Il séjourna dans cette région (St-Louis) pendant un mois et dix jours soit quarante jours. Ce long séjour fut dû au fait que ce fut la période pendant laquelle les autorités coloniales se concertèrent pour trouver un consensus puisque d’aucuns pensèrent que Khadim Rassoul devrait être emprisonné ou exécuté. Ses deux propositions furent aussitôt rejetées par le conseil privé, qui argumenta que ces dernières ne feraient qu’aggraver la situation de tension déjà incontrôlable et pourraient être à l’origine d’un soulèvement populaire. C’est à partir de ce moment qu’ils songèrent à l’exil de Khadimou Rassoul. Inconsciemment les autorités agirent en concordance avec la volonté de DIEU, de son Envoyé et de leur serviteur. Cette même situation fut vécue par le sceau des prophètes, lorsqu’il fut persécuté par les siens à la Mecque. Ces derniers se concertèrent à « Darou nadwa » dans le cadre d’une assemblée générale. Ainsi les décisions furent les même pour l’envoyé de DIEU. Ils jugèrent l’exil comme la solution la mieux adaptée et le prophète fut banni.
Comme le relate ce verset du Saint Coran :
« (Et rappelle-toi) le moment où les mécréants complotaient contre toi pour t'emprisonner ou t'assassiner ou te bannir. Ils complotèrent, mais Allah a fait échouer leur complot, et Allah est le meilleur en stratagèmes » (Coran verset 30 ; Sourate 2)
Khadimou Rassoul a dit :
« DIEU a remplacé en m’a faveur les trois propositions qui ont été faites lors du conseil privé à St-Louis par trois choses, à savoir :
IL m’octroya à mon départ l’ensemble des dons que les précédents auraient obtenus et m’éleva à leurs rangs respectifs, en sus de la précellence qui me fut accordée en termes de profession de FOI, de pratiques cultuelles de soumission à DIEU et de perfection spirituelle
Le fait d’être dépossédé de mes dents et d’avoir tous mes doigts coupés me semblait plus acceptable que d’être privé de deux choses dont IL m’honora également, à savoir :
L’idéal de la FOI, des pratiques cultuelles de soumission à DIEU et de la perfection spirituelle
La proximité du prophète(PSL) à l’instar des combattants de Badr »
Ainsi, tous les marabouts de l’Afrique Occidentale Française furent sans exception convoqués à St-Louis pour la ratification d’un traité. La liste fut établie par ordre alphabétique, disent certains ; ce que nous ne partageons pas, car ceux dont les noms commençaient par la lettre A (comme Aïdara) étaient plus d’une vingtaine. Les critères intrinsèques sur lesquels se basèrent les colons pour établir cette fameuse liste nous sont inconnus.
L’objet de cette convocation ne fut pas plus que la ratification du traité qui stipulait les affirmations suivantes :
1. DIEU n’existe pas,
2. Il n’existe pas de prophète qui serait son envoyé,
3. Le « LIVRE » dont Il(DIEU) serait l’auteur n’est qu’une illusion
Toute désobéissance eut comme conséquence le fait d’être jeté de force dans la cage d’un lion affamé.
Ils (les autorités coloniales) appelèrent Serigne Coki Mouhamadou Yala Aminata DIOP en premier chef et lui demandèrent de signer. Il refusa catégoriquement et subit le tragique sort d’une proie à la merci de son prédateur.
Le second sur la liste fut Serigne Maka Birama Khadi. Tout aussi courageux que son prédécesseur, il déclina la proposition des colons et subit le même sort.
Serigne Balla Thioket fut le troisième désigné par le conseil. Il fit comme ses homologues et accepta d’être jeté dans la cage du lion.
Chemin faisant,le suivant sur la liste, le fameux N°4 fut CHEIKH AHMADOU BAMBA le serviteur du prophète. Il signa conformément au Coran, le contraire de ce que stipulait le traité à travers les versets de la 112e sourate « le Monothéisme pur » :
Au nom de DIEU, le Clément, le Miséricordieux.
1. Dis : “Il est Allah, Unique.
2. Allah, Le Seul à être imploré pour ce que nous désirons.
3. Il n'a jamais engendré, n'a pas été engendré non plus.
4. Et nul n'est égal à Lui”.
Il fut jeté dans la cage du lion mais, à la grande surprise des colons, le fauve devint aussi inoffensif qu’un mouton, comme si la bête voyait en Khadimou Rassoul l’image du Maître bien aimé. Ce dernier donna du pain et des dattes au félin comme le ferait n’importe quel maître pour récompenser l’obéissance d’un animal apprivoisé.
Il raconte :
« J’ai dépensé dans le sentier de DIEU ce qui m’a valu qu’un lion même affamé s’immobilise et devient docile devant ma modeste personne ».
Khadimou Rassoul rejoignit les quatre vingt autres marabouts qui attendaient toujours. Ils furent tous impressionnés de le retrouver intact et ne purent s’empêcher de lui demander par quel moyen il a su dompter cette bête féroce.
Il répondit :
« Celui dont la disponibilité en la faveur le l’envoyé de DIEU est certaine, s’il croise un lion verra la bête se soumettre à lui».
A St-Louis, Khadimou Rassoul écrivit les premiers vers de son poème nommé « ASSIROU » et en montra un extrait à Ahmadou Ndiaye Mabèye.
« DIEU a fait de toi la preuve matérielle que je reviendrais car tu resteras saint et sauf jusqu’à mon retour »lui fit-il savoir.
Les notables de St-Louis lui demandèrent par ailleurs de diriger la prière du vendredi. Il répliqua qu’il n’avait pas la prérogative qui lui permettrait de s’acquitter d’un tel devoir à cause de son statut de voyageur ce qu’ils surent à priori.
Ils lui proposèrent alors une prière surérogatoire dans le seul but de profiter de ses bienfaits, ce qu’il accepta.
Khadimou Rassoul les disposa en deux rangés, procéda à des permutations entres les individus de part et d’autre, avant de se tenir debout entre les deux fils d’hommes pour célébrer la prière. Après le salut final, ils lui demandèrent des explications.
Il répondit :
« DIEU m’a fait savoir que tout ceux qui se trouvaient devant moi lors de la prière ne seront plus de ce monde à mon retour, ainsi je me suis acquitté de mon devoir d’effectuer une prière mortuaire en leur faveur et de les abriter au PARADIS »
Il a dit :
«A St-Louis déjà, DIEU m’éloigna de tout ce qui aurait pu me contrarier par considération pour les combattants de Badr »
C’est pourquoi, lorsque les colons s’attardèrent dans leurs histoires de protocole, il formula (à St-Louis) une autre versification pas très connue, intitulé : « l’inspiration de celui qui est exempt de vices » et s’attaqua idéologiquement aux « blancs ». Ces derniers assaillis, meurtris, et humiliés par ses propos se dépêchèrent afin de l’exiler dans les plus brefs délais.
Il quitta ainsi St-Louis le jeudi 28 RABI’OUL AWWAL en direction de Dakar.
Extrait de « Le Chemin de l’exil » de Serigne Khadim Gaydel Lô Borom Ndame
Khadimrassoul.net