«Le Brésil a un texte à proposer.» Il était 2 h 15 du matin, dans la nuit de lundi, lorsque le ministre brésilien des Affaires étrangères, Antonio Patriota, a fait cette déclaration. Épuisés par des heures d'attentes, observateurs et journalistes ont cru qu'un accord avait été scellé à la conférence des Nations unies sur le développement durable Rio + 20. Il n'en était rien. La confusion n'a fait qu'augmenter la mauvaise humeur des délégués de la conférence à l'égard du Brésil.
Depuis qu'elle a pris les rênes des négociations, la diplomatie brésilienne est prête à tout pour trouver un accord avant l'arrivée des chefs d'État, ce mercredi. Cela semblait acquis mardi soir: un projet de déclaration finale de 49 pages a été adopté par les délégués en séance plénière. Le pays hôte éviterait ainsi que les chefs d'État aient à négocier eux-mêmes, comme en 2009 lors de la conférence sur le climat à Copenhague. Et démontrerait par la même occasion sa capacité à jouer un rôle de premier plan sur la scène internationale.
Le résultat sera peut-être l'inverse de l'effet escompté. Même s'il a conduit les négociations à marche forcée ces trois derniers jours, le pays hôte a été, de l'avis de la majorité des délégués présents, incapable de prendre le rôle de leader que beaucoup attendaient de lui. Son projet de déclaration finale a été sévèrement contesté par la délégation européenne, qui critique un document dépourvu d'«ambition», avec «une régression du multilatéralisme».
Certes, le contexte n'aide pas. «En période de crise, aucun gouvernement n'est prêt à faire des concessions», tempère Marcos de Azambuja, qui était le négociateur brésilien lors du sommet organisé à Rio en 1992. «Le Brésil est le pays hôte, il n'a pas à être le leader, il doit former un consensus pour un accord à l'unanimité», ajoute-t-il.
La timidité du «gentil géant»
Mais, aux yeux de beaucoup, le Brésil ne cherche que le plus petit dénominateur commun. «C'est médiocre et lamentable, dans le meilleur des cas on aura une réaffirmation des principes de 1992», s'emporte Muriel Saragoussi, coordinatrice au Brésil des campagnes de l'ONG Oxfam. «Le Brésil est la sixième puissance mondiale, et c'est une démocratie. Cela lui donne des responsabilités, mais il se révèle incapable de la moindre vision», poursuit-elle. La prudence du Brésil fait d'autant plus enrager qu'il pourrait se poser en exemple. «En vingt ans, les avancées en termes de protection de l'environnement ont été considérables», assure Sergio Leitao, directeur des campagnes de Greenpeace. Il cite la réduction historique de la déforestation, les lois et les incitations financières pour protéger l'environnement.
En 2009, à Copenhague, le président Luiz Inacio Lula da Silva avait surpris en adoptant des objectifs volontaires de réductions d'émissions de CO2, contre l'avis des entreprises. «Cela a provoqué une réaction de l'industrie comme de l'agro-business, qui font front depuis quelques mois. Cela change les priorités du pays», estime Sergio Leitao.
Pour lui, la «timidité» du Brésil n'est pas seulement due à sa légendaire volonté d'éviter les conflits avec les autres pays. Le porte-parole de Greenpeace rappelle qu'entre-temps le pays a découvert de gigantesques réserves de pétrole, ce qui explique par exemple son nouveau désintérêt pour les énergies éolienne ou solaire. «En devenant une puissance, nous commençons à avoir nous aussi des contradictions, comme les États-Unis ou l'Union européenne», conclut-il. Le rêve du Brésil d'être un «gentil géant» pourrait se fracasser à Rio.
Par Lamia Oualalou
Depuis qu'elle a pris les rênes des négociations, la diplomatie brésilienne est prête à tout pour trouver un accord avant l'arrivée des chefs d'État, ce mercredi. Cela semblait acquis mardi soir: un projet de déclaration finale de 49 pages a été adopté par les délégués en séance plénière. Le pays hôte éviterait ainsi que les chefs d'État aient à négocier eux-mêmes, comme en 2009 lors de la conférence sur le climat à Copenhague. Et démontrerait par la même occasion sa capacité à jouer un rôle de premier plan sur la scène internationale.
Le résultat sera peut-être l'inverse de l'effet escompté. Même s'il a conduit les négociations à marche forcée ces trois derniers jours, le pays hôte a été, de l'avis de la majorité des délégués présents, incapable de prendre le rôle de leader que beaucoup attendaient de lui. Son projet de déclaration finale a été sévèrement contesté par la délégation européenne, qui critique un document dépourvu d'«ambition», avec «une régression du multilatéralisme».
Certes, le contexte n'aide pas. «En période de crise, aucun gouvernement n'est prêt à faire des concessions», tempère Marcos de Azambuja, qui était le négociateur brésilien lors du sommet organisé à Rio en 1992. «Le Brésil est le pays hôte, il n'a pas à être le leader, il doit former un consensus pour un accord à l'unanimité», ajoute-t-il.
La timidité du «gentil géant»
Mais, aux yeux de beaucoup, le Brésil ne cherche que le plus petit dénominateur commun. «C'est médiocre et lamentable, dans le meilleur des cas on aura une réaffirmation des principes de 1992», s'emporte Muriel Saragoussi, coordinatrice au Brésil des campagnes de l'ONG Oxfam. «Le Brésil est la sixième puissance mondiale, et c'est une démocratie. Cela lui donne des responsabilités, mais il se révèle incapable de la moindre vision», poursuit-elle. La prudence du Brésil fait d'autant plus enrager qu'il pourrait se poser en exemple. «En vingt ans, les avancées en termes de protection de l'environnement ont été considérables», assure Sergio Leitao, directeur des campagnes de Greenpeace. Il cite la réduction historique de la déforestation, les lois et les incitations financières pour protéger l'environnement.
En 2009, à Copenhague, le président Luiz Inacio Lula da Silva avait surpris en adoptant des objectifs volontaires de réductions d'émissions de CO2, contre l'avis des entreprises. «Cela a provoqué une réaction de l'industrie comme de l'agro-business, qui font front depuis quelques mois. Cela change les priorités du pays», estime Sergio Leitao.
Pour lui, la «timidité» du Brésil n'est pas seulement due à sa légendaire volonté d'éviter les conflits avec les autres pays. Le porte-parole de Greenpeace rappelle qu'entre-temps le pays a découvert de gigantesques réserves de pétrole, ce qui explique par exemple son nouveau désintérêt pour les énergies éolienne ou solaire. «En devenant une puissance, nous commençons à avoir nous aussi des contradictions, comme les États-Unis ou l'Union européenne», conclut-il. Le rêve du Brésil d'être un «gentil géant» pourrait se fracasser à Rio.
Par Lamia Oualalou