L’intervention du genre féminin dans la prise en charge d’une maladie interpelle ces nombreuses femmes (filles, sœurs, belles filles, belles sœurs, épouses, nièces, petites filles), qui accompagnent inlassablement leurs proches atteints d’une pathologie.
Rares sont les maladies qui font exception ; la maladie d’Alzheimer, dont le sujet âgé de 65 et plus est la principale cible le confirme.
La maladie d’Alzheimer, caractérisé par des troubles de la mémoire, (suffisamment importants pour empêcher le malade de mener ses activités de la vie quotidienne), des troubles de l’orientation dans le temps et dans l’espace, des troubles du jugement et de l’adaptation sociale, inscrit le malade dans une dépendance progressive et totale.
Ce proche, qui naguère était autonome (à part entière) est désormais installé dans une situation qui l’oblige à faire recourir à un autre pour mener ses activités quotidiennes (toilette, alimentation, habillement etc.).
Il reste évident que dans une telle situation de dépendance qui bouleverse et désoriente la cellule familiale, quels que soient les liens familiaux et affectifs, quelles que soient les activités professionnelles et familiales, la résolution d’une prise en charge s’impose.
La personne qui s’investit de prime abord dans ce processus d’aide et de prise en charge est la femme. Selon Ndiaye Fatou, dans son mémoire de fin d’études, intitulé : « la prise en charge des personnes âgées atteintes de démence à Dakar », sur 9 aidants familiaux, 8 sont de sexe féminin tandis qu’un seul est de sexe masculin. De plus, elle ajoute que la nature de l’aide apportée par les aidants tourne autour de l’hygiène, (toilette, habillement), alimentation (même lorsque le malade peut s’alimenter seul, la présence et l’assistance d’une autre personne reste indispensable) et les soins médicaux. Toutes ces activités quotidiennes requièrent une disponibilité, une affection et une attention toute particulière.
Si les dysfonctionnements de la maladie d’Alzheimer attirent l’attention, l’effort physique, psychologique et morale et le temps que les femmes consacrent à leurs proches pour leur assurer une survie et leur maintenir un équilibre suscitent un intérêt plus immense.
Soulignons d’emblée que selon Dani, la motivation des aidants à prendre en charge la personne âgée s’articule autour de deux logiques ; d’une part l’amour et l’affection, d’autre part la responsabilité, la dette voire la culpabilité. C’est dire que les aidantes trouvent normal la prise en charge de ce proche, mais celle-ci ne se fait pas sans contraintes majeures.
Ces contraintes ont sans doute poussé, les autorités françaises à mettre en place toute une politique d’aide et d’accompagnement des aidants familiaux et de leurs proches atteints de la maladie d’Alzheimer. Les allocations au profit des aidants familiaux pour les Affections de Longues durées (La maladie d’Alzheimer en fait partie) entrent dans ce cadre.
Au Sénégal, la réalité est toute autre ; il n’existe pas à l’heure actuelle de politique de prise en charge et d’assistance des familles et de leurs proches atteints de la maladie d’Alzheimer.
Le plan Sésame, est une action plus que salutaire mais n’intègre pas pour le moment cette pathologie. Cette situation s’explique par le fait que la maladie d’Alzheimer est une problématique naissante et nouvelle.
La méconnaissance de la maladie conjuguée à la faible proportion des personnes âgées de 60 et plus( 5% en 2006 , mais 9% en 2028) ont pour conséquence l’inexistence ou l’insuffisance de spécialistes, l’inexistence d’études récentes sur la question. Tous ces éléments sont autant sont autant de facteurs qui ralentissent l’adoption de mesures de prise en charge et d’aide des familles et des malades. Cette absence d’actions coordonnées en faveur des aidantes et des membres de leurs familles fait que la famille est laissée à elle-même.
