Deuxième gaz à effet de serre le plus important après le CO2, le méthane (CH4) a un pouvoir de réchauffement global (PRG) 25 fois plus élevé. Il serait ainsi responsable de 15 % de l’effet de serre d’origine humaine. Issu de la combustion des énergies fossiles, des décharges et de l’agriculture, sa concentration dans l’atmosphère est passée de 700 parties par milliard (ppb) à l’ère préindustrielle à plus de 1.800 ppb aujourd’hui.
L’OH comme puits de méthane atmosphérique
Le radical hydroxyle OH, formé d’un atome d’hydrogène et d’un atome d’oxygène, se forme à partir de l’ozone dans la troposphère sous l’effet des ultraviolets. Ce gaz très instable ne reste généralement pas plus d’une seconde sous cette forme et va se lier à d’autres molécules, comme le CH4, pour les casser et selon la réaction CH4 + OH → H2O + CH3. Le radical méthyle CH3 se combine ensuite avec l’oxygène pour donner du CH3O2, qui, par réaction catalytique avec les oxydes d’azotes NO et NO2, va donner du formaldéhyde CH2O puis, du CO2 et de l’ozone. Chaque année, OH fait ainsi « disparaître » 450 à 500 millions de tonnes de méthane, soit 90 % des émissions annuelles. C’est donc un puissant « nettoyant » atmosphérique.
Avec l’augmentation exponentielle des émissions de méthane, la crainte était que les ressources en OH s’épuisent rapidement, aboutissant à un prolongement de la durée de vie du méthane dans l’atmosphère, estimée à environ neuf années. Pourtant, « la concentration en OH reste remarquablement stable au fil du temps », observe Julie Nicely, chercheuse au NASA Goddard Space Flight Center. Avec ses collègues, elle a utilisé un modèle informatique basé sur les observations satellitaires de divers gaz, entre 1980 et 2015, pour simuler les sources d’OH dans l’atmosphère. Contrairement à ce que l’on pensait, l’OH n’est pas complètement éliminé lorsqu’il réagit avec le méthane. Il se trouve qu’en présence des oxydes d’azote (NO et NO2), des polluants issus notamment des énergies fossile et du diesel, l’OH se recycle par réaction avec la vapeur d’eau (NO + H2O → NO2 + OH). Ce « recyclage » représenterait 30 % des sources d’OH dans l’atmosphère, estiment les chercheurs.
L’agrandissement des zones tropicales fabrique davantage d’OH
Les chercheurs ont également découvert une nouvelle source inattendue d’OH : les tropiques. Dans la basse atmosphère, la vapeur d’eau (H2O) réagit avec l’ozone (O3) sous l’effet des ultraviolets pour former deux molécules d’OH. Or, les régions tropicales ont tendance à s’élargir vers le Nord et le Sud, « peut-être en raison de la hausse des températures qui affecte la circulation de l’air », suggèrent les chercheurs. Cet élargissement est toutefois assez lent, n’augmentant que de 0,5 à 1 degré de latitude tous les 10 ans.
Au total, ces deux effets cumulés compensent finalement l’OH utilisé pour dégrader la méthane. Cette bonne nouvelle ne doit pas conduire à relâcher nos efforts pour limiter les gaz à effet de serre, insistent les scientifiques, mais permettra d’affiner les modélisations climatiques. Les résultats de l’étude ont été publiés dans la revue Journal of Geophysical Research: Atmospheres.
L’augmentation des émissions de méthane laissait penser que le stock s’épuiserait au fur et à mesure.
L’OH est pourtant capable de s’auto-recycler en présence d’oxydes d’azote, ce qui pourrait limiter le réchauffement.