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Ibrahim Assane Mayaki, secrétaire exécutif du NEPAD : « Tous les leaders politiques africains sont assis sur une bombe politique »


Professeur d’administration publique, chercheur en sciences sociales, ex-travailleur du secteur de l’uranium au Niger, puis ancien Premier ministre nigérien, Ibrahim Assane Mayaki est aujourd’hui le Secrétaire exécutif du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) a pris fonction début avril 2009. En séjour au Burkina Faso, il dresse son premier bilan, évoque l’avenir du NEPAD, les grands projets etc.


Rédigé par leral.net le Dimanche 11 Avril 2010 à 13:52 | | 3 commentaire(s)|

Ibrahim Assane Mayaki, secrétaire exécutif du NEPAD : « Tous les leaders politiques africains sont assis sur une bombe politique »
Sidwaya (S) : En 2001, les chefs d’État africains ont lancé le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique. Neuf (9) ans après, que retenir du NEPAD ?

Ibrahim Assane Mayaki (IAM) : On peut retenir trois choses. Il y a eu une motivation politique très forte qui a permis l’éclosion de ce programme, puisque le NEPAD est défini comme un programme à l’époque de l’Organisation de l’unité africaine qui est devenu un programme de l’Union africaine.

Il s’agit donc d’une motivation politique très forte avec un niveau d’attente très élevé par rapport aux enjeux de développement du continent. La deuxième caractéristique que l’on peut retenir, c’est que ce programme était fondamentalement axé sur l’intégration régionale, économique comme mécanisme d’accélération du développement. Le raisonnement sous-jacent, c’était qu’il était difficile que l’on puisse arriver à des niveaux de création de richesse suffisant à l’intérieur des frontières nationales.

Il fallait donc réfléchir en termes d’ensembles régionaux, que ce soit pour les questions de santé, d’infrastructures ou d’éducation. La deuxième caractéristique était donc le renforcement de l’intégration régionale. La troisième chose qu’on peut retenir, c’est que le niveau des réalisations n’a pas été, évidemment, celui qui était attendu. Les attentes étaient très élevées.

Mais ceci dit, beaucoup de choses ont été réalisées. Que ce soit en termes d’infrastructures à travers des liens de travail très sérieux avec la Banque africaine de développement (BAD). Des projets d’infrastructures ont été lancés dans toutes les régions ou que ce soit au niveau de l’agriculture à travers un programme défini au sein du NEPAD et qui était ensuite appliqué à l’ensemble des régions et qui fait l’objet aujourd’hui de plans nationaux d’investissement maintenant. Que ce soit au niveau de la science et de la technologie avec le développement de compétences spécifiques dans le domaine par exemple de la biosécurité et de l’intégration de biotechnologie dans les politiques agricoles, sanitaires.

Beaucoup de choses ont donc été réalisées dans le domaine de l’éducation, de l’énergie etc., mais pas à un niveau auquel on s’attendait. Pour cela il y avait plusieurs raisons. Une des raisons, c’était la complémentarité des actions entre le NEPAD comme structure et l’architecture de l’Union africaine. Cette raison très particulière vient de faire d’une décision de l’Assemblée générale de l’Union africaine au dernier Sommet d’Addis Abeba ; décision par laquelle le Secrétariat du NEPAD est transformé en Agence d’exécution de l’Union africaine.

C’est la première fois qu’une initiative de développement au niveau continental fait l’objet d’une pérennisation institutionnelle à travers une structure qui est une agence d’exécution et qui est intégrée à l’Union africaine. Le NEPAD devient une agence de développement au niveau continental, un bras technique de la Commission de l’Union africaine.

S : Vous avez déclaré que beaucoup de réalisations ont été faites. Concrètement combien de kilomètres de route, combien de barrages ont été construits à travers le continent africain ?

IAM : (Sourire). C’est une très bonne question. Evidemment comme vous le comprenez, le rôle du NEPAD, ce n’est pas de construire des barrages et des routes. Les barrages et les routes se construisent à travers des actions gouvernementa les nationales.

Nous ne sommes pas une agence de travaux publics qui construisons de routes mais où la question est très importante, c’est que nous pouvons être évalué en fonction du nombre de kilomètres de route que nous avons aider à construire à travers des projets régionaux portés par des communautés économiques régionales comme la CEDEAO, la SADC, la COMESA et à travers ce que deux où trois pays font ensemble. Il y a un pont par exemple entre deux pays et que nous avons aidé à faire l’étude de faisabilité et qui a mobilisé beaucoup de ressources pour le réaliser, c’est bien, mais nous ne pouvons pas mettre à notre actif, des choses qui sont réalisées par les Etats.

Dans le cadre par exemple du PIDA qui est le programme à long terme des infrastructures de la Commission de l’Union africaine, qui est le programme continental adopté par tous les Etats, nous avons un programme à court terme pour lequel il existe une facilité au niveau de la BAD et cette facilité sert à financer des études de faisabilité pour des projets identifiés. Sur la base de ces études de faisabilité on peut enclencher des travaux à réaliser concrètement. Tout ce que nous avons fait en termes d’infrastructures, c’est fondamentalement à travers la BAD sur la base d’un projet d’infrastructures que nous avons aidé à définir.

Si on prend le domaine de la santé par exemple, la plupart des politiques continentales pour l’innovation pharmaceutique ont été définies par le Secrétariat du NEPAD et ensuite livrées à la Commission de l’Union africaine. Si l’on prend toujours le cas de la santé, les stratégies de production de médicaments génériques au niveau continental ont été fondamentalement définies par le secrétariat du NEPAD.

Sur le plan de la science et des technologies, en ce qui concerne la définition des cadres de régulation de l’utilisation des biotechnologies cela a été d’abord fait par le NEPAD pour être ensuite livré au niveau régional et national.

Sur le plan de l’agriculture, le PDDA qui est le programme de développement de l’agriculture au niveau continental a été développé par le NEPAD. Et le NEPAD a aidé des communautés économiques régionales comme la CEDEAO à le mettre en œuvre et ensuite est allé jusqu’au niveau des pays pour organiser des tables rondes sur les programmes nationaux d’investissement. Ces tables rondes sont en train de se faire maintenant. Je crois que celle du Burkina est pour bientôt.

