UNE POSTURE MAL INSPIREE…
La plupart de nos compatriotes relèvent l’absence de détermination du principal intéressé. D’ailleurs beaucoup disent ne pas comprendre le matraquage médiatique autour d’une candidature fictive. « Je ne l’ai jamais entendu dire qu’il souhaiterait être président ». En ce sens, ils comprennent parfaitement, qu’une candidature, fût-elle être relayée par de zélés colporteurs, n’est pas un colis et ne peut se faire sur le mode du jottali. Il s’agit d’un acte de langage qui engage doublement le postulant et les votants.
Une élection présidentielle, c’est la rencontre et le dialogue, entre un homme (ou une femme) et un peuple. Il revient à cet homme de dire « Pourquoi lui » et il appartient aux citoyens d’en juger la pertinence. Voilà pourquoi, en cherchant à inverser les rôles, ce sms, plutôt débile en son genre, trahit un double malaise. Tout d’abord, celui de ses créateurs, en montrant combien ils doivent être en manque d’inspiration pour rendre « attractif » un candidat, trop contestable ; ensuite celui des Sénégalais, étonnés d’être les cibles d’une farce aussi puérile.
Contestable, disions-nous, puisque nos concitoyens considèrent que la succession, sans législature intermédiaire, d’un père par le fils, n’est pas acceptable. C’est un schéma antinomique à notre démocratie et à nos traditions politiques. Traditions, encore fragiles, qui ont besoin d’être consolidées et non déstabilisées. Il s’y ajoute, beaucoup le disent, que la candidature de Karim Wade ne serait pas recevable, car ce dernier serait de double nationalité. Ce qui n’est pas conforme avec notre Constitution, qui n’admet que des candidats de nationalité exclusivement sénégalaise (art. 28).
Dans ces conditions une éventuelle candidature de Karim Wade, à la présidence de la République du Sénégal, n’est donc ni souhaitable, ni recevable.
UNE SYMBOLIQUE DESASTREUSE
Les Sénégalais ne disent pas autre chose, lorsqu’ils soulignent que le fils du président de la République, n’a jamais assumé une quelconque fonction élective. Comment peut-on leur reprocher de ne pas être prêts à confier la direction de notre nation à un garçon qui n’a jamais été chef de quartier, maire d’arrondissement, député… Les seules responsabilités significatives qu’il a eues à assumer, il les doit à l’affection et la confiance exclusives de son papa. Tous redoutent la symbolique qui découlerait d’une succession dans de telles conditions. Car, dans notre pays, s’il est, sans aucun doute, une brûlante urgence, c’est bien la réhabilitation de nos raisons de croire, de nouveau, au mérite et à la récompense de l’effort consenti. Or, pour bien des Sénégalais, dont de nombreux militants du PDS, Karim Wade est l’exemple parfait de l’arriviste qui cherche à transformer leur longue marche vers le sopi en une course effrénée pour son propre profit. On aurait souhaité, dans une symbolique davantage constructive et positive, que la Génération du Concret s’inscrivît dans le sens de l’histoire et des urgences du pays. On aurait souhaité dans cette même dynamique qu’elle relevât des défis démocratiques, politiques et économiques autour de questions difficiles agitant la société sénégalaise : la polygamie, les inégalités, la laïcité, la séparation des pouvoirs, le respect des libertés, les urgences sociales, la reconquête de notre souveraineté économique vis-à-vis de la France… au lieu de concerts géants en Espagne (si peu concret en fin de compte).
COURIR APRES LE TRAIN…
Le problème n’est pas que Karim Wade ait raté le premier train de l’Histoire, en s’éloignant du combat démocratique, à une époque où son père était un des opposants les plus célèbres d’Afrique, c’est d’avoir manqué le dernier après le premier. Il n’a jamais été capable de s’émanciper et de braver son propre camp malgré de nombreuses occasions offertes depuis 2000. Les Sénégalais ne l’ont jamais entendu condamné la loi Ezzan, l’agression de Talla Sylla, le pillage de l’AS et de 24H, les brutalités policières envers des journalistes… Pendant ce temps, son nom est apparu dans trop de controverses juridico-financières. Ceci, dans une société où chaque matin, et depuis si longtemps déjà, les femmes et les hommes luttent pour prendre le dessus sur leur quotidien. C’est finalement cette générosité outrancière et cette image trouble qui font, par contraste, l’opinion favorable que la société sénégalaise semble accorder à sa sœur, Sindiély.
