De notre envoyée spéciale à Chicago
Pour les grandes puissances, la réunion de Bagdad de mercredi sur le dossier nucléaire iranien a pour principal but d'éviter une guerre. Au moins avant l'élection américaine, en novembre. Même si les choses «ne peuvent être résolues en une nuit», le groupe des 5 + 1 (les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et l'Allemagne) a fait des propositions «intéressantes» à Téhéran, a affirmé le bureau de Catherine Ashton, la chef de la diplomatie européenne.
Concrètement, les grandes puissances ont mis sur la table des «mesures pour établir la confiance» avec les Iraniens. Elles demandent à Téhéran d'arrêter l'enrichissement de l'uranium à 20 %, d'accepter que son stock d'uranium soit transféré à l'étranger pour y être retraité et de donner des gages de coopération à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). C'est-à-dire de permettre l'accès des sites nucléaires aux inspecteurs de l'ONU et de répondre aux questions concernant le caractère militaire de son programme nucléaire. En échange, elles pourraient renoncer à prendre de nouvelles sanctions, voire reconsidérer, selon un diplomate européen, «celles qui ont déjà été prises dans le cadre de l'embargo pétrolier». Si la réunion de Bagdad se passe bien, un nouveau round de négociations pourrait être prochainement organisé.
L'Iran voudrait un allégement des sanctions
En pleine campagne électorale, accusé par son adversaire républicain de mollesse face à l'Iran, Barack Obama aimerait bien arracher une solution diplomatique. Jusque-là sur une ligne très dure vis-à-vis de Téhéran, la France a assoupli sa position depuis l'élection de François Hollande. «La lutte contre la prolifération sera une constante de la politique française. Aucun relâchement ne sera engagé. Cela vaut pour l'Iran et pour d'autres pays», a affirmé le président pendant le sommet de l'Otan à Chicago. Mais il a aussi assuré de sa volonté de «donner une chance à la négociation». En laissant entendre lundi au patron de l'AIEA, Yukiya Amano, qu'ils pourraient enfin laisser ses inspecteurs accéder au site militaire de Parchin, les Iraniens ont montré l'intérêt qu'ils portent à une solution diplomatique qui permettrait un allégement des sanctions.
Mais il reste encore à ancrer ces déclarations de bonne volonté réciproques dans les faits. La Maison-Blanche réclame des avancées concrètes. «L'annonce d'un accord est une chose, mais nous attendons qu'il soit appliqué et que l'Iran donne accès à tous les sites, les documents et les personnes dont l'AIEA a besoin», a prévenu le département d'État en commentant les progrès réalisés juste avant la réunion de Bagdad.
Scepticisme en Israël
Le scepticisme est encore plus grand en Israël, où le sujet de la bombe iranienne est considéré comme une question existentielle et où l'on craint que Téhéran ne cherche à gagner du temps. Le ministre de la Défense a mis en garde contre une tactique qui consisterait à «offrir des concessions partielles» contre un allégement des sanctions. La République islamique a fait beaucoup de promesses à l'AIEA sans jamais les tenir. «Les Iraniens sont des serial violeurs d'accords», a même dit un responsable israélien. Téhéran aurait d'ailleurs déjà fait une «contre-proposition en cinq points» aux grandes puissances, a affirmé un membre de la délégation iranienne.
Tant que les négociations ne sont pas rompues, Israël, qui menace de frapper les installations clandestines iraniennes, aura du mal à passer à l'acte. «C'est tout le jeu des États-Unis, qui tentent de faire durer les pourparlers jusqu'à l'élection», affirme, à Chicago, un spécialiste du dossier.
Le sujet est cependant entré dans une zone de fortes turbulences. Car la ligne rouge établie par Israël et les États-Unis n'est pas la même. L'équipe d'Obama se contenterait d'un Iran qui aurait atteint le seuil nucléaire sans fabriquer de bombes. Celle de Nétanyahou ne pourrait tolérer que Téhéran ait les capacités de fabriquer la bombe. Entre ces deux lignes, les experts voient au moins six mois de différence. La limite israélienne pourrait être atteinte au début de l'automne, c'est-à-dire avant l'élection américaine. Ehoud Barak, le ministre de la Défense, a prévenu: «Il est clair, pour les dirigeants du monde entier qu'au bout du compte, dans les domaines cruciaux pour sa sécurité ou son avenir, le gouvernement israélien est le seul à prendre ses décisions.»