Mais il y a plusieurs autres qui ont été faites en Afrique de l’Ouest, de l’Est, en Afrique australe. Ce sont là des actions concrètes notamment dans le cadre de l’agriculture. Parce qu’elles permettent d’harmoniser des cadres de politiques pour voir comment on peut augmenter la productivité agricole, comment on peut faire le lien entre la recherche et les politiques agricoles, comment on peut aider à définir des projets d’investissement agricole précis dans le domaine par exemple de l’agro-business. Il y a des cadres de politiques très clairs qui ont été définis. A l’intérieur de ces cadres il y a des actions précises qui ont été menées.

Pour revenir à votre question, la grande différence avec l’Agence, c’est qu’il sera beaucoup plus facile de nous évaluer. Autant auparavant on pouvait très généralement dresser une liste de choses que nous avons faites et présenter cette liste et avoir une appréciation plus ou moins positive ou négative, autant maintenant c’est très clair, c’est une question de mise en œuvre.

Si on a identifié un projet de pont par exemple entre le Sénégal et la Gambie ou un projet d’interconnexion électrique au niveau de la CEAC (Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale) et que pour le réaliser il faudrait deux ou quatre ans, il faudrait aussi des études de faisabilité autant sur tels aspects avec une mobilisation de ressources. Au bout de trois ans, on va dire, l’agence a pu le faire ou n’a pas pu le faire. Ce sera très concret. Le fait d’être une agence nous impose une responsabilité qui est tout à fait différente. Cela nous oblige à atteindre des objectifs et s’ils ne sont pas atteints ça ce voit très clairement.

S : Les populations à la base ne voient rien de concret se réaliser sur le terrain depuis la création du NEPAD. Est-ce qu’on n’a pas l’impression que c’est une coquille vide, rien que des discours ?

IAM : (regard baissé). C’est une bonne question. C’est l’une des critiques qui ont souvent été formulées et qui consistent à dire beaucoup de colloques, de séminaires et de conférences pour répéter toujours la même chose sur des questions qui sont connues ; alors qu’on a les Objectifs du millénaire pour le développement, les stratégies de réduction de la pauvreté, on a pleins d’instruments à gauche et à droite et à la fin, on vient rajouter le NEPAD. Est-ce qu’à la fin, l’Afrique en tant que continent a réussi à réduire sa pauvreté ?

On peut se poser ces questions-là. Globalement, il ne faut pas isoler le NEPAD de son contexte africain. Il ne faut pas culpabiliser une structure qui fonctionne à l’intérieur d’une architecture qui est globale. Deuxièmement, il faut se rendre compte qu’au cours des dix dernières années, malgré tout ce qu’on peut dire, il y a eu quand même des progrès économiques au niveau du continent qui sont significatifs.

Aujourd’hui le revenu par habitant de l’Africain au niveau du continent est plus élevé que le revenu par habitant de l’Inde qui fait à peu près un milliard deux cent millions d’habitants et nous faisons un peu moins d’un milliard. Il n’y a pas beaucoup de gens qui le savent. Ce sont des statistiques ; ce n’est pas un mystère.

L’Afrique qui a réussi à avoir ce niveau de revenu par habitant, cela signifie qu’il y a quand même des progrès qui ont été faits en termes de croissance économique même si on est le continent qui a le plus d’inégalités dans le monde. Les inégalités en Afrique sont plus importantes qu’en Amérique latine ou qu’en Asie.

C’est cette inégalité qui fait que la perception de la réduction de la pauvreté est très limitée. Pour ce qui concerne le NEPAD lui-même, on ne peut pas affectée au NEPAD une connexion directe avec l’état du continent en tant que tel. Ce qu’on doit essayer de voir, c’est ce qu’il a pu apporter dans les domaines très précis et voir comment il pourrait apporter plus.

Je pense qu’en étant transformé en agence il peut apporter beaucoup plus en soutien aux communautés économiques régionales, en ciblant des projets d’intégration que ce soit en transport, en énergie, du point de vue de la santé ou de l’éducation ou de la science et de la technologie.

Là on pourra l’évaluer de manière très concrète. C’est clair que si la pauvreté n’est pas réduite de manière significative, d’une manière directe ou indirecte, le NEPAD en est responsable comme en est responsable la Commission de l’Union africaine, comme en est responsable la CEDEAO, la SADC, la CEAC etc. On est tous responsables. Pour ce qui est de la question de la visibilité du NEPAD, il faut effectivement faire le lien entre ce que le NEPAD produit et ce que les populations peuvent sentir de façon concrète.

Il y a une chose qui est souvent difficile à communiquer, c’est que le rôle du NEPAD c’est sur le plan régional et sur le plan interrégional mais ce n’est pas au niveau national. Le NEPAD, ne peut pas entrer en compétition avec les Etats au niveau national pour mener à bien la réalisation de projets. Par contre, il peut travailler de manière très étroite avec la CEDEAO sur des projets de transports, avec la SADC sur des projets de santé. C’est à ce niveau qu’il faut véritablement nous évaluer.

S : Eradiquer la pauvreté en Afrique fait partie des objectifs du NEPAD. Comment atteindre cet objectif ?

IAM : (Il croise les doigts). Je ne suis pas de ceux qui sont en faveur de ce qu’on appelle les stratégies de réduction de la pauvreté pour deux raisons. Après le Programme d’ajustement structurel de la Banque mondiale, on a connu un accroissement de la pauvreté. Presque tout ce qui était programmes et projets sociaux a été mis de côté.

Les stratégies de réduction de la pauvreté définies par la Banque mondiale sont la conséquence de l’application du Programme d’ajustement structurel. Cela nous amène à réfléchir uniquement en termes de gestion de la pauvreté chronique et non pas en termes de création de richesse. Il ne faut pas qu’on soit dépendant mentalement des schémas de la Banque mondiale qui sont les résultats de leurs propres erreurs. Il faut plutôt qu’on réfléchisse en termes de stratégies de croissance économique pour créer de la richesse. C’est en créant de la richesse qu’on pourra employer les jeunes qui viennent sur le marché du travail.

