
L’actualité reste dominée ces jours-ci par la découverte de cas de fraudes dans le concours
de recrutement des élèves maitres. Une telle situation, si elle aurait prospéré, allait impacter
négativement sur la qualité. Comment peut-on se permettre de telles légèretés dans un enjeu
aussi important que celui de l’éducation. On ne peut faire des hommes sans être plus que des
hommes, disait Rousseau. Le courage du Ministre est à saluer pour avoir su prendre la bonne
décision et en réparant une injustice subie par certains candidats méritants laissés en rade.
Félicitations également aux inspecteurs de l’éducation des centres régionaux de formation des
personnels de l’éducation qui ont sonné l’alerte après avoir perçu des carences chez certains
futurs enseignants. Cela montre une fois de plus l’importance de leurs missions malgré les
faibles moyens de travail dont ils disposent (manque d’infrastructures, de véhicules, de
connexion, de téléphone, etc.) Même si le Ministre de l’éducation a posé un acte fort pour une
gouvernance vertueuse et transparente du système, beaucoup de chemin reste encore à faire
pour une éducation de qualité. Ce secteur a connu des remous de façon récurrente depuis la
mise en œuvre des plans d'ajustement structurels en 1981. Et ce sont les mêmes exigences
qui reviennent chaque année. Les revendications tournent principalement autour des points
suivants: la réforme du statut des volontaires, vacataires et contractuels, rationalisation de la
carte scolaire et universitaire, l’amélioration des conditions d'apprentissage et d'enseignement,
la promotion de l'habitat social et le paiement immédiat des indemnités de déplacement après
service effectué. Entre octobre 2007 et mars 2008, les enseignants en étaient déjà à prés de
deux mois de grève et donc autant d'heures de cours en moins pour les élèves. La grève de
2008-2009 a connu aussi de nombreuses perturbations, au total, près de cinq mois d'arrêt
des cours dans le public. Ainsi de 730 heures en 2007, le volume horaire est tombé à 720
heures en 2008, au lieu des 900 heures au moins requises par la norme internationale. Ce
qui occasionne du coup une fragilisation de la qualité des enseignements/apprentissages et
une faible proportion des apprenants de l’élémentaire au supérieur qui terminent leur cycle
d’éducation et de formation. Par contre, certains élèves qui parviennent à passer entre les
mailles du filet scolaire éprouvent au niveau supérieur d’énormes difficultés à suivre le train
en marche, compte tenu de leur faible niveau. Malgré la concertation initiée par la Coalition
nationale pour l’Education Pour Tous, les pré-assises de 2007, sans compter les nombreuses
rencontres gouvernement et syndicats, le mal persiste. Aujourd’hui, l’Etat devrait trouver une
stratégie communicationnelle pour prévenir les conflits et procéder à une résolution inclusive
des problèmes par une démarche participative acceptée par tous. Cependant, quelque soit la
démarche mise en œuvre, une organisation n’est jamais exempte de conflit et ne trouve guère
un style managérial idéal pour atteindre à cent pour cent ses objectifs. Il convient dès lors de
mettre l’accent sur les espaces de compromis. En plus, l’enjeu doit consister, dans le contexte
actuel, à créer des conditions d’émergence d’un bon leadership, du sommet à la base. Dans
le cas du management en milieu scolaire, le consensus consiste à chercher l’adhésion des
enseignants et les amener à s’impliquer. En outre, la nouvelle vision de la gestion scolaire doit
s’inscrire dans le cadre d’une politique volontariste de déconcentration et de décentralisation
du système éducatif qui met un accent particulier sur l’autonomisation de l’école.
