Ces tarikhas conquièrent un espace public grandissant, laissé vacant par des pouvoirs
publics corrompus et incapables de former des citoyens avertis. De sorte qu’aujourd’hui, beaucoup
de questions purement politiques, sont prises en main par des guides religieux, des tarikhas qui
fonctionnent comme des entreprises familiales religieuses de lobbying et sont gérées comme telles. Il
s’agit de questions relatives aux nominations aux plus hautes fonctions de l’Etat, au dialogue
politique, aux consignes de vote lors d’élections,… Qui peut croire que ces intermédiaires religieux
n’y trouvent pas un intérêt personnel, direct ou indirect, intérêt qui n’a rien à voir avec la religion ?
L’érection du religieux en deuxième pouvoir par Abdoulaye Wadd dans une république laïque,
l’ampleur et l’impunité des mouvements soi‐disant religieux en tout genre (mouvement Kara,
Béthio,…) constituent, à mes yeux, un cocktail explosif, une sérieuse menace pour notre démocratie.
La création d’un ministère chargé des affaires religieuses est tout simplement terrifiante.
Plus inquiétant encore, est la timidité des citoyens sénégalais face aux dérives de ce nouveau
pouvoir. Quand on lit la presse sénégalaise, on est frappé par la pertinence des analyses portant sur
de nombreux sujets (manque de transparence, corruption,…) mais très peu d’articles portant sur la
complicité des tarikhas, des guides religieux dans ce mouvement généralisé de perte de valeur.
Revenons sur l’affaire Ségura. Tous les intellectuels, hommes politiques, simples citoyens avaient
vigoureusement dénoncé cette affaire, et à juste titre. Ces mêmes intellectuels, politiques, citoyens
observent un silence coupable quand il s’agit des valises, d’enveloppes, de voitures de luxe, ou autres
cadeaux à destination des chefs religieux de ce pays. Dans de l’esprit des lois, Montesquieu disait
« Les grandes récompenses dans une monarchie et dans une république sont un signe de leur
décadence, parce qu’elles prouvent que leurs principes sont corrompus ; que, d’un côté, l’idée de
l’honneur n’y a plus tant de force ; que, de l’autre, la qualité de citoyen s’est affaiblie.
C’est un fait patent que depuis que Wade est au pouvoir, tout se vend, tout s’achète au Sénégal :
achat de voix d’électeurs, achats de conscience,… Les pratiques clientélistes des socialistes d’Abdou
Diouf ressurgissent d’une ampleur inégalée dans l’histoire politique de notre pays.Wade a érigé le
religieux en pouvoir afin de mieux le manipuler. C’est ainsi qu’il a pu corrompre beaucoup de nos
guides religieux mais c’est tellement plus facile pour nos intellectuels, citoyens, journalistes, leaders
de l’opposition de ne rien voir et de se taire ! La fameuse loi du silence de la maffia n’est‐elle pas de
la corruption passive ? De sorte qu’on peut aujourd’hui affirmer que dans ce pays, presque tout le
monde a un prix. La peur de dénoncer peut en être un. Le silence aussi. Les journalistes qui osent
franchir le pas sont attaqués par les talibés, sous la bénédiction de leurs guides. Comment
comprendre que, dans un pays démocratique et laïc, les réactions des talibés soient plus virulentes
que celles des policiers (dans le saccage des locaux de Walf par exemple) ? Nous avons en mémoire
les attaques et les insultes dont a été victime Madiambal Diagne, par certains talibés mourides,
furieux du traitement des informations concernant la vie privée du guide religieux des mourides,
Serigne Bara. Que l’information soit ou non vérifiée, il n’est pas acceptable dans un pays civilisé que
des talibés, sous la bénédiction de leur guide religieux, lancent des fatwas contre de simples citoyens,
qui font leur travail. Beaucoup d’honnêtes citoyens (Madiambal et d’autres) sont poursuivis,
surveillés, menacés par le régime de Wadd parce qu’ils dérangent au plus haut niveau. Mais le plus
frappant, c’est que personne ne dérange aujourd’hui les guides religieux, personne ne condamne les
faits de corruption les concernant, personne ne s’interroge sur leurs responsabilités dans le naufrage
du navire Sénégal. Ces derniers sont épargnés par les critiques au nom de je ne sais quel ordre. Et
pourtant, nombreux sont les sénégalais qui, dans leur salon, critiquent vertement l’attitude de
beaucoup de guides religieux, mais rechignent à en parler publiquement. De grâce, sortons de cette
irresponsabilité et de cette hypocrisie. Quel est l’impact de ce silence dans la faillite de notre
système ?