Dans un pays comme le Niger ou le Burkina, la cohorte des jeunes qui viennent tous les ans sur le marché de l’emploi, c’est entre 150 000 et 200 000 jeunes de 18 à 23 ans. Sur ces 150 000 à 200 000 jeunes, combien vous en avez qui sont employés ? Ils ne peuvent pas rentrer dans la Fonction parce que nous avons des seuils qui sont déjà comblés. Ce qui reste c’est essentiellement à travers le secteur privé et la création des richesses se fait par le secteur privé.

Et le rôle de l’Etat c’est de permettre au secteur privé de se développer. Ce n’est pas avec des stratégies de réduction de la pauvreté qu’on va créer la richesse qui va permettre d’employer ces jeunes-là. Il faut qu’on change de manière de réfléchir et qu’on ne pense pas en termes de comment on va gérer la pauvreté chronique mais plutôt comment on va créer la richesse.

S : Aujourd’hui, on entend le meilleur et le pire sur le NEPAD. Les uns disent que c’est un bel outil de développement, les autres que c’est un gadget inutile. Disposez-vous véritablement des moyens nécessaires pour le développement du continent qui semble être dans des ténèbres et qui peine à trouver le bout du tunnel ?

IAM : Si on regarde l’avenir, il y a au moins trois points d’optimisme. Le premier, c’est qu’aujourd’hui on a une agence qui est technique qui va se concentrer sur des projets très précis qui pourraient être évalués. L’Afrique a un atout parce qu’elle a une agence et qu’elle a des ressources humaines très pointues et qui peut aider à accélérer des projets régionaux. Deuxièmement, du point de vue de la mobilisation des ressources, notre objectif ce n’est pas d’aller quémander de l’aide avec des bailleurs de fonds. Si l’aide avait permis de développer ce continent, on ne serait pas où on est aujourd’hui.


Et il n’y a pas un seul pays qui soit développé à travers l’aide dans l’histoire économique contemporaine. Notre objectif ce n’est pas de mobiliser des aides de gauche à droite et de réfléchir en termes d’aide à mobiliser. C’est d’avoir des cadres de politiques qui soient cohérents. Et l’agriculture est un bon exemple. On importe de l’extérieur en produit alimentaire pour 40 milliards de dollars par an. Ce n’est pas un problème de ressources.

Si sur ces 40 milliards on utilisait la moitié pour investir dans l’agriculture, on n’aurait pas besoin d’importer. Ce n’est pas un problème de ressources mais un problème de cadres de politiques cohérents. Et dans le cadre de politique cohérent, il faut renforcer la capacité des petits exploitants, il faut les former, leur sécuriser la terre pour qu’ils soient motivés à produire. Il faut voir comment ils peuvent avoir accès à des engrais, à des biotechnologies qui soient pour eux faciles à utiliser. Il y a donc des cadres de politiques cohérents qu’il faut mettre en œuvre.

Il y a des projets régionaux qu’il faut accélérer et qui doivent être mis en œuvre en limitant d’une certaine manière, en amenant les Etats à être plus acteurs dans ces politiques régionales. Ce qui veut dire que si par exemple on ne constitue pas des morceaux que l’on protège d’une certaine manière, il est difficile d’avoir une agriculture qui soit productive, puisque nous allons continuer d’importer des boîtes de tomates d’Italie ou d’Espagne et nous ne pourrons pas les produire nous-mêmes. Sur le plan d’intégration régionale il y énormément de choses à faire et notre rôle c’est de participer à ce mouvement-là.

S : Quel est le montant du budget mis à la disposition du Secrétariat exécutif du NEPAD.


IAM : Il n’y a pas de mystère à ce niveau. On a trois sources de financement. On a une contribution du budget de la Commission de l’Union africaine qui est d’à peu près 3 millions de dollars cette année ; ce qui n’est pas grand-chose pour l’ensemble des activités que nous faisons. On a une contribution volontaire des Etats membres.

Au cours de l’année, ceux-ci peuvent contribuer. On a aussi un pourcentage que nous prélevons pour notre fonctionnement et qui vient des partenaires au développement qui financent un certain nombre de programmes que nous avons définis. Ce ne sont pas eux qui définissent ces programmes mais plutôt nous et s’ils sont intéressés ils y contribuent.

S : Quel appel avez-vous à lancer pour que les Etats africains prennent conscience que le développement de l’Afrique doit être géré par les Africains eux-mêmes ?

IAM : Je pense que les politiques africains ont compris cela. Pour une raison que tous les leaders politiques africains sont assis sur une bombe politique. Quelle est cette bombe politique ? C’est que nous sommes le continent le plus jeune du monde. 50% ont moins de 20 ans ; certains même diront moins de 18 ans. Nous avons le taux de croissance le plus élevé du monde, plus de 3%. Ce qui veut dire que notre population augmente et nos jeunes augmentent. Et un continent qui est aussi jeune comme celui-ci ne peut pas être géré comme les autres continents parce que les jeunes sont impatients.

A partir de ce moment-là, si les leaders politiques ne comprennent pas cela, ils vont être balayés par la jeunesse. Il n’y a d’autres solutions. Ils ont donc compris qu’il faut créer les richesses nécessaires pour employer ces jeunes qui viennent sur le marché du travail. C’est cela le défi de l’Afrique.

Entretien réalisé par Enok KINDO

Sidwaya

Sambou Biagui


1.Posté par gueye le 12/04/2010 00:03 | Alerter
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Bonjour,
je trouve cet article assez pertinent avec des reflexions pointues. Jespère qu'il sera diffusé et lu le plus largement possible. Vivemet que les africains prennent conscience des enjeux du développement

2.Posté par FAYE le 13/04/2010 17:34 | Alerter
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Et le volet environnement du NEPAD basé au Sénégal ?
Quel est son sort ?

