Sanofi, un des champions mondiaux des vaccins, est engagé dans deux projets de recherche. L'un d'eux, mené en partenariat avec le britannique GlaxoSmithKline, a été noué dès février en collaboration avec l'Autorité pour la recherche et le développement avancé dans le domaine biomédical (Barda), une agence qui dépend du département de la Santé américain. Ce dernier aurait apporté autour de 30 millions de dollars. Le laboratoire français expliquait à l'époque vouloir lui apporter tout son « savoir-faire » et « mettre à profit ses recherches antérieures sur le Sras ». Les États-Unis « ont investi pour essayer de protéger leur population », a ajouté mercredi Paul Hudson.
Sanofi corrige le tir
Des propos qui ont déclenché de vives réactions jusqu'à l'Élysée. Emmanuel Macron s'est en effet «ému» que le groupe serve en priorité les États-Unis, et a appelé de nouveau à ce que ce vaccin soit «extrait des lois du marché», a annoncé jeudi l'Élysée.
«La présidence, comme tout le monde, s'est émue de cette déclaration qui ne correspond pas, par ailleurs, à la réalité de la relation entre le groupe Sanofi et le gouvernement français dans la recherche pour le vaccin. Ce qui est absolument sûr, c'est que les efforts déployés ces dernières semaines et ces derniers mois montrent qu'il est nécessaire que le vaccin soit un bien public et mondial, c'est-à-dire extrait des lois du marché. (...) (Tout doit être fait pour que le vaccin soit) accessible le plus rapidement possible et distribué de manière juste et équitable, c'est-à-dire disponible partout, pour tous, et au même moment», a indiqué l'Élysée, en précisant que le chef de l'État recevrait des dirigeants de Sanofi en début de semaine prochaine.
De son côté, la secrétaire d'État à l'Économie Agnès Pannier-Runacher a également fait part de sa déception. «Tel accès privilégié de tel ou tel pays sous un prétexte qui serait un prétexte pécuniaire serait inacceptable», a-t-elle déclaré jeudi matin au micro de Sud Radio. «J'ai directement contacté le patron de Sanofi qui m'a confirmé que le vaccin sera bien accessible en France. Le groupe a d'ailleurs publié un communiqué pour préciser cela», a-t-elle expliqué.
Le président de Sanofi France a en effet assuré sur BFMTV que le vaccin contre le Covid-19 ne serait pas réservé aux États-Unis. «Si on découvre un vaccin, il sera accessible à tout le monde, les Américains et les Européens l'auront en même temps», a expliqué Olivier Bogillot. Le propos de Paul Hudson a mal été compris, il interpellait juste l'Union Européenne pour qu'elle soit efficace. Pour moi le débat est clos: le vaccin, s'il est découvert sera mis à disposition des patients français.»
Sanofi explique dans son communiqué travailler avec les autorités européennes pour faciliter l'accès à un éventuel vaccin sur le continent. «Sanofi dispose d'un ancrage industriel diversifié et international. Nous avons des capacités de production aux États-Unis, en Europe, notamment en France et ailleurs dans le monde. La production sur le sol américain sera principalement dédiée aux États-Unis et le reste de nos capacités de production sera alloué à l'Europe, à la France et au reste du monde», a précisé le groupe. «Nous nous sommes toujours engagés à ce que dans ces circonstances sans précédent, notre vaccin soit accessible à tous», a ajouté le laboratoire.
Le directeur général de Sanofi Paul Hudson ne cache pas sa déception face au manque de coordination en matière de recherche et de gestion de l'épidémie au niveau du Vieux Continent. Il appelle de ses vœux la création d'une « Barda » à l'européenne.
Il faut croire qu'il a été en partie entendu. Selon Reuters, la Commission européenne réfléchirait à mobiliser un fonds d'urgence de 2,4 milliards d'euros pour renforcer la capacité des laboratoires pharmaceutiques en Europe. Et ce, afin d'éviter que le Vieux Continent ne se retrouve démuni, tant en capacités de production que de distribution, lorsqu'un vaccin contre le coronavirus aura été trouvé. La commissaire européenne à la Santé, Stella Kyriakides, a évoqué ce sujet la semaine dernière devant les ministres européens de la Santé, qui l'ont approuvée, mais aucune décision finale n'a été prise.
La secrétaire d'État à l'Économie a ajouté ce jeudi que la France travaillait avec l'Allemagne afin «d'accélérer le mouvement de soutien européen» pour pouvoir rapidement accompagner les différentes recherches et faciliter le processus d'homologation des produits.
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