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Le président Bashir sera-t-il l’hôte du FESMAN ?

Le communiqué du Conseil des ministres du jeudi 04 novembre nous apprend que le président Abdoulaye Wade s’est rendu à Khartoum et qu’il a discuté avec son homologue soudanais, Omar Hassan Al Bashir, entre autres sujets, de la participation du Soudan à la troisième édition du festival mondial des arts nègres (FESMAN) qui aura lieu à Dakar du 10 au 31 décembre 2010.


Rédigé par leral.net le Samedi 13 Novembre 2010 à 18:35 | | 0 commentaire(s)|

Le président Bashir sera-t-il l’hôte du FESMAN ?
Cette information a créé, une nouvelle fois encore, partout dans le monde des rumeurs sur un possible déplacement du président soudanais au Sénégal, premier pays à ratifier le statut de Rome de la Cour pénale internationale et tenu par l’obligation de l’arrêter et de le livrer à la Cour qui a lancé un mandat d’arrêt international contre lui pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide au Darfour. Le Sénégal ne peut, en tant qu’Etat souverain, invoquer une décision politique de l’Union africaine, inspirée et imposée à ses pairs par le Colonel Khadafi (des chefs d’Etat ont affirmé à la presse qu’il leur a refusé la parole au cours du débat qui a précédé le vote) pour se soustraire à une obligation juridique internationale. La constitution de notre pays est on ne peut plus clair à ce sujet qui reconnaît aux traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés une autorité supérieure à celle des lois nationales, dès leur publication et oblige l’Etat à les respecter à moins de s’en retirer par le biais de la dénonciation.
Il est vrai que le Kenya et le Tchad se sont illustrés en accueillant sur leur territoire le fugitif président soudanais en violation flagrante de leurs engagements internationaux ; mais le Sénégal qui reste un pays de démocratie et de droits de l’homme ne peut descendre au niveau de ces Etats qui sont trop souvent épinglés pour leurs violations répétées des droits humains aussi bien par les ONG que les instances onusiennes et africaines. Le gouvernement kenyan s’est d’ailleurs rattrapé il y a quelques semaines en déclarant que Bashir n’était plus le bienvenu sur son territoire, obligeant l’IGAD à transférer son sommet sur la Somalie et le Sud Soudan à Addis Abéba.
D’autre part, la controverse que soulèverait une invitation du président Bashir au FESMAN éclipsera, ne serait-ce que sur le plan médiatique, ce grand rendez-vous de la culture nègre que l’Afrique noire et sa diaspora attendent avec enthousiasme. Pire, des pans importants de la diaspora africaine, aux Etats Unis et dans les Caraïbes notamment qui accusent le président Bashir de génocide contre la population négro-africaine du Darfour et d’oppression des sud-soudanais pourraient reconsidérer leur participation au FESMAN. Quel gâchis cette éventualité serait pour le peuple sénégalais et la race noire dans son entièreté.
Le président Wade a toujours entretenu de bonnes relations avec les dirigeants soudanais, de Gaafar Al Nimeiri à Omar Al Bashir, y compris lorsqu’il était opposant. Nous savons aussi qu’il existe des relations économiques entre les deux pays. Mais le capital dont jouit le Sénégal sur la scène internationale et qui lui vaut tant de respect et de soutiens financiers en tous genres est et reste son image de pays de démocratie et de respect des droits humains. L’amitié avec le président Bashir et tout l’or du Soudan ne valent pas ce capital.

Seydi Gassama
Directeur Amnesty International Sénégal



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