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Le français langue d'islam ( Par Pr ABDOUL AZIZE KEBE)

Rédigé par leral.net le Samedi 5 Octobre 2024 à 23:13 | | 0 commentaire(s)|

Le français langue d'islam ( Par Pr ABDOUL AZIZE KEBE)
Je voudrais saisir le moment de la célébration de la Francophonie pour partager cette réflexion. Je le fais dans le seul but de contribuer à rapprocher les musulmans de mon pays et d'ailleurs, à faire tomber ces cloisons d'un autre âge qui se dressent entre musulmans arabophones et francophones.  De ce point de vue, on pourrait se départir de cette pensée réactive qui nous empêche de percevoir toute cette potentialité créative que le français nous offre.
Nous savons tous que la plupart des pays de la Francophonie sont des pays anciennement colonisés. Parmi ceux-ci une bonne partie qui se trouve au Maghreb et en Afrique de l'Ouest, est majoritairement musulmane. Ce sont des espaces où l'islam, avec sa langue génitale l'arabe, a précédé le français et ses éléments culturels. Dans ces pays, l'établissement du français a été perçu comme une agression contre l'islam et contre la langue arabe. Tant et si bien que le français fût considéré - quelques fois à juste titre - comme une langue anti-islamique. Mais aujourd'hui, est-il juste de continuer à le voir de cet œil, à le percevoir comme la langue du diable, de l'antéchrist ? Est-il acceptable de le présenter ainsi pour décréter illicite son enseignement, quitte à frustrer nombre d'enfants des bienfaits de l'école et des savoirs qu'elle offre, comme le stipule Boku Haram ou les organisations qui partagent ses vues ? Pour qui suit le dynamisme qu'apporte le français à la propagation du savoir islamique et à la diffusion de sa culture, il serait plutôt juste de dire que le français est une langue d'islam, dans ses dimensions scientifiques, académiques, spirituelles, culturelles et historiques. Même si certains s'y expriment pour diffuser leur haine ou leur méconnaissance de cette belle religion, d'autres en usent pour la diffuser et mettre à la disposition du monde tout le trésor spirituel et théologique qu'elle a générée.
Le français facteur de diffusion de l'islam.
Toute langue dans laquelle s'exprime la religion, pour véhiculer ses enseignements, pour défendre ses idéaux, est une langue de religion, de cette religion. Vu sous cet angle, le français est une langue d'islam. Les musulmans arabophones sont les mieux placés pour accréditer cette hypothèse dans la mesure oú, la plupart d'entre leurs élites estiment qu'est arabe tout celui qui s'exprime dans cette langue, la langue du Dâd. Il y a même des hadiths dont il faut vérifier l'authenticité qui accréditeraient cette assertion. Dans tous les cas, parler une langue c'est bien intégrer, ne serait-ce que par la locution, une communauté.
 
