Correspondant à Beyrouth
Le chef du Hezbollah est apparu en personne hier dans la banlieue sud de Beyrouth pour galvaniser les dizaines de milliers de ses partisans qui ont répondu à son appel à manifester leur colère contre le film L'Innocence des musulmans . D'autres rassemblements similaires sont attendus dans les prochains jours dans différents fiefs du parti chiite, dans le nord, le sud et l'est du Liban. Ces défilés devraient se dérouler dans le calme et contraster ainsi avec la violence incontrôlée qui a caractérisé certaines des protestations suscitées par le brûlot anti-islam. Le Liban n'a pas été épargné par cette fièvre et le ministre de l'Intérieur a annoncé hier que les établissements américains étaient désormais protégés. Vendredi, un manifestant a été tué et vint-cinq autres blessés, lors de heurts opposant les forces de sécurité à des islamistes qui avaient incendié un fastfood KFC à Tripoli, la principale ville musulmane du Liban.
Se démarquer des sunnites
La rare apparition publique de Hassan Nasrallah - il vit caché depuis la guerre de 2006 avec Israël - est significative de l'importance qu'il accorde à cette campagne: la discipline dont savent faire preuve ses partisans est une occasion en or pour le Hezbollah de se démarquer des islamistes sunnites - salafistes ou proches d'al-Qaida - et de redorer ainsi son blason, fortement terni ces derniers mois sur la scène arabo-musulmane. La popularité gagnée par Nasrallah pour ses faits d'armes contre Israël est très ébranlée depuis le coup de force militaire du Hezbollah au Liban en 2008 et, surtout, par son soutien persistant à Bachar el-Assad en Syrie malgré la violence de la répression des opposants à son régime. «La montée au créneau du Hezbollah est très opportuniste. Comme il n'a plus la latitude d'agir militairement sans risquer d'embraser le Liban tout entier, notamment en raison de l'acuité des tensions entre sunnites et chiites, il montre ainsi qu'il est toujours là pour défendre les grandes causes musulmanes», analyse un diplomate sous couvert d'anonymat.
Répondant indirectement aux rigoristes sunnites qui accusent les chiites de ne pas vénérer suffisamment le Prophète et de lui préférer les imams Ali et Hussein, le secrétaire général du Hezbollah s'est posé en champion de l'islam «uni» et réclamé l'interdiction de toute atteinte à son encontre. «Je me sacrifie moi-même et je sacrifierai mes parents, mes frères, mes sœurs pour toi, ô Prophète», a déclamé Nasrallah avant de réitérer son appel à l'interdiction des atteintes à l'islam à l'instar de la loi contre l'antisémitisme promulguée en 2004 par le Congrès américain.
Pour Amal Saad Ghorayeb, auteur d'un livre sur le Hezbollah, le mouvement que vient de lancer le parti chiite libanais a des objectifs politiques évidents: «Nasrallah veut replacer ces protestations dans une logique d'opposition à l'impérialisme américain et dans la lutte antisioniste et se démarquer de l'approche civilisationnelle et culturelle qui prévaut parmi les salafistes.»
Le message «subliminal» de Nasrallah, qui s'adresse aussi aux Occidentaux et aux chrétiens orientaux dans la foulée de la visite du pape Benoît XVI au Liban, consiste à mettre en garde contre les dérives antichrétiennes des violences suscitées par le film sur Mahomet. Pour le chef du Hezbollah, en attribuant les offenses à l'islam à des chrétiens - le prêtre copte et le pasteur Terry Jones -, l'objectif «était de pousser les musulmans à attaquer des chrétiens».
Attaque antiaméricaine à Tunis: un chef salafiste défie la police
Le chef d'un groupe salafiste djihadiste recherché par la police après l'attaque de l'ambassade américaine à Tunis, qui a fait 4 morts vendredi dernier, a prêché lundi dans une mosquée de la ville, défiant la police qui encerclait les lieux. Seïf Allah Ibn Hussein (alias Abou Iyadh), chef du courant Ansar al-Charia (les Partisans de la Charia), s'est exprimé dans la mosquée al-Fatah, exigeant la démission du ministre de l'Intérieur, Ali Larayedh, membre du parti islamiste Ennahda, qui dirige le gouvernement. Les forces de sécurité, déployées en nombre, sont restées à distance de la mosquée où se trouvaient des femmes et des enfants, avant de se retirer en appelant les fidèles à quitter les lieux sans crainte. Abou Iyadh a ensuite été exfiltré par une foule compacte de partisans, échappant de nouveau à la police qui avait tenté de l'arrêter à son domicile vendredi peu après les violences. «Nous n'avons pas peur des menaces du ministre de l'Intérieur», a-t-il déclaré, ajoutant: «Une nouvelle dictature est en train de se mettre en place et le gouvernement se recherche un nouvel ennemi parmi les salafistes».
