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Lamine Gadiaga : ” Depuis six ans, Aliou Cissé est dans ses incohérences”

Rédigé par leral.net le Mardi 6 Avril 2021 à 19:31 | | 0 commentaire(s)|

Le Sénégal a validé son ticket pour la Can 2021, mais les critiques continuent de pleuvoir sur le sélectionneur national. Aliou Cissé qui a bouclé la campagne des qualifications sur deux décevants matchs nuls (contre le Congo et l’Eswatini) fait face à une tempête, la faute à sa façon de gérer cette équipe nationale. Ancien […]

Le Sénégal a validé son ticket pour la Can 2021, mais les critiques continuent de pleuvoir sur le sélectionneur national. Aliou Cissé qui a bouclé la campagne des qualifications sur deux décevants matchs nuls (contre le Congo et l’Eswatini) fait face à une tempête, la faute à sa façon de gérer cette équipe nationale. Ancien des Niayes de Pikine et formateur respecté, Lamine Gadiaga estime que le Sénégal mérite mieux que ça. Dans cet entretien qu’il a accordé à votre site L’Asnews, il ne ménage pas le coach national, mais aussi les dirigeants. Lamine Gadiaga demande le départ de ces derniers et la mise en place d’une équipe jeune et ambitieuse. Entretien

L’Asnews: Lamine Gadiaga, quelle lecture faites-vous de la campagne du Sénégal dans les qualifications,  mais aussi des deux dernières sorties de l’équipe?

Lamine Gadiaga: Le résultat du Sénégal lors de ses deux derniers matchs ne me surprend pas. L’équipe ne cesse de décevoir et cela, à chaque sortie. A mon avis, ce n’est pas un problème de dispositif. C’est avant tout un jeu collectif. Mais dans un collectif, il faut avoir une complémentarité. Mais nous ne sommes pas dans ces dispositions-là. L’entraîneur que nous avons, il n’en fait qu’à sa tête. Il fait ce qu’il veut, quand il veut et avec qui il veut. Et malheureusement, on le laisse faire.

Mais l’essentiel a été fait, avec cette qualification pour Cameroun 2021 ?

La qualification est acquise, mais il ne faut pas oublier que nous étions dans un groupe très très facile. Nous avons des joueurs de très grandes qualités. Nous avons des footballeurs qui jouent dans les plus grands clubs en Europe et dans le monde. Depuis  six ans, le Sénégal n’arrive pas à gagner quelque chose, malgré le talent que nous avons dans cette équipe. Avec un entraîneur normal, doté de qualités, on aurait au moins gagné une coupe d’Afrique. Mais nous avons perdu toutes les  campagnes. Ce qui est désolant, le monsieur vient de perdre une finale de Coupe d’Afrique et les dirigeants s’empressent de lui faire un nouveau contrat.

Et selon vous, qu’est-ce qui manque à cette équipe pour franchir ce cap ?  

Si sa façon de gérer c’est de mettre tous les bons footballeurs sénégalais qui sont en Europe, mais finalement il va se retrouver avec 50 000 joueurs. Les joueurs  issus de l’immigration sénégalaise sont partout et c’est normal. Mais il faut avoir une conduite. Mais celui qui dirige notre équipe est incohérent. Le football est un sport très logique. Le coach est dans ses incohérences depuis six ans. Les joueurs donnent de l’espoir, mais  l’entraîneur, il ne sait pas quoi faire. Mais c’est clair qu’il n’a pas de consignes à donner. Le Sénégal n’a jamais été cohérent dans son jeu. Et cela, depuis le début. Les joueurs viennent, d’autres partent. Là, il nous parle de système de jeu. Ça n’existe pas, le système de jeu. L’organisation  de jeu en 3-5-2, c’est lui qui l’a voulu imposer. Alors qu’il ne sait pas qu’on ne peut évoluer ainsi avec des milieux excentrés. Où on le joue avec des hommes de couloirs qui jouent sur toute la ligne. Et est-ce que dans ce groupe-là, nous avons des profils pareils ? Il ne le sait sans doute pas. Ce qui fait qu’il est toujours dans l’improvisation. On ne fait pas d’essais en équipe nationale. L’équipe nationale, c’est la suite logique du comportement d’un joueur sur sa carrière. Mais on ne doit pas y emmener des gens pour essayer des systèmes.

Et le classement FIFA, n’est-il pas un indicateur pour se faire une idée de cette équipe ?

Vous savez, ces histoires de premier au classement africain, c’est de la pommade. Ce  n’est pas du tout évident et la preuve est là. Nous avons eu du mal à arracher le nul contre l’Eswatini, pourtant classée 153éme mondiale. Une équipe nationale, c’est avant tout un vécu. Certaines équipes arrivent à le démontrer au quotidien. C’est le cas de l’Algérie, le Cameroun, l’Egypte ou encore la Côte-d’Ivoire. Ces équipes nous prouvent à chaque fois comment faire pour gagner une compétition. Leurs secrets, c’est d’avoir des gens compétents, aussi bien au niveau des fédérations que des sélections. Ce qui est loin d’être le cas chez nous.

Certains observateurs réclament le départ d’Aliou Cissé. Etes-vous d’avis ?