3.Posté par Y.Mérabet le 14/07/2012 15:27 | Alerter
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Le gaz africain pour l'Afrique
Par Y.Mérabet


Photo : OPEP
L’Afrique noire a besoin de son gaz et de son pétrole pour rattraper son retard et se développer et tout projet crédible de développement devrait proposer des alternatives sur des bases non discriminatoires et l'échange «donnant-donnant». L'approfondissement de l'intégration dans le marché mondial est allé avec la marginalisation. Le développement humain et économique de l'Afrique, le ratio du commerce extra-régional par rapport au PIB était de 45,6% en Afrique, contre 15,5% pour l'Asie, 23,7% pour l'Amérique latine, 13,2% pour l'Amérique du Nord et 12,8% pour l'Union européenne. La part de l'Afrique dans les exportations mondiales a chuté de 4,5% en 1990 à 1,1% en 2008 et celle des investissements étrangers directs de 5,8% à 1% en 1990, selon un communiqué de la FAO. Autrement dit, la marginalisation va de pair avec une intégration croissante (chiffres d’avant la crise mondiales).
Les grands projets du NEPAD
L'Afrique noire aura besoin de ses ressources énergétiques pour assurer son propre développement interne, elle n'a pas de surplus à vendre.
- Projet gazoducs
Le sous-sol africain est extrêmement riche en ressources énergétiques, mais le continent ne dispose pas d'infrastructure lui permettant de les exploiter à un niveau maximum. Les zones de production, de consommation et d'exploitation sont très éloignées géographiquement ; un développement des infrastructures sous forme de pipeline est la seule solution optée par le NEPAD.
La création de deux pipelines, dont le coût est estimé à 7 milliards de dollars, est inscrit dans l'agenda du NEPAD.
- Projet ligne électrique
Aujourd'hui, le taux d'électrification en Afrique est de 30% (deux fois moins que la moyenne mondiale). Le potentiel hydroélectrique n'est utilisé qu'à 6% de ses capacités, mais demande de lourds investissements qui ne sont pas disponibles : la solution iranienne est beaucoup plus abordable pour le moment.
C'est pourquoi le NEPAD met en place deux grands projets qui ont pour but la réhabilitation du barrage d'Inga et le renforcement des lignes à haute tension. Un mégaprojet de gazoduc, le Transafricain Gaz Iranien est à l'étude pour résoudre définitivement ce grand déficit.
- Projet autoroutier
Un des objectifs du NEPAD est le développement d'un réseau routier en Afrique afin de faciliter les échanges, notamment commerciaux, pour améliorer les approvisionnements et les acheminements des produits sur les marchés.
- Projet ferroviaire
Quelques timides investissements ont été réalisés afin de réhabiliter les chemins de fer existants. Des projets de rénovation et de construction sont actuellement à l'étude dans le but de réaliser un rail transafricain de 8.000 km qui relira le Nigéria et l'Afrique du Sud. Et les autres ?
- Projet portuaire
En Afrique, 95% du commerce extérieur se fait par voie maritime ou fluviale, mais le continent n'est pas pour autant suffisamment équipé et compétitif dans ce domaine qui reste encore sous-développé.
Le pétrole et le gaz pour créer une industrie pétrochimique africaine
La production mondiale de pétrole dépasse aujourd'hui les 3,5 milliards de tonnes. Le Moyen-Orient, avec plus de 1 milliard de tonnes, est la première zone productrice. L'Arabie Saoudite extrait près de la moitié de ce volume, l'Iran 18% (avant l'invasion américaine), l'Irak (avant l'invasion américaine), le Koweït et les Emirats Arabes Unis, chacun 11%. L'Amérique du Nord, avec plus de 600 millions de tonnes, est la deuxième zone de production. Les Etats-Unis en extraient plus de la moitié (à vérifier), le Mexique près de 30% et le Canada 20%. Les pays en transition (ex-URSS) constituent la troisième zone de production, avec 374 millions de tonnes, dont 93% pour la seule Russie. L'Afrique avec 376,4 millions de tonnes, soit 10,6% de la production mondiale : le brut africain, réputé d'excellente qualité car léger et donc facile à raffiner, attise toutes les convoitises.
Les réserves avérées du continent oscillent entre 80 et 100 milliards de barils, soit 7 à 9% des réserves mondiales. Or, pour l'heure, le continent produit 9 millions de barils par jour, dont près de 5 dans la seule région du golfe de Guinée. Une étude du FMI sur l'émergence du golfe de Guinée dans l'économie mondiale estime que « les pays producteurs d'Afrique généreront, entre 2002 et 2019, 350 milliards de dollars de revenus grâce au pétrole, c'est-à-dire plus que le PIB actuel de la Russie et près du PIB total actuel de l'ensemble des pays d'Afrique subsaharienne ». Avec 8% des réserves mondiales (95 milliards de barils équivalent pétrole), l'Afrique entend jouer pleinement son rôle dans la recomposition en cours du marché international du gaz. La diminution programmée des réserves de pétrole fait de cette ressource un enjeu majeur pour les pays producteurs du continent.
Selon l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), « la consommation de gaz devrait doubler d'ici à 2030 pour atteindre 4.900 milliards de m³. Il sera alors la deuxième énergie au monde derrière le charbon. L'économie pétrolière et uranifère reste dominée par les compagnies occidentales, notamment française qui tire profit des conflits et des guerres civiles.
L'Afrique devient une région de plus en plus importante pour la production de pétrole. Entre 1990 et 2005, la production de pétrole est passée de 6,5 millions de barils à 9,3 millions de barils par jour, soit une augmentation de 9,9% à 11,2% de la production mondiale. L'augmentation soutenue des prix du pétrole ces dernières années a mis en évidence le potentiel de l'Afrique comme fournisseur de pétrole et le continent est devenu le point de mire de grands pays importateurs de pétrole, en particulier la Chine et l'Inde.
Du gaz pour la production électrique et la consommation locale