Par Isabelle Lasserre
Pour les grandes puissances, la réunion de Bagdad de mercredi sur le dossier nucléaire iranien a pour principal but d'éviter une guerre. Au moins avant l'élection américaine, en novembre. Même si les choses «ne peuvent être résolues en une nuit», le groupe des 5 + 1 (les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et l'Allemagne) a fait des propositions «intéressantes» à Téhéran, a affirmé le bureau de Catherine Ashton, la chef de la diplomatie européenne.
Concrètement, les grandes puissances ont mis sur la table des «mesures pour établir la confiance» avec les Iraniens. Elles demandent à Téhéran d'arrêter l'enrichissement de l'uranium à 20 %, d'accepter que son stock d'uranium soit transféré à l'étranger pour y être retraité et de donner des gages de coopération à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). C'est-à-dire de permettre l'accès des sites nucléaires aux inspecteurs de l'ONU et de répondre aux questions concernant le caractère militaire de son programme nucléaire. En échange, elles pourraient renoncer à prendre de nouvelles sanctions, voire reconsidérer, selon un diplomate européen, «celles qui ont déjà été prises dans le cadre de l'embargo pétrolier». Si la réunion de Bagdad se passe bien, un nouveau round de négociations pourrait être prochainement organisé.
L'Iran voudrait un allégement des sanctions
En pleine campagne électorale, accusé par son adversaire républicain de mollesse face à l'Iran, Barack Obama aimerait bien arracher une solution diplomatique. Jusque-là sur une ligne très dure vis-à-vis de Téhéran, la France a assoupli sa position depuis l'élection de François Hollande. «La lutte contre la prolifération sera une constante de la politique française. Aucun relâchement ne sera engagé. Cela vaut pour l'Iran et pour d'autres pays», a affirmé le président pendant le sommet de l'Otan à Chicago. Mais il a aussi assuré de sa volonté de «donner une chance à la négociation». En laissant entendre lundi au patron de l'AIEA, Yukiya Amano, qu'ils pourraient enfin laisser ses inspecteurs accéder au site militaire de Parchin, les Iraniens ont montré l'intérêt qu'ils portent à une solution diplomatique qui permettrait un allégement des sanctions.
Mais il reste encore à ancrer ces déclarations de bonne volonté réciproques dans les faits. La Maison-Blanche réclame des avancées concrètes. «L'annonce d'un accord est une chose, mais nous attendons qu'il soit appliqué et que l'Iran donne accès à tous les sites, les documents et les personnes dont l'AIEA a besoin», a prévenu le département d'État en commentant les progrès réalisés juste avant la réunion de Bagdad.
Scepticisme en Israël
Le scepticisme est encore plus grand en Israël, où le sujet de la bombe iranienne est considéré comme une question existentielle et où l'on craint que Téhéran ne cherche à gagner du temps. Le ministre de la Défense a mis en garde contre une tactique qui consisterait à «offrir des concessions partielles» contre un allégement des sanctions. La République islamique a fait beaucoup de promesses à l'AIEA sans jamais les tenir. «Les Iraniens sont des serial violeurs d'accords», a même dit un responsable israélien. Téhéran aurait d'ailleurs déjà fait une «contre-proposition en cinq points» aux grandes puissances, a affirmé un membre de la délégation iranienne.
Tant que les négociations ne sont pas rompues, Israël, qui menace de frapper les installations clandestines iraniennes, aura du mal à passer à l'acte. «C'est tout le jeu des États-Unis, qui tentent de faire durer les pourparlers jusqu'à l'élection», affirme, à Chicago, un spécialiste du dossier.
Le sujet est cependant entré dans une zone de fortes turbulences. Car la ligne rouge établie par Israël et les États-Unis n'est pas la même. L'équipe d'Obama se contenterait d'un Iran qui aurait atteint le seuil nucléaire sans fabriquer de bombes. Celle de Nétanyahou ne pourrait tolérer que Téhéran ait les capacités de fabriquer la bombe. Entre ces deux lignes, les experts voient au moins six mois de différence. La limite israélienne pourrait être atteinte au début de l'automne, c'est-à-dire avant l'élection américaine. Ehoud Barak, le ministre de la Défense, a prévenu: «Il est clair, pour les dirigeants du monde entier qu'au bout du compte, dans les domaines cruciaux pour sa sécurité ou son avenir, le gouvernement israélien est le seul à prendre ses décisions.»
Par Isabelle Lasserre