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Le salafisme, une présence faible, mais croissante

Rédigé par leral.net le Lundi 17 Septembre 2012 à 14:15 | | 0 commentaire(s)|

FOCUS - Soupçonné d'être derrière la manifestation de samedi devant l'ambassade des États-Unis, ce mouvement, majoritairement apolitique et non violent, ne concerne en France qu'un nombre restreint d'individus.


Le salafisme, une présence faible, mais croissante
• Le salafisme, une école fondamentaliste de l'islam sunnite
Le salafisme est un mouvement fondamentaliste qui prône un retour à l'islam originel à travers une lecture stricte et littérale du Coran et de la sunna (faits et gestes du prophète Mahomet). Face à un monde musulman perçu comme décadent, les salafistes cherchent à restaurer une foi authentique, en revenant à la religion des salaf (ancêtres pieux). Imitant par exemple leur habillement, ils portent une longue barbe, une calotte et un qamîs (djellaba). Les femmes peuvent quant à elles porter différents types de voile, dont le niqâb, qui ne laisse découverts que les yeux.

• Trois courants rivaux
Il existe trois formes de salafisme. Le premier, de loin le plus important, est «quiétiste» ou traditionaliste. Proche des autorités religieuses saoudiennes, ce salafisme prédicatif, socialement conservateur, se fonde sur la formation religieuse. Son objectif étant de réislamiser les sociétés par le bas en poussant à l'adoption de pratiques rigoristes, il se désintéresse complètement de la question politique.

Le deuxième courant, le plus récent, est le salafisme «réformiste» ou politique, qui œuvre pour une plus grande ouverture des institutions politiques au champ religieux. S'inspirant de la stratégie des Frères musulmans, les salafistes réformistes encouragent à la constitution de partis politiques et à la participation aux élections, comme l'expliquait récemment au Figaro le chercheur Dominique Thomas.

Si ces deux premiers courants refusent l'action armée, le salafisme révolutionnaire considère lui le djihad (guerre sainte) comme une obligation religieuse. Né dans les années 1980, ce courant ultraminoritaire revendique le combat armé «afin de libérer la communauté non seulement des différentes occupations étrangères, mais aussi de ses propres régimes politiques, qualifiés d'oppresseurs», analyse Dominique Thomas.

• Une présence faible mais croissante en France
Le salafisme connaît un succès grandissant en France. Selon le ministère de l'Intérieur, ses adeptes sont entre 12.000 et 15.000, contre quelques dizaines de fidèles au début des années 1990. Les adeptes sont essentiellement issus de l'immigration musulmane, mais près d'un tiers d'entre eux sont des catholiques ou protestants convertis. Dotés d‘une trentaine de lieux de cultes, les salafistes ne représentent toutefois qu'une infime partie de la communauté musulmane, évaluée à environ 6 millions de personnes.

Comme l'explique le sociologue Samir Amghar, l'implantation du salafisme au début des années 1990 en France était le fait d'anciens militants du Front islamique du salut (FIS) fuyant la répression du régime algérien. Mais ce salafisme de tendance révolutionnaire, qui se concentrait surtout sur des questions politiques algériennes, a eu très peu d'influence sur les musulmans français. Dès le milieu des années 1990, il a été éclipsé par un salafisme de type apolitique et quiétiste, dont le pôle d'influence n'était plus l'Algérie mais l'Arabie saoudite, qui a formé nombre d'imams français. Pour le chercheur, si le salafisme a autant de succès, c'est aussi parce qu'il est parfaitement en phase avec l'individualisme et le consumérisme de l'époque néolibérale. Se désintéressant de la sphère politique, les salafistes ont en effet un rapport décomplexé à l'argent et à la réussite matérielle.

L'expansion du salafisme en France a toutefois ralenti après les attentats du 11 Septembre, les autorités accusant le mouvement, même dans sa version apolitique, d'être une étape favorisant le passage à l'action violente. Mais si certains imams ont été expulsés ou interdits de séjour, les téléprédicateurs restent accessibles par Internet ou par les chaînes satellitaires saoudiennes. Pour le chercheur Gilles Kepel, le danger est que les salafistes parviennent à imposer leur norme de l'islam aux autres musulmans, en leur faisant croire qu'ils sont de mauvais musulmans.


Par Laura Raim