Benoît XVI a résumé en deux phrases, vendredi soir, dans le sanctuaire de Notre-Dame de Harissa, dans la montagne libanaise, le sens de l'exhortation apostolique qu'il est spécialement venu signer là avant de la présenter, dimanche, à toutes les Églises du Moyen-Orient: «cultiver la pureté de la foi» et «retrouver l'essentiel».
Le reste, selon lui, semble secondaire. Les chrétiens du Moyen-Orient, pour «discriminés» qu'ils soient, ou «souvent empêchés» de vivre leur foi, doivent, a-t-il insisté, «dépouiller la foi de ce qui l'enlaidit, de tout ce qui peut obscurcir la splendeur de la lumière du Christ».
Cœur de son voyage au Liban, cette exhortation apostolique est un document de 92 pages intitulé «Église au Moyen-Orient», qu'il a rédigé à partir des conclusions d'un synode qu'il avait spécialement convoqué à Rome, en octobre 2010, pour repenser la question de l'avenir incertain des chrétiens dans cette région du monde. Deux cents évêques et experts avaient débattu pendant trois semaines sur le sujet et avaient formulé des propositions à Benoît XVI.
Il en résulte un texte très équilibré. Sans doute plus que ce que l'on avait pu entendre lors du synode, où la peur de l'islam radical avait été quotidiennement soulignée. Tout comme avait été souvent critiquée la politique israélienne à l'égard des Palestiniens. Benoît XVI propose une vision moins directement politique en cherchant, au cœur du judaïsme et de l'islam, des raisons de converger vers une nouvelle harmonie.
Le rôle des femmes
C'est d'ailleurs dans «l'étymologie hébraïque» que le Pape a puisé pour définir la paix: «Elle n'est pas seulement un pacte ou un traité qui favorise la vie tranquille» ni «une simple absence de guerre». La paix signifie « l'état de l'homme qui vit en harmonie avec Dieu, avec lui-même, avec son prochain et avec la nature. Avant d'être extérieure, la paix est intérieure».
Le document aborde la façon dont les chrétiens et leurs multiples Églises peuvent réaliser cette unité intérieure en se réformant pour donner un témoignage plus «crédible». Le Pape insiste par exemple sur le rôle des femmes: «J'estime que les femmes doivent s'engager et être impliquées davantage dans la vie publique et ecclésiale.»
Mais les pages les plus fortes concernent les relations avec le judaïsme et avec l'islam. Le Pape invite ainsi les chrétiens à «être toujours conscients et reconnaissants de leurs racines», en référence au judaïsme. «Car, pour que la greffe sur l'antique arbre puisse prendre, elle a besoin de la sève qui vient des racines.» Bien sûr, reconnaît-il, «inexcusables et hautement condamnables sont les persécutions insidieuses ou violentes du passé», mais il faut aujourd'hui offrir au monde la nouveauté d'un «noble alliage» entre ces deux religions. C'est «une responsabilité nouvelle», martèle-t-il. Avec l'islam, il importe de dépasser «les controverses doctrinales», qui donnent lieu, selon le Pape, «à des pratiques d'intolérance, de discrimination, de marginalisation et même de persécution». De façon que les catholiques du Moyen-Orient puissent «jouir d'une pleine citoyenneté et ne pas être traités en citoyens ou en croyants mineurs».
En résumé, le Pape appelle donc à reconnaître «l'apport juif, chrétien et musulman dans la formation d'une culture riche propre au Moyen-Orient». Mais ce renouveau que l'Église entend promouvoir doit franchir un passage obligé: «la liberté religieuse, qui est le sommet de toutes les libertés». Et qui est la «liberté de suivre sa conscience en matière religieuse, et la liberté de culte. Elle inclut la liberté de choisir la religion que l'on juge vraie et de manifester publiquement sa propre croyance».
«De la tolérance à la liberté religieuse»
Une liberté religieuse, enfin, qui impose de dépasser la simple «tolérance». Ainsi, écrit le Pape, «il est nécessaire de passer de la tolérance à la liberté religieuse». Ce qui n'est pas du «relativisme», assure-t-il. «Il ne convient donc pas d'affirmer de manière excluante: “Je possède la vérité.” La vérité n'est possédée par personne, elle est toujours un don.» Ni «d'imposer la vérité à l'autre», car «la vérité se dévoile seulement dans la rencontre d'amour». En conséquence, et s'adressant toujours à ces trois religions, Benoît XVI a conclu sur une autre obligation: la lutte contre le «fondamentalisme religieux». Il «afflige toutes les communautés religieuses» a-t-il souligné, il «veut prendre le pouvoir parfois avec violence, sur la conscience de chacun et sur la religion pour des raisons politiques. Je lance un appel pressant à tous les responsables religieux, juifs, chrétiens et musulmans de la région afin qu'ils cherchent (...) à tout mettre en œuvre afin d'éradiquer cette menace qui touche indistinctement et mortellement, les croyants de toutes les religions».