IL NE SERT A RIEN DE COURIR…
Par ailleurs, Karim Wade en donnant de lui une image publique de garçon généreux, et même trop généreux, a non seulement produit, à son désavantage, l’image d’un homme politique du passé, mais conduit aussi beaucoup de nos concitoyens à douter de la provenance régulière de ses moyens financiers pharaoniques. En comptant sur la magie de l’argent, ses conseillers ont raté le sens de l’Histoire. Car, en entrant dans ce nouveau siècle, le Sénégal a voulu tourné le dos, à une catégorie précise d’hommes politiques ; celle qui, quarante ans durant, l’a pillé en distribuant, à gauche et à droite, des billets de banque qu’elle ne gagnait pas à la sueur de son front. Faut-il le rappeler, Karim Wade n’est qu’un simple salarié de l’Etat ! Le plus grave, dans cette histoire, est sans aucun doute, le mépris dont témoigne, à l’encontre de la société sénégalaise, le choix d’une telle stratégie de conquête du pouvoir.
Que l’on ne perde pas de temps à nous faire un quelconque mauvais procès d’intention contre Karim Wade. Ce n’est pas sa personne qui est en jeu. Nous l’aurions défendu, sans hésiter, si un parti politique avait repris ce que des individus, heureusement peu nombreux, qui manquent de lucidité lui reproche : « de parler peu ou mal le wolof » ou « de ne pas être assez sénégalais » (sic). Nous aurions démontré en quoi de telles attaques procèdent d’une idéologie puriste et purificatrice, obsolète, dangereuse et scientifiquement sans fondement. Quel que soit son parcours, chaque individu qui se réclame du Sénégal y a entièrement sa place. Il s’agit juste de ne pas faire des uns, les imbéciles des autres et d’en finir avec ce débat de succession tellement désobligeant. L’essentiel, pour le, Sénégal est ailleurs.
Mouhamed A. Ly. Sociolinguiste. lymou@voila.fr
La plupart de nos compatriotes relèvent l’absence de détermination du principal intéressé. D’ailleurs beaucoup disent ne pas comprendre le matraquage médiatique autour d’une candidature fictive. « Je ne l’ai jamais entendu dire qu’il souhaiterait être président ». En ce sens, ils comprennent parfaitement, qu’une candidature, fût-elle être relayée par de zélés colporteurs, n’est pas un colis et ne peut se faire sur le mode du jottali. Il s’agit d’un acte de langage qui engage doublement le postulant et les votants.
Une élection présidentielle, c’est la rencontre et le dialogue, entre un homme (ou une femme) et un peuple. Il revient à cet homme de dire « Pourquoi lui » et il appartient aux citoyens d’en juger la pertinence. Voilà pourquoi, en cherchant à inverser les rôles, ce sms, plutôt débile en son genre, trahit un double malaise. Tout d’abord, celui de ses créateurs, en montrant combien ils doivent être en manque d’inspiration pour rendre « attractif » un candidat, trop contestable ; ensuite celui des Sénégalais, étonnés d’être les cibles d’une farce aussi puérile.
Contestable, disions-nous, puisque nos concitoyens considèrent que la succession, sans législature intermédiaire, d’un père par le fils, n’est pas acceptable. C’est un schéma antinomique à notre démocratie et à nos traditions politiques. Traditions, encore fragiles, qui ont besoin d’être consolidées et non déstabilisées. Il s’y ajoute, beaucoup le disent, que la candidature de Karim Wade ne serait pas recevable, car ce dernier serait de double nationalité. Ce qui n’est pas conforme avec notre Constitution, qui n’admet que des candidats de nationalité exclusivement sénégalaise (art. 28).
Dans ces conditions une éventuelle candidature de Karim Wade, à la présidence de la République du Sénégal, n’est donc ni souhaitable, ni recevable.
