En consacrant la zone euro comme le cœur de l'Union européenne, la crise a relancé la dérive du Royaume-Uni vers le grand large. Une dérive assumée, encouragée même par les Cassandre eurosceptiques britanniques, qui voient dans la menace d'un «Eurogeddon» - l'implosion de la zone euro - la confirmation de leurs sombres prédictions.
Mais une dérive qui inquiète tout de même, tant on a conscience, des deux côtés de la Manche, qu'Albion et le continent ont partie liée. C'était tout l'enjeu de la première visite officielle à Londres de François Hollande: remettre d'aplomb une relation qui s'engageait sur de mauvaises bases. La règle du jeu rappelée mardi avec Londres devrait permettre à l'Europe d'avancer vers la sortie de crise sans risquer un veto britannique. Cela, tant que des dossiers névralgiques, comme la taxe sur les transactions financières ou l'union bancaire, resteront cantonnés à l'Eurozone et ne s'appliqueront pas à l'ensemble des Ving-Sept. Un «gentleman's agreement» endossé à Londres par François Hollande lorsqu'il a évoqué une «Europe à plusieurs vitesses» où chacun «prend ce qu'il veut dans l'Union, dans le respect des autres pays».
Cette évolution de l'UE place néanmoins le pouvoir britannique face à un dilemme. Rompre les amarres au risque de se priver de l'immense bénéfice du marché unique. Rester dans le statu quo mais subir une pression accrue des eurosceptiques galvanisés par les soubresauts de l'UE et écoutés par une part croissante de l'opinion britannique. «Partir (de l'Union européenne) ne serait pas dans notre meilleur intérêt», a estimé David Cameron, début juillet. Il sait que la moitié des exportations britanniques de biens et de service se font vers l'UE. Il sait aussi que la City, si emblématique, aurait plus à souffrir que toute autre place européenne d'un effondrement de l'euro. Londres, c'est à peu près sûr désormais, ne rejoindra jamais la zone euro. En même temps, l'intégration politique, fiscale et bancaire qui se profile au sein des Dix-Sept pourrait laisser la Grande-Bretagne sur le bord du chemin européen.
Le périlleux pari d'un référendum
Face à ce choix cornélien, le premier ministre britannique est suffisamment idéologue et pragmatique pour parler alternativement à ses députés d'arrière-banc (les intraitables back-benchers) et aux Européens. Il vient de remettre sur la table la perspective d'un référendum sur l'appartenance à l'Europe, sans en préciser la formulation, ni l'échéance.
Si ce virage était pris, le Royaume-Uni et l'Union européenne auraient chacun beaucoup à perdre. Outre-Manche, les milieux d'affaires ne sont plus à convaincre sur ce point. Les efforts communs lors des crises, en Libye, en Syrie, montrent que le Royaume-Uni peut compter sur l'UE pour exercer son influence diplomatique, et réciproquement. La «relation spéciale» avec les États-Unis n'est plus ce qu'elle était: Obama mise plus sur l'Asie que sur l'Europe. Quant à l'Europe de la défense, elle repose essentiellement sur les épaules franco-britanniques. À ce titre, la réduction des financements militaires à Londres est un mauvais signal. Il montre que, vis-à-vis de l'Europe, Cameron n'a pas encore fixé son cap
Par Alain Barluet
Mais une dérive qui inquiète tout de même, tant on a conscience, des deux côtés de la Manche, qu'Albion et le continent ont partie liée. C'était tout l'enjeu de la première visite officielle à Londres de François Hollande: remettre d'aplomb une relation qui s'engageait sur de mauvaises bases. La règle du jeu rappelée mardi avec Londres devrait permettre à l'Europe d'avancer vers la sortie de crise sans risquer un veto britannique. Cela, tant que des dossiers névralgiques, comme la taxe sur les transactions financières ou l'union bancaire, resteront cantonnés à l'Eurozone et ne s'appliqueront pas à l'ensemble des Ving-Sept. Un «gentleman's agreement» endossé à Londres par François Hollande lorsqu'il a évoqué une «Europe à plusieurs vitesses» où chacun «prend ce qu'il veut dans l'Union, dans le respect des autres pays».
Cette évolution de l'UE place néanmoins le pouvoir britannique face à un dilemme. Rompre les amarres au risque de se priver de l'immense bénéfice du marché unique. Rester dans le statu quo mais subir une pression accrue des eurosceptiques galvanisés par les soubresauts de l'UE et écoutés par une part croissante de l'opinion britannique. «Partir (de l'Union européenne) ne serait pas dans notre meilleur intérêt», a estimé David Cameron, début juillet. Il sait que la moitié des exportations britanniques de biens et de service se font vers l'UE. Il sait aussi que la City, si emblématique, aurait plus à souffrir que toute autre place européenne d'un effondrement de l'euro. Londres, c'est à peu près sûr désormais, ne rejoindra jamais la zone euro. En même temps, l'intégration politique, fiscale et bancaire qui se profile au sein des Dix-Sept pourrait laisser la Grande-Bretagne sur le bord du chemin européen.
Le périlleux pari d'un référendum
Face à ce choix cornélien, le premier ministre britannique est suffisamment idéologue et pragmatique pour parler alternativement à ses députés d'arrière-banc (les intraitables back-benchers) et aux Européens. Il vient de remettre sur la table la perspective d'un référendum sur l'appartenance à l'Europe, sans en préciser la formulation, ni l'échéance.
Si ce virage était pris, le Royaume-Uni et l'Union européenne auraient chacun beaucoup à perdre. Outre-Manche, les milieux d'affaires ne sont plus à convaincre sur ce point. Les efforts communs lors des crises, en Libye, en Syrie, montrent que le Royaume-Uni peut compter sur l'UE pour exercer son influence diplomatique, et réciproquement. La «relation spéciale» avec les États-Unis n'est plus ce qu'elle était: Obama mise plus sur l'Asie que sur l'Europe. Quant à l'Europe de la défense, elle repose essentiellement sur les épaules franco-britanniques. À ce titre, la réduction des financements militaires à Londres est un mauvais signal. Il montre que, vis-à-vis de l'Europe, Cameron n'a pas encore fixé son cap
Par Alain Barluet