Est-ce là une manœuvre d’extraire cet ancien chef d’État à la justice de son pays qui sait manifestement (donc doit répondre) bien de choses dans l’état de déliquescence actuel de l’État du Mali?
Les sources en conviennent: c’est le président déchu, ATT, cet officier général à la retraite, putschiste lui aussi, il y a aujourd’hui 21 ans, qui a insisté auprès des dirigeants de la Cedeao pour qu’il soit exfiltré parce qu’ayant peur pour sa vie. Venant de lui, avec un tel acharnement, après le coup d’État qui l’a renversé, le président en exercice de la Cedeao, ADO, a en fait une affaire sérieuse et n’a pas hésité à mettre sur le coup le médiateur de l’organisation sous régionale dans la crise malienne, le président Blaise Compaoré, qui a actionné tout le reste.
Et la suite, on la connaît.
ATT, le président renversé, a donc cherché, par tous les moyens, à quitter son pays pour ne pas devoir à faire avec la justice de son pays, comme l’avait promis, le chef de l’ex-junte militaire, le capitaine Sanogo, qui avait publiquement annoncé que «Monsieur Amadou Toumani Touré pourrait faire l’objet de poursuites judiciaires pour haute trahison et malversations financières».
Le président déchu, dans la plus grande surprise de ses compatriotes, a, lui, préféré l’exil plutôt que de vouloir affronter son sort au Mali, un pays, il faut le reconnaître, qui subit aujourd’hui les pires humiliations de son histoire. Cela, après les 9 ans et les 9 mois qu’il a passé au pouvoir sur les 10 ans qui bouclaient ses deux mandats à la tête du pays.
C’est après tout cela que le président déchu a voulu s’enfuir de son pays en laissant derrière lui un ancien président, GMT, qu’il a fait arrêter, dans les années 91, et qui du reste a été jugé, par deux fois (crimes de sang et crimes économiques), et qui n’a jamais voulu abandonner les siens en choisissant le chemin de l’exil.
ATT, en prétextant de la peur qu’il avait de sa vie (raison de sécurité), pour filer à l’étranger(bon nombre d’observateurs se demandent encore si le Sénégal serait la dernière destination), en compagnie de toute sa famille, serait-il dans l’optique de se soustraire de la justice de son pays? Qui peut alors, au niveau africain ou européen, empêcher alors un homme d’État de répondre à la justice de son pays sous le fallacieux prétexte tiré d’un hypothétique souci sécuritaire?
Pour l’histoire, la grandeur de la charge suprême qu’il a exercée dans son pays (il se plaisait lui-même à dire que le pays lui a tout donné), et pour le respect de son peuple, le président déchu, ATT, qui disait à tout vent qu’il avait hâte de retrouver son Mopti natal pour s’occuper de la terre, après l’exercice du pouvoir d’État, ne devrait pas si facilement choisir le chemin de l’exil. Car il le sait et ceux qui l’ont aidé dans cette voie, peu glorieuse, savent que dans la déconfiture actuelle que vit le pays, l’ancien président ATT doit être écouté, ne serait-ce que pour l’histoire.
Il ne peut d’ailleurs en être autrement dans ces temps modernes où l’exigence de bonne gouvernance obéit toujours, en tout lieu, de celle de la transparence. Ailleurs, en dehors du Mali, c’est le cas. Et pour moindre que le chaos actuel du Mali, des anciens dirigeants en Afrique et au-delà, ont dû être interpellés pour être soumis à la justice de leur pays.
Le sort de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo en est une parfaite illustration. Aujourd’hui prisonnier à la Cour pénal international de la Haye, après avoir usurpé le pouvoir dans son pays, causant de graves violences politiques ayant entraîné la mort de milliers ivoiriens, le sort pénitencier de cet homme, qui lui est aujourd’hui réservé, ne déplaît à aucune conscience africaine civilisée, avide de réparations judiciaires pour fautes commises. Cela, pour ne pas en rajouter au torrent de l’impunité gratuite qui a gangrené le Mali, durant ces dernières années.