UNE SYMBOLIQUE DESASTREUSE
Les Sénégalais ne disent pas autre chose, lorsqu’ils soulignent que le fils du président de la République, n’a jamais assumé une quelconque fonction élective. Comment peut-on leur reprocher de ne pas être prêts à confier la direction de notre nation à un garçon qui n’a jamais été chef de quartier, maire d’arrondissement, député… Les seules responsabilités significatives qu’il a eues à assumer, il les doit à l’affection et la confiance exclusives de son papa. Tous redoutent la symbolique qui découlerait d’une succession dans de telles conditions. Car, dans notre pays, s’il est, sans aucun doute, une brûlante urgence, c’est bien la réhabilitation de nos raisons de croire, de nouveau, au mérite et à la récompense de l’effort consenti. Or, pour bien des Sénégalais, dont de nombreux militants du PDS, Karim Wade est l’exemple parfait de l’arriviste qui cherche à transformer leur longue marche vers le sopi en une course effrénée pour son propre profit. On aurait souhaité, dans une symbolique davantage constructive et positive, que la Génération du Concret s’inscrivît dans le sens de l’histoire et des urgences du pays. On aurait souhaité dans cette même dynamique qu’elle relevât des défis démocratiques, politiques et économiques autour de questions difficiles agitant la société sénégalaise : la polygamie, les inégalités, la laïcité, la séparation des pouvoirs, le respect des libertés, les urgences sociales, la reconquête de notre souveraineté économique vis-à-vis de la France… au lieu de concerts géants en Espagne (si peu concret en fin de compte).
COURIR APRES LE TRAIN…
Le problème n’est pas que Karim Wade ait raté le premier train de l’Histoire, en s’éloignant du combat démocratique, à une époque où son père était un des opposants les plus célèbres d’Afrique, c’est d’avoir manqué le dernier après le premier. Il n’a jamais été capable de s’émanciper et de braver son propre camp malgré de nombreuses occasions offertes depuis 2000. Les Sénégalais ne l’ont jamais entendu condamné la loi Ezzan, l’agression de Talla Sylla, le pillage de l’AS et de 24H, les brutalités policières envers des journalistes… Pendant ce temps, son nom est apparu dans trop de controverses juridico-financières. Ceci, dans une société où chaque matin, et depuis si longtemps déjà, les femmes et les hommes luttent pour prendre le dessus sur leur quotidien. C’est finalement cette générosité outrancière et cette image trouble qui font, par contraste, l’opinion favorable que la société sénégalaise semble accorder à sa sœur, Sindiély.
IL NE SERT A RIEN DE COURIR…
Par ailleurs, Karim Wade en donnant de lui une image publique de garçon généreux, et même trop généreux, a non seulement produit, à son désavantage, l’image d’un homme politique du passé, mais conduit aussi beaucoup de nos concitoyens à douter de la provenance régulière de ses moyens financiers pharaoniques. En comptant sur la magie de l’argent, ses conseillers ont raté le sens de l’Histoire. Car, en entrant dans ce nouveau siècle, le Sénégal a voulu tourné le dos, à une catégorie précise d’hommes politiques ; celle qui, quarante ans durant, l’a pillé en distribuant, à gauche et à droite, des billets de banque qu’elle ne gagnait pas à la sueur de son front. Faut-il le rappeler, Karim Wade n’est qu’un simple salarié de l’Etat ! Le plus grave, dans cette histoire, est sans aucun doute, le mépris dont témoigne, à l’encontre de la société sénégalaise, le choix d’une telle stratégie de conquête du pouvoir.
Que l’on ne perde pas de temps à nous faire un quelconque mauvais procès d’intention contre Karim Wade. Ce n’est pas sa personne qui est en jeu. Nous l’aurions défendu, sans hésiter, si un parti politique avait repris ce que des individus, heureusement peu nombreux, qui manquent de lucidité lui reproche : « de parler peu ou mal le wolof » ou « de ne pas être assez sénégalais » (sic). Nous aurions démontré en quoi de telles attaques procèdent d’une idéologie puriste et purificatrice, obsolète, dangereuse et scientifiquement sans fondement. Quel que soit son parcours, chaque individu qui se réclame du Sénégal y a entièrement sa place. Il s’agit juste de ne pas faire des uns, les imbéciles des autres et d’en finir avec ce débat de succession tellement désobligeant. L’essentiel, pour le, Sénégal est ailleurs.
Mouhamed A. Ly. Sociolinguiste. lymou@voila.fr