L'essentiel de la production de gaz du continent vient d'Afrique du Nord, Algérie en tête : elle exporte près de la moitié de cette production, mais aussi d’Égypte et bientôt de la Libye, appelée à développer ce secteur après la levée des sanctions américaines. Le Nigeria, qui a de grosses réserves de gaz, en exporte l'essentiel alors que l'Angola, qui réinjectait jusqu'à présent le gaz dans les gisements de pétrole, a un projet de gaz naturel liquéfié (GNL), tout comme la Guinée Equatoriale, autre producteur de brut. Des découvertes de gaz ont également été faites au Mozambique et en Tanzanie, pays non pétroliers.
L'Algérie souhaite porter ses exportations de gaz à 85 milliards de m³ en 2011. La compagnie algérienne Sonatrach, 2e fournisseur de gaz à l'Europe après la Russie, conserve ses projets d'expansion malgré des recettes inférieures à ses objectifs, en raison de l'effondrement des cours du brut. Les prix du gaz sont en effet indexés sur ceux du pétrole, en forte baisse. Mais le groupe public algérien, premier producteur de gaz du continent, confirme ses ambitions : consolider sa place de 2e fournisseur européen, se développer sur le marché prometteur du GNL (transportable par méthaniers) et sortir du pré-carré algérien en opérant à l'étranger. Le sous-sol algérien recèle à peu près les 3% des réserves mondiales en gaz: une recette modeste qui conteste ses ambitions de consolider sa position de deuxième producteur de gaz dans le monde et leader mondial dans la liquéfaction du gaz (GNL), un moyen pour faciliter le transport entre continents éloignés. En Afrique, le groupe opère déjà en Mauritanie, au Niger, au Mali, en Libye, en Tunisie et en Égypte.
En Libye, plusieurs compagnies pétrolières, dont la canadienne Verenex, ont découvert des gisements dans le bassin de Ghadamès, à environ 180 km au sud-ouest de Tripoli. Il s'agit de la dixième découverte dans ce périmètre depuis le début de son exploitation en septembre 2006. Troisième producteur de pétrole d'Afrique -après le Nigeria et l'Angola -, la Libye produit actuellement 3,5 milliards de m³/jour de gaz naturel et envisage de doubler sa production gazière d'ici 2012 ou 2013.
Au Nigeria, les violences dans le Delta du Niger, mais aussi la corruption et la désorganisation du tissu industriel freinent l'exploitation aussi bien du pétrole que du gaz, qui a souvent été brûlé au lieu d'être produit et exporté. Il est tout à fait naturel que les compagnies cherchent à faire le maximum de bénéfice et n'investissent pas dans la récupération ; c'est au pays d'accueil à faire des efforts et de minimiser les pertes.
Le Nigeria est potentiellement le plus grand producteur de pétrole en Afrique, mais dans la région du Delta du Niger, d'où presque tout le pétrole vient, les communautés locales affirment qu'elles ne profitent pas des milliards de dollars réalisés par an à partir des recettes, et accusent l'industrie pétrolière d'être la cause de l'appauvrissement de la population. Le Nigeria, situé dans le golfe de Guinée, est de loin le pays le plus peuplé d'Afrique avec plus de 140 millions d'habitants. Malgré une production de pétrole importante, le Nigeria demeure un pays relativement pauvre, en raison notamment d'une très forte corruption. La valeur de son PIB total le place à la troisième position en Afrique, derrière l'Afrique du Sud et l'Algérie. Malgré la tenue d'élections au suffrage universel, la démocratie n'est pas établie, le dernier scrutin ayant donné lieu à des fraudes massives, selon les observateurs internationaux. Les Ijaws, ethnie vivant dans le Delta du Niger, d'où sont extraits les hydrocarbures, se sont soulevés contre le gouvernement qu'ils accusent de connivence dans la pollution de l'environnement. Le MEND, mouvement d'émancipation du Delta du Niger, bien armé et bien entraîné aux tactiques commandos, s'en prend aux intérêts étrangers en enlevant des ingénieurs contre rançons et perturbe la production pétrolière destinée à l'exportation, sabote les oléoducs : le vol et le crime deviennent l'économie du pauvre. Les ressources naturelles du sous-sol nigérian ne sont plus distribuées équitablement entre les populations défavorisées, créant de sanglantes émeutes entre musulmans et chrétiens et aussi d'autres tribus.
Le transsaharien, un gazoduc initié par le NEPAD, destiné à approvisionner l'Europe en gaz naturel, n'a aucune relation avec le développement du reste de l'Afrique noire ; un seul pays seulement du Sahel bénéficiera de quelques milliers de m³, soit 1/15e pour le Niger et 14/15e pour l'Union européenne.
En Angola, les autorités prévoient une forte croissance du secteur gazier dans l'exécution des projets Angola LNG (Gaz naturel liquéfié) et de construction de nouvelles raffineries, ce qui favorisera la création d'une industrie pétrochimique. Au Mozambique, le gaz est exporté par la compagnie sud-africaine Sasol essentiellement pour la pétrochimie. Le gouvernement mozambicain s'est fixé comme objectif d'atteindre en 2009 une croissance de 8,9% pour les recettes de ses exportations dominées par trois produits : l'aluminium de la société Mozal, l'électricité du barrage de Cabora Bassa et le gaz naturel exploité par Sasol. De son côté, le gouvernement tanzanien a annoncé plusieurs découvertes de champs gaziers dans le pays, sans révéler leur réserve potentielle. Tous ces champs ont été découverts le long de la côte de l'océan Indien, entre Dar-es-Salam et Mtwara.
Le Transsaharien, un truc du NEPAD qui marche plus
Franchement, la politique énergétique que mènent les responsables africains du NEPAD ne nous honore pas : c'est plaisanterie sur plaisanterie et mandat sur mandat. Il est exagéré de présenter aux peuples d'Afrique un projet destructeur, appauvrissant et plein de vices. L'étude de faisabilité pour la réalisation du gazoduc transsaharien devant relier le Nigéria à l'Algérie via le Niger, baptisé NIGAL, confiée à la société britannique Penspen/IPA pour la somme de 2,04 millions de dollars, sort avec des résultats technico-économiques non probants et deux grandes entraves: la sécurité liée à la guerre au Nigéria et plus précisément dans le delta du Niger et le prix de revient de l'unité de gaz transportée qui dépasse le seuil de rentabilité. Qu'importe les résultats de l'étude, les responsables du NEPAD foncent sur le déficit lorsque les intérêts des Occidentaux sont menacés par la percée iranienne en Afrique noire. Ce projet, qualifié de grande envergure par les ministres du NEPAD, est en fait un projet anti-NEPAD et anti-africain.