L’étude de Ndiaye nous renseigne que dans la famille, au Sénégal, les membres peuvent se relayer dans la prise en charge même s’il est noté une aidante principale qui s’investit de manière permanente et régulière à prodiguer les soins au proche. Cette possibilité est sans doute un atout de taille dans un contexte sénégalais et inexistante ailleurs.
Cependant, l’entrée des femmes dans le marché du travail, la nucléarisation de la famille (surtout en milieu urbain), les migrations (exode rural) viendront hypothéquer de plus en plus cette possibilité. En effet, avec un travail permanent, la femme a du mal à s’occuper convenablement de son parent atteint. Ainsi, l’aidante est confrontée à un accomplissement des tâches quotidiennes, aux soins à apporter à la personne dépendante , bref entre l’exigence du travail d’aidant et celle de la vie familiale et professionnelle.
L’exigence de toutes ces tâches amène souvent l’aidante à renoncer progressivement au marché du travail. Ndiaye Fatou souligne dans son étude que cinq répondants sur 9 ont affirmé continuer d’exercer leurs activités tandis que 4 affirment le contraire. Les premiers soulignent qu’ils bénéficient d’une permission pour pouvoir répondre aux rendez médicaux du malades et accusent quotidiennement du retard sur le lieu de travail. Par contre, les secondes, ont été contraintes à cesser les activités en raison de la gravité de la maladie ou de l’absence d’autre personne capable de prodiguer des soins de manière convenable au malade.
La délicatesse des soins à prodiguer pousse les proches à renoncer à leurs activités professionnelles et à rester à domicile. Par conséquent, la cessation des activités prive les femmes de revenus, et l’investissement dans les soins les confine dans une situation de stress, de tension, et de routine.
L’absence de revenus est susceptible de soulever d’autres problèmes notamment une dépendance financière de l’aidante. La perte de revenus fait qu’elle est encline à solliciter l’aide d’un autre membre de la famille ou d’une personne extérieure pour sa propre survie et également pour la prise en charge de la personne dépendante.
Dans un contexte où les programmes et les politiques prônent l’autonomie de la femme , à travers l’insertion professionnelle , l’octroi de micro crédit , le maintien des femmes dans les structures scolaires , cette situation ne s’insert elle pas à contre à faux de la volonté des autorités et des ses partenaires au développement ?
Nous répondrons par l’affirmatif. Au moment où les Nations Unies, les Etats et les gouvernements font la promotion d’un travail décent pour les femmes, le retrait de celles-ci dans le marché du travail ne nous fait il pas reculer des décennies ?
Il est vrai que les faits sont existants mais peu significatifs et non alarmants pou attirer l’attention mais n’occultons pas que la proportion des personnes âgées dans les années à venir atteindra 9% et du coup le nombre de femmes qui s’investira dans le processus de prise en charge sera plus important.
En prônant pour cette journée de la femme un travail décent grâce à l’égalité d’accès à l’éducation et à la formation et aux sciences et technologies, il reste tout de même utile de souligner que ces femmes aidantes ont gagné le pari d’un travail décent mais n’ont pu le conserver par contrainte.
Pour qu’en 2028, le retrait des femmes pour s’inscrire dans le processus de prise en charge d’un proche atteint de la maladie d’Alzheimer ne soit pas une situation récurrente, il faudrait dès à présent que des mesures d’accompagnement et de prise en charge soient mises en place.
Il est urgent de réfléchir sur des actions d’envergure spécifiques au contexte sénégalais et qui pourront donner aux femmes aidantes la possibilité de vaquer à leurs occupations, le loisir de mener leurs activités professionnelles et familiales, la liberté de conserver leur travail décent. A défaut, accompagner et faciliter leur insertion à travers d’autres activités moins contraingantes en terme de temps.
Pour cela, il faudrait que les associations intervenant dans ce domaine et les communautés soutenues par l’Etat mettent sur pied des structures et des actions innovantes. Enfin, il est encore temps d’agir autrement.
