Selon le porte-parole de la famille tidiane, le droit de primogéniture est la règle d’or pour accéder au khalifat et, par conséquent, Serigne Cheikh étant le plus âgé de la famille est de droit le successeur de Serigne Mansour. Maintenant, la grande question est de savoir quelle sera la réaction du guide spirituel des Moustarchines Wal Moustarchidaty (MWM). Va-t-il accepter d’occuper une place qu’il considère occuper légitimement depuis le 14 décembre 1997, date de la disparition du khalife Serigne Abdoul Aziz Sy Dabakh ? Une chose est sûre : ceux qui connaissent Serigne Cheikh soutiennent qu’il ne se prononcera jamais par rapport à cette affaire de khalifat car le faire remettrait en question l’attitude rétive qu’il a toujours eue depuis que Serigne Mansour a pris les rênes du pouvoir.
Et puis pourquoi, se demandent ses partisans, accepter d’occuper une place qu’il n’a jamais quittée spirituellement depuis 1951, soit six ans avant la disparition de son père Serigne Babacar ? Les fidèles talibés soutiennent que leur guide mystique, spirituellement intronisé par son père, détenteur des secrets de la « tidianya », organisait même le « gamou » de Tivaouane avant la disparition de Serigne Ababacar. C’est pourquoi, Serigne Cheikh a toujours refusé de baser la succession califale sur des critères de primogéniture car, selon lui, seul le degré de spiritualité, d’érudition et de mysticisme soufi doit prévaloir pour briguer le trône du khalife. Son absence et son manque de réaction lors du décès de Serigne Mansour ne doivent pas étonner outre mesure si l’on sait que, pendant très longtemps, Serigne Cheikh s’est détourné de Tivaouane pour des raisons que tout le monde ignore.
Lors de la disparition du khalife Abdoul Aziz Dabakh, il ne s’est pas présenté pour compatir à la douleur qui frappait la communauté musulmane. Lors du décès de sa première épouse, Sokhna Sofiatou Dème, la mère de Serigne Moustapha Sy, responsable moral des MWM, « Al Makhtoum », ainsi qu’on le surnomme, ne s’était pas non plus présenté pour les obsèques. Ainsi, il n’a fait que sacrifier à la tradition en n’ayant pas assisté aux funérailles de son grand-frère Mansour. Mais en réalité, ce qui intrigue le plus dans l’attitude de Serigne Cheikh, c’est moins son absence physique que l’attitude indifférente de son frère Pape Malick Sy et de son fils Moustapha. Certains disent que ces absences procèdent de la perpétuation de la situation de guerre qui existait en 1993. A cette date, plus précisément le 30 octobre de cette année-là, Serigne Moustapha Sy, qui n’avait pas apprécié que le président Abdou Diouf s’attaquât à son père, avait sorti des cassettes où il flétrissait le régime de Diouf à travers les trois « C » : crise de compétence, crise de confiance et crise d’autorité.
Les diatribes verbales du leader des MWM qui n’ont pas épargné la vie privée du président Abdou Diouf ouvrirent les portes de Rebeuss au bouillant fils de Serigne Cheikh. Il faut souligner que dans ces cassettes le triumvirat Abdou Aziz Sy Dabakh, Serigne Mansour et Abdou Aziz Sy « Junior » n’ont pas échappé à la furie discursive de Moustapha Sy. Lequel n’avait pas digéré que ces derniers aient soutenu Abdou Diouf dans le différend qui l’opposait à son père. Abdou Aziz Sy Junior se voyait même obligé de convoquer tous les talibés à Tivaouane, un vendredi, pour apporter une cinglante réplique.
Le 16 février 1994, des hommes et des femmes encagoulés investissent les artères de Dakar et détruisent tout sur leur passage. Ils atteindront même les grilles du palais présidentiel. Six policiers perdront leur vie tragiquement dans leur déchaînement dévastateur. Plus de cent MWM indexés par le pouvoir socialiste seront arrêtés. Le même jour, l’alors ministre de l’Intérieur, Djibo Leity Ka, à travers une déclaration radiotélévisée annonce l’interdiction sur l’ensemble du territoire national de toute activité des dahiras moustarchidines. Dans la bataille qu’il menait contre Diouf, Cheikh Tidiane Sy était en collusion avec l’opposant Abdoulaye Wade trempé lui aussi dans l’assassinat du juge Babacar Sèye en mai 1993.
Le décès de Serigne Mansour risque de raviver plus les divisions intestines qui ont déchiré les membres de la famille d’El Hadji Malick Sy depuis 1993 que de rapprocher ceux-là. Puisque si Serigne Cheikh déclare qu’il assurera le khalifat, il remettra en cause sa position d’antan et certains talibés tidianes le récuseront parce qu’ils n’ont jamais digéré son absence aux obsèques d’Abdoul Aziz Sy. S’il s’engonce dans son mutisme légendaire, d’autres crieront haro sur cette attitude d’indifférence vis-à-vis de ce que les Tidianes ont de plus de cher, c’est-à-dire le khalifat qui soude toute leur communauté. La moindre attitude, c’est de dire qu’il cède le khalifat à son jeune frère immédiat. Mais cela poserait aussi un problème de cohérence dans la démarche parce que la seule chose qu’il peut léguer, c’est ce qu’il a toujours détenu c’est-à-dire l’héritage spirituel de son père Serigne Babacar. Or, tant qu’il sera en vie, il sera toujours détenteur des secrets de la tarikha tidiane. C’est dire que les Tidianes sont encore loin du bout du tunnel qui illuminera les retrouvailles dans la famille de Maodo.