Ce projet transsaharien doit répondre au besoin de transport du gaz naturel à partir des exploitations du Nigeria encore en litige de partage de richesse entre les renégats du gouvernement et la population autochtone, en transitant par le Niger et l'Algérie pour servir l'Union européenne en gaz. L'Afrique en quête d'argent finance des projets de grande envergure pour l'Union européenne, le coût global du transsaharien est estimé à 10 milliards de dollars, en plus de 3 milliards de dollars que nécessitera la collecte le long de son parcourt. L'étude prévoit un délai pour le début de l'exploitation de l'ouvrage : ce sera 2015, mais le financement reste posé.
Beaucoup d'étapes restent à franchir, la cessation des combats au delta du Niger, du terrorisme frontalier, la signature d'accords intergouvernementaux, l'harmonisation des normes de réalisation du pipeline, les études sur l'impact du projet sur l'environnement, le calcul du prix réel de l'unité transportée, la signature d'une directive commune entre l'Union européenne et la commission africaine chargée de gérer ce projet et, principal destinataire du gaz nigérian, le problème des frontières, l'entrée en vigueur probable des accords de l'UMP, l'inexpérience des trois pays africains pour gérer rationnellement les grands ouvrages de transport, les droits juridiques, etc.
La grande société russe Gazprom et Total France sont intéressés par ce projet pour véhiculer le gaz africain vers l'Europe via le Sahara : un chantier de 13 milliards de dollars et du gaz pour l'Union européenne.
Alors où est là l'intérêt pour l'Afrique? «Total pense que c'est une diversification stratégique à long terme pour le Nigeria, qui est vraiment intéressante», a dit Guy Maurice, directeur général de la prospection et de la production de Total au Nigeria, lors d'une conférence. «Je saisis cette occasion pour déclarer publiquement que Total est prêt à s'engager dans ce projet». L'Union européenne, qui reçoit 40% de son gaz et le tiers de son pétrole de la Russie, estime que le projet pourrait lui permettre de diversifier ses fournisseurs d'énergie. Gazprom, qui a dit auparavant qu'il espérait signer en mars un contrat de prospection pétrolière et gazière avec le Nigeria de 2,5 milliards de dollars, a manifesté à nouveau son intérêt pour le projet et s'est dit prêt à travailler avec Total. Nous sommes également intéressés... «Les projets gaziers du gazoduc transsaharien nous donnent l'opportunité de démontrer notre expérience», a dit Vladimir Ilianine, patron de Gazprom Nigeria. «Nous avons travaillé avec Total sur bien d'autres projets et je ne vois donc aucun motif qui empêche qu'on travaille encore avec lui sur celui-ci». Alors, où est l'intérêt africain dans cette affaire, si ce n'est une complicité collective des responsables africains du NEPAD ?
Le Transsaharien Service Gaz Pipeline (TSGP), d'intérêt européen, est indéfendable pour être intégré dans l'agenda du NEPAD, c'est plutôt une entrave au développement socio-économique du continent africain de soumettre nos richesses et notre indépendance au diktat de l'Union européenne. Ce projet ne pourrait être nullement comparé au Transafrican Gaz Iranien (TGI), qui lui aurait un impact économique de grande envergure dans l'immédiat sur l'ensemble des pays qui composent le continent. Ce sont plus de 41 pays africains qui émergeront à la fois du sous-développement.
Le GNL, un futur pour l’Afrique de l’Ouest
La flexibilité qu'il procure en matière d'approvisionnement représente un atout primordial pour l'équilibre futur des marchés. Malgré un certain nombre d'incertitudes et de contraintes susceptibles d'entacher quelque peu la réalisation des perspectives de croissance les plus optimistes, le commerce du GNL reste promis à un développement rapide. Sa part dans les échanges gaziers commerciaux sera de 38% en 2020.
Le GNL ou gaz naturel liquéfié est un gaz naturel mis en phase liquide par l'abaissement de sa température à - 160°C. La liquéfaction du gaz naturel permet de réduire 600 fois son volume, ce qui facilite son transport sur de grandes distances.
Les perspectives africaines sur la commercialisation du gaz sous forme de GNL
Avec 8% des réserves mondiales (95 milliards de barils équivalent pétrole), l'Afrique entend jouer pleinement son rôle dans la recomposition en cours du marché international du gaz. La diminution programmée des réserves de pétrole fait de cette ressource un enjeu majeur pour les pays producteurs du continent. Selon l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), « la consommation de gaz devrait doubler d'ici à 2030 pour atteindre 4.900 milliards de m³. Il sera alors la deuxième énergie au monde derrière le charbon. »
Cela vaut en particulier pour le gaz naturel liquéfié (GNL), marché que convoitent désormais les grands groupes internationaux, à commencer par le géant russe Gazprom. Alors que la demande ne va cesser de croître, le GNL présente de nombreux avantages. Rendu liquide par refroidissement à - 160 °C, il peut se transporter facilement par bateau. Il échappe ainsi à la contrainte géopolitique des gazoducs transfrontaliers utilisés pour le gaz naturel. Autre raison de cet attrait, l'instabilité chronique du Moyen-Orient amène, comme dans le cas du pétrole, les opérateurs à opter pour d'autres sources d'approvisionnement. L'utilisation du gaz naturel s'est fortement développée ces dernières années au Japon (40% des importations mondiales), dans l'Union européenne (UE) et aux Etats-Unis, ce qui pousse de nombreux pays à construire des usines de liquéfaction et de regazéification.
Richement dotée, l'Afrique connaîtra au cours des quinze prochaines années une expansion rapide du commerce de cette ressource à l'avenir prometteur. La hausse attendue de sa production doit se situer entre 2 et 4 millions de barils par jour (b/j), contre 500.000 actuellement. Deux pays seront particulièrement sollicités : l'Algérie, laquelle, avec ses 28,8 milliards de barils de réserves, a une longue tradition dans le GNL depuis la construction en 1961 de sa première usine de liquéfaction à Arzew, et surtout le Nigeria, suivi, dans une moindre mesure, par l'Angola (9 milliards de barils de réserves), le Gabon (2 milliards) et la Guinée Equatoriale (1,8 milliard).