Il faut dire les choses simplement : dans le Sénégal d’Abdoulaye Wade, il ya trois pouvoirs : le
politique, le religieux et les médias, plutôt certains médias. La justice est morte depuis l’affaire Idrissa
Seck et le législatif depuis l’affaire Macky Sall. J’affirme ici que nos guides religieux ont une énorme
responsabilité dans la faillite de notre état et dans la généralisation de la corruption. Une
responsabilité morale à l’égard de leurs talibés et une responsabilité à l’égard de la société dans la
mesure où ils participent, de manière directe ou directe, au système clientéliste mis en place par
Wade. Pire, ils bénéficient largement de ce système.
Le Sénégal se trouve aujourd’hui dans une situation ubuesque : les corrupteurs d’un côté, les
corruptibles de l’autre, le tout baignant dans une immense jungle gérée par des corrompus pour le
compte des corrupteurs. Le corrupteur (Wade) et le corrompu (guides religieux) semblent entrer en
symbiose, l’un aidant l’autre dans son rôle et inversement. L’un devient nécessaire à l’autre, et
même l’un ne peut plus vivre sans l’autre.
Wade a besoin du pouvoir religieux pour dompter les populations et apaiser le climat social. Ce sont
les tenants du pouvoir religieux qui se mobilisent à chaque fois que le pays traverse des moments
tendus (en réalité des moments de vérité nécessaires dans tout processus démocratique), ce sont les
tenants du pouvoir religieux qui jouent les intermédiations dans les affaires de justice. Ce sont les
mêmes, qui donnent des consignes de vote ; les mêmes qui fixent les contours de la laïcité dans
notre république (le débat récent sur le monument de la renaissance nous le rappelle) ; les mêmes
qui se mobilisent pour les nominations dans les plus hautes fonctions, les mêmes qui se mobilisent
pour secourir tel ou tel ministre ou dirigeant de sociétés coupables d’un détournement.
Les temps évoluent, les hommes aussi. Les chefs religieux d’hier ne sont pas du même tempérament
que ceux d’aujourd’hui. Les sénégalais sont nostalgiques du temps où Serigne Abdou Aziz SY Dabbah
convoquait tout le pays pour dire ses vérités aux dirigeants socialistes de l’époque.
Pour dire les choses simplement, il est temps que la critique politique s’intéresse à tous les acteurs
de la vie politique, économique et sociale de notre pays, sans exception, aucune.
Abou Seck
Directeur des Etudes ‐ Cabinet Cité Architecture ‐ Paris
gayeseck@yahoo.fr
publics corrompus et incapables de former des citoyens avertis. De sorte qu’aujourd’hui, beaucoup
de questions purement politiques, sont prises en main par des guides religieux, des tarikhas qui
fonctionnent comme des entreprises familiales religieuses de lobbying et sont gérées comme telles. Il
s’agit de questions relatives aux nominations aux plus hautes fonctions de l’Etat, au dialogue
politique, aux consignes de vote lors d’élections,… Qui peut croire que ces intermédiaires religieux
n’y trouvent pas un intérêt personnel, direct ou indirect, intérêt qui n’a rien à voir avec la religion ?
L’érection du religieux en deuxième pouvoir par Abdoulaye Wadd dans une république laïque,
l’ampleur et l’impunité des mouvements soi‐disant religieux en tout genre (mouvement Kara,
Béthio,…) constituent, à mes yeux, un cocktail explosif, une sérieuse menace pour notre démocratie.
La création d’un ministère chargé des affaires religieuses est tout simplement terrifiante.
Plus inquiétant encore, est la timidité des citoyens sénégalais face aux dérives de ce nouveau
pouvoir. Quand on lit la presse sénégalaise, on est frappé par la pertinence des analyses portant sur
de nombreux sujets (manque de transparence, corruption,…) mais très peu d’articles portant sur la
complicité des tarikhas, des guides religieux dans ce mouvement généralisé de perte de valeur.
Revenons sur l’affaire Ségura. Tous les intellectuels, hommes politiques, simples citoyens avaient
vigoureusement dénoncé cette affaire, et à juste titre. Ces mêmes intellectuels, politiques, citoyens
observent un silence coupable quand il s’agit des valises, d’enveloppes, de voitures de luxe, ou autres
cadeaux à destination des chefs religieux de ce pays. Dans de l’esprit des lois, Montesquieu disait
« Les grandes récompenses dans une monarchie et dans une république sont un signe de leur
décadence, parce qu’elles prouvent que leurs principes sont corrompus ; que, d’un côté, l’idée de
l’honneur n’y a plus tant de force ; que, de l’autre, la qualité de citoyen s’est affaiblie.