SERIGNE SALIOU GUEYE
« Le Témoin » N° 1107 – Hebdomadaire Sénégalais (DECEMBRE 2012)
Et puis pourquoi, se demandent ses partisans, accepter d’occuper une place qu’il n’a jamais quittée spirituellement depuis 1951, soit six ans avant la disparition de son père Serigne Babacar ? Les fidèles talibés soutiennent que leur guide mystique, spirituellement intronisé par son père, détenteur des secrets de la « tidianya », organisait même le « gamou » de Tivaouane avant la disparition de Serigne Ababacar. C’est pourquoi, Serigne Cheikh a toujours refusé de baser la succession califale sur des critères de primogéniture car, selon lui, seul le degré de spiritualité, d’érudition et de mysticisme soufi doit prévaloir pour briguer le trône du khalife. Son absence et son manque de réaction lors du décès de Serigne Mansour ne doivent pas étonner outre mesure si l’on sait que, pendant très longtemps, Serigne Cheikh s’est détourné de Tivaouane pour des raisons que tout le monde ignore.
Lors de la disparition du khalife Abdoul Aziz Dabakh, il ne s’est pas présenté pour compatir à la douleur qui frappait la communauté musulmane. Lors du décès de sa première épouse, Sokhna Sofiatou Dème, la mère de Serigne Moustapha Sy, responsable moral des MWM, « Al Makhtoum », ainsi qu’on le surnomme, ne s’était pas non plus présenté pour les obsèques. Ainsi, il n’a fait que sacrifier à la tradition en n’ayant pas assisté aux funérailles de son grand-frère Mansour. Mais en réalité, ce qui intrigue le plus dans l’attitude de Serigne Cheikh, c’est moins son absence physique que l’attitude indifférente de son frère Pape Malick Sy et de son fils Moustapha. Certains disent que ces absences procèdent de la perpétuation de la situation de guerre qui existait en 1993. A cette date, plus précisément le 30 octobre de cette année-là, Serigne Moustapha Sy, qui n’avait pas apprécié que le président Abdou Diouf s’attaquât à son père, avait sorti des cassettes où il flétrissait le régime de Diouf à travers les trois « C » : crise de compétence, crise de confiance et crise d’autorité.
Les diatribes verbales du leader des MWM qui n’ont pas épargné la vie privée du président Abdou Diouf ouvrirent les portes de Rebeuss au bouillant fils de Serigne Cheikh. Il faut souligner que dans ces cassettes le triumvirat Abdou Aziz Sy Dabakh, Serigne Mansour et Abdou Aziz Sy « Junior » n’ont pas échappé à la furie discursive de Moustapha Sy. Lequel n’avait pas digéré que ces derniers aient soutenu Abdou Diouf dans le différend qui l’opposait à son père. Abdou Aziz Sy Junior se voyait même obligé de convoquer tous les talibés à Tivaouane, un vendredi, pour apporter une cinglante réplique.
Le 16 février 1994, des hommes et des femmes encagoulés investissent les artères de Dakar et détruisent tout sur leur passage. Ils atteindront même les grilles du palais présidentiel. Six policiers perdront leur vie tragiquement dans leur déchaînement dévastateur. Plus de cent MWM indexés par le pouvoir socialiste seront arrêtés. Le même jour, l’alors ministre de l’Intérieur, Djibo Leity Ka, à travers une déclaration radiotélévisée annonce l’interdiction sur l’ensemble du territoire national de toute activité des dahiras moustarchidines. Dans la bataille qu’il menait contre Diouf, Cheikh Tidiane Sy était en collusion avec l’opposant Abdoulaye Wade trempé lui aussi dans l’assassinat du juge Babacar Sèye en mai 1993.
Le décès de Serigne Mansour risque de raviver plus les divisions intestines qui ont déchiré les membres de la famille d’El Hadji Malick Sy depuis 1993 que de rapprocher ceux-là. Puisque si Serigne Cheikh déclare qu’il assurera le khalifat, il remettra en cause sa position d’antan et certains talibés tidianes le récuseront parce qu’ils n’ont jamais digéré son absence aux obsèques d’Abdoul Aziz Sy. S’il s’engonce dans son mutisme légendaire, d’autres crieront haro sur cette attitude d’indifférence vis-à-vis de ce que les Tidianes ont de plus de cher, c’est-à-dire le khalifat qui soude toute leur communauté. La moindre attitude, c’est de dire qu’il cède le khalifat à son jeune frère immédiat. Mais cela poserait aussi un problème de cohérence dans la démarche parce que la seule chose qu’il peut léguer, c’est ce qu’il a toujours détenu c’est-à-dire l’héritage spirituel de son père Serigne Babacar. Or, tant qu’il sera en vie, il sera toujours détenteur des secrets de la tarikha tidiane. C’est dire que les Tidianes sont encore loin du bout du tunnel qui illuminera les retrouvailles dans la famille de Maodo.
SERIGNE SALIOU GUEYE
« Le Témoin » N° 1107 – Hebdomadaire Sénégalais (DECEMBRE 2012)