Avec 32,8 milliards de barils, le Nigeria détient 2,9% des réserves mondiales prouvées et contribue à 20% de la production de tout le continent (20 millions de m3 en 2007), contre 4% en 1995. La construction de plusieurs usines doit logiquement augmenter cette part et répondre à la hausse de la demande. Les projets se sont multipliés ces derniers mois. Le britannique Centrica, associé au norvégien Statoil-Hydro et au grec Consolidated Contractors, a signé en juin dernier un accord avec l'Etat Akwa Ibon dans le Delta du Niger. Statoil, Repsol, Gasol, Centrica ou encore l'Allemand E.ON Ruhrgas doivent également construire des usines.
En Algérie, après un arrêt temporaire du développement de la filière GNL au détriment du développement de l'approvisionnement de l'Union européenne et à la suite de la crise gazière entre l'Algérie et l'Espagne (Medgaz, Repsol, etc.) le ministre de l'Energie opte pour la livraison du gaz naturel sous forme de GNL. La liquéfaction et la regazéification sont des opérations supplémentaires très coûteuses (installations, transport par méthaniers, frais de transformation, pertes pendant la transformation...) : tout cela sera déduit d'une économie hôte qui va durer au maximum deux décennies.
Sonatrach (Algérie) compte quatre complexes de liquéfaction du gaz naturel (GLIK, GLIZ, GL2Z et GL4Z) d'une capacité respective de traitement en milliards de Cm³ de : 3,72 ; 10,05 ; 11,3 ; 1,12 , soit une capacité totale de 35,92 milliards de Cm³/an. Un mégatrain à Skikda qui produira 4,5 millions de tonnes de GNL. En plus, la Sonatrach possède 5 méthaniers d'une capacité totale de transport de 704.132 m³ et une autre flotte en partenariat d'une capacité de 350.000 m³. Les réserves algériennes représentent 31% des réserves gazières africaines; elle est le leadership africain dans la liquéfaction et la commercialisation du gaz naturel. Donc, une alliance avec les pays africains sur ce domaine devient plus qu'une nécessité.
L'Afrique permet aussi de renforcer le leadership du groupe russe Gazprom. Premier producteur de la planète, il a signé, en août 2006, un accord avec la Sonatrach algérienne puis, l'année suivante, avec la Nigeria Liquefied Natural Gaz Ltd (NLNG). En octobre dernier, Alexey Miller, président de la compagnie, s'est rendu à Malabo, en Guinée Equatoriale, pour étudier les possibilités d'une coopération. L'ancienne colonie espagnole fait de l'exploitation gazière sa priorité et est même pionnière pour la mise en valeur de ses 40 milliards de m3 de réserves. Un premier train de liquéfaction construit par la société EGLNG, détenue à 60% par l'américain Marathon, a été livré en mai dernier avec six mois d'avance sur le calendrier initial.
Situé sur le site pétrochimique de Punta Europa, à l'ouest de la capitale Malabo, cet ouvrage, d'une capacité de 3,7 millions de m3 par an, est unique au monde. Le gaz une fois traité est acheminé vers les méthaniers par un gazoduc suspendu sur un pont entièrement démontable situé à 80 m au-dessus de la mer. Le projet de construction d'un deuxième train pouvant doubler la production bute cependant sur la géopolitique régionale. Un accord passé en 2007 avec le Nigeria d'Olusegun Obasanjo a été remis en question par le nouveau président nigérian. Sur les recommandations de son conseiller, Rilwanu Lukman, ancien ministre du Pétrole et ancien secrétaire de l'Opep, intéressé dans plusieurs sociétés (African LNG Holdings, Afren, Gasol...), Umaru Yar'Adua souhaite privilégier la transformation locale. Cet accord prévoyait la livraison par le Nigeria de gaz moyennant la mise à disposition par la Guinée de blocs de recherche pétrolière. Quant aux négociations engagées avec le Cameroun, elles piétinent. Gazprom pourrait ainsi suppléer ces difficultés.
La compagnie russe n'est pas la seule à faire de l'Afrique une place forte. Le groupe Suntera, joint-venture entre l'indien Sun Group et le russe Itera, investit lui aussi sur le continent, tout comme le japonais Sojit (Sumitomo/LNG Japan).
Le groupe français EDF vient de concurrencer son compatriote GDF-Suez sur son propre marché. Objectif ?
S'approvisionner en GNL pour alimenter ses centrales.
La convoitise du GNL africain par les Français et les Américains
Le président de GDF, Philippe Olivier, et Adolphe Moudiki, président de la Société nationale des hydrocarbures (SNH), se sont rencontrés à Yaoundé en novembre pour étudier les possibilités de lancement d'une filière au Cameroun. A son tour, l'Angola se lance dans la production à travers la création d'Angola LNG. Retardée d'un an, la construction d'une usine à Soyo (Nord) associant Chevron, ENI, Total et British Petroleum a démarré. Le texan Gulf LNG Energy, en partenariat avec ENI, Exxon, Total et la Sonangol, sera pour sa part le principal opérateur de l'usine de regazéification de Pascagoula, qui entrera en service en 2011. Les réserves africaines sont convoitées. Reste aux pays producteurs à résoudre deux sérieux problèmes : le torchage (voir encadré) et la sécurisation des infrastructures.
Alors que les pays africains ne produisent que 500.000 b/j de GNL sur un total de 2,6 millions de b/j de gaz (gaz naturel, méthanol, condensat...), la mise en valeur des réserves suppose des investissements de plus en plus coûteux et risqués. Des militants indépendantistes s'en sont pris aux installations de l'usine de GNL de Soku, de l'anglo-néerlandais Shell, au Nigeria. Même si une cinquantaine d'entreprises ont postulé, en octobre, au Nigerian Gaz Master Plan qui doit doter la Fédération d'équipements de récupération du gaz torché, ces menaces freinent en définitive l'investissement.
La convoitise du GNL africain par les Russes
La nouvelle usine, d'une capacité annuelle de 9,6 millions de tonnes de gaz, sera chargée de liquéfier le combustible bleu extrait dans le cadre du projet international Sakhaline-2. Elle doit assurer jusqu'à 5% des livraisons mondiales de gaz naturel liquéfié.