Le virer en ce moment, je pense que c’est trop tard. Il fallait le faire le jour où nous avions perdu la finale contre l’Algérie. Mais nos dirigeants, je veux parler du président de la fédération sénégalaise de football et de ses acolytes se sont empressés de lui faire un nouveau contrat, hors du pays. Alors qu’on n’a même pas pris le temps d’évaluer. C’est comme si l’ambition était d’atteindre une finale de Coupe d’Afrique. Moi je suis convaincu qu’on est meilleur que ça. Ce groupe a les capacités d’atteindre une demi-finale de coupe du monde. Ce n’est pas de la prétention, mais c’est la réalité. Mais avec ce monsieur et son  staff, cela m’étonnerait qu’on gagne ce qu’on doit gagner. En plus, on ne peut pas virer un entraîneur comme ça. Il s’est qualifié pour la Can, dans un groupe très facile. Mais les gens qui l’ont installé à la tête de cette équipe doivent lui dire publiquement que ça ne va pas. Cela ne peut pas continuer ainsi. Le peuple a  besoin de victoires. Le peuple est dans une situation précaire et une victoire ferait du bien aux Sénégalais. Mais c’est le cadet de leurs soucis. On a le droit d’être heureux. Mais la chose qui nous reste pour être heureux, c’est ce football-là, ce sport-là.

Pourtant si on interroge les chiffres, Aliou Cissé a quand même un bilan  à défendre ?

Les chiffres et après ? Avons-nous remporté quelque chose ? Vous savez, le football, c’est la complémentarité. Ce n’est pas une juxtaposition de joueurs de qualités. Nous avons des compétences ici. Et même s’il faut aller les chercher ailleurs, il faut le faire. Mais avec ce que nous avons en ce moment, je ne vois pas le Sénégal remporter quelque chose sur le continent. Le peu d’identité de jeu que nous avions, Aliou Cissé l’a complètement détruit. Pour moi, ce sont les dirigeants qui ont montré leurs limites.  Mais à la tête de ce sport, on a mis des gens qui ne comprennent absolument rien au football de haut niveau. Et cela ne datepas d’aujourd’hui. On ne peut pas mettre un monsieur à la tête d’une équipe nationale, alors qu’il n’a jamais entraîné ne serait-ce qu’un club. Je suis désolé, mais on n’apprend pas ce métier là au sommet du football. Ce n’est pas possible. Michel Platini l’a essayé et il s’est cassé les dents. D’autres l’ont essayé, mais cela n’a pas marché. Celui qui dirige une équipe nationale doit avoir un vécu. Je suis désolé, mais cela démontre que dans ce pays-là, tout est politisé. Pour moi, ce sont les dirigeants qui ont montré leurs limites.

En tant que technicien, qu’est-ce que vous proposez concrètement pour faire bouger les lignes ?

Pour que ce football fonctionne, il faudrait que Senghor (NDL : président de la FSF) et son équipe partent. Il faudra mettre sur place des gens nouveaux, des gens qui pensent football pour le pays, des gens qui connaissent la pyramide du jeu du football. C’est la pyramide qui accélère la formation pour arriver au sommet. Mais maintenant pour intégrer l’équipe nationale, il faut être en Europe. Et quel que soit ton niveau, tu peux venir jouer en équipe nationale. Ce n’est pas possible. Il faut remettre les pendules à l’heure. Il faut que les gens puissent avoir le courage de le dire. Aliou Cissé, je ne vais même pas dire qu’il a atteint ses limites. Car quand quelqu’un montre ses limites, cela veut dire que ce dernier a déjà montré ses compétences en quelque sorte. Mais depuis qu’il est là, le Sénégal n’a jamais joué à son niveau. C’est sur la qualité individuelle des joueurs que nous arrivons à compétir.  Il faut enrichir le staff technique avec d’anciens joueurs qui ont un vécu en Europe. Je peux citer par exemple Roger Mendy, Oumar Guèye Sène ou encore Boubacar Sarr « Locotte ». Ce sont des jeunes qui peuvent être intégrés dans le staff de l’équipe nationale. Ils auront forcément des choses à dire à l’entraîneur et aux joueurs. Cela se fait dans plusieurs pays.

Quelle lecture avez-vous de ce qui est déjà appelé «le Protocole de Rabat » ?

Pour moi, ce qui s’est passé à Rabat est une humiliation. Monsieur Augustin Senghor a le droit de postuler pour être président de la Confédération africaine de football (CAF). Il pensait pouvoir emmener des idées, mais il n’a pas fait de bons résultats au niveau de la fédération sénégalaise de football. Le football des jeunes n’existe pas. Nos jeunes, nos cadets ne jouent pas. Il faut désormais passer par les centres de formations pour jouer au football. Mais combien de jeunes ont le droit de faire du sport et qui en sont privés ? La direction technique est nulle. Le monsieur, il est candidat, il fait des voyages, accompagné de gens qui voulaient qu’il soit président de la Caf. Et à un moment donné, un autre monsieur qui dirige la FIFA vient lui raconter des histoires. On lui demande de laisser tomber, avec comme récompense un poste de vice-président. Mais de qui se moque-t-on ? Même s’il devait être battu, il devait aller aux élections. Ce n’est pas une honte d’aller aux élections et d’être battu. Cela démontre que ces gens ne sont là que pour leur personne. Il est vice-président de la Caf et ça lui suffit. Et le ministre des sports applaudit des deux mains. Et c’est une chose très grave. C’est la première fois qu’un de nos candidats se déculotte devant un étranger, à savoir le président de la FIFA. Le football africain doit être régi et pensé par des Africains.  Ils sont dans la contradiction, les gens de la Caf. Ils disent que pour entraîner une équipe ici, il faut avoir un diplôme Caf. Et je suis d’accord. Mais pourquoi font- ils allégeance au président de la FIFA, à des fins électoralistes ? Ce dernier n’avait besoin que d’une chose : s’assurer des voix de l’Afrique pour les prochaines élections au niveau de la FIFA. 



Source : https://www.lasnews.info/lamine-gadiaga-depuis-six...