est une occasion de porter la voix de la démocratie dans un État qui n'est pas vertueux.»
«Efforts» préalables
Mais tous ne sont pas convaincus pour autant. «On surestime la force de la parole présidentielle française au Congo. Aller à Kinshasa est un pari perdant-perdant. François Hollande ne gagnera pas de points auprès des Congolais avec ses critiques et il va être critiqué pour s'y être rendu», analyse Thierry Vircoulon, du centre de recherche International Crisis Group (ICG). Comme d'autres, il redoute que ce sommet, où une vingtaine de présidents sont attendus, permette à Joseph Kabila de rompre l'isolement dans lequel il se trouve depuis sa réélection.
Conscient de ce risque, l'Élysée avait demandé cet été aux autorités congolaises, en préalable, des «efforts» pour l'organisation et la transparence des scrutins à venir, le respect des droits de l'homme et de la justice. Ce dernier volet visait particulièrement le procès en cours des assassins présumés de Floribert Chebeya, un militant des droits de l'homme tué à Kinshasa. À quelques jours du sommet, les projets de loi sur la réforme de la Commission électorale et sur la création d'une commission indépendante des droits de l'homme n'ont toujours pas été votés. Quant au procès Chebeya, les prochains débats ont été reportés à la fin octobre.
Paris mise désormais sur le discours que doit prononcer François Hollande et sur son tête-à-tête avec le président Kabila pour donner de la substance à son déplacement. «Il n'y aura pas de tabou ni de langue de bois», promet-on à l'Élysée. Face à des Congolais peu enclins à accepter les critiques, ces deux étapes se promettent d'être tendues.
Par Tanguy Berthemet
Les autorités françaises trahissent un certain embarras à quelques jours du déplacement. Car se rendre à ce sommet n'était pas une évidence. À peine élu, François Hollande a été confronté à la question de sa participation à ce rendez-vous prévu de longue date. Nicolas Sarkozy hésitait lui aussi. Dans l'entourage du nouvel élu, le sujet divise tant les diplomates que le Parti socialiste. «Il y a eu un vrai débat», reconnaît Yamina Benguigui, ministre déléguée à la Francophonie. Les ONG, elles non plus, ne parlent pas d'une seule voix.
En cause, les violations répétées des droits de l'homme constatées en RDC et surtout la réélection, en décembre 2011, du président Kabila lors d'un scrutin vivement critiqué par les observateurs internationaux, à commencer par ceux de l'Union européenne. François Hollande, convaincu par les demandes d'Abdou Diouf, le président de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et de plusieurs chefs d'État ouest-africains, a fini par trancher en faveur de sa participation. L'insistance de Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, qui voit dans la francophonie l'un des rouages essentiels de l'influence française dans le monde, aura pesé.
«Boycotter ce sommet, le premier organisé en Afrique centrale et dans le plus grand pays francophone du monde, aurait entraîné son annulation. Cela aurait été une grosse erreur pour la France et la RDC», plaide aujourd'hui Yamina Benguigui. Sidiki Kaba, président d'honneur de Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), ne dit pas autre chose: «C'est une occasion de porter la voix de la démocratie dans un État qui n'est pas vertueux.»
«Efforts» préalables
Mais tous ne sont pas convaincus pour autant. «On surestime la force de la parole présidentielle française au Congo. Aller à Kinshasa est un pari perdant-perdant. François Hollande ne gagnera pas de points auprès des Congolais avec ses critiques et il va être critiqué pour s'y être rendu», analyse Thierry Vircoulon, du centre de recherche International Crisis Group (ICG). Comme d'autres, il redoute que ce sommet, où une vingtaine de présidents sont attendus, permette à Joseph Kabila de rompre l'isolement dans lequel il se trouve depuis sa réélection.
Conscient de ce risque, l'Élysée avait demandé cet été aux autorités congolaises, en préalable, des «efforts» pour l'organisation et la transparence des scrutins à venir, le respect des droits de l'homme et de la justice. Ce dernier volet visait particulièrement le procès en cours des assassins présumés de Floribert Chebeya, un militant des droits de l'homme tué à Kinshasa. À quelques jours du sommet, les projets de loi sur la réforme de la Commission électorale et sur la création d'une commission indépendante des droits de l'homme n'ont toujours pas été votés. Quant au procès Chebeya, les prochains débats ont été reportés à la fin octobre.
Paris mise désormais sur le discours que doit prononcer François Hollande et sur son tête-à-tête avec le président Kabila pour donner de la substance à son déplacement. «Il n'y aura pas de tabou ni de langue de bois», promet-on à l'Élysée. Face à des Congolais peu enclins à accepter les critiques, ces deux étapes se promettent d'être tendues.
Par Tanguy Berthemet