Le projet Sakhaline-2 est réalisé dans le cadre d'un contrat de partage de production signé en 1994 entre le russe Gazprom (50% plus une action), l'anglo-néerlandais Royal Dutch/Shell (27,5%) et les japonais Mitsui (12,5%) et Mitsubishi (10%). La compagnie Sakhalin Energy est l'opérateur de ce projet dont les réserves sont estimées à 150 millions de tonnes de pétrole et à 500 milliards de mètres cubes de gaz naturel.
La liquéfaction du gaz naturel permet un transport par navires, appelés méthaniers, jusqu'à réception sur des sites nommés terminaux méthaniers. Sur de longues distances, ou lorsque les conditions de pose des gazoducs sont difficiles, ce mode de transport du gaz naturel est le plus économique. Sur les terminaux, le GNL est rendu à l'état gazeux par vaporisation. On dit qu'il est « regazéifié ». Il est ensuite injecté dans le réseau de transport du gaz naturel. La mise en place d'une chaîne de GNL (usine de liquéfaction, transport par méthanier, terminal méthanier) intervient généralement quand la construction de gazoducs est trop coûteuse : longue distance avec le lieu de production ou difficulté de poser des gazoducs (liaison offshore à travers une mer profonde, par exemple). La flexibilité qu'il procure en matière d'approvisionnement représente un atout primordial pour l'équilibre futur des marchés. Malgré un certain nombre d'incertitudes et de contraintes susceptibles d'entacher quelque peu la réalisation des perspectives de croissance les plus optimistes, le commerce du GNL reste promis à un développement rapide, On trouve du gaz naturel partout dans le monde, dans des réservoirs situés en profondeur, sous la surface terrestre ou des océans. Des poches de gaz peuvent se former au-dessus des dépôts de pétrole brut ou être emprisonnées au sein de roches poreuses. On qualifie le gaz naturel «d'associé» lorsqu'il est trouvé en présence de pétrole brut et «non associé» lorsqu'il est seul.
A la pression atmosphérique, si le gaz naturel est refroidi à une température de -161°C environ, il se condense sous la forme d'un liquide appelé gaz naturel liquéfié (GNL). Un volume de ce liquide occupe environ le six centième d'un volume de gaz naturel et est deux fois moins lourd que l'eau (45% environ). Il est inodore, incolore, non-corrosif et non-toxique. Une fois sous forme de vapeur, il ne brûle dans l'air que dans une concentration de 5% à 15%. Ni le GNL ni le gaz naturel ne peuvent exploser à l'air libre. Puisque le gaz naturel sous sa forme liquide occupe un volume plus restreint, il est souvent stocké et transporté sous cette forme.
Et voilà qu'après l'annonce de la possibilité de développer l'Afrique noire par le séduisant projet Transafricain Gaz Iranien, l'affaire du gazoduc transsaharien (TGS) surgit de sa tombe. Une rencontre regroupant les responsables de la compagnie Sonatrach et la compagnie NIOC nigériane et une mystérieuse compagnie du Niger : les trois compagnies ont été chargées par leurs gouvernements pour remédier à l'irrémédiable question de rentabilité de ce projet et de l'absence totale d'un quelconque impact économique sur le continent africain. Bien au contraire il faudrait éviter ce genre de projet qui sert de «pompe à vide» à l'Afrique noire. C'est un projet agressif qui servira uniquement l'intérêt des Européens, au mépris des populations africaines, les rendant encore plus pauvres et plus dépendantes de la rente du pétrole. En quelque sorte, la mauvaise expérience algérienne sera transférée en Afrique noire.
L'Afrique noire a besoin de valoriser ses ressources énergétiques et de les utiliser pour son rattrapage économico-social, tout en créant une industrie chimique et pétrochimique créatrice de richesses. A quoi bon vendre son pétrole et importer de milliers de produits manufacturés de l'Europe, alors qu'on peut les fabriquer chez soi. A titre d'exemple, vendre à l'Union européenne une tonne de pétrole, cela nous coûtera 10 fois plus si on l'achète en produits transformés.
Le transsaharien, comme tous les gazoducs algériens transcontinentaux (Medgaz, Galsi, GME), sont des projets à grand intérêt européen qui rentrent dans le chantage politique, qui livrent les peuples de l'Afrique à son ex-colonisateur les mains liées. On dit que l'Algérie, leadership du Transsaharien, entrant dans le cadre du NEPAD qui englobe l'Afrique blanche et l'Afrique noire, veut reprendre les rênes de ce projet mort-né et concrétiser l'idée que ce «bluff économique» va servir d'alibi pour se rechausser sur l'échiquier mondial des entreprises mondiales exportatrice de gaz, alors qu'elle n'arrive même pas à vendre son propre gaz ou rentabiliser ses infrastructures gazières du transport par canalisation qui tourne à moins de 50%, ou bien cesser de brûler par mévente plus de 3 millions de tonnes de GPL, soit l'équivalent de 1,5 milliard de m³ de gaz, soit la consommation de 36.500.000 personnes.
L'Algérie doit miser sur l'Afrique noire en raccordant son demi-transsaharien sur le Transafricain Gaz Iranien, un projet libérateur d'abandonner l'Europe «sangsue» de l'Afrique.
Il n'est pas dans l'habitude des Algériens de servir de bouc émissaire à la vieille Europe pour diviser l'Afrique et créer des tensions entre les communautés africaines. La concrétisation de ce projet, comme nous l'avons entendu, alimentera en gaz partiellement une seule capitale d'Afrique noire, Niamey, contrairement au Transafricain. Celui-ci desservira toutes les villes africaines en gaz, électricité et eau et créera autant de bonnes choses que de mauvaises que pourrait en créer le Transsaharien.
L'Afrique noire malade, bien malade, pour laquelle on parcourt le monde depuis deux décennies, à la recherche de remèdes, essuyant parfois la moquerie et l'humiliation. En Afrique, les 3/4 de la population vivent au-dessous du seuil de la pauvreté absolue avec moins de 0,55 dollar, où les gens continuent de mourir de faim et de malnutrition, alors que de vastes ressources naturelles sont à portée de main. C'est la région où environ 70% de la population vit dans le noir, ou s'éclaire au feu de bois ou à la lampe à pétrole, alors que ses fleuves et leurs chutes peuvent éclairer tout le continent

Y. Mérabet - Expert en Energie -- Journaliste indépendant


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