Votre avis sur le ndigeul en général et les récents ndigeuls de certains marabouts en particulier ?
En principe, tout leader d’opinion a le droit d’indiquer à ses partisans ou disciples ses options et orientations. Que ce soit en matière religieuse, sociale, économique, politique etc. Contrairement à une certaine vision républicaine, que je trouve, pour ma part, trop étroite et essentiellement inspirée du schéma laïque à la française, qui confine la religion dans une sphère strictement privée.
Cela dit, dans la pratique, on constate que les ndigeuls émis récemment par certains guides religieux, du fait même du contexte et de certaines considérations liées à leur personnalité ou même, quelques fois, leur moralité, posent un certain nombre de problèmes. Le principe du ndigeul politique, qui n’est qu’une composante du concept de ndigeul dont la portée cultuelle, éducative, organisationnelle, économique etc. dans le Mouridisme est beaucoup plus large, nous semble même galvaudé. Dans la mesure où celui-ci était en général une prérogative du guide suprême (le Khalife Général) qui, en traitant avec les hommes politiques, en usait pour l’intérêt général de la communauté dont il représentait les intérêts. Le fait est que l’on ne parvient plus à retrouver ces nobles motivations dans les récents ndigels qui sont, pour l’essentiel, motivés, à notre avis, par deux motivations essentielles : (1) le réflexe communautaire voulant que l’on soutienne le candidat Wade du simple fait de son appartenance confrérique, sans considération pour son bilan objectif, dont un certain nombre de dérives institutionnelles, financières etc. et l’utilisation ostentatoire et même néfaste pour l’équilibre de la nation du label religieux, (2) les intérêts financiers particuliers, sous formes de « ristournes » au donneur de ndigeul, qui décrédibilisent davantage la fonction religieuse et entament nos valeurs morales se trouvant ainsi gravement remises en cause.
Comment ces ndigeuls et leurs conséquences sont perçus à Touba ?
Beaucoup de mourides se sentent frustrés par les sorties hypermédiatisées et intempestives actuelles, en électrons libres, qu’ils perçoivent comme contraires à l’esprit de discipline et aux valeurs profondes de leur voie. Car le seul ndigeul qui a une chance d’être massivement suivi par les mourides reste celui du Khalife Général, mais nullement ceux qui n’engagent que leurs donneurs et leurs adeptes. L’un des risques paradoxaux de cette frustration croissante est que ces ndigeuls émis en dehors de toute considération pour la hiérarchie, donc du khalife général dont la neutralité constitue la seule consigne actuellement valable, se retournent contre leurs donneurs. Car les disciples, beaucoup plus nombreux, qui ne se sentent nullement concernés par ces ndigeuls particuliers et qui désapprouvent fortement leurs formes et motivations, sont de plus en plus tentés de les sanctionner, en votant contre le candidat Wade. Ces marabouts desservent ainsi, sans le savoir, leur « poulain » et créent un effet inverse à celui auxquels ils aspiraient. C’est pourquoi je pense que les résultats du second tour risquent de prouver non seulement, une fois de plus, la maturité du peuple sénégalais mais également, et c’est ça la nouveauté, celle de la communauté mouride qui n’a plus l’intention de se faire manipuler et diviser indûment par les politiques et leurs relais religieux.
Journal Le Quotidien du 5 mars 2012
En principe, tout leader d’opinion a le droit d’indiquer à ses partisans ou disciples ses options et orientations. Que ce soit en matière religieuse, sociale, économique, politique etc. Contrairement à une certaine vision républicaine, que je trouve, pour ma part, trop étroite et essentiellement inspirée du schéma laïque à la française, qui confine la religion dans une sphère strictement privée.
Cela dit, dans la pratique, on constate que les ndigeuls émis récemment par certains guides religieux, du fait même du contexte et de certaines considérations liées à leur personnalité ou même, quelques fois, leur moralité, posent un certain nombre de problèmes. Le principe du ndigeul politique, qui n’est qu’une composante du concept de ndigeul dont la portée cultuelle, éducative, organisationnelle, économique etc. dans le Mouridisme est beaucoup plus large, nous semble même galvaudé. Dans la mesure où celui-ci était en général une prérogative du guide suprême (le Khalife Général) qui, en traitant avec les hommes politiques, en usait pour l’intérêt général de la communauté dont il représentait les intérêts. Le fait est que l’on ne parvient plus à retrouver ces nobles motivations dans les récents ndigels qui sont, pour l’essentiel, motivés, à notre avis, par deux motivations essentielles : (1) le réflexe communautaire voulant que l’on soutienne le candidat Wade du simple fait de son appartenance confrérique, sans considération pour son bilan objectif, dont un certain nombre de dérives institutionnelles, financières etc. et l’utilisation ostentatoire et même néfaste pour l’équilibre de la nation du label religieux, (2) les intérêts financiers particuliers, sous formes de « ristournes » au donneur de ndigeul, qui décrédibilisent davantage la fonction religieuse et entament nos valeurs morales se trouvant ainsi gravement remises en cause.
Comment ces ndigeuls et leurs conséquences sont perçus à Touba ?
Beaucoup de mourides se sentent frustrés par les sorties hypermédiatisées et intempestives actuelles, en électrons libres, qu’ils perçoivent comme contraires à l’esprit de discipline et aux valeurs profondes de leur voie. Car le seul ndigeul qui a une chance d’être massivement suivi par les mourides reste celui du Khalife Général, mais nullement ceux qui n’engagent que leurs donneurs et leurs adeptes. L’un des risques paradoxaux de cette frustration croissante est que ces ndigeuls émis en dehors de toute considération pour la hiérarchie, donc du khalife général dont la neutralité constitue la seule consigne actuellement valable, se retournent contre leurs donneurs. Car les disciples, beaucoup plus nombreux, qui ne se sentent nullement concernés par ces ndigeuls particuliers et qui désapprouvent fortement leurs formes et motivations, sont de plus en plus tentés de les sanctionner, en votant contre le candidat Wade. Ces marabouts desservent ainsi, sans le savoir, leur « poulain » et créent un effet inverse à celui auxquels ils aspiraient. C’est pourquoi je pense que les résultats du second tour risquent de prouver non seulement, une fois de plus, la maturité du peuple sénégalais mais également, et c’est ça la nouveauté, celle de la communauté mouride qui n’a plus l’intention de se faire manipuler et diviser indûment par les politiques et leurs relais religieux.
Journal Le Quotidien du 5 mars 2012