Face aux indépendantistes catalans, le roi d'Espagne veut siffler la fin de la récréation. Depuis les manifestations du 11 septembre - jour de la fête de la Catalogne -, le gouvernement autonome flirte avec les thèses sécessionnistes. Car les arguments des séparatistes reçoivent un plus grand écho depuis que la crise économique s'est abattue sur le pays.
Le président de la région, Artur Mas, a d'abord réclamé un «pacte fiscal», autrement dit, une redistribution territoriale plus avantageuse. Puis il a évoqué le «besoin d'un État» si ses revendications n'étaient pas satisfaites. Quelques jours après cette prise de position, et 48 heures seulement avant l'entretien prévu jeudi entre le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, et Artur Mas, le souverain a appelé ses sujets à l'unité. Dans une lettre postée sur son site Internet, Juan Carlos met en garde: «La pire chose que nous puissions faire, c'est de diviser nos forces, d'attiser les dissensions, de poursuivre des chimères, d'approfondir les blessures. Ce n'est pas le moment de se livrer à l'introspection de nos identités», avertit-il.
La coïncidence du calendrier était suffisamment explicite pour que personne en Espagne ne doute du sens du message du roi. Quelques heures avant la publication, Juan Carlos avait conseillé aux journalistes qui l'interrogeaient sur la Catalogne: «Allez voir mon site à 14 heures.»
Dans cette monarchie constitutionnelle où le roi règne, mais ne gouverne pas, les prises de position politiques du souverain sont exceptionnelles. Lors de ses allocutions, Juan Carlos se contente, la plupart du temps, de déclarations générales et consensuelles. Auteur de plusieurs ouvrages sur le monarque, José García Abad, éditeur de l'hebdomadaire El Siglo de Europa, déniche difficilement deux précédents: «Le soutien à la politique économique du gouvernement Rajoy, et une insinuation discrète contre la participation à la guerre en Irak décidée par le gouvernement Aznar. Je ne vois pas d'autres cas.»
Alors que la plupart des messages du roi sont rédigés par le gouvernement, celui-ci provient directement du palais de la Zarzuela. «Le roi est très sensible à l'unité de l'Espagne. Il est aussi très à l'écoute des militaires», indique Abad. Les discours sécessionnistes ont ému certains officiers. En public ou en privé, quelques-uns ont rappelé que la Constitution confie à l'armée le rôle de «défendre l'intégrité territoriale» du pays.
Le message du roi a été diversement apprécié. Le Parti populaire (PP), la formation conservatrice de Rajoy, a applaudi. Le gouvernement catalan ne s'est pas senti concerné, au motif que les Catalans ne poursuivent pas des chimères, «mais des propositions et des solutions». Certains responsables politiques, loin des caméras, ont avoué une inquiétude: que la fermeté du roi attise la défiance des indépendantistes.
Par Mathieu de Taillac
Le président de la région, Artur Mas, a d'abord réclamé un «pacte fiscal», autrement dit, une redistribution territoriale plus avantageuse. Puis il a évoqué le «besoin d'un État» si ses revendications n'étaient pas satisfaites. Quelques jours après cette prise de position, et 48 heures seulement avant l'entretien prévu jeudi entre le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, et Artur Mas, le souverain a appelé ses sujets à l'unité. Dans une lettre postée sur son site Internet, Juan Carlos met en garde: «La pire chose que nous puissions faire, c'est de diviser nos forces, d'attiser les dissensions, de poursuivre des chimères, d'approfondir les blessures. Ce n'est pas le moment de se livrer à l'introspection de nos identités», avertit-il.
La coïncidence du calendrier était suffisamment explicite pour que personne en Espagne ne doute du sens du message du roi. Quelques heures avant la publication, Juan Carlos avait conseillé aux journalistes qui l'interrogeaient sur la Catalogne: «Allez voir mon site à 14 heures.»
Dans cette monarchie constitutionnelle où le roi règne, mais ne gouverne pas, les prises de position politiques du souverain sont exceptionnelles. Lors de ses allocutions, Juan Carlos se contente, la plupart du temps, de déclarations générales et consensuelles. Auteur de plusieurs ouvrages sur le monarque, José García Abad, éditeur de l'hebdomadaire El Siglo de Europa, déniche difficilement deux précédents: «Le soutien à la politique économique du gouvernement Rajoy, et une insinuation discrète contre la participation à la guerre en Irak décidée par le gouvernement Aznar. Je ne vois pas d'autres cas.»
Alors que la plupart des messages du roi sont rédigés par le gouvernement, celui-ci provient directement du palais de la Zarzuela. «Le roi est très sensible à l'unité de l'Espagne. Il est aussi très à l'écoute des militaires», indique Abad. Les discours sécessionnistes ont ému certains officiers. En public ou en privé, quelques-uns ont rappelé que la Constitution confie à l'armée le rôle de «défendre l'intégrité territoriale» du pays.
Le message du roi a été diversement apprécié. Le Parti populaire (PP), la formation conservatrice de Rajoy, a applaudi. Le gouvernement catalan ne s'est pas senti concerné, au motif que les Catalans ne poursuivent pas des chimères, «mais des propositions et des solutions». Certains responsables politiques, loin des caméras, ont avoué une inquiétude: que la fermeté du roi attise la défiance des indépendantistes.
Par Mathieu de Taillac