L’état des lieux révèle que notre système éducatif connait un déficit chronique
d’enseignants qualifiés, soit du fait de la demande croissante de places dans les établissements
d’enseignement, de la faible valorisation de cette profession, des conditions de travail
déplorables et du manque de motivation. Par ailleurs, ce déficit d’enseignants qualifiés
semble plus criant en ce qui a trait aux enseignants de sciences et de mathématiques. En plus,
on remarque une féminisation du corps enseignant et une forte concentration de ces dernières
en zones urbaines. S’agissant de la qualité des intrants, on déplore des écoles à cycle
incomplet, des abris provisoires, des écoles sous équipées, un déficit en mobiliers, un faible
ratio manuel/élève et une absence de bibliothèques fonctionnelles. Bref, ce qui semble
poursuivre le système éducatif à l’heure actuelle, ce sont les conséquences du caractère trop
politique et informel de la gestion du système de l’ancien régime. Le système de recrutements
d’enseignants appelés ”quota sécuritaire » et la « vacation » qui consistaient à engager des
clients politiques ont beaucoup contribué à rabaisser la qualité des enseignements/
apprentissages. Pour la simple raison qu’on les envoyait directement dans les classes sans une
formation au préalable, alors que certains étaient restés pendant longtemps en rupture avec les
livres. Aujourd’hui, il faut impérativement professionnaliser les enseignants par l’adoption
des mesures suivantes : renforcer les capacités des formateurs dans les centres de formation
initiale et mettre en œuvre une réforme de la formation initiale des enseignants qui s’appuie
sur les approches retenues dans les curricula et sur une meilleure articulation entre la théorie
et la pratique, assurer un suivi des enseignants sur le terrain par les chefs d’établissement et
les inspecteurs ( mais à condition que ces derniers soient dotés de moyens logistiques adaptés
et suffisants pour faire correctement leur travail), renforcer la formation continue pour
répondre aux besoins concrets des enseignants, y compris pour les nouveaux agents, mais
également pour les chefs d’établissement à travers, notamment, des structures d’échanges
pédagogiques de base. Cette revalorisation des personnels de l’éducation ne peut-être
effective que si des solutions sont trouvées à certaines contraintes extérieures: il s’agit des
salaires, des conditions de travail, des perspectives de carrière et la faiblesse de
l’encadrement. Parallèlement, il faudra concevoir des curricula reposant sur une approche par
compétences en fonction des réalités locales, régionales et répondant aux attentes et besoins
de la société, tout en prenant en compte les capacités réelles des apprenants. Notre éducation
ne doit plus être à l’image du modèle occidental, en déphasage avec les réalités du milieu
social et culturel des enfants sénégalais. En outre, notre école a l’obligation de recourir aux
valeurs cardinales et aux exigences de la société pour produire le type d’homme apte à participer positivement au développement de sa nation. Notre système éducatif doit aider à
former des citoyens qui partagent les valeurs, les coutumes, les principes, de même que les
interdits de la société, en restant bien sûr ouvert au monde. Nous devons surtout éviter d’avoir
une société sans école car elle devient comme un troupeau sans berger.
Ngor FAYE
Inspecteur de l’Education et de la Formation
de recrutement des élèves maitres. Une telle situation, si elle aurait prospéré, allait impacter
négativement sur la qualité. Comment peut-on se permettre de telles légèretés dans un enjeu
aussi important que celui de l’éducation. On ne peut faire des hommes sans être plus que des
hommes, disait Rousseau. Le courage du Ministre est à saluer pour avoir su prendre la bonne
décision et en réparant une injustice subie par certains candidats méritants laissés en rade.
Félicitations également aux inspecteurs de l’éducation des centres régionaux de formation des
personnels de l’éducation qui ont sonné l’alerte après avoir perçu des carences chez certains
futurs enseignants. Cela montre une fois de plus l’importance de leurs missions malgré les
faibles moyens de travail dont ils disposent (manque d’infrastructures, de véhicules, de
connexion, de téléphone, etc.) Même si le Ministre de l’éducation a posé un acte fort pour une
gouvernance vertueuse et transparente du système, beaucoup de chemin reste encore à faire
pour une éducation de qualité. Ce secteur a connu des remous de façon récurrente depuis la
mise en œuvre des plans d'ajustement structurels en 1981. Et ce sont les mêmes exigences
qui reviennent chaque année. Les revendications tournent principalement autour des points
suivants: la réforme du statut des volontaires, vacataires et contractuels, rationalisation de la
carte scolaire et universitaire, l’amélioration des conditions d'apprentissage et d'enseignement,
la promotion de l'habitat social et le paiement immédiat des indemnités de déplacement après
service effectué. Entre octobre 2007 et mars 2008, les enseignants en étaient déjà à prés de
deux mois de grève et donc autant d'heures de cours en moins pour les élèves. La grève de
2008-2009 a connu aussi de nombreuses perturbations, au total, près de cinq mois d'arrêt
des cours dans le public. Ainsi de 730 heures en 2007, le volume horaire est tombé à 720
heures en 2008, au lieu des 900 heures au moins requises par la norme internationale. Ce
qui occasionne du coup une fragilisation de la qualité des enseignements/apprentissages et
une faible proportion des apprenants de l’élémentaire au supérieur qui terminent leur cycle
d’éducation et de formation. Par contre, certains élèves qui parviennent à passer entre les
mailles du filet scolaire éprouvent au niveau supérieur d’énormes difficultés à suivre le train
en marche, compte tenu de leur faible niveau. Malgré la concertation initiée par la Coalition
nationale pour l’Education Pour Tous, les pré-assises de 2007, sans compter les nombreuses
rencontres gouvernement et syndicats, le mal persiste. Aujourd’hui, l’Etat devrait trouver une
stratégie communicationnelle pour prévenir les conflits et procéder à une résolution inclusive
des problèmes par une démarche participative acceptée par tous. Cependant, quelque soit la
démarche mise en œuvre, une organisation n’est jamais exempte de conflit et ne trouve guère
un style managérial idéal pour atteindre à cent pour cent ses objectifs. Il convient dès lors de
mettre l’accent sur les espaces de compromis. En plus, l’enjeu doit consister, dans le contexte
actuel, à créer des conditions d’émergence d’un bon leadership, du sommet à la base. Dans
le cas du management en milieu scolaire, le consensus consiste à chercher l’adhésion des
enseignants et les amener à s’impliquer. En outre, la nouvelle vision de la gestion scolaire doit
s’inscrire dans le cadre d’une politique volontariste de déconcentration et de décentralisation
du système éducatif qui met un accent particulier sur l’autonomisation de l’école.