Pour le choc consenti par les Maliens, suite à l’état de déliquescence avancé de leur pays, après ces derniers événements vécus, l’homme qui en assurait les hautes fonctions de l’État, bien que renversé par le coup d’État, ne devrait pas être, en tant qu’acteur institutionnel décisif au moment de l’effondrement de la nation (plus de la moitié du pays contrôlée par des groupes armés face à une armée qui n’est pas à l’état de défendre l’intégrité du territoire national), autoriser à «filer à l’anglaise» pour s’exiler à l’étranger.
Pour la défaillance de l’armée, dans cette crise du nord, dont il avait la haute charge, et pour beaucoup d’autres choses les unes plus scabreuses que les autres, comme par exemple le fait pour le président déchu du Mali de laisser entrer dans le pays des assaillants étrangers, lourdement armés, sans au préalable les désarmer, ATT, l’ancien président, pour la vérité historique, ne doit pas être autorisé à s’exiler. Mais, bien à rester, au Mali, à la disposition des nouvelles autorités du pays et du peuple.
Le président déchu, en se précipitant à prendre le chemin de l’exil, par ce geste de départ en catimini qui lui permet provisoirement de vivre loin de son pays, peut-il avoir des garanties suffisantes de la part des responsables des pays d’accueil lui assurant la totale impunité même en cas de graves implications judiciaires?
C’est là toute l’équation de cet exil du président déchu malien. Les chefs d’État de la Cedeao qui ont œuvré pour cette exfiltration du président déchu, en faisant pression sur l’ex-junte militaire du capitaine Sanogo, sont curieusement tous; à l’image des présidents ivoirien ADO, sénégalais Macky Sall, et Burkinabé Blaise Compaoré, considérés comme des icônes en matière de gouvernance démocratique.
Seront-ils en mesure d’imposer la rigueur de gouvernance et de transparence dans leurs pays respectifs et tolérer en même temps l’impunité chez le grand voisin du Mali qui, lui, souffre de graves dysfonctionnements démocratiques et institutionnels qui ont besoin d’être élucidés si l’on veut à jamais épargner à ce pays une telle tourmente ?
Sékouba Samaké
Source : Info Matin
Maliactu du 23 avril 2012
Les sources en conviennent: c’est le président déchu, ATT, cet officier général à la retraite, putschiste lui aussi, il y a aujourd’hui 21 ans, qui a insisté auprès des dirigeants de la Cedeao pour qu’il soit exfiltré parce qu’ayant peur pour sa vie. Venant de lui, avec un tel acharnement, après le coup d’État qui l’a renversé, le président en exercice de la Cedeao, ADO, a en fait une affaire sérieuse et n’a pas hésité à mettre sur le coup le médiateur de l’organisation sous régionale dans la crise malienne, le président Blaise Compaoré, qui a actionné tout le reste.
Et la suite, on la connaît.
ATT, le président renversé, a donc cherché, par tous les moyens, à quitter son pays pour ne pas devoir à faire avec la justice de son pays, comme l’avait promis, le chef de l’ex-junte militaire, le capitaine Sanogo, qui avait publiquement annoncé que «Monsieur Amadou Toumani Touré pourrait faire l’objet de poursuites judiciaires pour haute trahison et malversations financières».
Le président déchu, dans la plus grande surprise de ses compatriotes, a, lui, préféré l’exil plutôt que de vouloir affronter son sort au Mali, un pays, il faut le reconnaître, qui subit aujourd’hui les pires humiliations de son histoire. Cela, après les 9 ans et les 9 mois qu’il a passé au pouvoir sur les 10 ans qui bouclaient ses deux mandats à la tête du pays.
C’est après tout cela que le président déchu a voulu s’enfuir de son pays en laissant derrière lui un ancien président, GMT, qu’il a fait arrêter, dans les années 91, et qui du reste a été jugé, par deux fois (crimes de sang et crimes économiques), et qui n’a jamais voulu abandonner les siens en choisissant le chemin de l’exil.