Fatou NDIAYE
Diplômée Supérieure en Travail Social
Secrétaire Générale de
l’Association Tous Unis Contre Alzheimer/Sénégal (ATUCA/S)
Email : atucasenegal@gmail.com
Rares sont les maladies qui font exception ; la maladie d’Alzheimer, dont le sujet âgé de 65 et plus est la principale cible le confirme.
La maladie d’Alzheimer, caractérisé par des troubles de la mémoire, (suffisamment importants pour empêcher le malade de mener ses activités de la vie quotidienne), des troubles de l’orientation dans le temps et dans l’espace, des troubles du jugement et de l’adaptation sociale, inscrit le malade dans une dépendance progressive et totale.
Ce proche, qui naguère était autonome (à part entière) est désormais installé dans une situation qui l’oblige à faire recourir à un autre pour mener ses activités quotidiennes (toilette, alimentation, habillement etc.).
Il reste évident que dans une telle situation de dépendance qui bouleverse et désoriente la cellule familiale, quels que soient les liens familiaux et affectifs, quelles que soient les activités professionnelles et familiales, la résolution d’une prise en charge s’impose.
La personne qui s’investit de prime abord dans ce processus d’aide et de prise en charge est la femme. Selon Ndiaye Fatou, dans son mémoire de fin d’études, intitulé : « la prise en charge des personnes âgées atteintes de démence à Dakar », sur 9 aidants familiaux, 8 sont de sexe féminin tandis qu’un seul est de sexe masculin. De plus, elle ajoute que la nature de l’aide apportée par les aidants tourne autour de l’hygiène, (toilette, habillement), alimentation (même lorsque le malade peut s’alimenter seul, la présence et l’assistance d’une autre personne reste indispensable) et les soins médicaux. Toutes ces activités quotidiennes requièrent une disponibilité, une affection et une attention toute particulière.
Si les dysfonctionnements de la maladie d’Alzheimer attirent l’attention, l’effort physique, psychologique et morale et le temps que les femmes consacrent à leurs proches pour leur assurer une survie et leur maintenir un équilibre suscitent un intérêt plus immense.
Soulignons d’emblée que selon Dani, la motivation des aidants à prendre en charge la personne âgée s’articule autour de deux logiques ; d’une part l’amour et l’affection, d’autre part la responsabilité, la dette voire la culpabilité. C’est dire que les aidantes trouvent normal la prise en charge de ce proche, mais celle-ci ne se fait pas sans contraintes majeures.
Ces contraintes ont sans doute poussé, les autorités françaises à mettre en place toute une politique d’aide et d’accompagnement des aidants familiaux et de leurs proches atteints de la maladie d’Alzheimer. Les allocations au profit des aidants familiaux pour les Affections de Longues durées (La maladie d’Alzheimer en fait partie) entrent dans ce cadre.
Au Sénégal, la réalité est toute autre ; il n’existe pas à l’heure actuelle de politique de prise en charge et d’assistance des familles et de leurs proches atteints de la maladie d’Alzheimer.
Le plan Sésame, est une action plus que salutaire mais n’intègre pas pour le moment cette pathologie. Cette situation s’explique par le fait que la maladie d’Alzheimer est une problématique naissante et nouvelle.
La méconnaissance de la maladie conjuguée à la faible proportion des personnes âgées de 60 et plus( 5% en 2006 , mais 9% en 2028) ont pour conséquence l’inexistence ou l’insuffisance de spécialistes, l’inexistence d’études récentes sur la question. Tous ces éléments sont autant sont autant de facteurs qui ralentissent l’adoption de mesures de prise en charge et d’aide des familles et des malades. Cette absence d’actions coordonnées en faveur des aidantes et des membres de leurs familles fait que la famille est laissée à elle-même.
L’étude de Ndiaye nous renseigne que dans la famille, au Sénégal, les membres peuvent se relayer dans la prise en charge même s’il est noté une aidante principale qui s’investit de manière permanente et régulière à prodiguer les soins au proche. Cette possibilité est sans doute un atout de taille dans un contexte sénégalais et inexistante ailleurs.
