De notre envoyé spécial à Alger
La torpeur désespérante du week-end à Alger a commencé un jour plus tôt, en ce jeudi 10 mai, déclaré férié pour que les électeurs aient tout le loisir de participer aux élections législatives. Alors que les magasins étaient fermés et que les habituels embouteillages de la semaine avaient disparu, l'affluence dans les bureaux de vote n'a pas semblé beaucoup très importante. Sur l'Algérie tout entière, 24.916 candidats se présentaient pour 462 sièges à pourvoir. Jeudi soir, le ministre de l'Intérieur a annoncé un taux de participation de 42,90%, soit un taux plus élevé que les 35,67% enregistrés aux dernières élections législatives de 2007.
À 10 heures, deux heures après l'ouverture du scrutin, 86 personnes avaient voté à l'école Mohammed Zikel, selon une militante chargée de surveiller pour son parti les listes d'émargement dans le quartier du 1er mai d'Alger. Dans ce bureau de vote réservé à la gent féminine, une dizaine d'électrices se plaignaient de ne pas figurer sur les listes électorales. «Mon nom a été enlevé parce que je n'ai pas voté à la dernière présidentielle», se plaignait l'une d'elle portant foulard. «Moi, je ne connais pas tous ces partis, mais je voulais voter pour faire plaisir au président Bouteflika. On ne peut pas avoir de meilleur président! Mais ils nous disent qu'il faut voter, et ils nous en empêchent! C'est ça l'Algérie»…
Le cas du Dr Louze Sibachir Souraya, candidate sur Alger du FFS, un parti d'opposition, est plus problématique. «J'ai toujours voté, à chaque scrutin, et dans ce même bureau de vote», s'exclamait cette femme en agitant sa carte d'électeur sous le nez d'un agent administratif du centre installé au Lycée Sainte-Elisabeth, dans le quartier Telemy. Les dizaines de journalistes auxquels le chef de la délégation d'observateurs de l'Union européenne avait par hasard fixé rendez-vous à 11h30 dans ce même bureau, ressassaient la même question: comment l'administration du ministère de l'Intérieur a-t-elle pu agréer votre candidature, ce qui obligatoirement signifie que vous êtes dûment répertoriée sur la liste électorale du lieu où vous vous présentez, et ensuite avoir rayé votre nom de cette même liste? «Je sais, c'est inconcevable, mais ce n'est pas à moi de répondre, c'est à l'administration!», répétait l'électrice-candidate de plus en plus courroucée.
«Tout se déroule de façon normale»
Le chef de la délégation de l'UE, José Ignacio Salafranca, isolé par une meute de caméras, est arrivé. Il est passé à deux mètres de Louze Sibachir Souraya. «Pour l'instant, a-t-il par la suite communiqué, tout se déroule de façon normale. Mais nous ne donnerons nos conclusions qu'au lendemain du scrutin».
Sur les chaînes de télévision et radio se multipliaient les appels à voter, lancés par le président, des héros de la guerre d'indépendance, des chanteurs, des acteurs. «C'est un devoir, je le fais pour l'Algérie», répétaient les électeurs, souvent âgés, qui avaient trouvé le chemin des urnes.
A 40 Km d'Alger, sur la plage de Sidi Fredj, parmi tous ceux qui se moquaient ouvertement de ce scrutin, un chef de famille, voulant illustrer le dédain du peuple algérien pour des élections notoirement truquées, contait la petite histoire suivante: «Alors que je demandais, il y a des années, son avis sur un film à un vendeur de rue, pour me dissuader de l'acheter l'homme a eu ce cri du cœur: «ah non! Je préfère encore aller voter que de regarder ce film!»
Par Thierry Portes
La torpeur désespérante du week-end à Alger a commencé un jour plus tôt, en ce jeudi 10 mai, déclaré férié pour que les électeurs aient tout le loisir de participer aux élections législatives. Alors que les magasins étaient fermés et que les habituels embouteillages de la semaine avaient disparu, l'affluence dans les bureaux de vote n'a pas semblé beaucoup très importante. Sur l'Algérie tout entière, 24.916 candidats se présentaient pour 462 sièges à pourvoir. Jeudi soir, le ministre de l'Intérieur a annoncé un taux de participation de 42,90%, soit un taux plus élevé que les 35,67% enregistrés aux dernières élections législatives de 2007.
À 10 heures, deux heures après l'ouverture du scrutin, 86 personnes avaient voté à l'école Mohammed Zikel, selon une militante chargée de surveiller pour son parti les listes d'émargement dans le quartier du 1er mai d'Alger. Dans ce bureau de vote réservé à la gent féminine, une dizaine d'électrices se plaignaient de ne pas figurer sur les listes électorales. «Mon nom a été enlevé parce que je n'ai pas voté à la dernière présidentielle», se plaignait l'une d'elle portant foulard. «Moi, je ne connais pas tous ces partis, mais je voulais voter pour faire plaisir au président Bouteflika. On ne peut pas avoir de meilleur président! Mais ils nous disent qu'il faut voter, et ils nous en empêchent! C'est ça l'Algérie»…
Le cas du Dr Louze Sibachir Souraya, candidate sur Alger du FFS, un parti d'opposition, est plus problématique. «J'ai toujours voté, à chaque scrutin, et dans ce même bureau de vote», s'exclamait cette femme en agitant sa carte d'électeur sous le nez d'un agent administratif du centre installé au Lycée Sainte-Elisabeth, dans le quartier Telemy. Les dizaines de journalistes auxquels le chef de la délégation d'observateurs de l'Union européenne avait par hasard fixé rendez-vous à 11h30 dans ce même bureau, ressassaient la même question: comment l'administration du ministère de l'Intérieur a-t-elle pu agréer votre candidature, ce qui obligatoirement signifie que vous êtes dûment répertoriée sur la liste électorale du lieu où vous vous présentez, et ensuite avoir rayé votre nom de cette même liste? «Je sais, c'est inconcevable, mais ce n'est pas à moi de répondre, c'est à l'administration!», répétait l'électrice-candidate de plus en plus courroucée.
«Tout se déroule de façon normale»
Le chef de la délégation de l'UE, José Ignacio Salafranca, isolé par une meute de caméras, est arrivé. Il est passé à deux mètres de Louze Sibachir Souraya. «Pour l'instant, a-t-il par la suite communiqué, tout se déroule de façon normale. Mais nous ne donnerons nos conclusions qu'au lendemain du scrutin».
Sur les chaînes de télévision et radio se multipliaient les appels à voter, lancés par le président, des héros de la guerre d'indépendance, des chanteurs, des acteurs. «C'est un devoir, je le fais pour l'Algérie», répétaient les électeurs, souvent âgés, qui avaient trouvé le chemin des urnes.
A 40 Km d'Alger, sur la plage de Sidi Fredj, parmi tous ceux qui se moquaient ouvertement de ce scrutin, un chef de famille, voulant illustrer le dédain du peuple algérien pour des élections notoirement truquées, contait la petite histoire suivante: «Alors que je demandais, il y a des années, son avis sur un film à un vendeur de rue, pour me dissuader de l'acheter l'homme a eu ce cri du cœur: «ah non! Je préfère encore aller voter que de regarder ce film!»
Par Thierry Portes