ATT, en prétextant de la peur qu’il avait de sa vie (raison de sécurité), pour filer à l’étranger(bon nombre d’observateurs se demandent encore si le Sénégal serait la dernière destination), en compagnie de toute sa famille, serait-il dans l’optique de se soustraire de la justice de son pays? Qui peut alors, au niveau africain ou européen, empêcher alors un homme d’État de répondre à la justice de son pays sous le fallacieux prétexte tiré d’un hypothétique souci sécuritaire?
Pour l’histoire, la grandeur de la charge suprême qu’il a exercée dans son pays (il se plaisait lui-même à dire que le pays lui a tout donné), et pour le respect de son peuple, le président déchu, ATT, qui disait à tout vent qu’il avait hâte de retrouver son Mopti natal pour s’occuper de la terre, après l’exercice du pouvoir d’État, ne devrait pas si facilement choisir le chemin de l’exil. Car il le sait et ceux qui l’ont aidé dans cette voie, peu glorieuse, savent que dans la déconfiture actuelle que vit le pays, l’ancien président ATT doit être écouté, ne serait-ce que pour l’histoire.
Il ne peut d’ailleurs en être autrement dans ces temps modernes où l’exigence de bonne gouvernance obéit toujours, en tout lieu, de celle de la transparence. Ailleurs, en dehors du Mali, c’est le cas. Et pour moindre que le chaos actuel du Mali, des anciens dirigeants en Afrique et au-delà, ont dû être interpellés pour être soumis à la justice de leur pays.
Le sort de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo en est une parfaite illustration. Aujourd’hui prisonnier à la Cour pénal international de la Haye, après avoir usurpé le pouvoir dans son pays, causant de graves violences politiques ayant entraîné la mort de milliers ivoiriens, le sort pénitencier de cet homme, qui lui est aujourd’hui réservé, ne déplaît à aucune conscience africaine civilisée, avide de réparations judiciaires pour fautes commises. Cela, pour ne pas en rajouter au torrent de l’impunité gratuite qui a gangrené le Mali, durant ces dernières années.
Pour le choc consenti par les Maliens, suite à l’état de déliquescence avancé de leur pays, après ces derniers événements vécus, l’homme qui en assurait les hautes fonctions de l’État, bien que renversé par le coup d’État, ne devrait pas être, en tant qu’acteur institutionnel décisif au moment de l’effondrement de la nation (plus de la moitié du pays contrôlée par des groupes armés face à une armée qui n’est pas à l’état de défendre l’intégrité du territoire national), autoriser à «filer à l’anglaise» pour s’exiler à l’étranger.
Pour la défaillance de l’armée, dans cette crise du nord, dont il avait la haute charge, et pour beaucoup d’autres choses les unes plus scabreuses que les autres, comme par exemple le fait pour le président déchu du Mali de laisser entrer dans le pays des assaillants étrangers, lourdement armés, sans au préalable les désarmer, ATT, l’ancien président, pour la vérité historique, ne doit pas être autorisé à s’exiler. Mais, bien à rester, au Mali, à la disposition des nouvelles autorités du pays et du peuple.
Le président déchu, en se précipitant à prendre le chemin de l’exil, par ce geste de départ en catimini qui lui permet provisoirement de vivre loin de son pays, peut-il avoir des garanties suffisantes de la part des responsables des pays d’accueil lui assurant la totale impunité même en cas de graves implications judiciaires?
C’est là toute l’équation de cet exil du président déchu malien. Les chefs d’État de la Cedeao qui ont œuvré pour cette exfiltration du président déchu, en faisant pression sur l’ex-junte militaire du capitaine Sanogo, sont curieusement tous; à l’image des présidents ivoirien ADO, sénégalais Macky Sall, et Burkinabé Blaise Compaoré, considérés comme des icônes en matière de gouvernance démocratique.
Seront-ils en mesure d’imposer la rigueur de gouvernance et de transparence dans leurs pays respectifs et tolérer en même temps l’impunité chez le grand voisin du Mali qui, lui, souffre de graves dysfonctionnements démocratiques et institutionnels qui ont besoin d’être élucidés si l’on veut à jamais épargner à ce pays une telle tourmente ?
Sékouba Samaké
Source : Info Matin
Maliactu du 23 avril 2012