Par Jean-Marie Guénois
Par Service infographie du Figaro
Le reste, selon lui, semble secondaire. Les chrétiens du Moyen-Orient, pour «discriminés» qu'ils soient, ou «souvent empêchés» de vivre leur foi, doivent, a-t-il insisté, «dépouiller la foi de ce qui l'enlaidit, de tout ce qui peut obscurcir la splendeur de la lumière du Christ».
Cœur de son voyage au Liban, cette exhortation apostolique est un document de 92 pages intitulé «Église au Moyen-Orient», qu'il a rédigé à partir des conclusions d'un synode qu'il avait spécialement convoqué à Rome, en octobre 2010, pour repenser la question de l'avenir incertain des chrétiens dans cette région du monde. Deux cents évêques et experts avaient débattu pendant trois semaines sur le sujet et avaient formulé des propositions à Benoît XVI.
Il en résulte un texte très équilibré. Sans doute plus que ce que l'on avait pu entendre lors du synode, où la peur de l'islam radical avait été quotidiennement soulignée. Tout comme avait été souvent critiquée la politique israélienne à l'égard des Palestiniens. Benoît XVI propose une vision moins directement politique en cherchant, au cœur du judaïsme et de l'islam, des raisons de converger vers une nouvelle harmonie.
Le rôle des femmes
C'est d'ailleurs dans «l'étymologie hébraïque» que le Pape a puisé pour définir la paix: «Elle n'est pas seulement un pacte ou un traité qui favorise la vie tranquille» ni «une simple absence de guerre». La paix signifie « l'état de l'homme qui vit en harmonie avec Dieu, avec lui-même, avec son prochain et avec la nature. Avant d'être extérieure, la paix est intérieure».
Le document aborde la façon dont les chrétiens et leurs multiples Églises peuvent réaliser cette unité intérieure en se réformant pour donner un témoignage plus «crédible». Le Pape insiste par exemple sur le rôle des femmes: «J'estime que les femmes doivent s'engager et être impliquées davantage dans la vie publique et ecclésiale.»
Mais les pages les plus fortes concernent les relations avec le judaïsme et avec l'islam. Le Pape invite ainsi les chrétiens à «être toujours conscients et reconnaissants de leurs racines», en référence au judaïsme. «Car, pour que la greffe sur l'antique arbre puisse prendre, elle a besoin de la sève qui vient des racines.» Bien sûr, reconnaît-il, «inexcusables et hautement condamnables sont les persécutions insidieuses ou violentes du passé», mais il faut aujourd'hui offrir au monde la nouveauté d'un «noble alliage» entre ces deux religions. C'est «une responsabilité nouvelle», martèle-t-il. Avec l'islam, il importe de dépasser «les controverses doctrinales», qui donnent lieu, selon le Pape, «à des pratiques d'intolérance, de discrimination, de marginalisation et même de persécution». De façon que les catholiques du Moyen-Orient puissent «jouir d'une pleine citoyenneté et ne pas être traités en citoyens ou en croyants mineurs».
En résumé, le Pape appelle donc à reconnaître «l'apport juif, chrétien et musulman dans la formation d'une culture riche propre au Moyen-Orient». Mais ce renouveau que l'Église entend promouvoir doit franchir un passage obligé: «la liberté religieuse, qui est le sommet de toutes les libertés». Et qui est la «liberté de suivre sa conscience en matière religieuse, et la liberté de culte. Elle inclut la liberté de choisir la religion que l'on juge vraie et de manifester publiquement sa propre croyance».
«De la tolérance à la liberté religieuse»
Une liberté religieuse, enfin, qui impose de dépasser la simple «tolérance». Ainsi, écrit le Pape, «il est nécessaire de passer de la tolérance à la liberté religieuse». Ce qui n'est pas du «relativisme», assure-t-il. «Il ne convient donc pas d'affirmer de manière excluante: “Je possède la vérité.” La vérité n'est possédée par personne, elle est toujours un don.» Ni «d'imposer la vérité à l'autre», car «la vérité se dévoile seulement dans la rencontre d'amour». En conséquence, et s'adressant toujours à ces trois religions, Benoît XVI a conclu sur une autre obligation: la lutte contre le «fondamentalisme religieux». Il «afflige toutes les communautés religieuses» a-t-il souligné, il «veut prendre le pouvoir parfois avec violence, sur la conscience de chacun et sur la religion pour des raisons politiques. Je lance un appel pressant à tous les responsables religieux, juifs, chrétiens et musulmans de la région afin qu'ils cherchent (...) à tout mettre en œuvre afin d'éradiquer cette menace qui touche indistinctement et mortellement, les croyants de toutes les religions».
Par Jean-Marie Guénois
Par Service infographie du Figaro