L’état des lieux révèle que notre système éducatif connait un déficit chronique
d’enseignants qualifiés, soit du fait de la demande croissante de places dans les établissements
d’enseignement, de la faible valorisation de cette profession, des conditions de travail
déplorables et du manque de motivation. Par ailleurs, ce déficit d’enseignants qualifiés
semble plus criant en ce qui a trait aux enseignants de sciences et de mathématiques. En plus,
on remarque une féminisation du corps enseignant et une forte concentration de ces dernières
en zones urbaines. S’agissant de la qualité des intrants, on déplore des écoles à cycle
incomplet, des abris provisoires, des écoles sous équipées, un déficit en mobiliers, un faible
ratio manuel/élève et une absence de bibliothèques fonctionnelles. Bref, ce qui semble
poursuivre le système éducatif à l’heure actuelle, ce sont les conséquences du caractère trop
politique et informel de la gestion du système de l’ancien régime. Le système de recrutements
d’enseignants appelés ”quota sécuritaire » et la « vacation » qui consistaient à engager des
clients politiques ont beaucoup contribué à rabaisser la qualité des enseignements/
apprentissages. Pour la simple raison qu’on les envoyait directement dans les classes sans une
formation au préalable, alors que certains étaient restés pendant longtemps en rupture avec les
livres. Aujourd’hui, il faut impérativement professionnaliser les enseignants par l’adoption
des mesures suivantes : renforcer les capacités des formateurs dans les centres de formation
initiale et mettre en œuvre une réforme de la formation initiale des enseignants qui s’appuie
sur les approches retenues dans les curricula et sur une meilleure articulation entre la théorie
et la pratique, assurer un suivi des enseignants sur le terrain par les chefs d’établissement et
les inspecteurs ( mais à condition que ces derniers soient dotés de moyens logistiques adaptés
et suffisants pour faire correctement leur travail), renforcer la formation continue pour
répondre aux besoins concrets des enseignants, y compris pour les nouveaux agents, mais
également pour les chefs d’établissement à travers, notamment, des structures d’échanges
pédagogiques de base. Cette revalorisation des personnels de l’éducation ne peut-être
effective que si des solutions sont trouvées à certaines contraintes extérieures: il s’agit des
salaires, des conditions de travail, des perspectives de carrière et la faiblesse de
l’encadrement. Parallèlement, il faudra concevoir des curricula reposant sur une approche par
compétences en fonction des réalités locales, régionales et répondant aux attentes et besoins
de la société, tout en prenant en compte les capacités réelles des apprenants. Notre éducation
ne doit plus être à l’image du modèle occidental, en déphasage avec les réalités du milieu
social et culturel des enfants sénégalais. En outre, notre école a l’obligation de recourir aux
valeurs cardinales et aux exigences de la société pour produire le type d’homme apte à participer positivement au développement de sa nation. Notre système éducatif doit aider à
former des citoyens qui partagent les valeurs, les coutumes, les principes, de même que les
interdits de la société, en restant bien sûr ouvert au monde. Nous devons surtout éviter d’avoir
une société sans école car elle devient comme un troupeau sans berger.
Ngor FAYE
Inspecteur de l’Education et de la Formation