Cependant, l’entrée des femmes dans le marché du travail, la nucléarisation de la famille (surtout en milieu urbain), les migrations (exode rural) viendront hypothéquer de plus en plus cette possibilité. En effet, avec un travail permanent, la femme a du mal à s’occuper convenablement de son parent atteint. Ainsi, l’aidante est confrontée à un accomplissement des tâches quotidiennes, aux soins à apporter à la personne dépendante , bref entre l’exigence du travail d’aidant et celle de la vie familiale et professionnelle.
L’exigence de toutes ces tâches amène souvent l’aidante à renoncer progressivement au marché du travail. Ndiaye Fatou souligne dans son étude que cinq répondants sur 9 ont affirmé continuer d’exercer leurs activités tandis que 4 affirment le contraire. Les premiers soulignent qu’ils bénéficient d’une permission pour pouvoir répondre aux rendez médicaux du malades et accusent quotidiennement du retard sur le lieu de travail. Par contre, les secondes, ont été contraintes à cesser les activités en raison de la gravité de la maladie ou de l’absence d’autre personne capable de prodiguer des soins de manière convenable au malade.
La délicatesse des soins à prodiguer pousse les proches à renoncer à leurs activités professionnelles et à rester à domicile. Par conséquent, la cessation des activités prive les femmes de revenus, et l’investissement dans les soins les confine dans une situation de stress, de tension, et de routine.
L’absence de revenus est susceptible de soulever d’autres problèmes notamment une dépendance financière de l’aidante. La perte de revenus fait qu’elle est encline à solliciter l’aide d’un autre membre de la famille ou d’une personne extérieure pour sa propre survie et également pour la prise en charge de la personne dépendante.
Dans un contexte où les programmes et les politiques prônent l’autonomie de la femme , à travers l’insertion professionnelle , l’octroi de micro crédit , le maintien des femmes dans les structures scolaires , cette situation ne s’insert elle pas à contre à faux de la volonté des autorités et des ses partenaires au développement ?
Nous répondrons par l’affirmatif. Au moment où les Nations Unies, les Etats et les gouvernements font la promotion d’un travail décent pour les femmes, le retrait de celles-ci dans le marché du travail ne nous fait il pas reculer des décennies ?
Il est vrai que les faits sont existants mais peu significatifs et non alarmants pou attirer l’attention mais n’occultons pas que la proportion des personnes âgées dans les années à venir atteindra 9% et du coup le nombre de femmes qui s’investira dans le processus de prise en charge sera plus important.
En prônant pour cette journée de la femme un travail décent grâce à l’égalité d’accès à l’éducation et à la formation et aux sciences et technologies, il reste tout de même utile de souligner que ces femmes aidantes ont gagné le pari d’un travail décent mais n’ont pu le conserver par contrainte.
Pour qu’en 2028, le retrait des femmes pour s’inscrire dans le processus de prise en charge d’un proche atteint de la maladie d’Alzheimer ne soit pas une situation récurrente, il faudrait dès à présent que des mesures d’accompagnement et de prise en charge soient mises en place.
Il est urgent de réfléchir sur des actions d’envergure spécifiques au contexte sénégalais et qui pourront donner aux femmes aidantes la possibilité de vaquer à leurs occupations, le loisir de mener leurs activités professionnelles et familiales, la liberté de conserver leur travail décent. A défaut, accompagner et faciliter leur insertion à travers d’autres activités moins contraingantes en terme de temps.
Pour cela, il faudrait que les associations intervenant dans ce domaine et les communautés soutenues par l’Etat mettent sur pied des structures et des actions innovantes. Enfin, il est encore temps d’agir autrement.
Fatou NDIAYE
Diplômée Supérieure en Travail Social
Secrétaire Générale de
l’Association Tous Unis Contre Alzheimer/Sénégal (ATUCA/S)
Email : atucasenegal@gmail.com