 
Pourquoi soutenons-nous que le français est une langue d'islam ?
L'islam est une religion à vocation universelle, fondée par la révélation d'un Livre à partir duquel, des savoirs de toutes sortes ont été élaborés. Or, la vocation de ces savoirs est d'être reçus, appropriés, développés et retransmis par des peuples et des nations autres que le peuple arabe. Dans cette mission, le français a joué un rôle important en véhiculant, par la traduction et l'édition, un riche patrimoine qui serait resté inaccessible pour une bonne partie des musulmans non arabophones.
Quelques exemples illustrent notre propos
Le domaine éditorial représente un riche champ d'expression de l'islam, de diffusion de ses enseignements, de défense de ses idéaux, et même de clarification de controverse et d'idées reçues ou préjugées. Sur ce champ, la contribution de certaines maisons d'éditions est à citer.
En visitant la collection Sindbad de la maison d'édition Actes Sud, on est admiratif et reconnaissant devant son fondateur Pierre Bernard. Ce dernier a contribué, avec cette collection, à exhumer, en tout cas, à déposer sur la natte de l'universel un nombre considérable de textes relatifs à l'islam, littérature et civilisation confondues, pour montrer que cette religion n'est pas qu'un simple ritualisme sans âme. Elle est surtout une mine de ressources pour l'humanité. La bibliothèque musulmane de cette maison d'édition nous surprend, par la richesse et la diversité des publications parmi lesquelles figurent des classiques du fiqh, comme la Risâla de Shâfi'î, des livres de soufisme et de spiritualité comme les traités spirituels d'al-Ançâri, de Kalabâdhî, ou des traités de sciences comme ceux de Râzi.
A côté de cela, les éditions al-Buraq apportent leur pierre à l'édifice par la diffusion des œuvres d'auteurs musulmans contemporains ou classiques. Dans le site de la revue d'études sur l'islam, ''Cahiers de l'islam'', on lit ceci à propos de cette maison d'édition : ''al Bouraq devient alors une passerelle entre Orient et Occident, une voie vers la connaissance de la civilisation arabe-musulmane''.
De cette façon, le français, comme d'autres langues certainement, relie les anneaux du savoir islamique à la chaîne de la connaissance universelle, et transmet le message décrypté aux peuples et nations qui constituent la cible. Il joue son rôle de diffuseur mais aussi de lien entre les peuples disséminés, à travers les espaces géographiques différents, qu'ils soient d'Orient ou d'Occident, sans considération de discrimination d'aucune sorte.
Sur un autre plan, mais toujours dans le domaine éditorial, l'apport du français à la diffusion et à la connaissance de l'islam spirituel est très appréciable. Ce faisant, il a dévoilé au monde cette riche spiritualité qui se présente comme voie alternative pour accéder à Dieu par la quête de sens, à travers la philosophie et la mystique, l'amour et la création du beau, l'ouverture à l'autre, la charité et l'hospitalité.
Cette contribution inestimable se retrouve dans l'option éditoriale de la maison d'édition Verdier, par le biais de la collection ''islam spirituel, -نور على نور - fondée par Christian Jambet. En empruntant cette voie, il refuse d'emprisonner l'islam dans les carcans du juridisme ou les chemins aventureux du politique. Ce qui semble être aujourd'hui le seul visage médiatisé avec les jihadistes, les salafistes de DAESH ou de BOKU HARAM. Dans cette collection, nous pouvons citer l'excellent traité de soufisme d'Isfarâ’inî, Le révélateur des mystères - كاشف الأسرار - . Un beau texte sur l'unicité de Dieu et les subtilités du cœur, dans la perception de réalités autres que physiques, traduit par Hermann Landolt.
Traduction et valorisation de la culture
Ces quelques illustrations auraient suffi pour démontrer que le français n'est pas une langue anti-islamique, comme semblent le croire quelques arabophones radicalisés par des sentiments de marginalisation réelle ou fictive, ou par des islamistes anti-occidentaux qui confondent idéologie et religion. C'est, à l’instar de toutes les autres langues, un moyen de connaissance et de reconnaissance, de connexion avec les savoirs et avec les humains, pour transformer positivement les réalités.
 Les traductions des deux sources primordiales de l'islam, le Coran et la Sunna authentique du Prophète en attestent. Qui ne connaît pas les traductions exemplaires de Jacques Berque, de Hamidoullah, de Si Hamza Boubakeur ou des Deux Saintes Mosquées ? En plus de cela, qui ne connaît pas les traductions des œuvres magistrales de Ghazali, en soufisme, de penseurs contemporains comme Qaradawî, Mouhamed Ghazali, et d'autres encore ? Avec notre génération, qui n’a pas appris dans l’œuvre, en français, de Garaudy, René Guénon, Dominique Urvoy, Maurice Bucaille ? Qui n’a pas consolidé ses connaissances avec Minhâju-l-Muslim de Abu Bakr al-Jazâ’irî ? Qui ne s’est pas abreuvé dans la fontaine inépuisable de sagesse de l’Imâm ‘Ali (RTA) dans Nahju-l-Balâgha ?
Ici au Sénégal s’est tenu en 2014, pour la deuxième fois, l...

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