Par Sibylle Rizk
Le chef du Hezbollah est apparu en personne hier dans la banlieue sud de Beyrouth pour galvaniser les dizaines de milliers de ses partisans qui ont répondu à son appel à manifester leur colère contre le film L'Innocence des musulmans . D'autres rassemblements similaires sont attendus dans les prochains jours dans différents fiefs du parti chiite, dans le nord, le sud et l'est du Liban. Ces défilés devraient se dérouler dans le calme et contraster ainsi avec la violence incontrôlée qui a caractérisé certaines des protestations suscitées par le brûlot anti-islam. Le Liban n'a pas été épargné par cette fièvre et le ministre de l'Intérieur a annoncé hier que les établissements américains étaient désormais protégés. Vendredi, un manifestant a été tué et vint-cinq autres blessés, lors de heurts opposant les forces de sécurité à des islamistes qui avaient incendié un fastfood KFC à Tripoli, la principale ville musulmane du Liban.
Se démarquer des sunnites
La rare apparition publique de Hassan Nasrallah - il vit caché depuis la guerre de 2006 avec Israël - est significative de l'importance qu'il accorde à cette campagne: la discipline dont savent faire preuve ses partisans est une occasion en or pour le Hezbollah de se démarquer des islamistes sunnites - salafistes ou proches d'al-Qaida - et de redorer ainsi son blason, fortement terni ces derniers mois sur la scène arabo-musulmane. La popularité gagnée par Nasrallah pour ses faits d'armes contre Israël est très ébranlée depuis le coup de force militaire du Hezbollah au Liban en 2008 et, surtout, par son soutien persistant à Bachar el-Assad en Syrie malgré la violence de la répression des opposants à son régime. «La montée au créneau du Hezbollah est très opportuniste. Comme il n'a plus la latitude d'agir militairement sans risquer d'embraser le Liban tout entier, notamment en raison de l'acuité des tensions entre sunnites et chiites, il montre ainsi qu'il est toujours là pour défendre les grandes causes musulmanes», analyse un diplomate sous couvert d'anonymat.
Répondant indirectement aux rigoristes sunnites qui accusent les chiites de ne pas vénérer suffisamment le Prophète et de lui préférer les imams Ali et Hussein, le secrétaire général du Hezbollah s'est posé en champion de l'islam «uni» et réclamé l'interdiction de toute atteinte à son encontre. «Je me sacrifie moi-même et je sacrifierai mes parents, mes frères, mes sœurs pour toi, ô Prophète», a déclamé Nasrallah avant de réitérer son appel à l'interdiction des atteintes à l'islam à l'instar de la loi contre l'antisémitisme promulguée en 2004 par le Congrès américain.
Pour Amal Saad Ghorayeb, auteur d'un livre sur le Hezbollah, le mouvement que vient de lancer le parti chiite libanais a des objectifs politiques évidents: «Nasrallah veut replacer ces protestations dans une logique d'opposition à l'impérialisme américain et dans la lutte antisioniste et se démarquer de l'approche civilisationnelle et culturelle qui prévaut parmi les salafistes.»
Le message «subliminal» de Nasrallah, qui s'adresse aussi aux Occidentaux et aux chrétiens orientaux dans la foulée de la visite du pape Benoît XVI au Liban, consiste à mettre en garde contre les dérives antichrétiennes des violences suscitées par le film sur Mahomet. Pour le chef du Hezbollah, en attribuant les offenses à l'islam à des chrétiens - le prêtre copte et le pasteur Terry Jones -, l'objectif «était de pousser les musulmans à attaquer des chrétiens».
Attaque antiaméricaine à Tunis: un chef salafiste défie la police
Le chef d'un groupe salafiste djihadiste recherché par la police après l'attaque de l'ambassade américaine à Tunis, qui a fait 4 morts vendredi dernier, a prêché lundi dans une mosquée de la ville, défiant la police qui encerclait les lieux. Seïf Allah Ibn Hussein (alias Abou Iyadh), chef du courant Ansar al-Charia (les Partisans de la Charia), s'est exprimé dans la mosquée al-Fatah, exigeant la démission du ministre de l'Intérieur, Ali Larayedh, membre du parti islamiste Ennahda, qui dirige le gouvernement. Les forces de sécurité, déployées en nombre, sont restées à distance de la mosquée où se trouvaient des femmes et des enfants, avant de se retirer en appelant les fidèles à quitter les lieux sans crainte. Abou Iyadh a ensuite été exfiltré par une foule compacte de partisans, échappant de nouveau à la police qui avait tenté de l'arrêter à son domicile vendredi peu après les violences. «Nous n'avons pas peur des menaces du ministre de l'Intérieur», a-t-il déclaré, ajoutant: «Une nouvelle dictature est en train de se mettre en place et le gouvernement se recherche un nouvel ennemi parmi les salafistes».
Par Sibylle Rizk