C’est un fait patent que depuis que Wade est au pouvoir, tout se vend, tout s’achète au Sénégal :
achat de voix d’électeurs, achats de conscience,… Les pratiques clientélistes des socialistes d’Abdou
Diouf ressurgissent d’une ampleur inégalée dans l’histoire politique de notre pays.Wade a érigé le
religieux en pouvoir afin de mieux le manipuler. C’est ainsi qu’il a pu corrompre beaucoup de nos
guides religieux mais c’est tellement plus facile pour nos intellectuels, citoyens, journalistes, leaders
de l’opposition de ne rien voir et de se taire ! La fameuse loi du silence de la maffia n’est‐elle pas de
la corruption passive ? De sorte qu’on peut aujourd’hui affirmer que dans ce pays, presque tout le
monde a un prix. La peur de dénoncer peut en être un. Le silence aussi. Les journalistes qui osent
franchir le pas sont attaqués par les talibés, sous la bénédiction de leurs guides. Comment
comprendre que, dans un pays démocratique et laïc, les réactions des talibés soient plus virulentes
que celles des policiers (dans le saccage des locaux de Walf par exemple) ? Nous avons en mémoire
les attaques et les insultes dont a été victime Madiambal Diagne, par certains talibés mourides,
furieux du traitement des informations concernant la vie privée du guide religieux des mourides,
Serigne Bara. Que l’information soit ou non vérifiée, il n’est pas acceptable dans un pays civilisé que
des talibés, sous la bénédiction de leur guide religieux, lancent des fatwas contre de simples citoyens,
qui font leur travail. Beaucoup d’honnêtes citoyens (Madiambal et d’autres) sont poursuivis,
surveillés, menacés par le régime de Wadd parce qu’ils dérangent au plus haut niveau. Mais le plus
frappant, c’est que personne ne dérange aujourd’hui les guides religieux, personne ne condamne les
faits de corruption les concernant, personne ne s’interroge sur leurs responsabilités dans le naufrage
du navire Sénégal. Ces derniers sont épargnés par les critiques au nom de je ne sais quel ordre. Et
pourtant, nombreux sont les sénégalais qui, dans leur salon, critiquent vertement l’attitude de
beaucoup de guides religieux, mais rechignent à en parler publiquement. De grâce, sortons de cette
irresponsabilité et de cette hypocrisie. Quel est l’impact de ce silence dans la faillite de notre
système ?
Il faut dire les choses simplement : dans le Sénégal d’Abdoulaye Wade, il ya trois pouvoirs : le
politique, le religieux et les médias, plutôt certains médias. La justice est morte depuis l’affaire Idrissa
Seck et le législatif depuis l’affaire Macky Sall. J’affirme ici que nos guides religieux ont une énorme
responsabilité dans la faillite de notre état et dans la généralisation de la corruption. Une
responsabilité morale à l’égard de leurs talibés et une responsabilité à l’égard de la société dans la
mesure où ils participent, de manière directe ou directe, au système clientéliste mis en place par
Wade. Pire, ils bénéficient largement de ce système.
Le Sénégal se trouve aujourd’hui dans une situation ubuesque : les corrupteurs d’un côté, les
corruptibles de l’autre, le tout baignant dans une immense jungle gérée par des corrompus pour le
compte des corrupteurs. Le corrupteur (Wade) et le corrompu (guides religieux) semblent entrer en
symbiose, l’un aidant l’autre dans son rôle et inversement. L’un devient nécessaire à l’autre, et
même l’un ne peut plus vivre sans l’autre.
Wade a besoin du pouvoir religieux pour dompter les populations et apaiser le climat social. Ce sont
les tenants du pouvoir religieux qui se mobilisent à chaque fois que le pays traverse des moments
tendus (en réalité des moments de vérité nécessaires dans tout processus démocratique), ce sont les
tenants du pouvoir religieux qui jouent les intermédiations dans les affaires de justice. Ce sont les
mêmes, qui donnent des consignes de vote ; les mêmes qui fixent les contours de la laïcité dans
notre république (le débat récent sur le monument de la renaissance nous le rappelle) ; les mêmes
qui se mobilisent pour les nominations dans les plus hautes fonctions, les mêmes qui se mobilisent
pour secourir tel ou tel ministre ou dirigeant de sociétés coupables d’un détournement.
Les temps évoluent, les hommes aussi. Les chefs religieux d’hier ne sont pas du même tempérament
que ceux d’aujourd’hui. Les sénégalais sont nostalgiques du temps où Serigne Abdou Aziz SY Dabbah
convoquait tout le pays pour dire ses vérités aux dirigeants socialistes de l’époque.
Pour dire les choses simplement, il est temps que la critique politique s’intéresse à tous les acteurs
de la vie politique, économique et sociale de notre pays, sans exception, aucune.
Abou Seck
Directeur des Etudes ‐ Cabinet Cité Architecture ‐ Paris
gayeseck@yahoo.fr